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02/11/2001 | SUISSE | N°I.235/01

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 02 novembre 2001, I.235/01


«AZA 7»
I 235/01 Mh

IVe Chambre

MM. les juges Borella, Président, Rüedi et Kernen.
Greffier : M. Vallat

Arrêt du 2 novembre 2001

dans la cause

Office de l'assurance-invalidité du canton de Neuchâtel,
Espacité 4-5, 2302 La Chaux-de-Fonds, recourant,

contre

A.________, intimé, représenté par Maître Ivan Zender,
avenue Léopold-Robert 88, 2301 La Chaux-de-Fonds,

et

Tribunal administratif du canton de Neuchâtel, Neuchâtel

A.- A.________ a contracté, à l'

âge de dix-huit mois,
une maladie virale du système nerveux central. Il en est
résulté, sur le plan physique, un hémisyndrome moteur...

«AZA 7»
I 235/01 Mh

IVe Chambre

MM. les juges Borella, Président, Rüedi et Kernen.
Greffier : M. Vallat

Arrêt du 2 novembre 2001

dans la cause

Office de l'assurance-invalidité du canton de Neuchâtel,
Espacité 4-5, 2302 La Chaux-de-Fonds, recourant,

contre

A.________, intimé, représenté par Maître Ivan Zender,
avenue Léopold-Robert 88, 2301 La Chaux-de-Fonds,

et

Tribunal administratif du canton de Neuchâtel, Neuchâtel

A.- A.________ a contracté, à l'âge de dix-huit mois,
une maladie virale du système nerveux central. Il en est
résulté, sur le plan physique, un hémisyndrome moteur
gauche discret, avec atteinte des nerfs crâniens de la
face. Ce nonobstant, il a pu effectuer sa scolarité obli-
gatoire avant d'entreprendre avec succès une formation
d'enseignant au niveau primaire, achevée en 1986. Dans les

années qui ont suivi, il a travaillé comme instituteur et
comme éducateur, en alternance avec des périodes de chômage
depuis 1992. Dès 1994, en butte à une instabilité profes-
sionnelle croissante, il n'a plus occupé que de petits
emplois temporaires.
Alléguant un état dépressif, A.________ a déposé le
14 mars 1996 une demande de prestations de l'assurance-
invalidité. Avec le soutien de l'Office de l'assurance-
invalidité du canton de Neuchâtel (ci-après : l'office),
l'assuré a entrepris, au mois d'août 1997, un apprentissage
de constructeur de bateaux, cependant interrompu au mois de
décembre de la même année déjà. D'autres tentatives de
reclassement dans le même domaine ont également échoué. Il
a, par la suite, été engagé par X.________, dans le cadre
d'un programme temporaire d'aide aux chômeurs, du 1er octo-
bre 1998 au 31 mars 1999 puis du 1er août au 31 décembre
1999, comme menuisier-charpentier sur le chantier de cons-
truction d'un bateau, pour un salaire mensuel de 3300 à
3500 fr. Une curatelle volontaire a, par ailleurs, été
instituée par l'autorité tutélaire du district de
La Chaux-de-Fonds (décision du 7 septembre 1998).
Dans ce contexte, l'office a procédé à différents
examens psychologiques (ORUS, Psychorater et Minimult). Il
en est ressorti l'image d'une personnalité ouverte, plutôt
aimable, mais mal structurée, peu équilibrée, dominée par
l'anxiété ainsi que des phobies, et présentant des diffi-
cultés d'adaptation socioprofessionnelle, voire des ten-
dances schizothymiques et hypomanes.
Un mandat d'expertise a été confié au docteur
B.________ , psychiatre et psychothérapeute FMH. Dans un
rapport du 16 février 1999, ce spécialiste a posé le
diagnostic d'épisode dépressif moyen et de trouble orga-
nique de la personnalité - en relation avec l'atteinte
virale survenue pendant l'enfance; il conclut à une inca-
pacité de travail totale dans l'activité d'instituteur
ainsi que dans les activités professionnelles requérant un

minimum d'organisation. Selon ce médecin, l'assuré pourrait
cependant encore exercer des activités professionnelles non
qualifiées et peu rémunérées, sans qu'il soit certain qu'il
puisse maintenir un rythme de travail régulier à moyen
terme.
Par décision du 5 mai 2000, l'office a accordé à
A.________ une demi-rente d'invalidité à compter du
1er janvier 1997, compte tenu d'un degré d'invalidité de
52,87 % correspondant à la différence entre le gain qu'il
aurait pu obtenir sans atteinte à la santé comme enseignant
(89 117 fr. 50 l'an) et celui réalisé sur le chantier de
X.________.

B.- Par jugement du 15 mars 2001, le Tribunal adminis-
tratif du canton de Neuchâtel a admis le recours formé par
A.________ contre cette décision. Il a considéré en
substance que l'office, qui avait retenu une aptitude de
travail totale dans l'activité exercée auprès de
X.________, avait méconnu les conclusions du docteur
B.________ et que l'assuré, dont l'incapacité de travail
était en réalité totale, devait être mis au bénéfice d'une
rente entière d'invalidité.

C.- L'office interjette recours de droit administratif
contre ce jugement; il conclut à son annulation et à la
confirmation de la décision du 5 mai 2000.
A.________ conclut au rejet du recours, avec suite de
dépens; l'Office fédéral des assurances sociales ne s'est
pas déterminé.

Considérant en droit :

1.- Le jugement du Tribunal administratif du canton de
Neuchâtel expose correctement les principes régissant
l'évaluation de l'invalidité et les règles déterminant le

droit à une rente, ainsi que la jurisprudence relative à la
valeur probante des documents médicaux. Il suffit d'y ren-
voyer sur ces points.

2.- En l'espèce, ni le caractère invalidant de l'at-
teinte à la santé psychique dont souffre l'intimé ni le
revenu qu'il serait à même de réaliser s'il n'en était pas
affecté ne sont contestés, si bien que seule doit encore
être examinée sa capacité résiduelle de gain.

3.- a) Comme le relève à juste titre l'office recou-
rant, et contrairement à l'opinion des premiers juges, on
ne saurait conclure, sur la base du seul rapport du docteur
B.________, que le recourant ne disposerait plus d'aucune
capacité de travail en raison des troubles psychiques dont
il souffre. Ce médecin atteste au contraire expressément
que l'intimé est encore à même d'exercer une activité
professionnelle ne requérant ni qualification ni capacité
d'organisation. Si les tests réalisés par l'office confir-
ment, il est vrai, qu'il présente un profil psychologique
- pathologique - rendant problématique son insertion dans
le monde du travail, de telles difficultés ne suffisent
pas, à elles seules, à nier toute capacité de travail ou de
gain. Elles doivent, en priorité, être surmontées grâce à
l'aide du service de placement (art. 18 LAI), dont la tâche
est d'offrir une aide appropriée aux assurés qui rencon-
trent des difficultés, engendrées par leur état de santé,
dans la recherche d'une nouvelle place de travail (VSI
2000 235 consid. 1).

b) Si, dans son ensemble, le rapport du docteur
B.________ satisfait aux conditions permettant de lui
reconnaître pleine valeur probante (cf. ATF 125 V 352
consid. 3 et les références), la description qui y est

donnée des activités encore accessibles à l'intimé demeure
cependant trop vague pour permettre d'évaluer avec suffi-
samment de précision les gains que ce dernier pourrait en
retirer sur un marché du travail équilibré. On ignore en
effet concrètement en quoi pourraient consister ces acti-
vités - que ce médecin qualifie génériquement de «petits
boulots» -, dans quels domaines elles pourraient être
exercées et si même l'intimé, décrit comme présentant une
certaine excentricité et une instabilité relationnelle
(rapport du docteur B.________, p. 7), serait à même de les
exercer dans le cadre d'une relation de travail présentant
un minimum de stabilité.

c) L'intimé a certes exercé, plusieurs mois d'affilée,
l'activité de menuisier-charpentier dans le cadre d'un
programme temporaire d'occupation. Sur ce point, il con-
vient toutefois de relever, d'une part, que la reconnais-
sance de l'aptitude au placement de l'intimé par l'autorité
compétente en matière de chômage ne préjuge en rien de
l'appréciation de sa capacité de travail ou de gain, déter-
minante pour le droit à une rente d'invalidité (art. 15
al. 3 in fine OACI). D'autre part, de tels programmes, dont
le but est de diminuer le risque de chômage de longue
durée, de permettre une réintégration rapide sur le marché
du travail des personnes au chômage, de promouvoir leurs
qualifications professionnelles et d'offrir une expérience
professionnelle (art. 72b al. 2 LACI), sans entrer en
concurrence avec l'économie privée (art. 72 al. 1 in fine
LACI), ne correspondent précisément pas à l'offre d'un
marché du travail équilibré. On ne saurait, en conséquence,
tirer aucune conclusion pertinente de cette expérience en
ce qui concerne la capacité résiduelle de travail de l'in-
timé, respectivement sa capacité de gain.

Le caractère raisonnablement exigible de l'activité
exercée dans ce contexte est, par ailleurs, incertain. Il
convient en effet de relever que l'assuré souffre non
seulement de troubles psychiques, mais également, d'un
hémisyndrome moteur gauche à prédominance brachio-faciale
(asymétrie motrice) qui rendent lents et imprécis les
gestes de sa main gauche (rapport du docteur C.________, du
12 novembre 1993, p. 2). On peut ainsi sérieusement douter
de l'opportunité de reclasser l'intimé - qui, selon le
responsable de sa formation comme constructeur de bateaux,
n'aurait présenté qu'une aptitude moyenne au travail du
bois et se serait révélé lent et dangereux devant les
machines (rapport du docteur B.________, pp. 3 s.) -, dans
une profession manuelle exigeant de l'habilité au premier
chef pour des raisons de sécurité. Il n'en demeure pas
moins qu'il y a lieu d'examiner les conséquences du handi-
cap physique sur des activités concrètes ne nécessitant pas
un reclassement.

4.- a) Il résulte de ce qui précède que, en l'état, le
dossier de la cause ne permet pas de déterminer avec préci-
sion les activités que l'intimé est encore apte à exercer
et, partant, d'évaluer les gains qu'il serait en mesure
d'en retirer. Il convient dès lors de renvoyer la cause à
l'office afin qu'il complète l'instruction sur les plans
tant médical qu'économique.

b) L'intimé a conclut au rejet du recours; succombant,
il ne peut prétendre une indemnité de dépens (art. 159
al. 1 OJ). L'issue du litige en instance fédérale ne remet
toutefois pas en cause son droit aux dépens de première
instance.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances

p r o n o n c e :

I. Le recours est admis en ce sens que la décision de
l'Office AI du canton de Neuchâtel, du 5 mai 2000, et
les chiffres 1, 2 et 4 du jugement du Tribunal admi-
nistratif du canton de Neuchâtel, du 15 mars 2001,
sont annulés; la cause est renvoyée à l'office pour
complément d'instruction et nouvelle décision dans le
sens des motifs.

II. Il n'est pas perçu de frais de justice.

III. Le présent arrêt sera communiqué aux parties, à la
Caisse cantonale neuchâteloise de compensation, au
Tribunal administratif du canton de Neuchâtel, ainsi
qu'à l'Office fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 2 novembre 2001

Au nom du
Tribunal fédéral des assurances
Le Président de la IVe Chambre :

Le Greffier :


Synthèse
Numéro d'arrêt : I.235/01
Date de la décision : 02/11/2001
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2001-11-02;i.235.01 ?
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