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16/10/2001 | SUISSE | N°4P.176/2001

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 16 octobre 2001, 4P.176/2001


«/2»

4P.176/2001

Ie C O U R C I V I L E
****************************

Séance du 16 octobre 2001

Présidence de M. Walter, Président du Tribunal fédéral.
Présents: M. Leu, M. Corboz, Mme Klett, et M. Nyffeler,
juges.
Greffier: M. Carruzzo.

___________

Statuant sur le recours de droit public formé
par

X.________, représentée par Me Teresa Giovannini, avocat à
Genève,

contre

la sentence partielle rendue le 18 avril 2001 par un
Tribunal
arbitral

siégeant à Genève, dans la cause qui oppose la re-
courante à O.________, représentée par Me Emmanuel Stauffer,
avocat à Genève;

...

«/2»

4P.176/2001

Ie C O U R C I V I L E
****************************

Séance du 16 octobre 2001

Présidence de M. Walter, Président du Tribunal fédéral.
Présents: M. Leu, M. Corboz, Mme Klett, et M. Nyffeler,
juges.
Greffier: M. Carruzzo.

___________

Statuant sur le recours de droit public formé
par

X.________, représentée par Me Teresa Giovannini, avocat à
Genève,

contre

la sentence partielle rendue le 18 avril 2001 par un
Tribunal
arbitral siégeant à Genève, dans la cause qui oppose la re-
courante à O.________, représentée par Me Emmanuel Stauffer,
avocat à Genève;

(arbitrage international; compétence; cession de créance)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- Le 13 juillet 1978, X.________, société anonyme
de droit français dont le siège est à Paris (France), a con-
clu avec F.________, entreprise de droit yougoslave dont le
siège est à Pristina (République fédérale de Yougoslavie),
un
contrat intitulé "Amortisseurs".

L'art. 13 let. b de ce contrat prévoit que tout
différend entre les parties relatif à l'interprétation ou à
l'exécution du contrat sera tranché par la voie de l'arbitra-
ge conformément aux règles de la Chambre de Commerce Interna-
tionale de Paris, le tribunal arbitral devant siéger à
Genève
et appliquer le droit suisse.

Par lettre recommandée du 4 décembre 1992,
X.________ a manifesté la volonté de ne pas renouveler le
contrat à son échéance; il en est résulté un litige entre
les
parties.

B.- Le 12 avril 1997, l'entreprise yougoslave a mis
en oeuvre la procédure arbitrale, concluant à ce que sa par-
tie adverse lui paie le montant de 9'289'678,02 fr.fr. avec
intérêts.

Un tribunal arbitral de trois membres a été consti-
tué et son siège a été fixé à Genève.

La procédure d'arbitrage n'a toutefois pas commen-
cé, parce que X.________, qui refusait de se soumettre à
l'arbitrage et n'avait pas signé l'acte de mission, n'a pas
effectué l'avance de frais qui lui était demandée.

Le 25 juin 1999, l'entreprise yougoslave a cédé sa
créance contre X.________ à O.________, une société de droit
yougoslave ayant son siège à Belgrade (République fédérale
de
Yougoslavie).

O.________ a manifesté la volonté de reprendre la
procédure arbitrale et elle a effectué l'avance des frais
qui
incombait à X.________.

X.________ a fait valoir, notamment, que O.________
n'avait pas qualité pour intervenir dans la procédure
d'arbitrage.

Statuant sur les objections préalables de
X.________ par une sentence partielle du 18 avril 2001, le
Tribunal arbitral a considéré en particulier que la créance
litigieuse avait été valablement cédée à O.________ et il a
ordonné en conséquence la poursuite de la procédure
arbitrale
entre O.________ et X.________.

C.- X.________ a formé un recours de droit public.
Soutenant que le Tribunal arbitral s'est déclaré à tort com-
pétent, elle invite le Tribunal fédéral à annuler la
sentence
attaquée et à dire que le Tribunal arbitral n'est pas compé-
tent pour trancher le litige entre O.________ et X.________.

L'intimée conclut à l'irrecevabilité, voire au re-
jet, du recours ainsi qu'à la confirmation de la sentence at-
taquée.

Dans ses observations, le président du Tribunal ar-
bitral relève que celui-ci n'a pas été saisi d'une exception
d'incompétence.

C o n s i d é r a n t e n d r o i t :

1.- a) Selon l'art. 85 let. c OJ, le recours de
droit public au Tribunal fédéral est ouvert contre une sen-
tence arbitrale aux conditions des art. 190 ss LDIP (RS
291).
Il convient donc d'examiner en premier lieu si les
conditions
prévues par ces dispositions sont réunies.

La clause compromissoire, insérée dans le contrat
conclu le 13 juillet 1978, fixe le siège du Tribunal
arbitral
en Suisse (à Genève) et l'une des parties au moins (en l'oc-
currence les deux) n'avait, au moment de la conclusion de
cette convention d'arbitrage, ni son domicile ni sa
résidence
habituelle en Suisse; les art. 190 ss LDIP sont donc applica-
bles (art. 176 al. 1 LDIP), étant observé que les parties
n'en ont pas exclu l'application par écrit en choisissant
d'appliquer exclusivement les règles de la procédure cantona-
le en matière d'arbitrage (art. 176 al. 2 LDIP).

Le recours au Tribunal fédéral prévu par l'art. 191
al. 1 LDIP est ouvert, puisque les parties n'ont pas choisi,
en lieu et place, le recours à l'autorité cantonale (art.
191
al. 2 LDIP) et qu'elles ne l'ont pas non plus exclu conven-
tionnellement (cf. art. 192 al. 1 LDIP).

Le recours ne peut être formé que pour l'un des mo-
tifs énumérés de manière exhaustive à l'art. 190 al. 2 LDIP
(ATF 127 III 279 consid. 1a p. 282; 119 II 380 consid. 3c p.
383).

Le recours est immédiatement ouvert contre une sen-
tence incidente lorsque le Tribunal arbitral s'est déclaré à
tort compétent ou incompétent (art. 190 al. 3 en relation
avec l'art. 190 al. 2 let. b LDIP; ATF 127 III 279 consid.
1b).

La voie du recours de droit public étant ouverte en
l'espèce, il faut encore examiner si les règles de procédure
ont été respectées.

b) Pour le recours en matière d'arbitrage interna-
tional, la procédure devant le Tribunal fédéral est régie
par
les dispositions de la loi fédérale d'organisation
judiciaire
(OJ) relatives au recours de droit public (art. 191 al. 1,
2ème phrase, LDIP).

La recourante est personnellement touchée par la
décision attaquée, qui l'oblige à continuer de procéder de-
vant le Tribunal arbitral, de sorte qu'elle a un intérêt per-
sonnel, actuel et juridiquement protégé à ce que cette déci-
sion n'ait pas été rendue en violation des garanties décou-
lant de l'art. 190 al. 2 LDIP; en conséquence, elle a
qualité
pour recourir (art. 88 OJ).

Interjeté en temps utile (art. 89 al. 1 OJ), dans
la forme prévue par la loi (art. 90 al. 1 OJ), le recours
est
en principe recevable.

Hormis certaines exceptions, il n'a qu'un caractère
cassatoire (ATF 127 II 1 consid. 2c; 127 III 279 consid. 1b;
126 III 534 consid. 1c; 124 I 327 consid. 4). Lorsque le
litige porte sur la compétence d'un tribunal arbitral, il a
été admis, par exception, que le Tribunal fédéral pouvait
lui-même constater la compétence ou l'incompétence (ATF 127
III 279 consid. 1b; 117 II 94 consid. 4).

c) Dès lors que les règles de procédure sont celles
du recours de droit public, la partie recourante doit invo-
quer ses griefs conformément aux exigences de l'art. 90 al.
1
let. b OJ (ATF 127 III 279 consid. 1c; 117 II 604 consid. 3
p. 606). Saisi d'un recours de droit public, le Tribunal fé-
déral n'examine que les griefs admissibles qui ont été invo-

qués et suffisamment motivés dans l'acte de recours (cf. ATF
127 I 38 consid. 3c; 127 III 279 consid. 1c; 126 III 524 con-
sid. 1c, 534 consid. 1b). La recourante devait donc indiquer
quelles hypothèses de l'art. 190 al. 2 LDIP étaient à ses
yeux réalisées et, en partant de la sentence attaquée, mon-
trer de façon circonstanciée en quoi consisterait la viola-
tion du principe invoqué (ATF 127 III 279 consid. 1c); ce
n'est qu'à ces conditions qu'il sera possible d'entrer en ma-
tière.

2.- a) La recourante soutient que le Tribunal arbi-
tral s'est déclaré à tort compétent pour connaître des con-
clusions prises contre elle.

Elle invoque ainsi le motif de recours prévu par
l'art. 190 al. 2 let. b LDIP.

Saisi d'un tel grief, le Tribunal fédéral examine
librement les questions de droit, y compris les questions
préalables, qui déterminent la compétence ou l'incompétence
du tribunal arbitral (ATF 119 II 380 consid. 3c p. 383; 118
II 193 consid. 5a; 117 II 94 consid. 5a). En particulier, il
peut examiner librement la question préalable de la validité
d'un acte de cession dont dépend le transfert d'une clause
compromissoire (Heini, in IPRG Kommentar, n. 24b ad art. 190
LDIP).

Cependant, le Tribunal fédéral revoit l'état de
fait à la base de la sentence attaquée - même s'il s'agit de
la question de la compétence - uniquement lorsque l'un des
griefs mentionnés à l'art. 190 al. 2 LDIP est soulevé à l'en-
contre dudit état de fait ou lorsque des faits ou des moyens
de preuve nouveaux (cf. art. 95 OJ) sont exceptionnellement
pris en considération dans le cadre de la procédure de re-
cours de droit public (ATF 119 II 380 consid. 3c p. 383 et
les références).

b) aa) Lorsqu'ils examinent s'ils sont compétents
pour trancher le différend qui leur est soumis, les arbitres
doivent résoudre, entre autres questions, celle de la portée
subjective de la convention d'arbitrage. Il leur appartient,
notamment, de déterminer quelles sont les parties liées par
la convention (ATF 117 II 94 consid. 5b p. 98 et les auteurs
cités). A cet égard, il n'est pas douteux qu'une convention
d'arbitrage peut obliger même des personnes qui ne l'ont pas
signée. Appelé à dire si le litige dont il est saisi est de
son ressort ou de celui de la juridiction ordinaire, le tri-
bunal arbitral doit, dès lors, décider si telle personne as-
signée devant lui est liée ou non par la convention d'arbi-
trage. Sous l'angle de la compétence, l'existence, la validi-
té et la portée de la convention d'arbitrage constituent
donc
des problèmes indissociables (ATF 120 II 155 consid. 3b/bb
p.
163 s. et les auteurs cités).

bb) Sur le plan des principes, il sied de faire
clairement la distinction entre la notion de légitimation ac-
tive ou passive (appelée aussi qualité pour agir ou pour dé-
fendre; Aktiv- oder Passivlegitimation), d'une part, et
celle
de capacité d'être partie (Parteifähigkeit), d'autre part.
La
légitimation active ou passive dans un procès civil relève
du
fondement matériel de l'action; elle appartient au sujet (ac-
tif ou passif) du droit invoqué en justice et son absence en-
traîne, non pas l'irrecevabilité de la demande, mais son re-
jet (ATF 108 II 216 consid. 1). En revanche, la capacité
d'être partie, entendue ici dans son acception la plus
large,
consiste dans la faculté de participer à un procès en
qualité
de partie (Vogel/Spühler, Grundriss des Zivilprozessrechts,
7e éd., p. 135, n. 1 ad § 25); elle constitue une condition
de recevabilité de la demande et son défaut équivaut à une
fin de non-recevoir. Savoir si le demandeur ou le défendeur
est partie à la convention d'arbitrage, autrement dit s'il
dispose de la capacité d'être partie, est ainsi une question
de recevabilité qui détermine la compétence du tribunal arbi-

tral et qui ne doit, théoriquement, pas être confondue avec
le moyen de fond pris du défaut de légitimation active ou
passive (Lalive/Poudret/Reymond, Le droit de l'arbitrage in-
terne et international en Suisse, p. 65, n. 2 ad art. 8 du
Concordat sur l'arbitrage [CA], qui se réfèrent en particu-
lier à l'ATF 102 Ia 574 consid. 5 p. 578).

Cependant, en matière d'arbitrage, il n'est pas
toujours aisé de faire le départ entre les notions de légi-
timation et de capacité d'être partie. Dans ce domaine, en
effet, contrairement à celui de la procédure ordinaire où la
compétence des autorités judiciaires est fixée par un acte
de
caractère général et abstrait (loi, ordonnance, règlement),
la compétence des arbitres repose sur la seule convention
des
parties. Or, cette dernière, lorsqu'elle est insérée dans un
contrat, partagera, suivant les circonstances, le destin de
ce contrat. Le fait qu'en raison de sa fonction la clause
compromissoire soit séparable du contrat principal (principe
de l'autonomie de la clause arbitrale; cf. à ce sujet: ATF
119 II 380 consid. 4a; 116 Ia 56 consid. 3b p. 59 et les ré-
férences) n'implique pas pour autant qu'elle en soit néces-
sairement indépendante. Ainsi, le droit suisse, à l'instar
du droit allemand (cf. Berger, Internationale Wirtschafts-
schiedsgerichtsbarkeit, Berlin/New York 1992, p. 120 s.,
note
659 et les références; pour d'autres références, cf. Wenger,
Commentaire bâlois, Internationales Privatrecht, n. 67 ad
art. 178 LDIP) et du droit français (voir les arrêts de la
Cour de cassation des 5 janvier et 19 octobre 1999
reproduits
in Revue de l'arbitrage 2000 p. 85 ss), admet, en cas de
cession de créance (ATF 103 II 75; arrêt 4P.126/1992 du
13 octobre 1992, reproduit in Bulletin de l'Association sui-
sse de l'arbitrage [ASA] 1993 p. 68 ss) ou de reprise d'une
relation contractuelle (arrêts 4P.124/2001 du 7 août 2001,
consid. 2c, et 4P.289/1995 du 9 juillet 1996, consid. 2a),
que la clause compromissoire, en tant que clause accessoire
de nature procédurale, est transférée au cessionnaire ou au
reprenant, sauf convention contraire (arrêts cités, ibid.;
Wenger, ibid.; Lalive/Poudret/Reymond, op. cit., n. 4 i. f.
et 21 ad art. 178 LDIP; Rüede/Hadenfeldt, Schweizerisches
Schiedsgerichtsrecht, 2e éd., p. 82 et Supplément, p. 25 i.
f.; Martin Lukas Müller, Die Zuständigkeit des Schiedsge-
richts, thèse Saint-Gall 1996, p. 97 s.). En ce qui concerne
la cession de créance, un tel effet est rattaché à l'art.
170
CO, que l'on considère la clause compromissoire comme un
droit de préférence (voir les auteurs cités in ATF 103 II 75
consid. 3 p. 78 s.; cf. également: Spirig, Commentaire zuri-
chois, n. 24 ad art. 170 CO avec d'autres références; Engel,
Traité des obligations en droit suisse, 2e éd., p. 880) ou
comme un droit accessoire (Gauch/Schluep/Schmid/Rey, Schwei-
zerisches Obligationenrecht, Allgemeiner Teil, vol. II, 7e
éd., n. 3589), question qui ne joue aucun rôle en l'espèce
et
qui peut dès lors rester indécise. La cession d'une créance
(ou d'une relation contractuelle) assortie
d'une clause com-
promissoire revêt donc une double nature: elle entraîne non
seulement le transfert matériel du droit cédé, question qui
relève du fond, mais également la transmission de la conven-
tion d'arbitrage, question qui ressortit à la procédure. En
d'autres termes, la même circonstance - à savoir la cession
valable de la créance litigieuse - sortit deux effets dis-
tincts, puisqu'elle détermine à la fois la légitimation ac-
tive ou passive du cessionnaire ainsi que sa capacité d'être
partie à une procédure arbitrale mise en oeuvre en exécution
de la clause compromissoire. C'est en cela que les notions
de
légitimation et de capacité d'être partie se recouvrent en
quelque sorte dans l'hypothèse de la cession de créance, si
bien qu'il devient plus délicat d'en délimiter les contours.

Selon la théorie des faits de double pertinence
(sur cette notion, cf. ATF 122 III 249 consid. 3b/bb et les
références), il suffit, suivant les circonstances, pour ad-
mettre la compétence d'un tribunal, que les faits allégués

avec une certaine vraisemblance à l'appui d'une action - en
l'espèce, la cession valable de la créance litigieuse - cons-
tituent à la fois la condition de cette compétence et le fon-
dement nécessaire de la prétention soumise à l'examen du tri-
bunal. Toutefois, outre qu'elle revêt un caractère exception-
nel, cette théorie ne saurait entrer en ligne de compte lors-
que la compétence d'un tribunal arbitral est contestée, car
il est exclu de contraindre une partie à souffrir qu'un tel
tribunal se prononce sur des droits et obligations
litigieux,
s'ils ne sont pas couverts par une convention d'arbitrage va-
lable (ATF 121 III 495 consid. 6d p. 503).

cc) Dans le cas particulier, à supposer que la ces-
sion de la créance en cause n'ait pas été opérée
valablement,
non seulement l'intimée n'aurait pas acquis le droit liti-
gieux et ne posséderait donc pas la légitimation active,
mais, qui plus est, le Tribunal arbitral serait incompétent
pour trancher le différend, dès lors que la convention d'ar-
bitrage ne serait pas opposable à la recourante, faute d'un
transfert valable de la clause compromissoire liée à ladite
créance.

Par conséquent, le Tribunal arbitral devait régler
en premier lieu le problème de sa propre compétence et, dans
cette perspective, examiner à titre préjudiciel la question
de la validité de la cession de créance. C'est du reste ce
qu'il a fait, à tout le moins de manière implicite et con-
cluante, bien qu'il s'en défende, en ordonnant "la poursuite
de la procédure arbitrale entre O.________ et X.________".
Ce
faisant, il a estimé que les parties étaient liées par une
convention d'arbitrage, laquelle établissait sa compétence
pour mener la procédure et examiner les conclusions que l'in-
timée entendait prendre contre la recourante. Il a ainsi
rendu une décision incidente relative à la compétence, qui
était susceptible d'un recours de droit public fondé sur
l'art. 190 al. 2 let. b et al. 3 LDIP.

c) Le Tribunal arbitral, par la voix de son prési-
dent, fait cependant valoir, dans ses observations, qu'il
n'a
pas été saisi d'une exception d'incompétence.

aa) Aux termes de l'art. 186 al. 2 LDIP, l'excep-
tion d'incompétence doit être soulevée préalablement à toute
défense au fond. Il s'agit là d'un cas d'application du prin-
cipe de la bonne foi, ancré à l'art. 2 al. 1 CC, qui régit
l'ensemble des domaines du droit, y compris la procédure
civile (ATF 107 Ia 206 consid. 3a p. 211 et les références)
et l'arbitrage (ATF 126 III 249 consid. 3c p. 253 s.; 119 II
386 consid. 1a p. 388; 116 II 639 consid. 4c p. 644; 113 Ia
67 consid. 2a). Enoncée différemment, la règle posée à
l'art.
186 al. 2 LDIP, à l'instar de celle, plus générale, fixée à
l'art. 6 de la même loi, implique que le tribunal arbitral
devant lequel le défendeur procède au fond sans faire de ré-
serve est compétent de ce seul fait. Dès lors, celui qui en-
tre en matière sans réserve sur le fond (la terminologie al-
lemande utilise l'expression de "vorbehaltlose Einlassung")
dans une procédure arbitrale contradictoire portant sur une
cause arbitrable reconnaît, par cet acte concluant, la compé-
tence du tribunal arbitral et perd définitivement le droit
d'exciper de l'incompétence dudit tribunal (ATF 120 II 155
consid. 3b/bb p. 162 et p. 164 i. f.; cf. Lalive/Poudret/Rey-
mond, op. cit., n. 3 ad art. 8 CA, p. 66 in medio; Müller,
op. cit., p. 176 ss). Toutefois, le défendeur peut se déter-
miner à titre éventuel sur le fond, pour le cas où l'excep-
tion d'incompétence ne serait pas admise, sans que pareil
comportement vaille acceptation tacite de la compétence du
tribunal arbitral (Wenger, Schiedsvereinbarung und schiedsge-
richtliche Zuständigkeit, in Schiedsgerichtsbarkeit, Europa
Institut Zurich, 1997 [ci-après: Schiedsvereinbarung], p.
223
ss, 241 ch. 3, let. a; plus généralement, cf. Dutoit, Commen-
taire de la loi fédérale du 18 décembre 1987, 2e éd., n. 2
ad
art. 6).

C'est le lieu de rappeler que le droit constitu-
tionnel (pour la Suisse, cf. art. 30 al. 1 Cst.) et le droit
conventionnel (cf. art. 6 par. 1 CEDH [RS 0.101]) garantis-
sent à toute personne, physique ou morale, le droit à ce que
sa cause soit entendue par un tribunal établi par la loi. En
concluant une convention d'arbitrage, les parties renoncent
à
cette garantie (cf. Müller, op. cit., p. 18 s.; Frowein/Peu-
kert, EMRK-Kommentar, 2e éd., p. 196, note 266 et n. 64 i.
f.
ad art. 6), ce qui est d'ailleurs admissible sous certaines
réserves (sur cette problématique, cf. Jacot-Guillarmod,
L'arbitrage privé face à l'art. 6 § 1 de la Convention euro-
péenne des Droits de l'Homme, in Mélanges en l'honneur de
Gérard J. Wiarda, 1988, p. 281 ss). S'agissant de déroger à
une garantie de rang constitutionnel, on se gardera d'admet-
tre trop facilement qu'une convention d'arbitrage a été
conclue, si ce point est contesté (cf. ATF 116 Ia 56 consid.
3b p. 58; Müller, op. cit., p. 61 s.). Il importe, bien plu-
tôt, de s'assurer qu'il existe une convention d'arbitrage
susceptible d'être opposée aux parties à la procédure arbi-
trale, car ce n'est qu'à cette condition que l'on peut
exiger
de celles-ci qu'elles assument les conséquences de leur
choix
(notamment la limitation des possibilités de recours). Au
demeurant, il ressort de la systématique des dispositions
légales relatives à l'arbitrage international (art. 176 à
194
LDIP) que le législateur fédéral, en plaçant en tête de
celles-ci les règles touchant l'arbitrabilité (art. 177
LDIP)
ainsi que la convention d'arbitrage (art. 178 LDIP), et beau-
coup plus loin celle qui concerne l'exception d'incompétence
(art. 186 al. 2 LDIP), a démontré qu'il attachait plus de
poids à l'exigence fondamentale de l'existence d'une conven-
tion d'arbitrage opposable aux parties qu'à la règle posée à
l'art. 186 al. 2 LDIP aux fins d'assurer le déroulement
correct et loyal de la procédure arbitrale.

Les arbitres ne sauraient faire abstraction de ces
considérations lorsqu'ils examinent si leur compétence est

contestée. Sans doute le simple fait d'émettre de vagues ré-
serves, toutes générales, ne suffit-il pas, en principe,
pour
retenir que tel est bien le cas (Lalive/Poudret/Reymond, op.
cit., n. 10 ad art. 186 LDIP). En revanche, la conclusion in-
verse ne s'impose pas nécessairement au seul motif que la
partie assignée n'a pas utilisé la formule sacramentelle "ex-
ception d'incompétence". Aussi, pour savoir si leur compéten-
ce est remise en cause par le défendeur, les arbitres doi-
vent-ils interpréter les termes employés par celui-ci et,
lorsque la procédure arbitrale est régie par le droit
suisse,
appliquer l'art. 18 CO par analogie, à l'instar du juge appe-
lé à interpréter les déclarations d'une partie en justice
(cf. Guldener, Schweizerisches Zivilprozessrecht, 3e éd., p.
262, ch. VI; Jäggi/Gauch, Commentaire zurichois, n. 323 ad
art. 18 CO; Kramer, Commentaire bernois, n. 114 ad art. 1er
CO et n. 65 ad art. 18 CO). Il leur incombe de déterminer le
sens qui peut être attribué, objectivement et selon les rè-
gles de la bonne foi, aux déclarations (écrites ou orales)
de
la partie assignée, sans s'arrêter uniquement aux
expressions
dont elle s'est servie, mais en tenant compte de l'ensemble
des circonstances dans lesquelles ces déclarations ont été
faites.

bb) aaa) En l'espèce, la recourante a d'emblée con-
clu à l'impossibilité de l'arbitrage en se fondant sur un rè-
glement du Conseil de l'Union Européenne qui concrétisait
les
sanctions prises à l'époque par l'Organisation des Nations
Unies à l'encontre de la République fédérale de Yougoslavie,
en interdisant de faire droit à une demande présentée par
une
personne morale ayant son siège dans ce pays. Par la suite,
elle a soutenu, de surcroît, que le contrat dont l'intimée
entendait déduire des droits à son encontre n'avait pas été
valablement cédé à la soi-disant créancière, s'agissant d'un
acte simulé qui aurait en outre été signé par une personne
n'ayant plus le pouvoir de représenter la cédante.

Il ressort clairement des moyens soulevés par elle
que la recourante, loin de procéder au fond sans faire de ré-
serve, a manifesté, au contraire, la ferme volonté de
refuser
l'arbitrage. Plus précisément, elle s'est opposée à ce que
les arbitres se prononcent, par une sentence finale, sur le
bien-fondé de la prétention élevée par l'intimée, leur recon-
naissant pour seule compétence celle de constater leur incom-
pétence en la matière. Au reste, la recourante n'aurait pu
leur contester cette compétence-là. Il appartient, en effet,
au tribunal arbitral, conformément au principe de la "compé-
tence de la compétence" ancré à l'art. 186 al. 1 LDIP, de
statuer sur sa propre compétence (ATF 121 III 155 consid.
3b/
bb p. 163 s.; 120 II 495 consid. 6c) et, pour ce faire, de
trancher les questions préjudicielles dont dépend cette com-
pétence, comme celle de savoir si la créance litigieuse, in-
cluant la clause compromissoire, a été valablement cédée à
la
partie demanderesse.

bbb) Le Tribunal arbitral constate que la recouran-
te a soulevé des "exceptions préjudicielles", dont l'une se
rapportait au "défaut de qualité de O.________ pour inter-
venir dans la procédure d'arbitrage" (c'est le Tribunal fédé-
ral qui souligne). Déterminer ce qui a été invoqué dans la
procédure d'arbitrage est une question de fait (cf. ATF 125
III 305 consid. 3e) sur laquelle il n'y a pas lieu de reve-
nir. En revanche, la portée juridique de l'exception
soulevée
est une question de droit que le Tribunal fédéral revoit li-
brement.

Selon la définition qu'en donne le dictionnaire,
l'"intervention" est l'acte par lequel un tiers, qui n'était
pas originairement partie dans une contestation judiciaire,
s'y présente pour y prendre part et faire valoir ses droits
ou soutenir ceux d'une partie principale (Le Grand Robert de
la langue française, vol. 5, p. 696). Dans le même sens, La-
live/Poudret/Reymond (n. 1.2 ad art. 28 CA, p. 152) relèvent
que l'art. 28 CA, relatif à l'intervention (et à l'appel en
cause) est également applicable à la substitution volontaire
de parties, notamment en cas de cession de créance. L'expres-
sion employée ("intervenir dans la procédure d'arbitrage"),
interprétée selon le principe de la confiance - à savoir
d'après le sens que les arbitres pouvaient et devaient lui
donner objectivement et de bonne foi, à la lumière de toutes
les circonstances du cas concret -, fait clairement apparaî-
tre que la recourante contestait à l'intimée le droit de par-
ticiper à la procédure arbitrale, c'est-à-dire le droit de
procéder par la voie arbitrale. Aussi bien, sur le vu des
termes utilisés par la recourante, rien ne permet de retenir
que celle-ci, même si elle n'a pas utilisé les mots "excep-
tion d'incompétence", se serait bornée à dénier à l'intimée
la légitimation active et aurait invité le Tribunal arbitral
à constater le défaut de légitimation. Un doute subsisterait-
il sur ce point qu'il faudrait d'ailleurs trancher en faveur
de l'interprétation la plus large, pour les motifs sus-indi-
qués, et admettre l'existence d'une contestation globale por-
tant à la fois sur la légitimation au fond et la capacité
d'être partie à la procédure arbitrale.

Ainsi, contrairement à l'avis de son président, le
Tribunal arbitral était bien saisi d'une exception d'incompé-
tence ratione personae. Il ne ressort pas des constatations
de fait des arbitres que la recourante aurait tardé à soule-
ver cette exception. Fondée sur l'absence de validité de la
cession de créance incluant la clause compromissoire, l'ex-
ception d'incompétence ne pouvait être soulevée qu'une fois
la cession de créance opérée. Comme cette cession est inter-
venue pendente lite, la recourante ne saurait se voir repro-
cher de ne pas avoir soulevé ladite exception d'entrée de
cause.

ccc) Si la recourante a effectivement contesté la
compétence du Tribunal arbitral, en alléguant que la créance

litigieuse, incorporant la convention d'arbitrage, n'a pas
été valablement cédée à l'intimée, il est vrai que, pour ce
faire, elle n'a pas tiré argument de l'incessibilité de
cette
créance, mais d'autres circonstances (acte simulé et défaut
de pouvoir de représentation de la personne ayant agi au nom
de la cédante).

Dans ces conditions, le Tribunal arbitral devait-il
limiter son examen aux seuls arguments avancés par la recou-
rante ou lui appartenait-il de s'assurer, sans s'en tenir
uniquement aux moyens soulevés à cet égard, qu'il existait
une convention d'arbitrage opposable aux deux parties? En fa-
veur de la première solution, on pourrait relever que
lorsque
l'exception d'incompétence est motivée,
elle doit l'être de
manière complète, le défendeur ne pouvant pas garder des ar-
guments en réserve (cf. Wenger, Schiedsvereinbarung, ibid.,
qui parle de "partielle Einlassung"). Il paraît, en effet,
douteux que l'on puisse imposer aux arbitres le devoir d'exa-
miner la question de leur compétence sous tous ses aspects -
ils peuvent être multiples - et de rechercher d'office si
des
circonstances n'ayant aucun rapport avec celles qui ont été
invoquées à l'appui de l'exception d'incompétence ne les
obligeraient pas à décliner leur compétence. Les tenants de
la seconde solution pourraient, à l'inverse, souligner qu'un
tribunal arbitral, contrairement au Tribunal fédéral
statuant
sur un recours de droit public au sens des art. 85 let. c OJ
et 190 LDIP, n'est pas une cour de cassation, qui n'examine
que les griefs expressément articulés par le recourant, et
qu'il n'est, en principe, pas lié par l'argumentation juridi-
que des parties (ATF 120 II 172 consid. 3a p. 175). Une solu-
tion moyenne consisterait à ne pas contraindre les arbitres
à
examiner tous les motifs d'incompétence possibles et imagina-
bles, mais à les obliger néanmoins à prendre en
considération
d'office un motif d'incompétence, même non invoqué, qu'ils
auraient découvert en examinant les éléments de fait fournis
par les parties.

En l'espèce, il n'est pas nécessaire de trancher
définitivement cette question. Force est, en effet, de cons-
tater que le Tribunal arbitral a examiné spontanément le pro-
blème de la cessibilité de la créance litigieuse (cf.
consid.
3b ci-dessous). L'intimée affirme à tort le contraire, dans
sa réponse au recours. Elle prétend, en outre, que le Tribu-
nal arbitral n'était pas autorisé à soulever cette question
d'office, mais ne motive pas cet argument d'une manière con-
forme aux exigences rappelées plus haut (art. 90 al. 1 let.
b
OJ; cf. consid. 1c). A cet égard, son objection selon laquel-
le la recourante pouvait parfaitement renoncer à se
prévaloir
de la clause d'incessibilité insérée dans le contrat d'amor-
tisseurs ne pourrait être retenue, à supposer qu'elle soit
juridiquement pertinente, que si les constatations de fait
du
Tribunal arbitral révélaient l'existence d'une telle renon-
ciation, consciente, de la part de la recourante, ce qui
n'est pas du tout le cas.

Cela étant, il reste à examiner si c'est à bon
droit que le Tribunal arbitral est arrivé à la conclusion
que
rien ne s'opposait à la cession de la créance incluant la
clause compromissoire.

3.- a) Savoir si une convention d'arbitrage a été
valablement transférée se détermine d'après le droit défini
à
l'art. 178 al. 2 LDIP, c'est-à-dire au regard du droit le
plus favorable à la validité même de la convention (ATF 117
II 94 consid. 5b p. 98 et les auteurs cités). Selon cette
disposition, la convention d'arbitrage est valable si elle
répond aux conditions que pose soit le droit choisi par les
parties, soit le droit régissant l'objet du litige et notam-
ment le droit applicable au contrat principal, soit encore
le
droit suisse.

A l'art. 13 let. b du contrat d'amortisseurs, la
société yougoslave et l'entreprise française n'ont pas choi-

si, pour la clause compromissoire, un droit différent de ce-
lui qui s'applique au contrat principal. Celui-ci est le
droit suisse, conformément à la volonté des parties. Le troi-
sième terme de l'alternative susmentionnée renvoie également
au droit suisse. Il s'ensuit que le transfert de la clause
compromissoire doit s'apprécier, quant à sa validité, à la
lumière du droit suisse.

Quoi qu'il en soit, le Tribunal arbitral indique
que le droit yougoslave et le droit suisse ne diffèrent maté-
riellement pas, prima facie, pour la solution de la question
ici décisive.

b) En vertu de l'art. 164 al. 1 CO, le créancier
peut céder son droit à un tiers sans le consentement du débi-
teur, à moins que la cession n'en soit interdite par la loi,
la convention ou la nature de l'affaire. L'art. 436 al. 2 du
Code des obligations yougoslave prévoit également la possibi-
lité d'exclure par convention une cession de créance sans
l'accord du débiteur.

Après avoir cité ces dispositions et rappelé les
hypothèses dans lesquelles elles excluent la cession de
créance, le Tribunal arbitral a ajouté, de façon
péremptoire:
"ce qui n'est manifestement pas le cas en l'espèce".

Cette conclusion est incompréhensible. Le Tribunal
arbitral a expliqué qu'il se prononçait "sur la base du dos-
sier". Il s'est référé expressément au contrat d'amortis-
seurs, dont il a reproduit certains passages. Même s'il n'a
pas reproduit intégralement le texte dudit contrat - qui est
à la base du litige -, on doit en déduire que le contenu de
ce document compte au nombre des faits admis par les
arbitres
et sur lesquels ils se sont fondés. Or, l'art. 9 let. c du
contrat prévoit que l'entreprise yougoslave "ne pourra en au-
cun cas céder à titre gratuit ou onéreux les droits que lui

confère le présent contrat, qui lui est strictement person-
nel". Une telle clause est claire et ne contient ni condi-
tion, ni réserve. Elle vaut pour toutes les créances nées du
contrat et il faut admettre qu'elle s'applique également,
comme la clause compromissoire elle-même, à des prétentions
nées de l'extinction du contrat (cf. ATF 117 II 94 consid.
5c/aa p. 99; 116 Ia 56 consid. 3b p. 59).

Le cas est ainsi identique à celui déjà tranché
dans l'arrêt publié aux ATF 117 II 94 ss, si ce n'est que,
dans ce précédent, la cession de créance n'était pas abso-
lument interdite, comme dans la présente espèce, mais
soumise
à l'autorisation écrite préalable de l'autre partie. La ces-
sion d'une créance issue du contrat ayant été exclue conven-
tionnellement en l'occurrence, l'intimée n'est pas cession-
naire de la créance qu'elle invoque et elle ne peut donc pas
soutenir que la cession a entraîné le transfert de la clause
compromissoire. On peut également inférer du caractère inces-
sible des droits et obligations découlant du contrat que la
clause compromissoire était, elle aussi, incessible (ATF 117
II 94 consid. 5c/bb). Au demeurant, même s'il ne s'agissait
pas là d'une conséquence nécessaire de l'interdiction conven-
tionnelle de la cession de créance (sur cette question, cf.
Tschanz, note à l'arrêt précité, in Revue de l'arbitrage
1991 p. 717 ss, let. D), aucun élément ne viendrait étayer
ici la thèse voulant que la convention d'arbitrage ait pu
être transférée à l'intimée, nonobstant cette interdiction.

L'intimée ne peut donc pas se prévaloir d'une clau-
se compromissoire liant des tiers et qui ne lui a pas été
transférée. En l'absence de toute convention d'arbitrage en-
tre la recourante et l'intimée, le Tribunal arbitral n'est
pas compétent pour connaître des conclusions que la seconde
voudrait prendre contre la première, dès lors que celle-ci
refuse de se soumettre à la procédure d'arbitrage. L'incompé-

tence doit ainsi être constatée, sans qu'il soit nécessaire
d'examiner les autres arguments soulevés par la recourante.

4.- Les frais et dépens de la procédure fédérale
doivent être mis à la charge de l'intimée qui succombe (art.
156 al. 1 et 159 al. 1 OJ).

Par ces motifs,

l e T r i b u n a l f é d é r a l :

1. Admet le recours et annule la sentence attaquée;

2. Déclare le Tribunal arbitral incompétent pour
connaître des conclusions que l'intimée voudrait prendre à
l'encontre de la recourante;

3. Met un émolument judiciaire de 15 000 fr. à la
charge de l'intimée;

4. Dit que l'intimée versera à la recourante une
indemnité de 18 000 fr. à titre de dépens;

5. Communique le présent arrêt en copie aux manda-
taires des parties et au Président du Tribunal arbitral.

__________

Lausanne, le 16 octobre 2001
ECH

Au nom de la Ie Cour civile
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
Le président, Le Greffier,


Synthèse
Numéro d'arrêt : 4P.176/2001
Date de la décision : 16/10/2001
1re cour civile

Analyses

Arbitrage international; compétence du tribunal arbitral; cession de créance (art. 186 al. 2 et 190 al. 2 let. b LDIP). Pour se prononcer sur leur propre compétence, les arbitres peuvent être amenés à devoir examiner, à titre préjudiciel, si la créance litigieuse, issue du contrat incluant la clause compromissoire, a été valablement cédée à la partie qui a mis en oeuvre la procédure arbitrale (consid. 2b). Tel n'était pas le cas en l'espèce, les cocontractants ayant stipulé l'incessibilité des créances découlant du contrat (consid. 3). Le tribunal arbitral doit interpréter les termes utilisés par le défendeur pour savoir si et, le cas échéant, dans quelle mesure sa compétence est contestée. Eu égard à la nature de la procédure arbitrale, il se gardera d'admettre trop facilement l'existence d'une convention d'arbitrage, si ce point est contesté (consid. 2c/aa). Les arbitres doivent-ils restreindre leur examen aux seuls motifs d'incompétence invoqués par le défendeur? Question laissée indécise (consid. 2c/bb).


Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2001-10-16;4p.176.2001 ?
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