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10/10/2001 | SUISSE | N°5C.227/2001

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 10 octobre 2001, 5C.227/2001


«/2»
5C.227/2001

IIe C O U R C I V I L E
******************************

10 octobre 2001

Composition de la Cour: M. Reeb, président, M. Raselli et
Mme Nordmann, juges. Greffière: Mme Mairot.

__________

Dans la cause civile pendante
entre

Z.________, défendeur et recourant, représenté par Me Fran-
çois Contini, avocat à Bienne,

et

Dame Z.________-G.________, demanderesse et intimée, repré-
sentée par Me Danielle Müller, avocate à Bienne;

(divorce)>
Considérant en fait et en droit:

1.- Z.________ et dame Z.________-G.________ se sont
mariés le 17 avril 1998. Aucun enfant...

«/2»
5C.227/2001

IIe C O U R C I V I L E
******************************

10 octobre 2001

Composition de la Cour: M. Reeb, président, M. Raselli et
Mme Nordmann, juges. Greffière: Mme Mairot.

__________

Dans la cause civile pendante
entre

Z.________, défendeur et recourant, représenté par Me Fran-
çois Contini, avocat à Bienne,

et

Dame Z.________-G.________, demanderesse et intimée, repré-
sentée par Me Danielle Müller, avocate à Bienne;

(divorce)

Considérant en fait et en droit:

1.- Z.________ et dame Z.________-G.________ se sont
mariés le 17 avril 1998. Aucun enfant n'est issu de leur
union. En raison de graves difficultés conjugales, ils
vivent
séparés depuis la fin de janvier 2000.

Par jugement du 29 novembre 2000, le Président 1 de
l'Arrondissement judiciaire II Bienne-Nidau a rejeté la de-
mande en divorce formée par l'épouse le 22 février 2000. Sta-
tuant le 30 mai 2001 sur le recours de celle-ci, la IIe Cham-
bre civile de la Cour d'appel du canton de Berne a notamment
prononcé le divorce et réglé ses effets accessoires.

Le défendeur requiert le Tribunal fédéral de réfor-
mer le jugement du 30 mai 2001, en ce sens que l'action en
divorce de son épouse est rejetée. Il sollicite en outre le
bénéfice de l'assistance judiciaire. L'intimée n'a pas été
invitée à répondre.

2.- Le recours est recevable du chef de l'art. 44 OJ
en tant qu'il porte sur le prononcé du divorce. Interjeté en
temps utile contre une décision finale rendue par l'autorité
suprême du canton, il l'est aussi selon les art. 48 al. 1
et
54 al. 1 OJ.

3.- a) La cour cantonale a retenu en fait que le ma-
ri avait frappé son épouse à quatre reprises au moins, soit
les 22 juillet, 10 août et 26 décembre 1999, ainsi que le 29
janvier 2000. Après cette dernière altercation, les
conjoints
avaient cessé la vie commune. Au cours de ces disputes, la
demanderesse avait subi une lésion au tympan, constatée médi-
calement, et des hématomes au bras. De plus, la police

s'était déplacée à chaque fois, ce qui tendait à démontrer
que l'épouse se sentait effectivement menacée. Le 29 janvier
2000, le président de commune était même intervenu et la po-
lice avait dû emmener le mari hors de l'appartement.
Celui-ci
ne s'était par ailleurs pas opposé à l'ordonnance pénale con-
cernant les voies de fait commises envers sa femme les 26 dé-
cembre 1999 et 29 janvier 2000. L'autorité cantonale a égale-
ment retenu qu'au cours d'une scène, le défendeur avait pous-
sé la demanderesse sur une table en verre qui s'était alors
brisée. Elle a aussi admis que l'épouse souffrait psychique-
ment de cette situation. Au vu de ces constatations, qui
lient le Tribunal fédéral en instance de réforme (art. 63
al.
2 OJ), la Cour d'appel a considéré que la défenderesse avait
subi des actes de violence considérables, qui avaient défini-
tivement brisé sa confiance à l'égard de son mari. Le main-
tien du mariage durant quatre ans pouvait, dans ces circons-
tances, lui paraître objectivement intolérable, de sorte que
les conditions pour prononcer le divorce en application de
l'art. 115 CC étaient réalisées.

b) Le recourant se plaint d'une violation de cette
disposition. Il expose que la violence conjugale est un phé-
nomène détestable, mais malheureusement courant; elle ne sau-
rait dès lors constituer un motif sérieux de divorce, au ris-
que de faire perdre à l'art. 115 CC son caractère d'excep-
tion. De surcroît, se poserait alors le problème de la déli-
mitation de l'intensité de la violence. En l'occurrence,
l'intimée ne s'était séparée de lui que plus de six mois
après sa lésion au tympan, ce qui démontrerait que cette
blessure ne lui paraissait pas grave au point de lui rendre
la poursuite de la vie commune et, a fortiori, des liens du
mariage, insupportable. Quant aux voies de fait commises en
décembre 1999 et janvier 2000, il s'agissait d'incidents peu
importants, n'ayant entraîné aucun problème psychique parti-

culier pour l'intimée. La séparation des époux avait du
reste
mis fin à cette situation, de sorte qu'elle ne pouvait pré-
tendre que la continuation du mariage lui fût insupportable.

4.- a) L'art. 115 CC autorise chaque époux à deman-
der le divorce avant l'expiration du délai de séparation de
quatre ans prévu par l'art. 114 CC lorsque des motifs sé-
rieux, qui ne lui sont pas imputables, rendent la continua-
tion du mariage insupportable. Selon la jurisprudence, cette
cause de divorce - subsidiaire à celle de l'art. 114 CC -
permet de déroger à la règle du divorce sur demande unilaté-
rale dans des cas particuliers où il serait excessivement
rigoureux d'imposer au demandeur de patienter durant le
délai
légal de séparation (ATF 126 III 404 consid. 4c p. 408 et
les
références). Dans un arrêt ultérieur, le Tribunal fédéral a
précisé que l'existence de motifs sérieux ne devait pas être
soumise à des exigences excessives (ATF 127 III 129 consid.
3b p. 134, approuvé par Roger Weber, in AJP/PJA 4/2001, p.
466 ss, qui préconise une réduction du délai de quatre ans,
tout comme Alexandra Rumo-Jungo, in recht 2001, p. 82 ss).
Savoir si tel est le cas dépend des circonstances de chaque
espèce, de sorte qu'il n'est pas possible, ni souhaitable,
d'établir des catégories fermes de motifs sérieux au sens de
l'art. 115 CC; le juge doit statuer en appliquant les règles
du droit et de l'équité (art. 4 CC; 127 III 129 consid. 3 p.
132 ss, 347 consid. 2a p. 349; 126 III 404 consid. 4 p. 407
ss). Il est toutefois unanimement admis que les actes de vio-
lence mettant en péril la santé physique et psychique du con-
joint demandeur peuvent constituer des motifs sérieux permet-
tant de solliciter le divorce pour rupture du lien conjugal
(cf. ATF 126 III 404 consid. p. 410 et les citations; cf.
aussi Jacques Micheli et al., Le nouveau droit du divorce,
1999, n. 194).

b) En l'espèce, il résulte des constatations du ju-
gement entrepris qu'au cours des six derniers mois de la vie
conjugale, qui a duré un peu moins de deux ans, le mari a
battu son épouse à quatre occasions au moins. Les coups por-
tés ont été d'une certaine gravité puisqu'ils ont provoqué
chez la victime une lésion au tympan et des hématomes; l'une
des altercations entre les conjoints a aussi entraîné le
bris
d'une table. Ces disputes ont toutes entraîné l'intervention
de la police et le mari a été condamné pénalement pour cer-
tains de ces faits. La Cour d'appel a également retenu que
l'épouse lui avait paru extrêmement bouleversée et qu'elle
souffrait encore psychiquement des violences qu'elle avait
subies.

Le recourant tente en vain de minimiser ses actes.
Vu leur répétition, leurs conséquences et leur caractère uni-
latéral - l'autorité cantonale ayant retenu, comme le
premier
juge, que la désunion n'était pas imputable à l'épouse -,
ils
doivent être qualifiés de graves. Le recourant ne saurait en
outre tirer argument du fait que l'intimée n'a pas mis fin à
la vie commune immédiatement après avoir reçu les premiers
coups. On comprend en effet aisément qu'elle ait espéré que
ces violences ne se reproduiraient pas et qu'elle ne se soit
rendue à l'évidence que plus tard. Contrairement à ce que
prétend le recourant, une certaine généralisation de la vio-
lence entre époux ne saurait empêcher l'application de
l'art.
115 CC et le droit du divorce, banaliser ainsi de tels actes
en ne reconnaissant comme motifs sérieux que les plus
graves.
Le fait que les époux vivent désormais séparés n'exclut pas
non plus de recourir à cette disposition, pour le motif que
le risque de violence aurait dès lors disparu (Weber, op.
cit., p. 469), car les effets de celle-ci peuvent être dura-
bles. Au demeurant, le recourant ne manque pas d'audace lors-
qu'il renvoie l'intimée à attendre l'échéance du délai de
quatre ans prévu à l'art. 114 CC. Même si le nouveau droit
tend à déculpabiliser le divorce, le conjoint innocent vic-

time d'actes de violence ne peut qu'éprouver un sentiment
d'injustice quand l'unique responsable de la désunion
refuse,
pour des motifs incompréhensibles, de participer à une procé-
dure de divorce sur requête commune alors que la rupture est
en fait consommée (Jean-François Perrin, Les causes du divor-
ce selon le nouveau droit, in De l'ancien au nouveau droit
du
divorce, 1999, p. 26-27); en l'occurrence, le mari ne dit
mot
d'une éventuelle reprise de la vie commune.

Au vu de l'ensemble de ces circonstances, l'autorité
cantonale n'a pas méconnu son pouvoir d'appréciation (art. 4
CC) en considérant que le maintien du mariage était insuppor-
table pour l'épouse et en prononçant par conséquent le divor-
ce pour rupture du lien conjugal, en application de l'art.
115 CC.

5.- Vu ce qui précède, le recours apparaît mal fondé
et doit être rejeté. Ses conclusions étaient d'emblée vouées
à l'échec, de sorte que la requête d'assistance judiciaire
ne
peut être agréée (art. 152 OJ). Il n'y a pas lieu d'allouer
des dépens, une réponse n'ayant pas été requise.

Par ces motifs,

l e T r i b u n a l f é d é r a l :

1. Rejette le recours et confirme le jugement entre-
pris.

2. Rejette la requête d'assistance judiciaire.

3. Met un émolument judiciaire de 1'500 fr. à la
charge du recourant.

4. Communique le présent arrêt en copie aux manda-
taires des parties et à la IIe Chambre civile de la Cour
d'appel du canton de Berne.

__________

Lausanne, le 10 octobre 2001
MDO/frs

Au nom de la IIe Cour civile
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE :
Le Président,

La Greffière,


Synthèse
Numéro d'arrêt : 5C.227/2001
Date de la décision : 10/10/2001
2e cour civile

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2001-10-10;5c.227.2001 ?
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