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05/10/2001 | SUISSE | N°I.236/01

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 05 octobre 2001, I.236/01


«AZA 7»
I 236/01 Mh

IIIe Chambre

MM. et Mme les juges Schön, Président, Spira et Widmer.
Greffier : M. Berthoud

Arrêt du 5 octobre 2001

dans la cause

Office de l'assurance-invalidité du canton de Neuchâtel,
Espacité 4-5, 2302 La Chaux-de-Fonds, recourant,

contre

A.________, intimé, représenté par Maître Michel Bise,
avocat, Passage Max.-Meuron 1, 2001 Neuchâtel,

et

Tribunal administratif du canton de Neuchâtel, Neuchâtel

A.- A.________ a travaillé en

qualité de maçon et de
machiniste de chantier. Souffrant de dorso-lombalgies, il
s'est annoncé à l'assurance-invalidité.

Son ...

«AZA 7»
I 236/01 Mh

IIIe Chambre

MM. et Mme les juges Schön, Président, Spira et Widmer.
Greffier : M. Berthoud

Arrêt du 5 octobre 2001

dans la cause

Office de l'assurance-invalidité du canton de Neuchâtel,
Espacité 4-5, 2302 La Chaux-de-Fonds, recourant,

contre

A.________, intimé, représenté par Maître Michel Bise,
avocat, Passage Max.-Meuron 1, 2001 Neuchâtel,

et

Tribunal administratif du canton de Neuchâtel, Neuchâtel

A.- A.________ a travaillé en qualité de maçon et de
machiniste de chantier. Souffrant de dorso-lombalgies, il
s'est annoncé à l'assurance-invalidité.

Son médecin traitant, la doctoresse B.________, l'a
adressé à une spécialiste en maladies rhumatismales, la
doctoresse C.________. Dans son rapport du 9 novembre 1999,
cette dernière a conseillé de reclasser le patient dans une
activité exempte de port de charges lourdes et de vibra-
tions.
L'Office de l'assurance-invalidité du canton de Neu-
châtel (l'office AI) a mandaté le docteur D.________,
également spécialiste en maladie rhumatismales. Le 20 mars
2000, il a attesté que l'exercice d'une activité de maçon
n'entrait plus en ligne de compte. En revanche, l'assuré
conservait une capacité de travail entière comme conducteur
de machines, grutier, ou encore en étant assis sur une
pelleteuse.
Par décision du 10 juillet 2000, l'office AI a rejeté
la demande, au motif que l'assuré pouvait travailler sans
restriction en qualité de machiniste.

B.- A.________ a recouru contre cette décision devant
le Tribunal administratif du canton de Neuchâtel, en con-
cluant à la prise en charge, par l'AI, d'un reclassement
professionnel. Il a mis notamment l'accent sur les contra-
dictions existant entre l'avis du docteur D.________ et
celui de sa consoeur C.________, s'agissant de la conduite
de machines de chantier. A cet effet, il a produit un
certificat de la doctoresse C.________ du 29 août 2000,
laquelle s'opposait aux conclusions de son confrère
D.________.
Par jugement du 14 mars 2001, la juridiction cantonale
a admis le recours et renvoyé la cause à l'office AI afin
qu'il complète l'instruction par une expertise médicale
destinée à déterminer si l'assuré est ou non capable
d'exercer l'activité de conducteur de pelle en dépit de ses
lombalgies.

C.- L'office AI interjette recours de droit adminis-
tratif contre ce jugement dont il demande l'annulation, en
concluant au rétablissement de sa décision.

L'intimé conclut au rejet du recours, avec suite de
dépens. L'Office fédéral des assurances sociales ne s'est
pas déterminé.

Considérant en droit :

1.- Pour pouvoir calculer le degré d'invalidité,
l'administration (ou le juge, s'il y a eu un recours) a
besoin de documents que le médecin, éventuellement aussi
d'autres spécialistes, doivent lui fournir. La tâche du
médecin consiste à porter un jugement sur l'état de santé
et à indiquer dans quelle mesure et pour quelles activités
l'assuré est incapable de travailler. En outre, les données
médicales constituent un élément utile pour déterminer
quels travaux on peut encore, raisonnablement, exiger de
l'assuré (ATF 125 V 261 consid. 4, 115 V 134 consid. 2,
114 V 314 consid. 3c, 105 V 158 consid. 1).
Lorsque des spécialistes émettent des opinions con-
traires aptes à mettre sérieusement en doute la pertinence
des déductions de l'expert, on ne peut exclure, selon les
cas, une interprétation divergente des conclusions de ce
dernier par le juge ou, au besoin, une instruction complé-
mentaire sous la forme d'une nouvelle expertise médicale
(ATF 125 V 352 consid. 3b/aa et les références).

2.- a) En l'espèce, les docteurs C.________ et
D.________, tous deux spécialistes en rhumatologie, sont
parvenus à des conclusions diamétralement opposées en ce
qui concerne la possibilité, pour l'intimé, de travailler
en qualité de conducteur de machines de chantier.
Nonobstant ces contradictions, le recourant soutient
que l'avis du docteur D.________, qu'il avait mandaté, doit
prévaloir pour statuer sur le droit de l'intimé aux presta-
tions de l'AI, car le rapport de cet expert remplit les
conditions posées par la jurisprudence et a pleine valeur

probante (cf. ATF 125 V 352 consid. 3a, 122 V 160 con-
sid. 1c et les références). Par ailleurs, le recourant
estime qu'il a satisfait à son obligation d'instruire les
faits de la cause, conformément au principe inquisitoire
qui régit la procédure dans le domaine des assurances so-
ciales (cf. ATF 117 V 283 consid. 4a).

b) Pour sa part, la juridiction cantonale de recours a
considéré que la cause n'était pas en état d'être jugée.
Selon elle, l'avis de la doctoresse C.________ ne devait
pas être écarté sans autre forme de procès, dès lors que la
prénommée s'était prononcée en qualité de spécialiste en
rhumatologie et non de médecin de famille (à cet égard,
voir RJJ 1995 p. 44, RCC 1988 p. 504 consid. 2). En
conséquence, seule une nouvelle expertise médicale permet-
trait de faire toute la lumière sur la capacité de l'intimé
de conduire une pelle mécanique, opinion à laquelle ce
dernier se rallie.
La Cour de céans partage l'avis des premiers juges,
car ces derniers ne disposaient pas des éléments leur per-
mettant de statuer en connaissance de cause, compte tenu
des opinions contradictoires des experts. Ce point de fait
doit donc être préalablement élucidé, avant de poursuivre
l'examen du droit de l'intimé à un reclassement.

3.- a) Il reste à décider si l'expertise médicale,
destinée à déterminer la capacité de travail de l'intimé
dans un emploi de conducteur de machines de chantier, doit
être mise en oeuvre par le recourant ou par l'autorité
judiciaire cantonale. Les premiers juges ont estimé que
cette tâche incombait à l'office AI, ce que celui-ci con-
teste, estimant avoir suffisamment instruit la cause sur le
plan médical.
Selon la jurisprudence, le juge cantonal qui estime
que les faits ne sont pas suffisamment élucidés a en prin-

cipe le choix entre deux solutions : soit renvoyer la cause
à l'assureur pour complément d'instruction, soit procéder
lui-même à une telle instruction complémentaire. Un renvoi
à l'assureur, lorsqu'il a pour but d'établir l'état de
fait, ne viole ni le principe de simplicité et de rapidité
de la procédure, ni le principe inquisitoire. Il en va
cependant autrement quand un tel renvoi constitue en soi un
déni de justice; cela peut être le cas notamment lorsque,
en raison des circonstances, un simple mandat d'expertise
judiciaire ou une mesure d'instruction ponctuelle édictée
par le juge suffirait à élucider l'état de fait, ou qu'un
renvoi apparaîtrait disproportionné (cf. ATF 122 V 163
consid. 1d, RAMA 1993 n° U 170 p. 136 et la critique de
G. Aubert parue in SJ 1993 p. 560).

b) En l'occurrence, l'office AI a certes mandaté un
rhumatologue, conformément aux art. 57 LAI et 69 RAI, afin
de connaître la nature et les conséquences des douleurs
lombaires de l'intimé sur sa capacité de travail. A la
lecture du rapport du docteur D.________ du 20 mars 2000,
l'office aurait cependant dû inviter ce médecin à préciser
les motifs pour lesquels il ne partageait pas l'avis de sa
consoeur C.________ quant à l'exercice d'une activité de
machiniste. Au lieu de cela, il a préféré statuer en
l'état, sans chercher à élucider cette divergence (fonda-
mentale) de vues, malgré les griefs que l'intimé avait
soulevés à cet égard dans sa prise de position du 6 juin
2000 sur le projet de décision du 14 avril 2000.
Ce faisant, il devait se douter que cette contra-
diction serait probablement invoquée dans le cadre d'une
procédure de recours et qu'elle nécessiterait un complément
d'instruction. Il doit en subir les conséquences et
s'acquitter lui-même du complément d'instruction nécessité
par son incurie. Le recours est infondé.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances

p r o n o n c e :

I. Le recours est rejeté.

II. Il n'est pas perçu de frais de justice.

III. Le recourant versera à l'intimé la somme de 2500 fr. à
titre de dépens (y compris la taxe à la valeur ajou-
tée) pour l'instance fédérale.

IV. Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au
Tribunal administratif du canton de Neuchâtel et à
l'Office fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 5 octobre 2001

Au nom du
Tribunal fédéral des assurances
Le Président de la IIIe Chambre :

Le Greffier :


Synthèse
Numéro d'arrêt : I.236/01
Date de la décision : 05/10/2001
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2001-10-05;i.236.01 ?
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