La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

26/09/2001 | SUISSE | N°B.92/00

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 26 septembre 2001, B.92/00


«AZA 7»
B 92/00 Mh

Ière Chambre

MM. et Mme les juges Lustenberger, Président, Schön, Spira,
Rüedi et Widmer. Greffier : M. Frésard

Arrêt du 26 septembre 2001

dans la cause

Fondation de Prévoyance Y.________ SA et des Sociétés
connexes, recourante, représentée par Maître Jacques-André
Schneider, avocat, rue du Rhône 100, 1211 Genève 3,

contre

A.________, intimé, représenté par Maître Maurice
Turrettini, avocat, rue de Hesse 8-10, 1211 Genève 11,

et

Tr

ibunal administratif du canton de Genève, Genève

A.- Par contrat du 17 mars 1993, A.________ a été
engagé par X.________, à Paris, ...

«AZA 7»
B 92/00 Mh

Ière Chambre

MM. et Mme les juges Lustenberger, Président, Schön, Spira,
Rüedi et Widmer. Greffier : M. Frésard

Arrêt du 26 septembre 2001

dans la cause

Fondation de Prévoyance Y.________ SA et des Sociétés
connexes, recourante, représentée par Maître Jacques-André
Schneider, avocat, rue du Rhône 100, 1211 Genève 3,

contre

A.________, intimé, représenté par Maître Maurice
Turrettini, avocat, rue de Hesse 8-10, 1211 Genève 11,

et

Tribunal administratif du canton de Genève, Genève

A.- Par contrat du 17 mars 1993, A.________ a été
engagé par X.________, à Paris, en qualité de «gérant
international» à la Banque privée internationale.
Dès le 1er octobre 1995, il a été détaché auprès de
Y.________ SA, à Genève, pour y occuper un poste de
directeur chargé de la clientèle privée. Le 11 septembre
1995, les parties au contrat susmentionné ont précisé dans
un avenant les conditions de ce détachement. Celui-ci était

de durée indéterminée; l'employeur pouvait y mettre fin à
tout moment, tandis que le salarié pourrait demander son
rapatriement après trois années de séjour. L'avenant
prévoyait par ailleurs que le salarié serait inscrit, pour
le risque de vieillesse, à la Caisse des Français de
l'étranger. X.________ prenait à sa charge 8,2 pour cent
des 15,9 pour cent de cotisations afférentes à ce risque.
En outre, l'intéressé continuerait à être assuré aux
Caisses de retraites (françaises) auxquelles X.________
était affilié, soit l'ARCIL et l'APICIL. L'ARCIL fait
partie de l'Association des régimes de retraites complé-
mentaires (ARRCO), tandis que l'APICIL est membre de
l'Association générale des institutions de retraites des
cadres (AGIRC). Enfin, l'employé continuerait à bénéficier,
également, du contrat «Prévoyance Sociale» souscrit par
X.________ pour son personnel, pour la couverture des
risques de décès et d'invalidité. Il était prévu que
l'employeur verserait un montant de 59 000 francs français,
payé en France, et qui était destiné à couvrir les
cotisations à la charge du salarié pour le maintien de
cette prévoyance sociale, sur la base d'un salaire annuel
de référence de 700 000 francs français (soit le salaire
avant le détachement).
L'avenant contenait par ailleurs la clause suivante à
l'intention du salarié :

«Par ailleurs, si la réglementation locale fait obligation
de cotiser à un fonds de retraite ou à tout autre organisme
de prévoyance de nature similaire et, au cas où lors de
votre départ vous pourriez prétendre à un versement quel-
conque ou à un remboursement de cotisations, seule la
partie correspondant à la participation du salarié vous
serait acquise, celle correspondant à la part employeur
devant être reversée à celui-ci».

Le 18 septembre 1995, A.________ et Y.________ SA ont
signé un contrat dans lequel ils ont arrêté les conditions
de l'engagement auprès de Y.________ SA de A.________. La
rémunération annuelle a été fixée à 350 000 francs suisses.
Il était notamment prévu une retenue de 8 pour cent au
titre de la prévoyance professionnelle (deuxième pilier)
«étant entendu» que la part versée par l'employeur ne
serait pas acquise au salarié.

B.- Par lettres des 25 juillet 1998, A.________ a
résilié les rapports de travail tant avec Y.________ SA
qu'avec X.________.
Pendant son détachement auprès de Y.________ SA,
A.________ a été affilié, du 1er octobre 1995 au
1er octobre 1998, à la Fondation de prévoyance en faveur du
personnel de Y.________ SA et des sociétés connexes
(ci-après : la Fondation). La Fondation a régulièrement
perçu les cotisations réglementaires de l'assuré et de son
employeur.
Le 7 septembre 1998, Y.________ SA a informé
A.________ que sa prestation de sortie auprès de la
Fondation s'élevait à 97 927 fr. 70, montant qui repré-
sentait les cotisations versées par l'assuré, plus les
intérêts. D'après le certificat de sortie établi par la
Fondation, la part versée par l'employeur s'élevait, quant
à elle, à 142 050 fr. 80. La Fondation a transféré le
montant de 97 927 fr. 70 sur un compte de libre passage au
nom de l'affilié auprès de la Banque cantonale de Genève.
Elle en a avisé l'assuré par lettre du 30 octobre 1998.

C.- Le 7 juin 1999, A.________ a ouvert action contre
la Fondation devant le Tribunal administratif du canton de
Genève en concluant au transfert par la défenderesse, en
plus du montant déjà versé, de la somme de 142 050 fr. 80,

plus intérêts à 5 pour cent l'an à partir du 1er octobre
1998, sur un compte de libre passage auprès de la Banque
cantonale de Genève.
La Fondation a conclu, principalement, au rejet de la
demande. Subsidiairement, elle a conclu à ce que le tribu-
nal lui donne acte qu'elle s'engageait à verser au deman-
deur la somme de 11 089 fr. 20 au titre de prestation de
sortie complémentaire. Ce montant représentait, selon la
défenderesse, la part de l'avoir de vieillesse qui aurait
dû être financée par l'employeur en vertu de la LPP.
Statuant le 10 octobre 2000, le Tribunal administratif
a fait entièrement droit aux conclusions du demandeur.

D.- La Fondation interjette un recours de droit admi-
nistratif dans lequel elle conclut à l'annulation de ce
jugement et au rejet de la demande. Subsidiairement, elle
réitère son engagement de verser la somme complémentaire de
11 089 fr. 20, avec intérêts, «au titre de la prestation de
sortie minimale LPP».
A.________ conclut, sous suite de dépens, au rejet du
recours. Quant à l'Office fédéral des assurances sociales,
il propose d'admettre la conclusion subsidiaire de la
Fondation.

Considérant en droit :

1.- Le litige concernant le montant d'une prestation
de sortie est un litige en matière de prestations d'assu-
rance, de sorte que le pouvoir d'examen du Tribunal fédéral
des assurances est déterminé par l'art. 132 OJ. Il n'est
ainsi pas limité à la violation du droit fédéral - y com-
pris par l'excès ou l'abus du pouvoir d'appréciation - mais
il s'étend également à l'opportunité de la décision atta-
quée. Le tribunal n'est alors pas lié par l'état de fait

constaté par la juridiction inférieure et il peut s'écarter
des conclusions des parties, à l'avantage ou au détriment
de celles-ci (ATF 126 V 165 consid. 1).

2.- Dans un premier moyen, la recourante soutient que
l'intimé, contrairement à ce que retiennent les premiers
juges, a présenté une demande d'exemption de l'assurance au
sens de l'art. 1er al. 2 OPP 2. L'avenant du 11 septembre
1995 conclu avec X.________ et le contrat du 18 septembre
1995, conclu avec Y.________ SA, qui portaient tous deux la
signature de l'intimé, contenaient une telle demande, en
raison de la renonciation explicite de l'intimé à la part
des cotisations versées par l'employeur. L'intimé savait
que les contrats en question avaient été portés à la con-
naissance de la Fondation, qui les avait «acceptés» par
actes concluants. Selon la recourante, les cotisations ver-
sées à la Fondation l'ont ainsi été sans cause juridique.

a) Selon l'art. 2 al. 1 LPP, sont soumis à l'assurance
obligatoire les salariés qui ont plus de 17 ans et reçoi-
vent d'un même employeur un salaire annuel supérieur au
montant-limite fixé par l'art. 7 LPP. L'assurance obli-
gatoire commence en même temps que les rapports de travail
(art. 10 al. 1 LPP, première partie de la phrase). Les
critères juridiques de l'AVS sont déterminants pour décider
de la qualité de salarié au sens de la LPP, sans toutefois
que le statut de cotisant dans l'AVS soit formellement
obligatoire (ATF 123 V 277 consid. 2a, 115 Ib 41 consid. 4
et les références).

b) Aux termes de l'art. 2 al. 2 LPP, le Conseil fédé-
ral définit les catégories de salariés qui, pour des motifs
particuliers, ne sont pas soumis à l'assurance obligatoire.
C'est ce qu'il a fait en édictant l'art. 1er OPP 2. Selon
l'alinéa 2 de cette disposition de l'ordonnance, les sa-

lariés dont l'activité en Suisse n'a probablement pas un
caractère durable, et qui bénéficient de mesures de prévo-
yance suffisantes à l'étranger, seront exemptés de l'assu-
rance obligatoire à condition qu'ils en fassent la demande
à l'institution de prévoyance compétente.
Cette règle - qui s'applique uniquement à la prévoyan-
ce professionnelle obligatoire selon la LPP - a pour but de
coordonner les régimes de prévoyance sur le plan interna-
tional (Markus Moser, Die Zweite Säule und ihre Tragfähig-
keit, thèse Bâle, 1992, p. 39). Elle vise certains salariés
au service de sociétés étrangères ou d'organisations inter-
nationales qui sont déjà affiliés à l'étranger à une insti-
tution de prévoyance bien développée (voir à ce sujet le
commentaire par l'Office fédéral des assurances sociales du
projet de l'OPP 2, août 1983, p. 9). Il s'agit donc princi-
palement de travailleurs détachés en Suisse, pour une durée
relativement courte, qui conservent un lien de subordina-
tion avec leur employeur d'origine à l'étranger (Jacques-
André Schneider, Les régimes complémentaires de retraite en
Europe : Libre circulation et participation, 1994, pp. 82
et 363 sv; voir aussi Ernst-J. Holzapfel, La réglementation
relative au détachement de salariés dans les conventions de
sécurité sociale conclues par la Suisse, Sécurité sociale
4/1997, p. 226 ss).
L'exemption de l'assurance en vertu de cette disposi-
tion réglementaire exige, selon son texte clair («wenn sie
ein entsprechendes Gesuch...» et «a condizione che ne
faccia domanda...», selon les versions allemande et
italienne) la présentation d'une demande émanant du
salarié; l'institution ne peut donc en décider librement,
quand bien même les conditions de fond d'une exemption
seraient réunies (voir aussi Jürg Brühwiler, Die betriebli-
che Personalvorsorge in der Schweiz, p. 271, ch. 20). A cet
égard, il existe d'ailleurs un parallélisme entre
l'art. 1er al. 2 OPP 2 et l'art. 1er al. 2 let. b LAVS
(Brühwiler, op. cit., p. 274, ch. 24). D'après cette dis-
position de la LAVS, ne sont pas assurées les personnes

affiliées à une institution officielle étrangère d'assu-
rance-vieillesse et survivants si l'assujettissement à la
loi constitue pour elles un cumul de charges trop lourdes :
cette exemption de l'AVS, tout comme celle qui est prévue à
l'art. 1er al. 2 OPP 2, est subordonnée à une demande de
l'assuré (ATF 120 V 402 consid. 2a).
La demande d'exemption constitue d'autre part l'exer-
cice d'un droit formateur. Elle est définitive, sous réser-
ve d'un vice de la volonté (Brühwiler, op. cit., p. 271,
ch. 20; Moser, op. cit., p. 39 sv. et note de bas de
page 114). Eu égard au but de protection sociale visé par
le principe de la soumission obligatoire des travailleurs à
la LPP, la demande d'exemption au sens de l'art. 1er al. 2
OPP 2 doit être formulée de manière explicite et non équi-
voque. Cette exigence se justifie aussi par le fait qu'il
importe de savoir, dès le début des rapports de travail,
s'il existe ou non une couverture d'assurance selon la LPP
pour le cas où une éventualité assurée se produirait (cf.
ATF 98 V 185 consid. b).

c) En l'espèce, l'argumentation de la recourante, qui
voit une demande d'exemption dans la renonciation de l'in-
timé à la part des cotisations de l'employeur, n'est pas
fondée. En fait, les clauses contractuelles invoquées par
la recourante n'ont d'autre objet que de limiter les droits
de l'assuré, lors du calcul de la prestation de sortie, au
montant de ses propres cotisations. Elles ne contiennent
aucun élément qui permettrait d'en déduire que l'intimé ait
voulu purement et simplement être exempté de l'assurance.
De telles clauses violent certes l'art. 15 al. 2 LFLP,
ainsi que les art. 17 al. 1 et 20 al. 2 du règlement de la
recourante, dispositions du règlement selon lesquelles la
prestation de sortie correspond à la totalité du compte
individuel de l'assuré (avec les contributions de l'emplo-
yeur). Le fait que les parties ont en l'occurrence adopté
une solution contraire à la loi et au règlement de l'insti-
tution de prévoyance n'est pas un indice de nature à démon-

trer que le salarié désirait être exempté de l'assurance
obligatoire selon la LPP. En tout cas, on n'est pas en
présence d'une demande explicite et non équivoque de sa
part.

3.- A titre subsidiaire, la recourante soutient que
l'intimé, pour la prévoyance plus étendue, n'était pas
affilié à la Fondation. Elle invoque l'art. 5 al. 1 de son
règlement, qui contient une disposition selon laquelle
l'affiliation suppose que la personne exerce une activité
durable en Suisse et qu'elle ne bénéficie pas de mesures de
prévoyance suffisantes à l'étranger. Or, dans le cas parti-
culier, prétend la recourante, ces conditions n'étaient pas
remplies. L'activité en Suisse avait un caractère tempo-
raire. L'intimé pouvait prétendre à une retraite annuelle
projetée de 639 700 francs français en vertu de sa couver-
ture à l'étranger. Le taux de remplacement du revenu de
retraite, par rapport à un salaire de référence de
700 000 francs français, s'élevait à 91,3 pour cent.
D'après la recourante, cette couverture doit être qualifiée
de suffisante au sens du règlement de la Fondation. Par
ailleurs, l'affiliation de l'intimé ne pouvait pas résulter
d'une convention particulière par laquelle les parties
auraient dérogé à l'ordre réglementaire. Une telle déroga-
tion n'était pas possible, en l'absence d'un accord écrit
des partie soumis à l'approbation de l'autorité de sur-
veillance. Elle eût été au demeurant incompatible avec le
principe de l'égalité de traitement entre affiliés.
Finalement, la recourante prétend qu'elle se trouvait
dans une erreur essentielle quand elle a perçu des cotisa-
tions pour le compte de l'intimé, dès lors que celui-ci ne
pouvait pas être affilié
à la prévoyance professionnelle.
Elle a cru, de bonne foi, que seules les cotisations per-
sonnelles de l'assuré donnaient lieu à des obligations

juridiques de sa part et qu'elle pouvait ainsi créer un
régime spécial en son sein, nonobstant le texte du règle-
ment. Par la suite, elle aurait constaté son erreur, après
consultation d'un juriste spécialisé.

a) Dans le domaine de la prévoyance professionnelle
plus étendue (sur cette notion, voir par exemple ATF
122 V 145 consid. 4b), l'assuré est lié à l'institution de
prévoyance par un contrat innommé (sui generis) dit de
prévoyance, dont le règlement de prévoyance constitue le
contenu préformé, savoir ses conditions générales, aux-
quelles l'assuré se soumet expressément ou par actes
concluants (p. ex. en conservant le règlement reçu, en
payant des cotisations ou en acceptant la déduction cor-
respondante sur son salaire). L'interprétation du règlement
doit dès lors se faire selon les règles générales qui sont
applicables pour interpréter les contrats (ATF 122 V 145
consid. 4b et les références).

b) La disposition réglementaire invoquée ici par la
recourante laisse une très grande liberté d'appréciation
aux parties dans l'interprétation qu'il convient de lui
donner, quand il s'agit de savoir si l'assuré bénéficie
d'une couverture suffisante à l'étranger ou si l'activité
en Suisse a un caractère durable. Ces notions ne s'appré-
cient pas tant selon des critères purement objectifs (non
définis en l'occurrence dans le règlement), mais au regard
de l'ensemble des circonstances. Il appartient, le cas
échéant, à l'institution de prévoyance de procéder à un
examen détaillé des conditions de la prévoyance profes-
sionnelle à l'étranger. Ainsi, s'il existe une couverture
d'assurance à l'étranger et que les parties, néanmoins,
concluent le contrat de prévoyance, c'est qu'elles admet-
tent, implicitement tout au moins, que les conditions d'une
affiliation sont remplies. Elle considèrent en particulier

que la couverture d'assurance à l'étranger n'est pas suf-
fisante, compte tenu des circonstances, et qu'elle est
susceptible d'être améliorée. Le seul fait que l'institu-
tion de prévoyance puisse, au moment où survient un cas de
libre passage ou un cas de prévoyance, avoir une appré-
ciation différente à propos des conditions réglementaires
de l'affiliation n'entraîne pas une invalidation du
contrat.
Il est ainsi incontestable que les parties ont en
l'espèce conclu un contrat de prévoyance, à tout le moins
par actes concluants (paiement de cotisations par l'emplo-
yeur et le salarié, remise de fiches individuelles sur le
montant des prestations etc.). Si la recourante entendait
se prévaloir de la disposition réglementaire en cause, il
lui incombait d'emblée d'en manifester la volonté de ma-
nière clairement reconnaissable par l'assuré. Non seulement
elle n'en a rien fait, mais elle a démontré, par actes
concluants, qu'elle considérait qu'il n'existait aucun
obstacle à l'affiliation de l'intimé.

c) C'est à tort, par ailleurs, que la recourante se
prétend victime d'une erreur essentielle.
Selon l'art. 23 CO, le contrat n'oblige pas celle des
parties qui, au moment de le conclure, était dans une
erreur essentielle. Est une erreur essentielle, notamment,
l'erreur dite de base telle que l'entend l'art. 24 al. 1
ch. 4 CO. Un contractant peut invoquer cette erreur s'il
s'est trompé sur un point déterminé qu'il considérait comme
un élément nécessaire du contrat et dont l'autre partie a
reconnu ou pouvait reconnaître qu'il avait un tel carac-
tère; il faut encore que l'erreur concerne un fait qu'il
est objectivement justifié de considérer comme un élément
essentiel. L'erreur peut aussi consister dans la mécon-
naissance d'une situation juridique (ATF 118 II 62 con-
sid. 3b, 300 consid. 2c, 114 II 139 consid. 2).

En l'occurrence, le moyen soulevé est dépourvu de
pertinence. La recourante est une institution de prévoyance
qui est gérée en Suisse par des spécialistes reconnus du
deuxième pilier. Elle a eu connaissance des conditions du
détachement de l'intimé par X.________ et des conditions de
son engagement par Y.________ SA. Dans de telles circons-
tances, on ne voit pas qu'elle ait pu se faire une repré-
sentation inexacte de la situation, notamment juridique,
concernant les conditions d'affiliation de l'intimé.

d) Enfin, on ne peut pas retenir que les parties ont
dérogé au règlement de la Fondation par une convention
particulière.
Pendant la durée du détachement en Suisse de l'intimé,
le salaire convenu était de 350 000 francs suisses par an,
ce qui correspond, en francs français (selon un cours de
change approximatif de 24 francs pour 100 FF) à un montant
très largement supérieur au salaire de référence avant le
détachement (700 000 francs français). La pension de
retraite qui était garantie à l'intimé en France (environ
153 000 francs suisses par an après conversion en monnaie
suisse du montant de la rente projetée de 639 700 francs
français) se trouvait proportionnellement réduite. Vu
l'importance de la rémunération versée en Suisse et
s'agissant d'un cadre supérieur d'un grand établissement
bancaire, les parties au contrat de prévoyance pouvaient
légitimement considérer comme justifiées des mesures
complémentaires de prévoyance. Elles étaient de surcroît
fondées à qualifier de durable l'activité en Suisse de
l'intimé, attendu que le détachement était prévu pour une
durée indéterminée. Compte tenu du large pouvoir d'appré-
ciation qui est réservé aux parties dans l'interprétation
du règlement et qui résulte de l'absence de critères
objectifs pour définir le caractère durable de l'activité

ou la notion de prévoyance suffisante (supra let. b),
l'affiliation de l'intimé ne s'écartait pas des conditions
fixées par l'art. 5 al. 1 du règlement de la recourante.
Il est dans ces circonstances superflu d'examiner le
cas sous l'angle du respect de la forme requise pour
l'adoption d'une convention particulière entre parties ou à
la lumière du principe d'égalité de traitement entre les
destinataires (voir à ce sujet ATF 118 V 232 consid. 4b;
Hans Michael Riemer, Vorsorge-, Fürsorge- und Sparverträge
der beruflichen Vorsorge, in Innominatverträge, Festgabe
zum 60. Geburtstag von Walter R. Schluep, Zurich 1988,
p. 237).

4.- La recourante ne peut non plus opposer à l'intimé
l'accord conclu avec l'employeur au sujet de la restitution
des cotisations d'employeur pour la prévoyance profession-
nelle plus étendue. En effet, une telle clause se heurte à
la règle de l'art. 331 al. 3 CO qui est de droit impératif
et elle est, partant, illicite (ATF 107 II 435 consid. 4;
Hermann Walser, Weitergehende berufliche Vorsorge, in :
Schweizerisches Bundesverwaltungsrecht, Soziale Sicherheit,
ch. 155 ss).
C'est en conséquence à bon droit que les premiers
juges ont condamné la recourante à transférer sur le compte
de libre passage de l'intimé une prestation de sortie égale
à la totalité du montant atteint au jour du départ par le
compte individuel de l'assuré, soit également la part ver-
sée par l'employeur, conformément à l'art. 20 du règlement
de la Fondation.

5.- Il suit de là que le recours de droit administra-
tif est mal fondé.
Vu la nature du litige (supra consid. 1), la procédure
est gratuite (art. 134 OJ).
D'autre part, l'intimé, qui obtient gain de cause, a
droit à une indemnité de dépens à la charge de la recou-
rante (art. 159 al. 1 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances

p r o n o n c e :

I. Le recours est rejeté.

II. Il n'est pas perçu de frais de justice.

III. L'avance de frais versée par la recourante, d'un mon-
tant de 5000 fr., lui est restituée.

IV. La recourante versera à l'intimé une indemnité de
2500 fr. (y compris la taxe à la valeur ajoutée) à
titre de dépens pour la procédure fédérale.

V. Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au
Tribunal administratif du canton de Genève et à
l'Office fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 26 septembre 2001

Au nom du
Tribunal fédéral des assurances
Le Président de la Ière Chambre :

Le Greffier :


Synthèse
Numéro d'arrêt : B.92/00
Date de la décision : 26/09/2001
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2001-09-26;b.92.00 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award