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26/09/2001 | SUISSE | N°B.91/00

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 26 septembre 2001, B.91/00


«AZA 7»
B 91/00 Mh

Ière Chambre

MM. et Mme les juges Lustenberger, Président, Schön, Spira,
Rüedi et Widmer. Greffier : M. Frésard

Arrêt du 26 septembre 2001

dans la cause

Fondation de Prévoyance de Y.________ SA et des Sociétés
connexes, recourante, représentée par Maître Jacques-André
Schneider, avocat, rue du Rhône 100, 1211 Genève 3,

contre

E.________, intimé, représenté par Maître Maurice
Turrettini, avocat, rue de Hesse 8-10, 1211 Genève 11,

et

Tribunal administratif du canton de Genève, Genève

A.- Par contrat du 30 janvier 1985, E.________ a été
engagé par X.________, à P...

«AZA 7»
B 91/00 Mh

Ière Chambre

MM. et Mme les juges Lustenberger, Président, Schön, Spira,
Rüedi et Widmer. Greffier : M. Frésard

Arrêt du 26 septembre 2001

dans la cause

Fondation de Prévoyance de Y.________ SA et des Sociétés
connexes, recourante, représentée par Maître Jacques-André
Schneider, avocat, rue du Rhône 100, 1211 Genève 3,

contre

E.________, intimé, représenté par Maître Maurice
Turrettini, avocat, rue de Hesse 8-10, 1211 Genève 11,

et

Tribunal administratif du canton de Genève, Genève

A.- Par contrat du 30 janvier 1985, E.________ a été
engagé par X.________, à Paris, en qualité de cadre ratta-
ché au Département international.

Dès le 14 octobre 1996, il a été détaché auprès de
Y.________ SA, à Genève, pour y occuper un poste de sous-
directeur. Le 21 octobre 1996, les parties au contrat
susmentionné ont précisé dans un avenant les conditions de
ce détachement. Celui-ci était de durée indéterminée;
l'employeur pouvait y mettre fin à tout moment, tandis que
le salarié pourrait demander son rapatriement après trois
années de séjour. L'avenant prévoyait par ailleurs que le
salarié serait inscrit, pour le risque de vieillesse, à la
Caisse des Français de l'étranger. X.________ prenait à sa
charge 8,2 pour cent des 15,9 pour cent de cotisations
afférentes à ce risque. En outre, l'intéressé continuerait
à être assuré aux Caisses de retraites (françaises) aux-
quelles X.________ était affilié, soit l'ARCIL et l'APICIL.
L'ARCIL fait partie de l'Association des régimes de retrai-
tes complémentaires (ARRCO), tandis que l'APICIL est membre
de l'Association générale des institutions de retraites des
cadres (AGIRC). Enfin, l'employé continuerait à bénéficier,
également, du contrat «Prévoyance Sociale» souscrit par
X.________ pour son personnel, pour la couverture des
risques de décès et d'invalidité. Il était prévu que l'em-
ployeur verserait un montant de 34 300 francs français,
payé en France, et qui était destiné à couvrir les cotisa-
tions à la charge du salarié pour le maintien de cette
prévoyance sociale, sur la base d'un salaire annuel de
référence de 379 060 francs français (soit le salaire avant
le détachement).
L'avenant contenait par ailleurs la clause suivante à
l'intention du salarié:

«Par ailleurs, si la réglementation locale fait obligation
de cotiser à un fonds de retraite ou à tout autre organisme
de prévoyance de nature similaire et, au cas où lors de
votre départ vous pourriez prétendre à un versement quel-
conque ou à un remboursement de cotisations, seule la
partie correspondant à la participation du salarié vous
serait acquise, celle correspondant à la part employeur
devant être reversée à celui-ci».

Auparavant, le 17 octobre 1996, E.________ et
Y.________ SA avaient signé un contrat dans lequel ils
avaient arrêté les conditions de l'engagement auprès de
Y.________ SA de E.________. Le salaire annuel a été fixé à
170 000 francs suisses. Il était notamment prévu une re-
tenue de 6 pour cent au titre de la prévoyance profes-
sionnelle (deuxième pilier) «étant entendu» que la part
versée par l'employeur ne serait pas acquise au salarié.

B.- Par lettre du 27 juillet 1998, E.________ a rési-
lié les rapports de travail tant avec Y.________ SA
qu'avec X.________.
Pendant son détachement auprès de Y.________ SA ,
E.________ a été affilié, du 1er novembre 1996 au
1er octobre 1998, à la Fondation de prévoyance en faveur du
personnel de Y.________ SA et des sociétés connexes
(ci-après : la Fondation). La Fondation a régulièrement
perçu les cotisations réglementaires de l'assuré et de son
employeur.
Le 7 septembre 1998, Y.________ SA a informé
E.________ que sa prestation de sortie auprès de la
Fondation s'élevait à 16 985 fr. 10, montant qui
représentait les cotisations versées par l'assuré, plus les
intérêts. D'après le certificat de sortie établi par la
Fondation, la part versée par l'employeur s'élevait, quant
à elle, à 33 969 fr. 80. La Fondation a transféré le
montant de 16 985 fr. 10 sur un compte de libre passage au
nom de l'affilié auprès de la Banque cantonale de Genève.
Elle en a avisé l'assuré par lettre du 30 octobre 1998.

C.- Le 7 juin 1999, E.________ a ouvert action contre
la Fondation devant le Tribunal administratif du canton de
Genève en concluant au transfert par la défenderesse, en
plus du montant déjà versé, de la somme de 33 969 fr. 80,

plus intérêts à 5 pour cent l'an à partir du 1er octobre
1998, sur un compte de libre passage auprès de la Banque
cantonale de Genève.
La Fondation a conclu, principalement, au rejet de la
demande. Subsidiairement, elle a conclu à ce que le tribu-
nal lui donne acte qu'elle s'engageait à verser au deman-
deur la somme de 4666 fr. 30 au titre de prestation de
sortie complémentaire. Ce montant représentait, selon la
défenderesse, la part de l'avoir de vieillesse qui aurait
dû être financée par l'employeur en vertu de la LPP.
Statuant le 10 octobre 2000, le Tribunal administratif
a fait entièrement droit aux conclusions du demandeur.

D.- La Fondation interjette un recours de droit admi-
nistratif dans lequel elle conclut à l'annulation de ce
jugement et au rejet de la demande. Subsidiairement, elle
réitère son engagement de verser la somme complémentaire de
4666 fr. 30, avec intérêts, «au titre de la prestation de
sortie minimale LPP».
E.________ conclut, sous suite de dépens, au rejet du
recours. Quant à l'Office fédéral des assurances sociales,
il propose d'admettre la conclusion subsidiaire de la
Fondation.

Considérant en droit :

1.- Le litige concernant le montant d'une prestation
de sortie est un litige en matière de prestations d'assu-
rance, de sorte que le pouvoir d'examen du Tribunal fédéral
des assurances est déterminé par l'art. 132 OJ. Il n'est
ainsi pas limité à la violation du droit fédéral - y com-
pris par l'excès ou l'abus du pouvoir d'appréciation - mais
il s'étend également à l'opportunité de la décision atta-
quée. Le tribunal n'est alors pas lié par l'état de fait

constaté par la juridiction inférieure et il peut s'écarter
des conclusions des parties, à l'avantage ou au détriment
de celles-ci (ATF 126 V 165 consid. 1).

2.- Dans un premier moyen, la recourante soutient que
l'intimé, contrairement à ce que retiennent les premiers
juges, a présenté une demande d'exemption de l'assurance au
sens de l'art. 1er al. 2 OPP 2. L'avenant du 21 octobre
1996 (contrat de détachement) conclu avec la maison mère et
le contrat du 17 octobre 1996, conclu avec Y.________ SA,
qui portaient tous deux la signature de l'intimé, conte-
naient une telle demande, en raison de la renonciation
explicite de l'intimé à la part des cotisations versées par
l'employeur. L'intimé savait que les contrats en question
avaient été portés à la connaissance de la Fondation, qui
les avait «acceptés» par actes concluants. Selon la
recourante, les cotisations versées à la Fondation l'ont
ainsi été sans cause juridique.

a) Selon l'art. 2 al. 1 LPP, sont soumis à l'assurance
obligatoire les salariés qui ont plus de 17 ans et reçoi-
vent d'un même employeur un salaire annuel supérieur au
montant-limite fixé par l'art. 7 LPP. L'assurance obliga-
toire commence en même temps que les rapports de travail
(art. 10 al. 1 LPP, première partie de la phrase). Les
critères juridiques de l'AVS sont déterminants pour décider
de la qualité de salarié au sens de la LPP, sans toutefois
que le statut de cotisant dans l'AVS soit formellement
obligatoire (ATF 123 V 277 consid. 2a, 115 Ib 41 consid. 4
et les références).

b) Aux termes de l'art. 2 al. 2 LPP, le Conseil fédé-
ral définit les catégories de salariés qui, pour des motifs
particuliers, ne sont pas soumis à l'assurance obligatoire.
C'est ce qu'il a fait en édictant l'art. 1er OPP 2. Selon

l'alinéa 2 de cette disposition de l'ordonnance, les sala-
riés dont l'activité en Suisse n'a probablement pas un
caractère durable, et qui bénéficient de mesures de prévo-
yance suffisantes à l'étranger, seront exemptés de l'assu-
rance obligatoire à condition qu'ils en fassent la demande
à l'institution de prévoyance compétente.
Cette règle - qui s'applique uniquement à la prévo-
yance professionnelle obligatoire selon la LPP - a pour but
de coordonner les régimes de prévoyance sur le plan inter-
national (Markus Moser, Die Zweite Säule und ihre Trag-
fähigkeit, thèse Bâle 1992, p. 39). Elle vise certains
salariés au service de sociétés étrangères ou d'organisa-
tions internationales qui sont déjà affiliés à l'étranger à
une institution de prévoyance bien développée (voir à ce
sujet le commentaire par l'Office fédéral des assurances
sociales du projet de l'OPP 2, août 1983, p. 9). Il s'agit
donc principalement de travailleurs détachés en Suisse,
pour une durée relativement courte, qui conservent un lien
de subordination avec leur employeur d'origine à l'étranger
(Jacques-André Schneider, Les régimes complémentaires de
retraite en Europe : Libre circulation et participation,
1994, pp. 82 et 363 sv.; voir aussi Ernst-J. Holzapfel, La
réglementation relative au détachement de salariés dans les
conventions de sécurité sociale conclues par la Suisse, in:
Sécurité sociale 4/1997, p. 226 ss).
L'exemption de l'assurance en vertu de cette disposi-
tion réglementaire exige, selon son texte clair («wenn sie
ein entsprechendes Gesuch...» et «a condizione che ne
faccia domanda...», selon les versions allemande et ita-
lienne) la présentation d'une demande émanant du salarié;
l'institution ne peut donc en décider librement, quand bien
même les conditions de fond d'une exemption seraient
réunies (voir aussi Jürg Brühwiler, Die betriebliche Perso-
nalvorsorge in der Schweiz, Berne 1989, p. 271, ch. 20). A
cet égard, il existe d'ailleurs un parallélisme entre
l'art. 1er al. 2 OPP 2 et l'art. 1er al. 2 let. b LAVS

(Brühwiler, op. cit., p. 274, ch. 24). D'après cette dispo-
sition de la LAVS, ne sont pas assurées les personnes affi-
liées à une institution officielle étrangère d'assuran-
ce-vieillesse et survivants si l'assujettissement à la loi
constitue pour elles un cumul de charges trop lourdes :
cette exemption de l'AVS, tout comme celle qui est prévue à
l'art. 1er al. 2 OPP 2, est subordonnée à une demande de
l'assuré (ATF 120 V 402 consid. 2a).
La demande d'exemption constitue d'autre part l'exer-
cice d'un droit formateur. Elle est définitive, sous réser-
ve d'un vice de la volonté (Brühwiler, op. cit., p. 271,
ch. 20; Moser, op. cit., p. 39 sv. et note de bas de
page 114). Eu égard au but de protection sociale visé par
le principe de la soumission obligatoire des travailleurs à
la LPP, la demande d'exemption au sens de l'art. 1er al. 2
OPP 2 doit être formulée de manière explicite et non
équivoque. Cette exigence se justifie aussi par le fait
qu'il importe de savoir, dès le début des rapports de
travail, s'il existe ou non une couverture d'assurance
selon la LPP pour le cas où une éventualité assurée se
produirait (cf. ATF 98 V 185 consid. b).

c) En l'espèce, l'argumentation de la recourante, qui
voit une demande d'exemption dans la renonciation de l'in-
timé à la part des cotisations de l'employeur, n'est pas
fondée. En fait, les clauses contractuelles invoquées par
la recourante n'ont d'autre objet que de limiter les droits
de l'assuré, lors du calcul de la prestation de sortie, au
montant de ses propres cotisations. Elles ne contiennent
aucun élément qui permettrait d'en déduire que l'intimé ait
voulu purement et simplement être exempté de l'assurance.
De telles clauses violent certes l'art. 15 al. 2 LFLP,
ainsi que les art. 17 al. 1 et 20 al. 2 du règlement de la
recourante, dispositions du règlement selon lesquelles la
prestation de sortie correspond à la totalité du compte
individuel de l'assuré (avec les contributions de l'em-
ployeur). Le fait que les parties ont en l'occurrence

adopté une solution contraire à la loi et au règlement de
l'institution de prévoyance n'est pas un indice de nature à
démontrer que le salarié désirait être exempté de l'assu-
rance obligatoire selon la LPP. En tout cas, on n'est pas
en présence d'une demande explicite et non équivoque de sa
part.

3.- A titre subsidiaire, la recourante soutient que
l'intimé, pour la prévoyance plus étendue, n'était pas
affilié à la Fondation. Elle invoque l'art. 5 al. 1 de son
règlement, qui contient une disposition selon laquelle
l'affiliation suppose que la personne exerce une activité
durable en Suisse et qu'elle ne bénéficie pas de mesures de
prévoyance suffisantes à l'étranger. Or, dans le cas parti-
culier, prétend la recourante, ces conditions n'étaient pas
remplies. L'activité en Suisse avait un caractère tempo-
raire. L'intimé pouvait prétendre à une retraite annuelle
projetée de 255 082 francs français en vertu de sa cou-
verture à l'étranger. Le taux de remplacement du revenu de
retraite, par rapport à un salaire de référence de
379 060 francs français, s'élevait à 67,29 pour cent.
D'après la recourante, cette couverture doit être qualifiée
de suffisante au sens du règlement de la Fondation. Par
ailleurs, l'affiliation de l'intimé ne pouvait pas résulter
d'une convention particulière par laquelle les parties
auraient dérogé à l'ordre réglementaire. Une telle déro-
gation n'était pas possible, en l'absence d'un accord écrit
des parties soumis à l'approbation de l'autorité de sur-
veillance. Elle eût été au demeurant incompatible avec le
principe de l'égalité de traitement entre affiliés.
Finalement, la recourante prétend qu'elle se trouvait
dans une erreur essentielle quand elle a perçu des cotisa-
tions pour le compte de l'intimé, dès lors que celui-ci ne
pouvait
pas être affilié à la prévoyance professionnelle.
Elle a cru, de bonne foi, que seules les cotisations

personnelles de l'assuré donnaient lieu à des obligations
juridiques de sa part et qu'elle pouvait ainsi créer un
régime spécial en son sein, nonobstant le texte du règle-
ment. Par la suite, elle aurait constaté son erreur, après
consultation d'un juriste spécialisé.

a) Dans le domaine de la prévoyance professionnelle
plus étendue (sur cette notion, voir par exemple ATF
122 V 145 consid. 4b), l'assuré est lié à l'institution de
prévoyance par un contrat innommé (sui generis) dit de
prévoyance, dont le règlement de prévoyance constitue le
contenu préformé, savoir ses conditions générales, aux-
quelles l'assuré se soumet expressément ou par actes
concluants (p. ex. en conservant le règlement reçu, en
payant des cotisations ou en acceptant la déduction cor-
respondante sur son salaire). L'interprétation du règlement
doit dès lors se faire selon les règles générales qui sont
applicables pour interpréter les contrats (ATF 122 V 145
consid. 4b et les références).

b) La disposition réglementaire invoquée ici par la
recourante laisse une très grande liberté d'appréciation
aux parties dans l'interprétation qu'il convient de lui
donner, quand il s'agit de savoir si l'assuré bénéficie
d'une couverture suffisante à l'étranger ou si l'activité
en Suisse a un caractère durable. Ces notions ne s'appré-
cient pas tant selon des critères purement objectifs (non
définis en l'occurrence dans le règlement), mais au regard
de l'ensemble des circonstances. Il appartient, le cas
échéant, à l'institution de prévoyance de procéder à un
examen détaillé des conditions de la prévoyance profes-
sionnelle à l'étranger. Ainsi, s'il existe une couverture
d'assurance à l'étranger et que les parties, néanmoins,
concluent le contrat de prévoyance, c'est qu'elles admet-
tent, implicitement tout au moins, que les conditions d'une

affiliation sont remplies. Elles considèrent en particulier
que la couverture d'assurance à l'étranger n'est pas
suffisante, compte tenu des circonstances, et qu'elle est
susceptible d'être améliorée. Le seul fait que l'institu-
tion de prévoyance puisse, au moment où survient un cas de
libre passage ou un cas de prévoyance, avoir une appré-
ciation différente à propos des conditions réglementaires
de l'affiliation n'entraîne pas une invalidation du
contrat.
Il est ainsi incontestable que les parties ont en
l'espèce conclu un contrat de prévoyance, à tout le moins
par actes concluants (paiement de cotisations par l'emplo-
yeur et le salarié, remise de fiches individuelles sur le
montant des prestations etc.). Si la recourante entendait
se prévaloir de la disposition réglementaire en cause, il
lui incombait d'emblée d'en manifester la volonté de ma-
nière clairement reconnaissable par l'assuré. Non seulement
elle n'en a rien fait, mais elle a démontré, par actes
concluants, qu'elle considérait qu'il n'existait aucun
obstacle à l'affiliation de l'intimé.

c) C'est à tort, par ailleurs, que la recourante se
prétend victime d'une erreur essentielle.
Selon l'art. 23 CO, le contrat n'oblige pas celle des
parties qui, au moment de le conclure, était dans une
erreur essentielle. Est une erreur essentielle, notamment,
l'erreur dite de base telle que l'entend l'art. 24 al. 1
ch. 4 CO. Un contractant peut invoquer cette erreur s'il
s'est trompé sur un point déterminé qu'il considérait comme
un élément nécessaire du contrat et dont l'autre partie a
reconnu ou pouvait reconnaître qu'il avait un tel carac-
tère; il faut encore que l'erreur concerne un fait qu'il
est objectivement justifié de considérer comme un élément
essentiel. L'erreur peut aussi consister dans la mécon-
naissance d'une situation juridique (ATF 118 II 62 con-
sid. 3b, 300 consid. 2c, 114 II 139 consid. 2).

En l'occurrence, le moyen soulevé est dépourvu de
pertinence. La recourante est une institution de prévoyance
qui est gérée en Suisse par des spécialistes reconnus du
deuxième pilier. Elle a eu connaissance des conditions du
détachement de l'intimé par X.________ et des conditions de
son engagement par Y.________ SA. Dans de telles circons-
tances, on ne voit pas qu'elle ait pu se faire une repré-
sentation inexacte de la situation, notamment juridique,
concernant les conditions d'affiliation de l'intimé.

d) Enfin, on ne peut pas retenir que les parties ont
dérogé au règlement de la Fondation par une convention
particulière.
Pendant la durée du détachement en Suisse de l'intimé,
le salaire convenu était de 170 000 francs suisses par an,
ce qui correspond, en francs français (selon un cours de
change approximatif de 24 francs suisses pour 100 FF) à un
montant très largement supérieur au salaire de référence
avant le détachement. La pension de retraite qui était
garantie à l'intimé en France (environ 61 000 francs
suisses par an après conversion en monnaie suisse du
montant de la rente projetée de 255 082 francs français) se
trouvait proportionnellement réduite. Vu l'importance de la
rémunération versée en Suisse et s'agissant d'un cadre
supérieur d'un grand établissement bancaire, les parties au
contrat de prévoyance pouvaient légitimement considérer
comme justifiées des mesures complémentaires de prévoyance.
Elles étaient de surcroît fondées à qualifier de durable
l'activité en Suisse de l'intimé, attendu que le déta-
chement était prévu pour une durée indéterminée. Compte
tenu du large pouvoir d'appréciation qui est réservé aux
parties dans l'interprétation du règlement et qui résulte
de l'absence de critères objectifs pour définir le caractè-
re durable de l'activité ou la notion de prévoyance suffi-
sante (supra let. b), l'affiliation de l'intimé ne s'écar-

tait pas des conditions fixées par l'art. 5 al. 1 du règle-
ment de la recourante.
Il est dans ces circonstances superflu d'examiner le
cas sous l'angle du respect de la forme requise pour
l'adoption d'une convention particulière entre parties ou à
la lumière du principe d'égalité de traitement entre les
destinataires (voir à ce sujet ATF 118 V 232 consid. 4b;
Hans Michael Riemer, Vorsorge-, Fürsorge- und Sparverträge
der beruflichen Vorsorge, in: Innominatverträge, Festgabe
zum 60. Geburtstag von Walter R. Schluep, Zurich 1988,
p. 237).

4.- La recourante ne peut non plus opposer à l'intimé
l'accord conclu avec l'employeur au sujet de la restitution
des cotisations d'employeur pour la prévoyance profession-
nelle plus étendue. En effet, une telle clause se heurte à
la règle de l'art. 331 al. 3 CO qui est de droit impératif
et elle est, partant, illicite (ATF 107 II 435 consid. 4;
Hermann Walser, Weitergehende berufliche Vorsorge, in :
Schweizerisches Bundesverwaltungsrecht, Soziale Sicherheit,
ch. 155 ss).
C'est en conséquence à bon droit que les premiers
juges ont condamné la recourante à transférer sur le compte
de libre passage de l'intimé une prestation de sortie égale
à la totalité du montant atteint au jour du départ par le
compte individuel de l'assuré, soit également la part
versée par l'employeur, conformément à l'art. 20 du règle-
ment de la Fondation.

5.- Il suit de là que le recours de droit administra-
tif est mal fondé.
Vu la nature du litige (supra consid. 1), la procédure
est gratuite (art. 134 OJ).
D'autre part, l'intimé, qui obtient gain de cause, a
droit à une indemnité de dépens à la charge de la recouran-
te (art. 159 al. 1 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances

p r o n o n c e :

I. Le recours est rejeté.

II. Il n'est pas perçu de frais de justice.

III. L'avance de frais versée par la recourante, d'un mon-
tant de 3000 fr., lui est restituée.

IV. La recourante versera à l'intimé une indemnité de
2500 fr. (y compris la taxe à la valeur ajoutée) à
titre de dépens pour la procédure fédérale.

V. Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au
Tribunal administratif du canton de Genève et à
l'Office fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 26 septembre 2001

Au nom du
Tribunal fédéral des assurances
Le Président de la Ière Chambre :

Le Greffier :


Synthèse
Numéro d'arrêt : B.91/00
Date de la décision : 26/09/2001
Cour des assurances sociales

Analyses

Art. 2 al. 2 LPP et art. 1er al. 2 OPP 2: Exemption de l'assurance obligatoire. La renonciation contractuelle de l'assuré à la part des cotisations de l'employeur en cas de sortie de l'institution de prévoyance n'équivaut pas à une demande d'exemption de l'assurance obligatoire au sens de l'art. 1er al. 2 OPP 2. Art. 49 al. 2 LPP: Prévoyance plus étendue. Interprétation d'une disposition réglementaire de l'institution de prévoyance selon laquelle l'affiliation suppose que la personne exerce une activité durable en Suisse et qu'elle ne bénéficie pas de mesures de prévoyance suffisantes à l'étranger. Art. 331 al. 3 CO: Obligations de l'employeur en matière de prévoyance du personnel. Cette disposition est de caractère impératif.


Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2001-09-26;b.91.00 ?
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