La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

20/09/2001 | SUISSE | N°5C.2/2001

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 20 septembre 2001, 5C.2/2001


«/2»
5C.2/2001

IIe C O U R C I V I L E
******************************

20 septembre 2001

Composition de la Cour: MM. les Juges Reeb, président,
Bianchi et Meyer. Greffière: Mme Jordan.

__________

Dans la cause civile pendante
entre

X.________, demandeur et recourant, représenté par Me André
Malek-Asghar, avocat à Genève,

et

Dame X.________, née V.________, défenderesse et intimée, re-
présentée par Me Jacques Borowsky, avocat à Genève;

(divorce; d

roit transitoire)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- X.________, né le 27 novembre 1946...

«/2»
5C.2/2001

IIe C O U R C I V I L E
******************************

20 septembre 2001

Composition de la Cour: MM. les Juges Reeb, président,
Bianchi et Meyer. Greffière: Mme Jordan.

__________

Dans la cause civile pendante
entre

X.________, demandeur et recourant, représenté par Me André
Malek-Asghar, avocat à Genève,

et

Dame X.________, née V.________, défenderesse et intimée, re-
présentée par Me Jacques Borowsky, avocat à Genève;

(divorce; droit transitoire)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- X.________, né le 27 novembre 1946, et dame
X.________, née le 6 août 1956, se sont mariés à Genève le
11
janvier 1983. Deux filles sont issues de cette union: Alexan-
dra Catherine et Tatiana Mélanie, nées respectivement les 26
septembre 1983 et 19 juin 1987.

Les époux se sont séparés dans le courant du mois
d'octobre 1998. Ils n'ont pas repris la vie commune depuis
lors.

Par assignation déposée en conciliation le 15 juil-
let 1998, le mari a ouvert une action en divorce. Lors de
l'audience de comparution personnelle du 16 novembre
suivant,
son épouse s'est déclarée d'accord avec le principe du divor-
ce. Les conjoints ne se sont en revanche pas entendus sur le
sort des enfants et le règlement des effets accessoires.

Dans sa réponse du 11 décembre 1998, la défenderesse
a derechef consenti au prononcé du divorce.

Assistées de leur avocat, les parties ont à nouveau
été entendues en audience de comparution personnelle le 1er
décembre 1999, en prévision des changements résultant de
l'entrée en vigueur du nouveau droit du divorce; l'interroga-
toire a porté sur le règlement des rapports patrimoniaux (fi-
nancement des immeubles en copropriété, fonds de prévoyance,
paiement des impôts).

Le 10 février 2000, le mari, représenté par son man-
dataire, a conclu au prononcé du divorce "aux torts de son
épouse"; il a en outre notamment demandé l'attribution de la

garde et de l'autorité parentale sur ses filles, un droit de
visite étant réservé à la mère, la jouissance exclusive du
domicile conjugal, l'allocation en faveur de chaque enfant
d'une contribution d'entretien de 500 fr. par mois jusqu'à
l'âge de 25 ans au plus en cas d'études sérieuses et réguliè-
res, ainsi que le transfert de la part de copropriété de sa
femme sur la villa de Bellevue. L'épouse, également par l'in-
termédiaire de son conseil, a requis le prononcé du divorce,
l'attribution de la garde et de l'autorité parentale sous ré-
serve du droit de visite du père, le versement en faveur de
chacune de ses filles d'une contribution d'entretien de 800
fr. jusqu'à la majorité, voire au-delà en cas d'études supé-
rieures. Elle a en outre donné acte de son engagement de
transférer à son mari sa part de copropriété sur la villa,
moyennant le paiement d'une somme de 125'000 fr.

B.- Le 8 mars 2000, le Tribunal de première instance
du canton de Genève a notamment dissous par le divorce le ma-
riage des époux X.________, attribué la garde et l'autorité
parentale sur les enfants au père et réservé un large droit
de visite à la mère. Il a en outre condamné la défenderesse
à
contribuer à l'entretien de chacune de ses filles à concur-
rence de 300 fr. jusqu'à l'âge de 15 ans et de 400 fr. jus-
qu'à la majorité, voire jusqu'à l'âge de 25 ans en cas
d'études sérieuses et régulières. Il a enfin attribué au de-
mandeur la propriété exclusive de la parcelle sise sur la
Commune de Bellevue, avec toutes ses constructions et dépen-
dances, ainsi que celle de deux autres parcelles en copro-
priété à raison d'un sixième.

S'agissant du prononcé du divorce, il a considéré
que les conditions de l'art. 112 CC, entré en vigueur le 1er
janvier 2000, étaient réalisées, les parties ne s'accordant
que sur le principe du divorce. Il n'a cependant pas jugé

utile de fixer un délai de deux mois pour que les époux con-
firment leur intention de divorcer, dès lors que ceux-ci
s'étaient accordés sur ce point le 16 novembre 1998, date de
leur comparution personnelle, et avaient confirmé leur volon-
té de mettre un terme à leur mariage tout au long de la pro-
cédure.

Statuant le 10 novembre 2000 sur l'appel de dame
X.________, laquelle concluait à l'annulation du jugement de
première instance et au prononcé d'une séparation de corps,
la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève
a
rejeté la demande en divorce de X.________ et celle en sépa-
ration de corps de sa femme, compensé les dépens de première
instance et d'appel et débouté les parties de toutes autres
conclusions.

C.- X.________ exerce simultanément au Tribunal fé-
déral un recours de droit public et un recours en réforme.
Dans ce dernier, il conclut à la réforme de l'arrêt cantonal
dans le sens d'une confirmation du jugement de première ins-
tance.

L'intimée propose le rejet du recours dans la mesure
de sa recevabilité.

C o n s i d é r a n t e n d r o i t :

1.- Selon la règle générale de l'art. 57 al. 5 OJ,
le recours de droit public doit être examiné en premier
lieu.
Il se justifie néanmoins de déroger à ce principe lorsque le
recours en réforme paraît devoir être admis indépendamment
des griefs invoqués dans le recours de droit public, qui de-
vient alors sans objet (J.-F. Poudret/S. Sandoz-Monod, Com-
mentaire de la loi fédérale d'organisation judiciaire, n. 5
ad art. 57). Tel est le cas en l'espèce.

2.- Le présent recours, qui concerne le refus du di-
vorce sur requête commune, subsidiairement sur requête unila-
térale, est recevable du chef des art. 44 let. bbis et 44 OJ
(cf. Poudret/Sandoz-Monod, op. cit., n. 1.3.2 ad art. 44).
Interjeté en temps utile contre une décision finale rendue
par le tribunal suprême du canton de Genève, il l'est aussi
au regard des art. 48 al. 1 et 54 al. 1 OJ.

3.- Saisi d'un recours en réforme, le Tribunal fédé-
ral fonde son arrêt sur les faits tels qu'ils ont été consta-
tés par la dernière autorité cantonale, à moins que des dis-
positions fédérales en matière de preuve n'aient été violées
ou que des constatations ne reposent sur une inadvertance ma-
nifeste (art. 63 al. 2 OJ). Il ne peut pas être présenté de
griefs contre les constatations de fait - ou l'appréciation
des preuves à laquelle s'est livrée l'autorité cantonale
(ATF
126 III 59 consid. 2a p. 65; 125 III 368 consid. 3 p. 372) -
et les faits nouveaux sont irrecevables (art. 55 al. 1 let.
c
OJ). Ces principes sont également applicables à la réponse
(art. 59 al. 3 OJ).

La cour de céans ne peut dès lors pas tenir compte
des faits qui ne résultent pas de l'arrêt entrepris et aux-
quels le recourant se réfère sans démontrer la réalisation
de
l'une ou l'autre des exceptions susmentionnées. Tel est no-
tamment le cas lorsque l'intéressé entend compléter l'état
de
fait s'agissant de la date de la relation adultère de sa fem-
me. Il en va de même de sa demande tendant à faire constater
le caractère calomnieux de l'acte d'appel de celle-ci; tout
au plus peut-on retenir à cet égard que l'épouse a plaidé
hors dossier et à la limite de la bonne foi, et que c'est
dans le seul but de contribuer à un certain apaisement que
l'autorité cantonale a renoncé à examiner si un tel comporte-
ment procédural justifiait le prononcé d'une amende.

Pour les mêmes motifs, la réponse est irrecevable,
autant que, dans la partie intitulée "en fait", l'intimée se
borne à critiquer les constatations de l'autorité cantonale,
sans se prévaloir de l'une des hypothèses précitées.

4.- Annulant le jugement de première instance, qui
prononçait la dissolution du mariage selon l'art. 112 CC, la
Cour de justice a rejeté - les conditions des art. 114 et
115
CC n'étant pas remplies - la demande en divorce du mari
ainsi
que celle en séparation de corps formée par l'épouse en ap-
pel.

Plus particulièrement, elle a considéré que les exi-
gences de procédure des art. 111 et 112 CC étaient applica-
bles par analogie à la présente cause en vertu de l'art. 116
CC. Les parties auraient ainsi dû être entendues personnelle-
ment, séparément et ensemble, puis confirmer par écrit leur
volonté de divorcer au terme du délai de deux mois. Or, en
l'espèce, le Tribunal de première instance s'était
uniquement
référé aux conclusions prises devant lui le 10 février 2000.
Si, par ailleurs, les époux avaient effectivement prétendu,
dans leurs conclusions du 28 octobre 1999, au prononcé du di-
vorce, comme ils l'avaient déjà fait le 17 décembre 1998,
ces
actes étaient intervenus avant l'entrée en vigueur du
nouveau
droit, le 1er janvier 2000, et ne pouvaient dès lors être
considérés comme suppléant aux règles formelles posées par
celui-ci. "Ainsi, en l'absence d'une audition personnelle
des
parties postérieure au 10 février 2000 et d'une confirmation
subséquente de leur accord donnée par écrit selon la procédu-
re prévue par les art. 111, 112 et 116 CC, il n'était pas
possible de faire application de cette dernière
disposition".
L'autorité cantonale s'est dès lors attachée à examiner si
l'un des conjoints pouvait se prévaloir d'une cause de divor-
ce ou de séparation de corps au sens des art. 114 et 115 CC,

ce qu'elle a toutefois nié au vu des faits retenus. S'agis-
sant plus précisément du chef de conclusions en séparation
de
corps, elle a jugé qu'il était recevable en vertu de l'art.
138 al. 2 CC, d'autant plus que la procédure requise par les
art. 111, 112 et 116 CC n'avait pas été suivie en première
instance et que les conditions de l'art. 114 CC n'étaient
pas
réalisées.

a) Le recourant prétend en bref que les "règles de
forme" prévues aux art. 111 et 112 al. 2 CC ne peuvent être
appliquées sans restriction à une cause instruite sous l'an-
cien droit. Il soutient que la jurisprudence publiée aux ATF
126 III 404 s'est prononcée sur la possibilité d'interpréter
de façon souple la règle de fond de l'art. 115 CC dans le ca-
dre de situations intertemporelles, sans aborder le sort des
règles relatives à la vérification du consentement des
époux.
A son avis, ces dernières ne sauraient être soumises au même
régime. L'admettre aurait pour effet que toutes les procédu-
res instruites sous l'ancien droit seraient affectées d'un
vice, au demeurant irréparable: après une annulation, il ne
serait objectivement plus possible d'obtenir le consentement
de la partie pour laquelle le jugement annulé aurait été dé-
favorable. Le recourant se réfère aussi - sans exposer plus
avant sa critique - à la problématique que poserait l'appli-
cation de l'art. 111 CC à des jugements rendus sous l'ancien
droit qui feraient l'objet d'un appel. En conclusion, il af-
firme que les premiers juges pouvaient se contenter des con-
clusions concordantes et constantes des parties quant à leur
volonté de divorcer. Il soutient par ailleurs que, contraire-
ment à ce qu'ont retenu les juges cantonaux, la continuation
du mariage serait insupportable (art. 115 CC) et le chef de
conclusions en séparation de corps irrecevable dans le cadre
d'un divorce sur requête commune (art. 111 s., 116 s. et 138
al. 2 CC).

b) Tant le Tribunal de première instance que la Cour
de justice ont appliqué - à juste titre - le nouveau droit
du
divorce. En vertu de l'art. 7b al. 1 Tit. fin. CC, les
procès
en divorce pendants qui doivent être jugés par une instance
cantonale sont en effet soumis au nouveau droit dès l'entrée
en vigueur de la loi fédérale du 26 juin 1998. A partir du
1er janvier 2000, les juridictions cantonales qui sont sai-
sies d'un procès en divorce ou d'un recours portant sur le
principe du divorce, doivent ainsi statuer en application
des
art. 111 à 116 CC (Thomas Sutter/Dieter Freiburghaus, Kommen-
tar zum neuen Scheidungsrecht, 1999, nos 3, 5 et 7 ad art.
7b
Tit. fin. CC; cf. ATF 126 III 404 consid. 3a p. 405). Cela
suppose une requalification des faits pertinents au regard
des nouveaux cas de divorce prévus par la loi (Bruno Suter,
Übergangsrecht, in: Das neue Scheidungsrecht, 1999, p. 162
et
167; Renate Pfister-Liechti, Le nouveau droit du divorce:
quelle procédure?, in: SJ 2000 II p. 260; cf. aussi: Sutter/
Freiburghaus, op. cit., nos 6 s. ad art. 7b Tit. fin. CC;
Marcel Leuenberger, in: Ingeborg Schwenzer [éd.], Praxiskom-
mentar Scheidungsrecht, 2000, n. 2 ad art. 7a/b Tit. fin. CC;
Jean-François Perrin, Les causes du divorce selon le nouveau
droit, in: De l'ancien au nouveau droit du divorce, 1999, p.
32).

c) En l'espèce, l'action du mari était fondée sur
les art. 137 et 142 aCC. Lors de l'audience de comparution
personnelle du 16 novembre 1998, ainsi que dans sa réponse,
l'épouse s'est déclarée d'accord avec le principe du
divorce;
les effets accessoires sont en revanche restés litigieux.
Dans leurs conclusions après enquêtes et dans celles du 10
février 2000, les conjoints ont derechef confirmé leur posi-
tion quant au prononcé du divorce. Dans cette dernière écri-
ture, l'épouse a plus précisément indiqué ne pas s'opposer
au
divorce et requis que celui-ci soit prononcé en application

de l'art. 112 nCC. Dans l'intervalle, à savoir le 1er décem-
bre 1999, le couple avait à nouveau été entendu; cette séan-
ce, qui a porté sur la question des rapports patrimoniaux,
avait été agendée pour tenir compte des implications de l'en-
trée en vigueur du nouveau droit, le prononcé du divorce de-
vant intervenir après le 1er janvier 2000.

Il s'agit donc d'un cas où les époux ont pris des
conclusions concordantes quant au principe du divorce et di-
vergentes quant aux effets accessoires, la femme ayant au de-
meurant expressément accepté la dissolution du mariage.
Pour
certains auteurs, une telle configuration appelle l'applica-
tion directe des art. 111 et 112 CC (Roland Fankhauser, in:
Ingeborg Schwenzer [éd.], Praxiskommentar Scheidungsrecht,
2000, n. 46 ad art. 111 CC, qui semble toutefois aussi admet-
tre une application par analogie de ces dispositions [op.
cit., n°s 32 s. ad art. 116 CC]; Suter, op. cit., p. 161 s.,
spéc. 167 s., qui paraît n'envisager le passage par l'art.
116 CC que dans l'hypothèse d'une demande en divorce et
d'une
demande reconventionnelle dans le même sens). D'autres sont
d'avis que les dispositions précitées ne s'appliquent qu'in-
directement par le biais de l'art. 116 CC (Sutter/Freiburg-
haus, op. cit., nos 8 et 11 ad art. 7b Tit. fin. CC; Thomas
Geiser, Übersicht zum Übergangsrecht des neuen Scheidungs-
rechts, in: Vom alten zum neuen Scheidungsrecht, 1999, p.
254, n. 6.20 et la note 35 renvoyant à l'article de Ruth
Reusser, Die Scheidungsgründe und die Ehetrennung, dans le
même ouvrage, p. 44, n. 1.107; Philippe Meier, Nouveau droit
du divorce: questions de droit transitoire, in: JdT 2000 I
p.
87; Regula Rhiner, Die Scheidungsvoraussetzungen nach revi-
diertem Schweizerischem Recht [Art. 111-116 ZGB], thèse Zu-
rich 2001, p. 205 et 234, qui, se référant à Fankhauser, op.
cit., n. 32 ad art. 116 CC, précise en outre que rien ne
s'oppose à une application de l'art. 116 CC lorsque le con-

sentement est intervenu sous l'empire de l'ancienne loi; cf.
aussi Pfister-Liechti, op. cit., p. 259, qui cite les deux
points de vue sans prendre position; cf. également: FamPra
2000 p. 535).

Cette dernière opinion doit être suivie. Comme il a
déjà été dit (cf. supra, let. b), l'application du nouveau
droit aux procédures pendantes implique que le juge requali-
fie les anciennes causes de divorce au regard des conditions
posées par le nouveau droit. Or, dans le cas particulier, on
ne saurait parler d'une véritable requête commune avec
accord
partiel au sens de l'art. 112 CC, mais plutôt d'une demande
unilatérale non contestée quant au résultat demandé, à
savoir
le prononcé du divorce (cf. Daniel Steck, Scheidungsklagen,
in: Das neue Scheidungsrecht, 1999, p. 41; Perrin, op. cit.,
p. 31, pour lequel il y a un accord matériel que cache le
conflit "formel"; cf. aussi Ruth Reusser, Das neue Schei-
dungsrecht in der Zielgerade [cité ci-après: Scheidungs-
recht], in: RDS 118/1999 I p. 97, ch. 7 in fine). Matérielle-
ment, il existe un accord sur le principe même du divorce,
situation que l'on peut qualifier d'analogue à celle que
vise
l'art. 116 CC, selon lequel les dispositions relatives au di-
vorce sur requête commune sont applicables par analogie no-
tamment lorsqu'un époux demande le divorce après suspension
de la vie commune ou pour rupture du lien conjugal et que
l'autre consent expressément au divorce (FF 1996 I 1 ss,
spéc. 95, ch. 231.33).

5.- a) Selon le message du Conseil fédéral, le ren-
voi de l'art. 116 CC concerne en particulier les prescrip-
tions de procédure des art. 111 al. 1 et 2 et 112 al. 2 CC,
à
savoir l'audition commune et séparée des époux, le délai de
réflexion de deux mois et l'obligation de confirmer par
écrit
la volonté de divorcer (cf. FF 1996 I 1 ss, p. 95, ch.
231.33,

qui se réfère aux "deux auditions de l'art. 111 [la deuxième
audition a par la suite été remplacée par la confirmation
écrite] et au délai de réflexion"; pour la doctrine:
Fankhauser, op. cit., nos 20 in fine et 21 ad art. 116 CC;
Reusser, op. cit., p. 41 s., nos 1.98 s.; Sutter/Freiburg-
haus, op. cit., nos 6 et 15 ss ad art. 116 CC; Perrin, op.
cit., p. 31).

La volonté du législateur était principalement de
prévenir que les parties n'éludent, par le biais d'une procé-
dure contradictoire simulée, les règles du divorce sur requê-
te commune et obtiennent ainsi plus rapidement le divorce
(FF
1996 I 1 ss, p. 95, ch. 231.33; Sutter/Freiburghaus, op.
cit., n. 9 ad art. 116 CC; Reusser, Scheidungsrecht, p. 97,
ch. 7; Rhiner, op. cit., p. 327 et les références citées aux
notes 1322 et 1323). Conformément à l'esprit du nouveau
droit
qui est d'"objectiver", dans la mesure du possible, le pro-
noncé du divorce, l'art. 116 CC tend toutefois aussi à
éviter
que les causes de la désunion soient examinées alors même
que
les époux s'entendent sur le principe du divorce (cf. notam-
ment: Sutter/Freiburghaus, op. cit., n. 5 ad art. 116 CC).
Si
l'application par analogie n'autorise pas que l'on renonce
aux règles imposées par les buts de l'art. 116 CC, elle per-
met en revanche que celles-ci soient adaptées à la nature
particulière de la situation envisagée (cf. Rhiner, op.
cit.,
p. 347 et les auteurs cités à la note 1403). Ce principe
vaut
d'autant plus dans le cadre de situations intertemporelles,
où le double objectif de l'art. 116 CC ne peut pas toujours
être atteint. La présente affaire le démontre à l'envi: l'ac-
tion a été introduite en juillet 1998, son sort n'est tou-
jours pas réglé trois ans plus tard et le consentement donné
par l'épouse n'a pas dispensé le tribunal de première instan-
ce d'instruire sur les causes du divorce, ce qui était con-
forme à l'art. 158 ch. 1 et 3 aCC (ATF 52 II 411 consid. 2

p. 412/413). L'on ne saurait dès lors exiger un strict res-
pect des prescriptions de forme prévues aux art. 111 al. 1
et
2 et 112 al. 2 CC, ce d'autant plus que l'on se trouve déjà
dans le cadre d'une application analogique de l'art. 116 CC
(cf. supra, consid. 4). Il importe en définitive que le juge
soit convaincu du sérieux de la décision des conjoints ainsi
que de leur libre arbitre (cf. arrêt 5C.129/2001).

b) En l'espèce, le mari a ouvert action en divorce
par citation en conciliation du 15 juillet 1998. Lors de
l'audience de comparution personnelle du 16 novembre 1998,
soit quatre mois plus tard, son épouse s'est expressément dé-
clarée d'accord avec le principe du divorce, le sort des en-
fants et les autres effets accessoires restant litigieux.
Elle a confirmé cette position dans sa réponse du 11
décembre
suivant. Dans son mémoire après enquête du 23 octobre 1999,
elle a derechef persisté dans ses précédentes conclusions.
Lors de la séance du 1er décembre 1999, agendée en prévision
des changements résultant de l'entrée en vigueur du nouveau
droit, elle s'est en outre contentée de répondre aux ques-
tions relatives aux rapports patrimoniaux du couple. A cette
occasion, et alors même que dans sa convocation le juge
avait
informé les parties que le jugement serait soumis aux nouvel-
les dispositions sur le divorce, elle n'a pas remis en cause
le caractère sérieux et libre de sa volonté de divorcer. Le
10 février 2000, soit plus de deux mois après la dernière
comparution personnelle, elle a par ailleurs, à l'instar de
son mari, déposé par l'intermédiaire de son conseil des con-
clusions motivées aux termes desquelles elle a de nouveau dé-
claré ne pas s'opposer à l'action en divorce et a expressé-
ment demandé que celui-ci soit prononcé selon l'art. 112 CC.
Enfin, elle a renoncé à plaider lors de l'audience qui s'est
tenue le même jour. Ainsi pendant près de deux ans,
l'intimée
n'est jamais revenue sur son consentement au divorce qu'elle

a au contraire toujours confirmé. A ce comportement procédu-
ral, il faut ajouter que les conjoints vivent séparés depuis
le mois d'octobre 1998 et qu'ils n'ont jamais repris ni même
envisagé de reprendre la vie commune depuis lors. L'épouse
entretient d'ailleurs une liaison adultère depuis la même
époque, à savoir quasiment depuis le début de la procédure
de
divorce.

L'ensemble de ces circonstances, notamment l'attitu-
de déterminée des parties pendant toute la durée de la procé-
dure, était propre à fonder la conviction que la volonté de
divorcer des époux était libre et sérieuse et, partant, auto-
risait le premier juge à prononcer la dissolution du
mariage.
Par une application trop rigoureuse des art. 111 et 112 CC,
qui ne se justifiait pas en l'état et au vu du caractère in-
tertemporel de la cause, la cour cantonale a ainsi violé le
droit fédéral en annulant le jugement de première instance.
Au demeurant, il n'est pas inutile de relever que cette au-
torité a mis en cause le comportement procédural de l'épouse
qui a tenté d'asseoir son appel en plaidant hors dossier et
à
la limite de la bonne foi.

c) Dès lors que l'on peut déduire des particularités
du cas d'espèce que c'est après mûre réflexion et de son
plein gré que l'épouse a consenti au divorce, son action en
séparation de corps formulée dans le cadre de l'appel appa-
raît irrecevable (cf. Sutter/Freiburghaus, op. cit., n. 15
ad
art. 116 CC).

Vu ce qui précède, il n'y a pas lieu d'examiner le
grief du recourant pris de la violation de l'art. 115 CC.

6.- Cela étant, le recours en réforme doit être ad-
mis dans la mesure de sa recevabilité. L'arrêt entrepris est
annulé et la cause renvoyée à l'autorité cantonale pour

qu'elle prononce le divorce et statue sur les effets acces-
soires demeurés litigieux en appel. L'intimée, qui succombe,
supportera les frais et dépens de la procédure (art. 156 al.
1 et 159 al. 1 et 2 OJ).

Par ces motifs,

l e T r i b u n a l f é d é r a l :

1. Admet le recours dans la mesure où il est receva-
ble, annule l'arrêt entrepris et renvoie la cause à l'autori-
té cantonale pour nouvelle décision dans le sens des considé-
rants.

2. Met à la charge de l'intimée:
a) un émolument judiciaire de 2'000 fr.;
b) une indemnité de 1'500 fr. à payer au recou-
rant à titre de dépens.

3. Communique le présent arrêt en copie aux manda-
taires des parties et à la Chambre civile de la Cour de jus-
tice du canton de Genève.

__________

Lausanne, le 20 septembre 2001
JOR/frs
Au nom de la IIe Cour civile
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE :
Le Président, La Greffière,


Synthèse
Numéro d'arrêt : 5C.2/2001
Date de la décision : 20/09/2001
2e cour civile

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2001-09-20;5c.2.2001 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award