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19/09/2001 | SUISSE | N°I.701/00

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 19 septembre 2001, I.701/00


«AZA 7»
I 701/00 Mh

IIIe Chambre

MM. et Mme les juges Spira, Widmer et Ursprung.
Greffier : M. Wagner

Arrêt du 19 septembre 2001

dans la cause

Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud,
avenue Général-Guisan 8, 1800 Vevey, recourant,

contre

A.________, intimée, représentée par Maître Jean-Noël
Jaton, avocat, avenue Général-Guisan 64, 1002 Lausanne,

et

Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne

A.- a) A.________ a travaillé en qua

lité d'employée
d'hôpital à partir du 1er mai 1982. Exerçant l'activité
d'aide-soignante à l'Hôpital psycho-gériatrique X._______...

«AZA 7»
I 701/00 Mh

IIIe Chambre

MM. et Mme les juges Spira, Widmer et Ursprung.
Greffier : M. Wagner

Arrêt du 19 septembre 2001

dans la cause

Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud,
avenue Général-Guisan 8, 1800 Vevey, recourant,

contre

A.________, intimée, représentée par Maître Jean-Noël
Jaton, avocat, avenue Général-Guisan 64, 1002 Lausanne,

et

Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne

A.- a) A.________ a travaillé en qualité d'employée
d'hôpital à partir du 1er mai 1982. Exerçant l'activité
d'aide-soignante à l'Hôpital psycho-gériatrique X.________,
elle fut victime le 4 décembre 1985 d'un faux mouvement en
voulant retenir une malade qui perdait l'équilibre. Il en
est résulté des douleurs lombaires qui n'ont jamais cessé.
Lors d'essais de reprise du travail à 50 % et à 100 %, elle
a dû interrompre plusieurs fois son activité.

Le 3 mai 1987, A.________ a présenté une demande de
prestations de l'assurance-invalidité. Selon un rapport du
29 juin 1987 du docteur B.________, spécialiste FMH en
médecine générale et médecin traitant de l'assurée, elle
était atteinte d'une légère bascule du bassin sur la droite
et de contractures musculaires du carré des lombes et des
fessiers gauches entretenant un vice postural pelvi-crural
gauche. Dans un prononcé présidentiel du 20 janvier 1988,
la Commission de l'assurance-invalidité du canton de Vaud a
conclu à une invalidité de 50 % dès le 11 décembre 1987.
Par décision du 24 mai 1988, la Caisse cantonale vaudoise
de compensation a alloué à A.________ une demi-rente d'in-
validité à partir du 1er décembre 1987, assortie d'une
demi-rente pour enfant.
En janvier 1988, le docteur C.________, médecin, a
demandé aux médecins de l'Hôpital psychiatrique Y.________
de procéder à un examen de la situation de A.________, qui
a suivi désormais un traitement à la Policlinique
Z.________. Dans un rapport du 7 novembre 1988, le docteur
D.________, chef de clinique adjoint, a posé le diagnostic
de névrose d'assurance sur la base d'un syndrome algique
paralombaire gauche, sans systématisation, avec surcharge
psychogène et résiduelle deux ans après un syndrome
vertébral lombaire aigu, traumatique, sans atteinte
radiculaire, chez une personnalité globalement normale
présentant des phénomènes de conversion hystériformes.
Procédant à la révision du droit de l'assurée à une
demi-rente d'invalidité, la commission de l'assurance-inva-
lidité a, dans un prononcé présidentiel du 11 janvier 1989,
conclu à une invalidité de 100 % dès le 1er février 1988.
Par décision du 13 février 1989, la caisse a alloué à
A.________ une rente entière d'invalidité à partir du
1er février 1988, assortie d'une rente pour enfant.

Après trois révisions, la commission de l'assurance-
invalidité dans un prononcé présidentiel du 21 juin 1989,
la caisse dans un prononcé du 13 août 1992 et l'Office de
l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud dans un pro-
noncé du 22 décembre 1995 ont constaté que l'assurée conti-
nuait d'être invalide à 100 % et que son droit à une rente
entière demeurait donc inchangé.

b) Au cours de 1997, l'office AI a de nouveau procédé
à la révision du droit de A.________ à une rente entière
d'invalidité. Il a confié une expertise au docteur
E.________, spécialiste FMH en médecine physique et
réhabilitation (maladies rhumatismales). Ce praticien a
examiné l'assurée le 24 avril 1997. Il a demandé des
radiographies de la colonne lombaire face-profil et du
bassin face. Selon un rapport du 11 juin 1997, que l'expert
a corrigé dans une écriture annexe, la patiente présentait
des lombosciatalgies gauches chroniques sans substrat
clinique ni radiologique. Sur le plan purement rhumato-
logique, sa capacité de travail était entière dans son
ancienne activité d'aide-soignante. En ce qui concerne son
état psychique, le docteur E.________ était d'avis que le
diagnostic de névrose de rente posé en 1988 était à revoir.
Le 20 novembre 1997, l'office AI a informé A.________
que son droit à une rente entière d'invalidité n'était plus
justifié.
Selon une communication du docteur B.________ du
3 décembre 1997, sa patiente était dans l'impossibilité
d'effectuer les travaux ménagers et elle l'appelait régu-
lièrement à domicile en raison de blocages douloureux
lombaires avec céphalées, parfois de douleurs abdominales.
On était confronté à cette nouvelle entité de syndrome
somatoforme douloureux, qui l'empêchait de travailler ou
d'avoir une activité personnelle adéquate.

L'office AI a demandé au docteur B.________ s'il se
ralliait aux constatations de l'expert E.________. Dans sa
réponse, le médecin traitant de l'assurée a déclaré qu'il
partageait l'avis rhumatologique de son confrère, mais que
l'on était en présence d'un état douloureux chronique et
invalidant, très difficile à soigner, d'autant que l'inca-
pacité de travail se prolongeait.
Dans un prononcé du 10 novembre 1998, l'office AI a
conclu à une invalidité nulle. Par décision datée du même
jour, il a supprimé le droit de A.________ à une rente
d'invalidité, avec effet le 1er janvier 1999.

B.- A.________ a recouru contre cette décision devant
le Tribunal des assurances du canton de Vaud, en concluant,
sous suite de dépens, à la réforme de celle-ci en ce sens
qu'elle continuait d'avoir droit à une rente entière d'in-
validité. Requérant la mise en oeuvre d'une expertise, elle
produisait un rapport du docteur F.________, spécialiste
FMH en rhumatologie et médecin-chef de l'Hôpital de zone
G.________, du 3 novembre 1998, dans lequel ce praticien
retenait le diagnostic de troubles somatoformes douloureux
avec hémifibromyalgia du côté gauche, sans substrat orga-
nique typique. Selon lui, on pouvait exiger d'elle qu'elle
travaille au moins à 50 % dans une activité préservée. De
son côté, le docteur B.________, dans une attestation du
24 novembre 1998, certifiait que sa patiente était inca-
pable de travailler, même dans une activité adaptée.
La juridiction cantonale a confié une expertise au
docteur H.________, spécialiste FMH en psychiatrie-psycho-
thérapie, en l'invitant à répondre à un questionnaire. Dans
un rapport du 5 avril 2000, l'expert a répondu aux ques-
tions du tribunal et à celles de l'office AI. Il indiquait
que A.________ ne présentait pas de troubles de la lignée
psychotique, mais qu'elle était atteinte d'un trouble
névrotique, de type syndrome douloureux somatoforme

persistant incomplet. Ce syndrome ne justifiait pas une
incapacité complète de travail. Selon lui, le taux de l'in-
capacité de travail de l'assurée était de 50 % depuis sep-
tembre 1995.
Par jugement du 9 août 2000, le tribunal des assuran-
ces a admis partiellement le recours et réformé la décision
attaquée en ce sens que la rente entière d'invalidité était
remplacée par une demi-rente dès le 1er janvier 1999.

C.- L'Office de l'assurance-invalidité pour le canton
de Vaud interjette recours de droit administratif contre ce
jugement, en concluant à l'annulation de celui-ci. Il pro-
duit une lettre du 29 septembre 1996 émanant d'une certaine
I.________, qui invite les organes de l'assurance-invalidi-
té à surveiller A.________, qu'elle accuse de profiter de
l'assurance-invalidité alors qu'elle serait à même de
nettoyer plusieurs fois par semaine les escaliers de
l'immeuble dont la conciergerie est à la charge de son
mari.
A.________ conclut, sous suite de dépens, au rejet du
recours. L'Office fédéral des assurances sociales (OFAS) ne
s'est pas déterminé.

Considérant en droit :

1.- a) Les premiers juges ont considéré que les condi-
tions prévues à l'art. 41 LAI faisaient défaut, dès lors
que la situation n'avait pas changé par rapport à la déci-
sion de rente initiale. Ils ont remplacé la rente entière
par une demi-rente, pour le motif substitué que la décision
initiale de rente entière était sans nul doute erronée.

b) Le recourant soutient que les conditions prévues à
l'art. 41 LAI sont remplies et que, bien que l'expert
HZ.________ ait conclu à une incapacité de travail de 50 %
sur le plan psychique, on peut raisonnablement attendre de

l'intimée, qui n'est pas atteinte d'une pathologie
psychiatrique grave, qu'elle surmonte ses troubles et fasse
l'effort nécessaire pour exercer à plein temps une activité
adaptée à son handicap.

2.- En vertu de l'art. 41 LAI, les rentes en cours
doivent être, pour l'avenir, augmentées, réduites ou sup-
primées si le degré d'invalidité se modifie de manière à
influencer le droit à ces prestations. Tout changement im-
portant des circonstances propre à influencer le degré
d'invalidité et donc le droit à la rente, peut motiver une
révision. Pour juger si un tel changement s'est produit, il
faut comparer les faits tels qu'ils se présentaient au
moment de la décision de rente initiale avec les circons-
tances régnant à l'époque de la décision litigieuse.
Si les conditions prévues à l'art. 41 LAI font défaut,
la décision de rente ne peut être modifiée que d'après les
règles applicables à la reconsidération de décisions admi-
nistratives passées en force. Conformément à ces règles,
l'administration peut en tout temps revenir d'office sur
une décision formellement passée en force de chose jugée et
sur laquelle une autorité judiciaire ne s'est pas prononcée
sous l'angle matériel, à condition qu'elle soit sans nul
doute erronée et que sa rectification revête une importance
notable. Le juge peut, le cas échéant, confirmer une déci-
sion de révision rendue à tort pour le motif substitué que
la décision de rente initiale était sans nul doute erronée
et que sa rectification revêt une importance notable (ATF
125 V 369 consid. 2 et les références).

3.- Il faut commencer par examiner si les conditions
prévues à l'art. 41 LAI sont remplies en l'occurrence.

a) Dès le 1er décembre 1987, l'intimée avait perçu une
demi-rente d'invalidité en raison de ses troubles musculai-
res. Le docteur J.________, neurologue FMH et professeur

associé à la faculté de médecine de S.________, qui l'avait
examinée le 9 juin 1987, avait retenu le diagnostic de
polyinsertionite lombo-fessière, résultant vraisemblable-
ment d'une posture antalgique progressivement développée
par la patiente. Dans son rapport du 29 juin 1987, le
docteur B.________ attestait une incapacité de travail de
50 % à partir du 6 janvier 1986.
Dès le 1er février 1988, l'assurance-invalidité a
alloué à l'intimée une rente entière en lieu et place de la
demi-rente, puisqu'elle faisait une fixation névrotique et
que son incapacité de travail était totale depuis le
1er novembre 1987 (rapport du docteur D.________ du
7 novembre 1988), le pronostic pour une réadaptation
n'étant pas favorable, ainsi que l'a confirmé ce spécia-
liste dans un rapport ultérieur du 26 avril 1989.

b) Au moment déterminant, soit lors de la décision
administrative litigieuse du 10 novembre 1998, la situation
s'était améliorée sur le plan rhumatologique. Selon les
constatations médicales de l'expert E.________, du 11 juin
1997, l'intimée présentait des lombosciatalgies gauches
chroniques sans substrat clinique ni radiologique. Il n'y
avait pas de signes pour une polyinsertionite. Sa capacité
de travail comme aide-soignante était entière. L'avis de ce
spécialiste est partagé par le docteur B.________. Le fait
que le médecin traitant de l'assurée, dans deux lettres
datées des 8 mai et 21 juillet 2000, a attesté que son état
de santé physique s'était aggravé depuis le début de
l'année 2000, soit postérieurement à la décision adminis-
trative litigieuse n'est pas de nature à mettre en cause la
légalité de celle-ci.
Du point de vue psychique, le docteur H.________, dans
l'expertise judiciaire du 5 avril 2000, a retenu un trouble
névrotique de type syndrome douloureux somatoforme persis-
tant incomplet. Il a fixé à 50 % la capacité de travail de
l'intimée. Selon lui, on peut exiger de sa part qu'elle

fasse l'effort de surmonter les inhibitions résultant de
ces troubles et qu'elle reprenne une activité lucrative à
temps partiel.
Les constatations du docteur B.________ du 24 novembre
1998, selon lesquelles sa patiente est incapable de tra-
vailler, même dans une activité adaptée à son handicap, ses
douleurs étant persistantes et empêchant la reprise d'une
quelconque activité, ne sont pas propres à mettre en doute,
sur ce point, l'opinion de l'expert judiciaire (ATF
125 V 354 consid. 3c; RAMA 2000 n° U 362, p. 41). En effet,
ces affirmations ont une moindre valeur probante en raison
du rapport de confiance qui lie le médecin traitant à sa
patiente (ATF 125 V 353 consid. 3b/cc; comp. ATF 124 I 175
consid. 4). Or, les déclarations du docteur B.________
divergent par rapport aux constatations du docteur
F.________, du 3 novembre 1998, lesquelles vont dans le
même sens que les conclusions de l'expert H.________.
Il s'ensuit qu'au moment déterminant, les conséquences
de l'état de santé de l'intimée sur sa capacité de gain
avaient subi un changement important, dans la mesure où
l'on pouvait raisonnablement attendre d'elle qu'elle fasse
l'effort nécessaire pour exercer à 50 % une activité lu-
crative adaptée à son handicap. Les conditions prévues à
l'art. 41 LAI étaient donc réunies non pas pour supprimer
tout droit à la rente d'invalidité, mais pour remplacer la
rente entière par une demi-rente. En effet, l'invalidité
s'élevait alors à 50 %, taux qui correspond à son incapa-
cité de gain dans son ancienne activité d'aide-soignante,
qu'elle est en mesure de reprendre selon l'expert
E.________ (comparaison en pour-cent; ATF 114 V 313
consid. 3a et les références).
Pour cette raison, le jugement attaqué est conforme au
droit fédéral dans son résultat.
Il y a lieu, dès lors,
d'en confirmer le dispositif, ce qui conduit au rejet du
recours.

4.- Représentée par un avocat, l'intimée, qui obtient
gain de cause, a droit à une indemnité de dépens pour
l'instance fédérale (art. 159 al. 1 en corrélation avec
l'art. 135 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances

p r o n o n c e :

I. Le recours est rejeté au sens des considérants.

II. Il n'est pas perçu de frais de justice.

III. Le recourant versera à l'intimée la somme de 2500 fr.
(y compris la taxe sur la valeur ajoutée) à titre de
dépens pour l'instance fédérale.

IV. Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au
Tribunal des assurances du canton de Vaud, à la Caisse
cantonale vaudoise de compensation et à l'Office
fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 19 septembre 2001

Au nom du
Tribunal fédéral des assurances
Le juge présidant la IIIe Chambre :

Le Greffier :


Synthèse
Numéro d'arrêt : I.701/00
Date de la décision : 19/09/2001
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2001-09-19;i.701.00 ?
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