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22/08/2001 | SUISSE | N°4P.89/2001

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 22 août 2001, 4P.89/2001


«/2»

4P.89/2001

Ie C O U R C I V I L E
****************************

22 août 2001

Composition de la Cour: MM. Walter, président, Leu et
Corboz,
juges. Greffière: Mme de Montmollin Hermann.

_________

Statuant sur le recours de droit public
formé par

P.________, à Versoix, représenté par Me Ninon Pulver,
avocate à Genève,

contre

l'arrêt rendu le 22 février 2001 par la Chambre civile de la
Cour de justice genevoise dans la cause qui oppose le recou-

rant à K.________, représenté par Me Emmanuel Stauffer,
avocat à Genève;

(arbitraire)

Vu les pièces du dossier d'où resso...

«/2»

4P.89/2001

Ie C O U R C I V I L E
****************************

22 août 2001

Composition de la Cour: MM. Walter, président, Leu et
Corboz,
juges. Greffière: Mme de Montmollin Hermann.

_________

Statuant sur le recours de droit public
formé par

P.________, à Versoix, représenté par Me Ninon Pulver,
avocate à Genève,

contre

l'arrêt rendu le 22 février 2001 par la Chambre civile de la
Cour de justice genevoise dans la cause qui oppose le recou-
rant à K.________, représenté par Me Emmanuel Stauffer,
avocat à Genève;

(arbitraire)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- P.________ exploitait à Genève le café restau-
rant "...". Seul propriétaire du fonds de commerce, il était
colocataire avec la société X.________ S.A., dont il était
l'unique actionnaire, des locaux abritant l'établissement
public.

En 1995, P.________ a informé son expert-comptable,
B.________, qu'il désirait remettre son affaire. B.________
a
songé à son propre cousin, A.________, qui - selon les décla-
rations concordantes des parties - était alors au chômage.
Comme un acte de défaut de biens avait été délivré à l'encon-
tre de ce dernier, B.________ a proposé que l'acquisition
soit faite par K.________, père de A.________.

B.________ a préparé une convention, portant la
date du 11 novembre 1995, qui prévoit les opérations sui-
vantes. P.________ cède à K.________ pour la somme de 1 fr.
le capital-actions de la société X.________ S.A. La société
X.________ désigne A.________ comme unique administrateur.
X.________ S.A., représentée par A.________, achète à
P.________ la moitié du fonds de commerce et du droit au
bail
pour un prix total de 350 000 fr.

Cette convention a été signée par P.________ et par
A.________. K.________ n'a pas participé aux pourparlers
avec
le vendeur et n'était pas présent lors de la signature de
l'acte. Il a été retenu que A.________ s'était comporté
d'une
manière telle que l'on pouvait en déduire qu'il avait le pou-
voir de représenter son père. Un nouveau contrat de bail à
loyer daté du 24 novembre 1995, mentionnant comme locataires
P.________, K.________ et X.________ S.A., a été signé par
A.________ et P.________.

Dans le courant de l'année 1996, P.________ a
appris de sa banque que les mensualités prévues dans la
convention n'avaient pas été payées. Par la suite, il a été
informé que le loyer n'était plus versé.

Au début de l'année 1997, P.________, par l'inter-
médiaire de son conseil, s'est adressé à K.________ et
A.________, les mettant en demeure de verser les mensualités
et loyers arriérés. A.________ n'a pas donné suite.
K.________ a refusé de procéder à un quelconque paiement,
affirmant ne s'être nullement engagé contractuellement dans
cette affaire.

B.- Le 7 septembre 1998, P.________ a déposé devant
les tribunaux genevois une demande en paiement dirigée
contre
K.________, concluant à ce que ce dernier soit condamné à
lui
payer la somme de 94 661 fr.60 avec intérêts.

Réformant un jugement rendu par le Tribunal de pre-
mière instance du canton de Genève le 30 septembre 1999, la
Chambre civile de la Cour de justice, par arrêt du 22
février
2001, a débouté P.________ de toutes ses conclusions. En
substance, la cour cantonale a retenu qu'il n'était pas éta-
bli que K.________ ait eu la volonté de devenir
cocontractant
de P.________ et qu'il ait donné procuration à son fils; il
n'avait pas adopté à l'égard du cocontractant une attitude
dont on aurait pu inférer l'existence de pouvoirs et il
n'avait pas non plus ratifié l'acte; en conséquence,
K.________ n'avait conclu aucun contrat avec le demandeur.

C.- Parallèlement à un recours en réforme,
P.________ interjette un recours de droit public au Tribunal
fédéral. Invoquant l'arbitraire dans l'appréciation des
preuves, il conclut à l'annulation de l'arrêt du 22 février
2001 et au déboutement de K.________ de toutes ses conclu-
sions.

L'intimé propose le rejet du recours et la confir-
mation de la décision attaquée.

C o n s i d é r a n t e n d r o i t :

1.- a) Conformément à la règle générale, le recours
de droit public doit être examiné en premier lieu (art. 57
al. 5 OJ).

b) Hormis certaines exceptions qui ne sont pas réa-
lisées en l'espèce, le recours de droit public n'a qu'un ca-
ractère cassatoire (ATF 127 II 1 consid. 2c; 126 III 534 con-
sid. 1c; 124 I 327 consid. 4). Les conclusions des parties
qui vont au-delà de l'annulation sont par conséquent irrece-
vables.

c) Saisi d'un recours de droit public, le Tribunal
fédéral n'examine que les griefs d'ordre constitutionnel in-
voqués et suffisamment motivés dans l'acte de recours (ATF
127 I 38 consid. 3c; 126 III 524 consid. 1c; 126 III 534 con-
sid. 1b; 125 I 492 consid. 1b et les références).

2.- a) Le recourant invoque exclusivement l'inter-
diction de l'arbitraire.

Selon la jurisprudence, l'arbitraire - prohibé par
l'art. 9 Cst. - ne résulte pas du seul fait qu'une autre so-
lution pourrait entrer en considération ou même qu'elle se-
rait préférable; le Tribunal fédéral ne s'écarte de la déci-
sion attaquée que lorsque celle-ci est manifestement insoute-
nable, qu'elle se trouve en contradiction claire avec la si-
tuation de fait, qu'elle viole gravement une norme ou un
principe juridique indiscuté, ou encore lorsqu'elle heurte
de

manière choquante le sentiment de la justice et de l'équité;
pour qu'une décision soit annulée en raison de son caractère
arbitraire, il ne suffit pas que la motivation formulée soit
insoutenable, il faut encore que le résultat soit arbitraire
(ATF 126 I 168 consid. 3a; 125 I 166 consid. 2a; 124 I 247
consid. 5; 124 V 137 consid. 2b; 122 I 61 consid. 3a).

Lorsqu'une partie recourante invoque l'arbitraire
dans l'appréciation des preuves et l'établissement des
faits,
elle doit, en partant de la décision attaquée et en se réfé-
rant avec précision à des moyens de preuve indiscutables,
montrer en quoi consiste l'arbitraire (cf. art. 90 al. 1
let.
b OJ). Il y a arbitraire dans ce domaine lorsque l'autorité
ne prend pas en compte, sans aucune raison sérieuse, un élé-
ment de preuve propre à modifier la décision, lorsqu'elle se
trompe manifestement sur son sens et sa portée, ou encore
lorsque, en se fondant sur les éléments recueillis, elle en
tire des constatations insoutenables.

b) Le recourant reproche à la cour cantonale
d'avoir retenu arbitrairement que l'intimé n'avait pas la vo-
lonté d'être partie aux contrats et qu'il n'avait pas con-
naissance de la convention établie en son nom avant la mise
en demeure de janvier 1997.

aa) Il est constant que l'intimé n'a pas signé la
convention de reprise de commerce, ni le nouveau bail. Il
n'a
pas non plus participé personnellement à la négociation de
ces contrats ou assisté à leur signature. Il n'a pas signé
de
procuration en faveur de son fils, ni fait savoir au recou-
rant d'une autre manière qu'il autorisait son fils à le re-
présenter.

Que l'intimé ait visité l'établissement et qu'il
ait dit à son fils qu'il était prêt à le soutenir (soutien
qu'il lui a peut-être apporté au début de l'exploitation) ne

permet pas de déduire qu'il avait la volonté de devenir lui-
même le cocontractant du recourant.

Que l'intimé ait vu le contrat de bail ne permet
pas non plus de faire une telle déduction, puisqu'il a
refusé
de le signer.

Que A.________ ait adopté une attitude ambiguë
faisant croire qu'il avait le pouvoir de représenter son
père
ne permet en rien de déduire que le père avait la volonté
d'être représenté et de conclure personnellement le contrat.

bb) Le recourant reproche à la cour cantonale
d'avoir préféré les déclarations de A.________ à celles de
B.________.

Il n'est pas exact de dire que la cour cantonale
s'est fondée sur les déclarations de A.________.

Elle devait examiner s'il était prouvé que l'intimé
avait reçu la convention datée du 11 novembre 1995 avant la
mise en demeure de janvier 1997.

L'intimé affirme qu'il n'a pas reçu ce document. Il
ressort des déclarations de B.________ que A.________ avait
affirmé avoir montré le contrat à son père, alors qu'il
s'est
révélé par la suite qu'il ne l'avait pas fait. B.________ a
prétendu qu'il avait lui-même envoyé à l'intimé les
documents
signés, en tout cas après la signature. Il ressort de cette
formulation qu'il n'est pas certain de les avoir communiqués
avant la signature et ce point reste donc douteux. Comme son
affirmation selon laquelle il aurait envoyé le document
après
la signature était contestée, B.________ a déclaré qu'il pro-
duirait des échanges de correspondance attestant de l'envoi
de cette pièce à l'intimé; or, il n'est pas contesté qu'il
n'en a rien fait. Dès lors que sa parole était mise en
doute,

on ne voit pas pourquoi B.________ n'aurait pas fourni les
documents justificatifs s'il les détenait. Dans une telle si-
tuation, la cour cantonale n'a pas statué arbitrairement en
concluant qu'il n'était pas prouvé que B.________ avait en-
voyé les contrats après la signature.

cc) Le recourant fait valoir également que
B.________ a déclaré que l'intimé "voulait non seulement por-
ter aide à son fils mais être partie prenante dans l'affai-
re". Il semble qu'il s'agisse d'une déduction personnelle du
témoin, sans que l'on sache exactement sur quel fait cette
conviction repose. Il ressort des explications données par
le
recourant que B.________ s'est trouvé en conflit avec l'inti-
mé en raison de cette affaire, puisque ce dernier a déposé
une plainte pénale contre lui. En raison de ce litige,
B.________ ne se trouve pas vraiment dans la situation d'un
témoin impartial; il est bien plutôt dans la position d'une
personne appelée à se justifier. Ces circonstances invitent
à
n'accueillir sa déposition en défaveur de l'intimé qu'avec
une certaine circonspection. La cour cantonale n'est donc
pas
tombée dans l'arbitraire en ne tenant pas la volonté de l'in-
timé pour établie sur la base de la seule phrase de
B.________ selon laquelle il "voulait non seulement porter
aide à son fils mais être partie prenante dans l'affaire".

Ainsi, il n'est pas démontré que la cour cantonale
ait apprécié arbitrairement les preuves et le recours doit
être rejeté.

3.- Les frais et dépens seront mis à la charge du
recourant qui succombe (art. 156 al. 1 et 159 al. 1 OJ).

Par ces motifs,

l e T r i b u n a l f é d é r a l :

1. Rejette le recours;

2. Met un émolument judiciaire de 4500 fr. à la
charge du recourant;

3. Dit que le recourant versera à l'intimé une in-
demnité de 5000 fr. à titre de dépens;

4. Communique le présent arrêt en copie aux manda-
taires des parties et à la Chambre civile de la Cour de jus-
tice genevoise.

__________

Lausanne, le 22 août 2001
ECH

Au nom de la Ie Cour civile
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
Le président,

La greffière,


Synthèse
Numéro d'arrêt : 4P.89/2001
Date de la décision : 22/08/2001
1re cour civile

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2001-08-22;4p.89.2001 ?
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