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21/08/2001 | SUISSE | N°K.191/00

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 21 août 2001, K.191/00


«AZA 7»
K 191/00 Kt

IIIe Chambre

composée de MM. et Mme les Juges fédéraux Schön, Président,
Spira et Widmer; von Zwehl, Greffière

Arrêt du 21 août 2001

dans la cause

P.________, recourant, représenté par Me Muriel
Pierrehumbert, avocate, avenue de Champel 4, 1206 Genève,

contre

Helsana Assurances SA, chemin de la Colline 12,
1007 Lausanne, intimée,

et

Tribunal administratif du canton de Genève, Genève

A.- P.________ travaillait en qualité de maçon

au
service de l'entreprise B.________ SA. A ce titre, il était
assuré pour une indemnité journalière en cas d'incapacité
de gain d...

«AZA 7»
K 191/00 Kt

IIIe Chambre

composée de MM. et Mme les Juges fédéraux Schön, Président,
Spira et Widmer; von Zwehl, Greffière

Arrêt du 21 août 2001

dans la cause

P.________, recourant, représenté par Me Muriel
Pierrehumbert, avocate, avenue de Champel 4, 1206 Genève,

contre

Helsana Assurances SA, chemin de la Colline 12,
1007 Lausanne, intimée,

et

Tribunal administratif du canton de Genève, Genève

A.- P.________ travaillait en qualité de maçon au
service de l'entreprise B.________ SA. A ce titre, il était
assuré pour une indemnité journalière en cas d'incapacité
de gain due à la maladie, dans le cadre d'un contrat
d'assurance collective conclu par son employeur auprès de
la Caisse-maladie Helsana Assurances SA (ci-après : Helsana
ou la caisse). Il exerçait également une seconde activité

comme nettoyeur à raison de 2 heures par jour pour le
compte de la société I.________ SA.
Souffrant de troubles dégénératifs au dos (cf. rapport
du docteur Z.________ du 24 juin 1998), P.________ a été
mis en arrêt de travail dans son emploi de maçon du 3 au
31 août 1998, puis du 20 octobre 1998 au 10 janvier 1999,
avant d'être déclaré totalement incapable de travailler
pour une durée indéterminée le 16 janvier 1999. A l'issue
d'un stage d'observation accompli du 14 janvier au
4 février 1999, les médecins de la Clinique X.________ sont
parvenus à la conclusion qu'une reprise du travail comme
maçon était exclue et qu'un reclassement dans une profes-
sion plus légère serait souhaitable (rapport du 26 août
1999). L'assuré a également été examiné par le docteur
V.________, médecin-conseil de la caisse, qui a confirmé le
taux d'incapacité de travail de 100 % dans son ancienne
activité et préconisé un recyclage (évaluation du 4 février
1999).
Par décision du 24 mars 1999, Helsana a alors notifié
à l'assuré sa volonté de mettre fin aux prestations à par-
tir du 10 juin 1999, en l'invitant à se consacrer, dans
l'intervalle, à la recherche d'une activité adaptée, le cas
échéant avec l'aide de l'assurance-invalidité. Saisie d'une
opposition de l'assuré, la caisse ne l'a admise que très
partiellement, prolongeant le versement de l'indemnité
journalière jusqu'au 31 juillet 1999 (décision du 24 juin
1999). Entre-temps, P.________ a déposé une demande de
prestations à l'Office AI du canton de Genève.

B.- L'assuré a déféré la décision sur opposition du
24 juin 1999 au Tribunal administratif du canton de Genève,
en concluant au versement de l'indemnité journalière assu-
rée pendant 720 jours. En substance, il reprochait à la
caisse d'avoir supprimé ses prestations en se basant uni-
quement sur l'existence d'une capacité de travail rési-
duelle médico-théorique, tandis que les activités qui lui

étaient encore accessibles n'avaient fait l'objet d'aucun
examen, pas plus que l'étendue des revenus qu'il pourrait
en tirer. Par ailleurs, il indiquait que son état de santé
s'était encore détérioré, si bien qu'il avait dû cesser son
activité de nettoyeur depuis avril 1999. De son côté,
Helsana a conclu au rejet du recours.
L'autorité cantonale a requis la production du dossier
de l'assurance-invalidité, lequel contenait, notamment, un
rapport du Centre d'intégration professionnelle OSER (ci-
après : CIP) du 29 février 2000, concluant à une capacité
de travail résiduelle d'au moins 80 % dans une activité
adaptée. Les parties ont pu se déterminer sur les conclu-
sions de ce rapport.
Par jugement du 10 octobre 2000, le tribunal a rejeté
le recours.

C.- Reprenant ses arguments développés en première
instance, P.________ interjette recours de droit adminis-
tratif contre ce jugement, dont il requiert l'annulation
avec suite de dépens. Il conclut, principalement, au paie-
ment par la caisse de ses prestations pour la totalité de
la période de la couverture d'assurance «en fonction de son
degré d'incapacité de travail à définir et compte tenu
d'une éventuelle capacité de travail résiduelle qui devra
être préalablement déterminée». Subsidiairement, il conclut
au renvoi de la cause à la juridiction cantonale pour ins-
truction complémentaire sur son aptitude à exercer une
autre profession et l'incapacité de gain en découlant. Il
sollicite également le bénéfice de l'assistance judiciaire
gratuite.
Helsana conclut au rejet du recours, tandis que l'Of-
fice fédéral des assurances sociales ne s'est pas détermi-
né.

Considérant en droit :

1.- Le point litigieux est de savoir si la caisse
était fondée, par sa décision sur opposition du 24 juin
1999, à supprimer le droit de l'assuré à une indemnité
journalière dès le 31 juillet 1999.

2.- a) Les premiers juges ont correctement exposé la
notion d'incapacité de travail dans l'assurance-maladie
(RAMA 1998 n° KV 45 p. 430). Ils ont rappelé à juste titre
qu'on peut exiger d'un assuré, conformément à son obliga-
tion de diminuer le dommage, qu'il utilise sa capacité de
travail résiduelle dans un autre secteur d'activité profes-
sionnelle, à condition qu'un laps de temps suffisant lui
soit imparti pour lui permettre de retrouver un emploi
adapté à son état de santé (ATF 114 V 289 consid. 5b,
111 V 239 consid. 2a et les références; RAMA 1989 n° K 812
p. 256 consid. 2b, 1987 n° K 720 p. 108 consid. 3). A cet
égard, la jurisprudence a considéré comme appropriée la
fixation d'un délai d'adaptation compris entre trois et
cinq mois (RAMA 2000 n° KV 112 p. 122 consid. 3a).
L'assureur-maladie ne peut toutefois se défaire de son
obligation d'indemniser la perte de gain de l'assuré en se
fondant uniquement sur la seule évaluation médico-théorique
de la capacité de travail dont ce dernier dispose dans sa
nouvelle activité. Il reste tenu au paiement de l'indemnité
journalière, le cas échéant dans une mesure réduite, tant
que subsiste chez l'assuré un dommage résiduel dû à la ma-
ladie et couvert par les conditions d'assurance. Ce dommage
se détermine par la différence entre le revenu qui pourrait
être obtenu sans maladie dans la profession exercée jus-
qu'ici et le revenu qui est obtenu ou pourrait raisonnable-
ment être réalisé dans la nouvelle profession (ATF
114 V 286 consid. 3c in fine).

b) En l'occurrence, selon le règlement de l'assurance
d'une indemnité journalière de l'intimée (édition 1er jan-
vier 1999, art. 14 ch. 1), l'indemnité est versée à partir
d'une «incapacité de travail prouvée d'au moins 25 %».

3.- a) Lorsque l'intimée a rendu sa décision par la-
quelle elle a supprimé ses prestations, il était médica-
lement établi qu'en raison de ses problèmes dorsaux, le
recourant était incapable de travailler comme maçon mais
qu'il conservait néanmoins une capacité de travail impor-
tante dans une autre profession plus légère (cf. le rapport
de la Clinique X.________ et l'évaluation effectuée par le
docteur V.________, médecin-conseil de la caisse). On doit
convenir avec le recourant que ces données médicales
étaient insuffisantes pour justifier la suspension pure et
simple du versement de l'indemnité journalière, dès lors
que le taux de capacité de travail encore raisonnablement
exigible, de même que les activités professionnelles envi-
sageables, n'avaient pas été précisés dans les rapports
soumis à la caisse. Sur ce point, les critiques adressées
par le recourant à la décision sur opposition litigieuse
sont fondées.

b) Les premiers juges ont, pour leur part, confirmé
les termes de cette décision en se basant sur les pièces
médicales recueillies dans le cadre de l'instruction AI,
plus particulièrement sur les conclusions auxquelles ont
abouti les responsables du CIP. Selon ces derniers,
P.________ jouit d'une capacité de travail d'au moins 80 %
dans une activité adaptée, sans port de charges et permet-
tant une alternance des positions assis/debout, dans les
secteurs de l'industrie légère, de l'artisanat ou du servi-
ce après vente, telle qu'ouvrier d'usine, conducteur d'élé-
vateur, magasinier ou encore concierge (rapport du 29 fé-
vrier 2000). Bien que le recourant conteste le taux retenu,
arguant que celui-ci ne tient pas compte d'une aggravation

de son état de santé et ne reflète donc pas sa véritable
capacité de travail, on ne voit pas de motif de s'en écar-
ter. D'une part, contrairement à ce qu'il prétend, le bilan
radiologique décrit par le docteur Z.________ en date du
3 février 2000 est tout à fait superposable à celui effec-
tué en juin 1998. D'autre part, ces conclusions résultent
d'une évaluation concrète de la situation de l'assuré qui
n'est, au demeurant, pas contredite par les autres docu-
ments médicaux versés au dossier. Il n'y a guère que le
docteur W.________ pour évoquer l'octroi d'une rente com-
plète et définitive, mais son avis, non motivé et polémi-
que, n'est pas de nature à remettre en cause les constata-
tions faites au CIP.
Le rapport du 29 février 2000 se réfère certes à
l'état de santé du recourant tel qu'il se présentait au mo-
ment de l'accomplissent du stage d'observation. On peut
néanmoins considérer que cette situation prévalait déjà au
moment où la caisse a pris sa décision, puisque le diagnos-
tic est resté inchangé et que les rapports médicaux de l'é-
poque faisaient état, chez l'assuré, d'importantes facultés
de réadaptation, et attestaient même d'une amélioration de
ses troubles dorsaux sur le plan fonctionnel (cf. rapport
du docteur Y.________ du 10 décembre 1998). A l'instar des
juges cantonaux, on doit donc admettre que le recourant au-
rait pu mettre à profit, dès le mois de janvier 1999, une
capacité de travail résiduelle de 80 % dans une activité
adaptée telle celle retenue par le CIP, et cela sans atten-
dre que l'AI statue sur sa demande de mesures d'ordre pro-
fessionnel.

c) Les considérations qui précèdent ne conduisent tou-
tefois pas au rejet du recours de droit administratif comme
le propose l'intimée, mais à son admission. En effet, il
n'est pas exclu que le recourant subisse, dans les activi-
tés qu'on peut encore raisonnablement exiger de sa part,
une perte de gain équivalente, voire supérieure à celle

correspondant à une incapacité de travail de 25 % dans sa
profession de maçon. Partant, il y a lieu d'annuler le ju-
gement attaqué ainsi que la décision sur opposition liti-
gieuse et de renvoyer la cause à l'intimée afin qu'elle
procède - conformément à la jurisprudence citée au con-
sid. 2 ci-dessus - à l'évaluation de la perte de gain que
le recourant aurait le cas échéant subi dans une activité
adaptée et qu'elle examine, à la lumière du résultat ainsi
obtenu, s'il subsiste un dommage résiduel dont elle répond
en vertu de ses conditions générales; ensuite de quoi, elle
rendra une nouvelle décision sur le droit de P.________ à
une indemnité journalière.

4.- Le recourant, qui obtient gain de cause, a droit à
une indemnité de dépens à charge de l'intimée (art. 159
al. 1 OJ), de sorte que sa requête d'assistance judiciaire
est sans objet.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances

p r o n o n c e :

I. Le recours est admis et le jugement du Tribunal admi-
nistratif du canton de Genève du 10 octobre 2000, ain-
si que la décision sur opposition d'Helsana Assu-
rances SA du 24 juin 1999 sont annulés.

II. La cause est renvoyée à l'intimée pour instruction et
nouvelle décision au sens des considérants.

III. Il n'est pas perçu de frais de justice.

IV. Helsana versera à P.________ une indemnité de 2500 fr.
(y compris la taxe à la valeur ajoutée) à titre de
dépens pour la procédure fédérale.

V. Le Tribunal administratif du canton de Genève statuera
sur les dépens de l'instance cantonale, au regard de
l'issue du procès.

VI. Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tri-
bunal administratif du canton de Genève et à l'Office
fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 21 août 2001

Au nom du
Tribunal fédéral des assurances
p. le Président de la IIIe Chambre :

La Greffière :


Synthèse
Numéro d'arrêt : K.191/00
Date de la décision : 21/08/2001
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2001-08-21;k.191.00 ?
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