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10/08/2001 | SUISSE | N°I.78/01

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 10 août 2001, I.78/01


«AZA 7»
I 78/01 Mh

Ière Chambre

composée des Juges fédéraux Lustenberger, Président, Schön,
Borella, Spira et Rüedi; Beauverd, Greffier

Arrêt du 10 août 2001

dans la cause

A.________, recourant, représenté par Maître Jean-Marie
Agier, avocat, FSIH, Place du Grand-Saint-Jean 1,
1003 Lausanne,

contre

Office AI Berne, Chutzenstrasse 10, 3007 Berne, intimé,

et

Tribunal administratif du canton de Berne, Berne

A.- A.________, actuellement domicilié à B.__

______,
dans l'un des trois districts francophones du canton de
Berne, a droit depuis le 1er juin 1993 à une demi-rente
d'invalidi...

«AZA 7»
I 78/01 Mh

Ière Chambre

composée des Juges fédéraux Lustenberger, Président, Schön,
Borella, Spira et Rüedi; Beauverd, Greffier

Arrêt du 10 août 2001

dans la cause

A.________, recourant, représenté par Maître Jean-Marie
Agier, avocat, FSIH, Place du Grand-Saint-Jean 1,
1003 Lausanne,

contre

Office AI Berne, Chutzenstrasse 10, 3007 Berne, intimé,

et

Tribunal administratif du canton de Berne, Berne

A.- A.________, actuellement domicilié à B.________,
dans l'un des trois districts francophones du canton de
Berne, a droit depuis le 1er juin 1993 à une demi-rente
d'invalidité, en fonction d'un taux d'invalidité de 50 %.
A.________ ayant demandé à bénéficier d'une rente
entière en raison d'une aggravation de son invalidité, il a
notamment dû se soumettre à une expertise auprès du Centre

d'observation médicale de l'AI (COMAI) de l'Hôpital
X.________. Ayant reçu de ce dernier des documents rédigés
en allemand, il a protesté et l'Office AI du canton de
Berne lui a fait envoyer des formulaires rédigés en fran-
çais. Le 4 janvier 2000, A.________ s'est adressé au COMAI
pour demander «poliment» à pouvoir se faire examiner par
des médecins ou dans un hôpital de sa région, déclarant
qu'il avait peur de se présenter «devant une commission
médicale de langue allemande, comprenant mal (son)
dossier». Répondant à sa lettre le 14 janvier suivant,
l'Office AI indiquait notamment : «Selon renseignements
pris auprès de ce centre, la question de la langue ne pose
pas de problème. Les experts peuvent s'entretenir en fran-
çais». En date du 23 mars 2000, le COMAI a livré son rap-
port, rédigé en allemand et long de onze pages, plus deux
rapports annexes, de respectivement six et quatre pages,
également en allemand.
Le 17 mai 2000, l'Office AI a demandé à l'assuré de
l'autoriser à transmettre le rapport d'expertise à ses
médecins traitants. Deux jours plus tard, ledit office lui
a fait part d'une «préorientation» aux termes de laquelle
il était prévu de maintenir son droit à une demi-rente
d'invalidité, soit, en fait, de rejeter sa demande d'aug-
mentation de la rente. Le 22 mai suivant, A.________ a
répondu à l'Office AI qu'il faisait «objection» à cette
décision, car il estimait qu'il y avait eu «vices de forme
dans la procédure suivie par le centre d'observation médi-
cal de X.________», ses «droits élémentaires de patient»
n'ayant pas été respectés. En guise de réponse, l'Office AI
lui a écrit le 30 mai 2000 pour l'inviter à préciser par
écrit, dans un délai échéant le 13 juin suivant, quels
points de la préorientation il contestait et pour quelles
raisons exactement.

Le 6 juin 2000, l'assuré a écrit à l'Office AI pour
lui faire part de ses griefs. En particulier, il se
plaignait d'avoir été examiné par des médecins ne parlant
et ne comprenant pas le français, de sorte qu'il avait dû
s'entretenir avec eux par le truchement d'une traductrice,
ce qui était particulièrement malvenu en ce qui concerne
l'examen psychiatrique. L'office lui a répondu le 30 juin
suivant en indiquant d'une part qu'il faisait parvenir une
copie de l'expertise du COMAI à son médecin traitant et,
d'autre part, que pour la question de la langue, il consta-
tait qu'une traductrice professionnelle et qualifiée avait
servi d'interprète lors des examens, comme il l'avait
souhaité.
Par lettres des 12 et 28 juillet 2000, l'assuré a
demandé à l'Office AI de lui faire parvenir le rapport
d'expertise en français, ce que l'office a refusé, en
précisant que «seules la correspondance et les décisions
peuvent être envoyées en français». Par décision du 18 août
2000, l'Office AI a rejeté la demande de révision et main-
tenu le droit de l'assuré à une demi-rente.
Le 14 août 2000, Me Y.________, avocat de la
Fédération suisse pour l'intégration des handicapés (FSIH)
à Lausanne, a informé l'Office AI que A.________ lui avait
confié la défense de ses intérêts et il a demandé à
l'office de lui communiquer le dossier de son mandant, ce
qui fut fait le 21 août suivant. Le 23 août 2000, Me
Y.________ a invité l'office à lui confirmer que sa
décision du 18 août précédent était «nulle et non avenue».
Le 29 août 2000, l'Office AI a répondu que celle-ci restait
valable et il a rappelé l'indication des moyens de droit
dont elle était assortie.

B.- Se plaignant d'une violation de son droit d'être
entendu pour le double motif que l'Office AI avait refusé,
d'une part de lui communiquer le rapport d'expertise et
d'autre part de le faire traduire en français, l'assuré a

formé recours contre la décision du 18 août 2000 devant le
Tribunal administratif du canton de Berne. La juridiction
cantonale a rejeté le recours par jugement du 14 décembre
2000.

C.- A.________ interjette recours de droit adminis-
tratif contre ce jugement qu'il demande au Tribunal fédéral
des assurances d'annuler, avec suite de frais et dépens, le
dossier de la cause étant renvoyé à l'Office AI «pour que
ce dernier remette à l'assuré A.________, en même temps que
son projet de décision, une copie du rapport du MEDAS du
23 mars 2000 et sa traduction en français».
Le président de la Cour des affaires de langue
française du Tribunal administratif du canton de Berne
présente des observations circonstanciées sur les griefs
formulés par le recourant, notamment en ce qui concerne la
législation applicable en procédure administrative ber-
noise. L'Office AI conclut au rejet du recours.
Invité à se déterminer sur le recours, l'Office fédé-
ral des assurances sociales (OFAS) propose le rejet de
celui-ci. Les parties ont pu se prononcer sur ce préavis et
elles ont chacune maintenu leurs conclusions.

Considérant en droit :

1.- Par un premier moyen, le recourant soutient qu'en
refusant de lui communiquer une copie du rapport du COMAI,
l'intimé a violé la législation fédérale sur la protection
des données, en particulier l'art. 8 al. 1, 2 et 5 LPD
(RS 235.1) tel que l'interprète le Tribunal fédéral dans sa
jurisprudence (ATF 125 II 321).

a) aa) Le droit d'accès à des données personnelles,
régi à l'art. 8 LPD, est, dans une certaine mesure, plus
étroit que le droit de consulter le dossier en vertu des

garanties générales de procédure car il ne s'étend pas à
toutes les pièces essentielles de la procédure mais ne vise
que les données concernant la personne intéressée. Par
ailleurs, il est aussi plus large en ce sens que - sauf
abus de droit - il peut être invoqué sans qu'il faille se
prévaloir d'un intérêt particulier, même en dehors d'une
procédure administrative. Il n'est donc pas lié à la prépa-
ration, par une autorité, d'une décision pouvant porter
atteinte aux intérêts de la personne concernée, mais à une
simple collecte de données personnelles effectuée par l'au-
torité (ATF 123 II 538 consid. 2e et les références de
doctrine et de jurisprudence; arrêt non publié M. du
16 septembre 1999, C 418/98). La décision d'une autorité
refusant de donner suite à une demande de consulter des
données en dehors de toute procédure peut être déférée aux
juridictions compétentes en matière de protection des
données selon la procédure prévue par la LPD (ATF
123 II 539 consid. 2f). Confirmant cette jurisprudence, le
Tribunal fédéral a considéré que lorsque les questions de
protection des données se posent dans les rapports d'un
assuré avec sa caisse-maladie, indépendamment de toute
prétention découlant du droit des assurances sociales, la
cause est du ressort du Tribunal fédéral, et non du
Tribunal fédéral des assurances (consid. 1 non publié de
l'arrêt ATF 125 II 321).
En revanche, l'assuré qui se voit refuser par un
organe de l'assurance sociale le droit de consulter son
dossier dans le cadre d'une procédure le concernant doit
contester ce refus devant le juge des assurances sociales
(arrêt non publié M. du 16 septembre 1999, déjà cité).

bb) En l'espèce, c'est dans le cadre d'une procédure
de révision de son droit à une rente d'invalidité (art. 41
LAI) que le recourant a été soumis à une expertise auprès
d'un COMAI, de sorte que sa demande de communication du
rapport d'expertise est liée à une demande de prestations

d'une assurance sociale. Il en résulte, selon la juris-
prudence précitée, que c'est le juge des assurances so-
ciales et non les juridictions compétentes en matière de
protection des données qui est compétent ratione materiae
pour trancher un litige relatif à la consultation du
dossier par un assuré. Le recours est partant recevable.

b) Les premiers juges, en se référant notamment à
Thomas Locher, Grundriss des Sozialversicherungsrechts,
2e édition, Berne 1997, p. 343-344, ont rejeté le grief en
considérant que selon l'interprétation traditionnelle, il
n'y a pas de violation du droit d'être entendu lorsque
l'autorité administrative refuse d'envoyer des copies du
dossier à un administré non représenté par un avocat, tout
en autorisant une consultation du dossier au siège de
l'autorité (ATF 108 Ia 7 consid. 2b; cf. dans la doctrine
récente les développements de Michele Albertini, Der
verfassungsmässige Anspruch auf rechtliches Gehör im
Verwaltungsverfahren des modernen Staates, thèse Berne
1999, p. 249 ss).
Cette opinion n'est plus compatible avec les principes
développés par la jurisprudence du Tribunal fédéral rela-
tive à la communication des données personnelles dans le
domaine des assurances sociales. On ne voit pas, en effet,
ce qui justifierait de traiter différemment l'assuré qui
demande à un assureur social de lui communiquer par écrit
les données personnelles le concernant, indépendamment de
prétentions fondées sur le droit des assurances, et celui
qui présente cette requête dans le cadre de l'instruction
d'une demande de prestations. Or, si dans le premier cas la
jurisprudence lui reconnaît un tel droit (ATF 125 II 323
consid. 3b et les références), il n'y a aucune raison de le
lui refuser dans le second.
Peu importe, à cet égard, ce que prévoit la réglemen-
tation spécifique au domaine concerné en matière de commu-
nication du dossier. S'agissant de l'assurance-invalidité,
l'art. 73bis al. 4 RAI donne à l'OFAS la compétence

d'édicter des instructions «sur les détails de la
procédure... de consultation du dossier», ce qu'il a fait
dans sa circulaire sur l'obligation de garder le secret et
sur la communication des données dans le domaine de l'AVS/-
AI/APG/PC/AF. Dans sa version valable depuis le 1er janvier
2001, cette circulaire prévoit la possibilité de communi-
quer les données personnelles à la personne concernée
(ch. m. 25 ss), y compris, en principe, quand il s'agit de
renseignements et de dossiers médicaux (ch. m. 36). Une
réglementation analogue figurait antérieurement aux
ch. m. 18 et 25 de la circulaire valable lorsque les faits
déterminants en l'espèce se sont produits. Au demeurant, de
telles directives administratives, selon une jurisprudence
constante, n'ont pas valeur de règles de droit et ne lient
pas le juge (ATF 125 V 379 consid. 1c).
Par ailleurs, lorsqu'il a demandé à recevoir une copie
du rapport d'expertise, le recourant n'était pas assisté
par un avocat. Il est vrai que l'Office AI a communiqué le
rapport en question à son médecin traitant. Pourtant, à
aucun moment l'office n'a prétendu que la connaissance, par
le recourant, du rapport d'expertise était de nature à lui
être dommageable, ce qui, selon les instructions de l'OFAS
(ancien ch. m. 25 et actuel ch. m. 36 de la circulaire pré-
citée), aurait pu justifier l'envoi du rapport au médecin
traitant plutôt qu'à l'assuré (comp. art. 8 al. 3 LPD). Or,
ici encore, on ne voit pas pourquoi il faudrait se montrer
plus restrictif que dans le cadre de la législation fédé-
rale sur la protection des données, de sorte qu'on ne
saurait considérer, en principe, que la communication au
médecin traitant de l'assuré d'une copie d'un rapport
d'expertise épuise le droit de ce dernier à la communi-
cation écrite d'un tel document (comp. ATF 123 II 541
consid. 3d).
On ajoutera qu'un auteur a récemment soutenu que le
droit de se faire remettre une copie du rapport d'expertise
dont on a fait l'objet, dans le domaine de l'assurance-

invalidité, peut se déduire directement de la garantie
constitutionnelle du droit d'être entendu (Stéphane Blanc,
La procédure administrative en assurance-invalidité, thèse
Fribourg 1999, p. 281, qui se fonde sur la thèse
d'Alexander Dubach, Das Recht auf Akteneinsicht, Zurich
1990, p. 165, dont l'opinion est à vrai dire plus nuancée
et se rapporte à un cas assez particulier traité par la
jurisprudence [consid. 4 non publié de l'arrêt ATF
105 Ia 285]).
Quoi qu'il en soit, au vu de ce qui précède, le refus
de l'intimé de communiquer au recourant personnellement une
copie du rapport d'expertise médicale du COMAI du 23 mars
2000 n'était pas justifié, de sorte que sur ce point le
recours apparaît bien fondé.

2.- a) Par un second moyen, le recourant soutient
qu'en refusant de lui remettre une traduction du rapport
d'expertise établi par le COMAI, l'intimé a enfreint le
principe de l'égalité des armes tel qu'il résulte du droit
à un procès équitable garanti par les art. 29 al. 1 Cst. et
14 du Pacte international relatif aux droits civils et
politiques du 16 décembre 1966, en vigueur pour la Suisse
depuis le 18 septembre 1992 (RS 0.103.2).
Le tribunal n'étant pas lié par les motifs que les
parties invoquent (art. 114 al. 1 i.f. et 132 OJ), il n'est
pas nécessaire de se prononcer sur le bien-fondé de ce
moyen dans le contexte du cas d'espèce car, en réalité,
c'est sur un autre terrain que le grief doit être examiné.

b) aa) Aux termes de l'art. 8 al. 2 Cst., nul ne doit
subir de discrimination du fait notamment de sa langue.
D'autre part, la
liberté de la langue est garantie (art. 18
Cst.). Selon l'art. 70 al. 1 Cst., les langues officielles
de la Confédération sont l'allemand, le français et l'ita-
lien, le romanche étant aussi langue officielle pour les
rapports que la Confédération entretient avec les personnes

de langue romanche. Les cantons déterminent leurs langues
officielles (art. 70 al. 2, première phrase Cst.). Selon
l'art. 6 de la Constitution du canton de Berne (RSB 101.1),
le français et l'allemand sont les langues nationales et
officielles de ce canton (al. 1er); le français est la
langue officielle dans le Jura bernois (al. 2 let. a) et
toute personne peut s'adresser dans la langue officielle de
son choix aux autorités compétentes pour l'ensemble du
canton (al. 4).
D'après la jurisprudence rendue sous l'empire de la
Constitution de 1874, la liberté de la langue faisait
partie des libertés non écrites de la Constitution fédé-
rale. Elle garantit l'usage de la langue maternelle, ou
d'une autre langue proche, voire de toute langue de son
choix. Lorsque cette langue est en même temps une langue
nationale, son emploi était en outre protégé par l'art. 116
al. 1 aCst. (ATF 122 I 238 consid. 2a et b, 121 I 198 con-
sid. 2a, 106 Ia 302 consid. 2a). Dans les rapports avec les
autorités toutefois, la liberté de la langue est limitée
par le principe de la langue officielle. En effet, sous
réserve de dispositions particulières (par exemple les
art. 5 par. 2 et 6 par. 3 lettre a CEDH), il n'existe en
principe aucun droit à communiquer avec les autorités dans
une autre langue que la langue officielle (Praxis 2000
n° 40 p. 217 consid. 3). Ces principes ont été formalisés
dans la Constitution de 1999, notamment aux art. 18 et 70
(cf. Marco Borghi, La liberté de la langue et ses limites,
in: Daniel Thürer R/J Jean-François Aubert T/J Jörg-Paul
Müller
[éd.], Droit constitutionnel suisse, Zurich 2001, § 38).

bb) En l'espèce, il est constant que le recourant est
un francophone établi dans le Jura bernois. Dès le début de
la procédure d'expertise ordonnée par l'intimé, il a deman-
dé à pouvoir se faire examiner par des médecins ou dans un
hôpital de sa région, déclarant qu'il avait peur de se pré-
senter «devant une commission médicale de langue allemande,

comprenant mal (son) dossier». Cette question a été au
centre du différend qui l'oppose à l'Office AI, indépendam-
ment du problème de fond. Or, on ne comprend pas pourquoi
l'office s'est obstiné, dans ces circonstances, à faire
examiner le recourant par les médecins d'un COMAI situé en
Suisse alémanique, alors que de tels centres existent aussi
en Suisse romande. Il paraît s'être agi, en l'occurrence,
d'une mesure purement vexatoire, sans aucune justification
objective, d'ordre médical notamment.
Or, compte tenu du statut particulier de cette insti-
tution propre à l'assurance-invalidité et de l'importance
de son rôle dans l'instruction des faits d'ordre médical
(cf. l'art. 72bis RAI et ATF 123 V 177 consid. 4), on doit
exiger de la part des organes d'exécution le strict respect
des droits fondamentaux des assurés qui doivent, dans le
cadre de leur obligation de collaborer à l'établissement
des faits pertinents, se soumettre à une expertise auprès
d'un tel centre d'observation médicale. La liberté de la
langue d'une part et la garantie de ne pas subir de discri-
mination en raison de sa langue d'autre part s'inscrivent
au rang de ces droits.
Cela ne signifie cependant pas qu'un assuré peut de-
mander dans tous les cas qu'une expertise médicale soit
conduite et rédigée dans une langue qu'il comprend. Il
faut, à cet égard, s'en tenir à la règle d'après laquelle,
on l'a vu, seules les langues officielles de la Confédéra-
tion peuvent être utilisées dans les relations avec les
autorités (cf. Albertini, op. cit., p. 342 ss). Restent
réservées les règles procédurales relatives à l'assistance
d'un interprète qui ne sont toutefois pas en cause ici.
Dès lors, quand un assuré qui doit se soumettre à une
expertise dans un COMAI demande à l'office compétent de
désigner un Centre d'observation médicale où l'on s'exprime
dans l'une des langues officielles de la Confédération
qu'il maîtrise, il y a lieu, en principe, de donner suite à
sa requête, à moins que des raisons objectives justifient

une exception. A défaut, l'assuré a le droit non seulement
d'être assisté par un interprète lors des examens médicaux
- comme cela a d'ailleurs été le cas en l'espèce - mais
encore d'obtenir gratuitement une traduction du rapport
d'expertise du COMAI.
Certes, la jurisprudence ne reconnaît pas à un assuré
ou à son mandataire le droit de se faire traduire les
pièces du dossier rédigées dans une langue qu'il ne
maîtrise pas ou de manière seulement imparfaite (RCC 1983
p. 392; arrêt non publié V. du 3 novembre 1992, I 50/92).
Sur ce point, le jugement attaqué est conforme à la loi.
Mais, comme on l'a vu, ce n'est pas la question qui se pose
ici.
En l'occurrence, l'office intimé n'a jamais soutenu
qu'il existait une raison quelconque empêchant que l'exper-
tise du recourant ait lieu dans un COMAI situé en Suisse
romande, alors même que celui-ci l'avait demandé dès qu'il
a été informé qu'il devrait se soumettre à une telle
expertise.
C'est dès lors à bon droit que le recourant se plaint
de n'avoir pu obtenir de l'office intimé une traduction
française du rapport établi le 23 mars 2000 par le COMAI.
Le recours est bien fondé sur ce point également. Aussi
convient-il d'annuler le jugement attaqué ainsi que la
décision administrative du 18 août 2000 et d'inviter
l'intimé à faire parvenir au recourant, à bref délai, une
copie du rapport susmentionné, accompagnée d'une traduction
en langue française. L'office reprendra ensuite l'instruc-
tion de la cause au fond, après avoir donné au recourant
l'occasion de s'exprimer sur le contenu de cette expertise
médicale.

3.- L'intimé qui succombe supportera les dépens de
l'instance fédérale (art. 159 al. 1 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances

p r o n o n c e :

I. Le recours est admis et le jugement du Tribunal
administratif du canton de Berne du 14 décembre 2000,
ainsi que la décision de l'Office AI du canton de
Berne du 18 août 2000 sont annulés.

II. L'Office AI du canton de Berne communiquera au recou-
rant, à bref délai, une copie du rapport d'expertise
médicale du COMAI du 23 mars 2000, accompagnée d'une
traduction française, puis reprendra l'instruction de
la cause et rendra une nouvelle décision.

III. Il n'est pas perçu de frais de justice.

IV. L'Office AI du canton de Berne versera au recourant la
somme de 2500 fr. (y compris la taxe sur la valeur
ajoutée) à titre de dépens pour l'instance fédérale.

V. Le Tribunal administratif du canton de Berne statuera
sur les dépens pour la procédure de première instance,
au regard de l'issue du procès de dernière instance.

VI. Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au
Tribunal administratif du canton de Berne, Cour des
affaires de langue française, et à l'Office fédéral
des assurances sociales.

Lucerne, le 10 août 2001

Au nom du
Tribunal fédéral des assurances
Le Président de la Ière Chambre :

Le Greffier :


Synthèse
Numéro d'arrêt : I.78/01
Date de la décision : 10/08/2001
Cour des assurances sociales

Analyses

Art. 128 OJ; art. 8 LPD; art. 73bis RAI: Droit d'un assuré de consulter le dossier. - Compétence du juge des assurances sociales - à l'exclusion des juridictions compétentes en matière de protection des données - pour connaître d'un litige relatif à la consultation du dossier par un assuré, dans le cadre d'une procédure concernant des prétentions découlant du droit des assurances sociales. - Le refus d'un office AI de communiquer une copie d'un rapport d'expertise d'un Centre d'observation médicale de l'assurance-invalidité (COMAI) à un assuré non représenté par un avocat, assorti d'une autorisation de consulter le dossier au siège de l'autorité, n'est pas compatible avec la jurisprudence relative à la communication des données personnelles dans le domaine des assurances sociales. Art. 8 al. 2, art. 18, art. 70 al. 1 et 2 Cst.: Traduction du rapport d'expertise d'un COMAI dans une langue que l'assuré comprend. A moins que des raisons objectives justifient une exception, il y a lieu en principe de donner suite à la demande d'un assuré de désigner un Centre d'observation médicale où l'on s'exprime dans l'une des langues officielles de la Confédération qu'il maîtrise. A défaut, l'intéressé a le droit non seulement d'être assisté par un interprète lors des examens médicaux mais encore d'obtenir gratuitement une traduction du rapport d'expertise du COMAI.


Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2001-08-10;i.78.01 ?
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