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09/08/2001 | SUISSE | N°B.53/00

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 09 août 2001, B.53/00


«AZA 7»
B 53/00 Mh

IIe Chambre

composée des Juges fédéraux Lustenberger, Président, Rüedi
et Ferrari; von Zwehl, Greffière

Arrêt du 9 août 2001

dans la cause

A.________, recourant, représenté par Maître Jean-Luc
Colombini, avocat, rue Saint-Pierre 2, 1003 Lausanne,

contre

Winterthur-Columna, Fondation pour la prévoyance profes-
sionnelle, Paulstrasse 9, 8401 Winterthur, intimée,

et

Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne

A.- A.________ tra

vaillait comme ouvrier tâcheron. Le
1er mars 1991, il a été engagé, sur la base d'un contrat
oral, par X.________ SA pour effectue...

«AZA 7»
B 53/00 Mh

IIe Chambre

composée des Juges fédéraux Lustenberger, Président, Rüedi
et Ferrari; von Zwehl, Greffière

Arrêt du 9 août 2001

dans la cause

A.________, recourant, représenté par Maître Jean-Luc
Colombini, avocat, rue Saint-Pierre 2, 1003 Lausanne,

contre

Winterthur-Columna, Fondation pour la prévoyance profes-
sionnelle, Paulstrasse 9, 8401 Winterthur, intimée,

et

Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne

A.- A.________ travaillait comme ouvrier tâcheron. Le
1er mars 1991, il a été engagé, sur la base d'un contrat
oral, par X.________ SA pour effectuer la pose des parois
et des plafonds de Y.________. En raison de cet engagement,
A.________ a été affilié, le 9 avril 1991, à la fondation
pour la prévoyance professionnelle Winterthur Columna (ci-
après : la fondation). Par lettre du 7 janvier 1993, l'em-

B 53/00 Mh

ployeur a demandé à la fondation de faire sortir l'assuré
de l'institution de prévoyance, ce qu'elle a fait en éta-
blissant au nom de l'intéressé une police de libre passage
de 12 570 fr. avec valeur au 10 décembre 1992 (décompte de
sortie du 12 janvier 1993).
Le 5 février 1993, X.________ SA a fait parvenir à la
Caisse nationale suisse en cas d'accidents (CNA) une décla-
ration d'accident LAA, indiquant que le 25 janvier 1993,
A.________ s'était blessé à l'épaule en soulevant une
plaque de couverture sur le chantier de Y.________.
Depuis cet accident, le prénommé n'a jamais pu repren-
dre son travail à plein temps. La CNA a pris en charge le
cas et lui a versé des indemnités journalières, tandis que
l'Office AI du canton du Valais l'a mis au bénéfice d'une
demi-rente d'invalidité, fondée sur un taux de 65 %, dès le
1er janvier 1994 (décision du 23 août 1995), puis d'une
rente entière à partir du 1er décembre 1995 (décision du
6 février 1997). De son côté, la fondation a refusé d'al-
louer des prestations, arguant que A.________ n'était plus
assuré auprès d'elle au moment déterminant dès lors que son
contrat de travail avait pris fin le 10 décembre 1992. Se
fondant sur une lettre de l'employeur du 28 juin 1996, dans
laquelle ce dernier laissait entendre que plus aucun tra-
vail n'avait été confié à A.________ après son départ de
l'entreprise au mois de décembre 1992, la fondation mettait
également en doute le fait que l'accident annoncé se fût
produit sur le chantier de Y.________.

B.- Par mémoire du 22 décembre 1997, A.________ a
ouvert action devant le Tribunal des assurances du canton
de Vaud, en concluant à ce que la fondation fût condamnée à
lui verser les prestations légales et contractuelles dues à
la suite de son accident du 25 janvier 1993. Il faisait
valoir qu'il avait bel et bien été victime d'un accident de
travail alors qu'il se trouvait - pour le compte de
X.________ SA - sur le chantier de Y.________ et contestait
que son contrat de travail eût pris fin avant la survenance
de cet accident.

Par jugement du 21 septembre 1999, le tribunal a reje-
té la demande.

C.- A.________ interjette recours de droit adminis-
tratif contre ce jugement, dont il requiert l'annulation,
en reprenant ses conclusions formulées devant la juridic-
tion cantonale. A l'appui de son recours, il produit un
témoignage écrit de l'ancien directeur de la société,
B.________, certifiant que l'accord conclu en 1991 incluait
également les travaux de finition et de retouche à faire le
cas échéant sur l'ouvrage.
La fondation renonce à se déterminer, alors que l'Of-
fice fédéral des assurances sociales propose l'admission du
recours et le renvoi de la cause à la juridiction cantonale
pour nouvelle décision après instruction sur le degré d'in-
validité du recourant.

Considérant en droit :

1.- Dans la procédure de recours concernant l'octroi
ou le refus de prestations d'assurance, le pouvoir d'examen
du Tribunal fédéral des assurances n'est pas limité à la
violation du droit fédéral - y compris l'excès et l'abus du
pouvoir d'appréciation - mais s'étend également à l'oppor-
tunité de la décision attaquée. Le tribunal n'est alors pas
lié par l'état de fait constaté par la juridiction infé-
rieure, et il peut s'écarter des conclusions des parties à
l'avantage ou au détriment de celles-ci (art. 132 OJ).

3.- Selon l'art. 23 LPP, ont droit à des prestations
d'invalidité les personnes qui sont invalides à raison de
50 pour cent au moins au sens de l'AI et qui étaient assu-
rées lorsqu'est survenue l'incapacité de travail dont la
cause est à l'origine de l'invalidité.
L'art. 10 LPP règle impérativement le début et la fin
de l'assurance obligatoire. Celle-ci commence en même temps

que les rapports de travail; elle prend fin, entre autres
éventualités, en cas de dissolution des rapports de tra-
vail. En matière de prévoyance plus étendue, la dissolution
des rapports de travail est également un motif qui met fin
à l'assurance (ATF 120 V 20 consid. 2a). Le moment de la
dissolution des rapports de travail est celui où, juri-
diquement, les rapports de travail ont pris fin, confor-
mément aux règles des art. 334 ss CO, c'est-à-dire en
principe à l'expiration du délai légal ou contractuel de
congé (Brühwiler, Die betriebliche Personalvorsorge in der
Schweiz, p. 507, note 72; voir aussi Meyer-Blaser, Résilia-
tion abusive du contrat de travail, nouvelles règles du
Code des obligations en la matière et incidences de ces
dernières dans le domaine de l'assurance sociale, en parti-
culier sur le maintien de la couverture d'assurance et le
droit aux prestations, Colloque de l'IRAL 1994, p. 179
sv.). Peu importe la date à laquelle le travailleur, effec-
tivement, a quitté l'entreprise (ATF 115 V 34 consid. 5 in
fine et les références). Toutefois, pendant 30 jours après
la dissolution des rapports de travail, le salarié demeure
assuré auprès de l'ancienne institution de prévoyance pour
les risques de décès et d'invalidité (art. 10 al. 3 LPP
dans sa teneur en vigueur jusqu'au 31 décembre 1994).

3.- Les premiers juges ont confirmé le refus de la
fondation d'allouer des prestations en se basant essentiel-
lement sur l'avis de sortie du 7 janvier 1993. Ils en ont
inféré que le contrat de travail entre X.________ SA et
A.________ - et partant la couverture d'assurance obliga-
toire LPP - avait pris fin au 31 décembre 1992. Ils ont
toutefois admis que l'entreprise avait demandé à son ancien
employé d'effectuer encore des «travaux complémentaires»
sur le chantier de Y.________ le 23 janvier 1993, date de
la survenance de l'accident, mais à leurs yeux, il s'agi-
ssait là d'un nouvel engagement, de brève durée et limité à
une tâche particulière, qui «ne (faisait) pas revivre
l'affiliation à l'institution de prévoyance» dès lors que

la rémunération perçue pour ce travail n'atteignait pas le
minimum légal LPP alors en vigueur.
Le recourant réfute cette thèse et reproche à la juri-
diction cantonale d'avoir attribué une importance décisive
à l'avis de sortie du 7 janvier 1993. Fort du témoignage de
l'ancien directeur de X.________ SA, il affirme qu'il n'y a
jamais eu interruption des rapports de service au mois de
décembre 1992 et conclusion d'un nouveau contrat de travail
au mois de janvier 1993, mais un seul et même rapport de
travail échéant «à l'achèvement complet des travaux y
compris les retouches et finitions nécessaires».

4.- Il n'y a pas lieu de mettre en doute le fait que
le recourant a été victime d'un accident pendant qu'il tra-
vaillait au service de X.________ SA. Suffisamment de
pièces versées au dossier corroborent la version des faits
donnée par le recourant à ce sujet (cf. en particulier la
déclaration d'accident LAA remplie par l'employeur et le
témoignage écrit de C.________, présent lors de l'événement
accidentel). En définitive, la question centrale qui se
pose est de savoir si les rapports de travail entre les
intéressés avaient pris fin le 31 décembre 1992 pour faire
ensuite place à un nouvel engagement temporaire au mois de
janvier 1993 ou si, au contraire, les travaux de finition
accomplis par le recourant le 23 janvier 1993 l'avaient été
dans le cadre du contrat initial conclu le 1er mars 1991.
La qualité d'assuré du recourant dépend de la réponse
apportée à cette question.

5.- a) Sous réserve du respect des dispositions impé-
ratives et relativement impératives régissant la matière,
c'est la volonté des parties qui fait règle quant à la
durée du contrat de travail (cf. Pierre Engel, Contrats de
droit suisse, 2e éd. Berne 2000, p. 356). Pour déterminer
si il y a eu effectivement accord entre les parties, il y a
lieu de rechercher d'abord leur réelle et commune intention
(art. 18 al. 1 CO), le cas échéant empiriquement, sur la

base d'indices. En l'occurrence, le témoignage écrit de
B.________ - ancien directeur de X.________ SA qui dis-
posait de la signature individuelle -, vient confirmer les
déclarations du recourant, selon lesquelles la durée prévue
du contrat s'étendait jusqu'à la fin des travaux de montage
des parois et plafonds de Y.________, retouches et fini-
tions comprises. Partant, on doit admettre que les rapports
de travail n'avaient pas pris fin le 10 décembre 1992 comme
le prétend la fondation, ni même le 31 décembre 1992, dates
dont on ne voit pas, au demeurant, à quoi elles correspon-
dent dans le cours du déroulement du chantier.
Devant l'instance cantonale, l'intimée soutenait
encore que les parties au contrat auraient mis un terme à
leurs relations par accord mutuel le 10 décembre 1992,
comme cela est possible, indépendamment du caractère
déterminé ou indéterminé de la durée du travail convenu
(cf. Brunner/Bühler/Waeber, op. cit., note 14 ad art. 335
CO). L'existence d'une volonté commune de rompre le contrat
avant son échéance n'est toutefois pas établie dans le cas
particulier. A cet égard, l'avis de sortie de l'institution
de prévoyance du 7 janvier 1993 ne saurait, contrairement à
l'opinion de l'intimée, tenir lieu de preuve pour une rési-
liation conventionnelle. Tout au plus un tel avis indique-
t-il que l'employeur pensait - à tort, comme cela s'est
avéré par la suite - que le chantier ne nécessiterait plus
l'intervention du recourant. D'ailleurs, dans un question-
naire à l'intention de l'AI que l'employeur a rempli plus
tard, le 16 août 1994, c'est la date du 16 février 1993 qui
a été mentionnée comme terme du contrat de travail.

b) Il découle de ce qui précède qu'au moment de l'ac-
cident, le 23 janvier 1993, les rapports de travail entre
X.________ SA et le recourant subsistaient, si bien que ce
dernier était obligatoirement assuré en prévoyance profes-
sionnelle (art. 10 al. 2 LPP).

Le recours est bien fondé, ce qui justifie l'annula-
tion du jugement entrepris et le renvoi de la cause aux
premiers juges afin qu'ils examinent les autres conditions
mises au droit à une rente d'invalidité puis rendent un
nouveau jugement.

6.- Le recourant qui obtient gain de cause a droit à
une indemnité de dépens à charge de l'intimée (art. 159
al. 1 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances

p r o n o n c e :

I. Le recours est admis et le jugement du 21 septembre
1999 du Tribunal des assurances du canton de Vaud est
annulé, la cause étant renvoyée à cette autorité pour
nouveau jugement au sens des considérants.

II. Il n'est pas perçu de frais de justice.

III. L'intimée versera au recourant une indemnité de dépens
(y compris la taxe à la valeur ajoutée) de 2000 fr.

IV. Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au
Tribunal des assurances du canton de Vaud et à
l'Office fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 9 août 2001

Au nom du
Tribunal fédéral des assurances
Le Président de la IIe Chambre :

La Greffière :


Synthèse
Numéro d'arrêt : B.53/00
Date de la décision : 09/08/2001
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2001-08-09;b.53.00 ?
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