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06/08/2001 | SUISSE | N°1A.236/2000

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 06 août 2001, 1A.236/2000


«/2»

1A.236/2000
1P.528/2000

Ie C O U R D E D R O I T P U B L I C
**********************************************

6 août 2001

Composition de la Cour: MM. les Juges Aemisegger, Président,
Vice-président du Tribunal fédéral, Favre et Mme Pont
Veuthey, Juge suppléante. Greffier: M. Thélin.

__________

Statuant sur les recours de droit administratif
et de droit public formés par

les époux A.________, représentés par Me Soli Pardo, avocat
à
Genève,

contrer>
l'arrêt rendu le 20 juin 2000 par le Tribunal administratif
du canton de Genève dans la cause qui oppose les recourants
à
...

«/2»

1A.236/2000
1P.528/2000

Ie C O U R D E D R O I T P U B L I C
**********************************************

6 août 2001

Composition de la Cour: MM. les Juges Aemisegger, Président,
Vice-président du Tribunal fédéral, Favre et Mme Pont
Veuthey, Juge suppléante. Greffier: M. Thélin.

__________

Statuant sur les recours de droit administratif
et de droit public formés par

les époux A.________, représentés par Me Soli Pardo, avocat
à
Genève,

contre

l'arrêt rendu le 20 juin 2000 par le Tribunal administratif
du canton de Genève dans la cause qui oppose les recourants
à
B.________, représenté par Me Eric Hess, avocat à Genève, et
au Département de l'aménagement, de l'équipement et du loge-
ment du canton de G e n è v e ;

(construction à proximité de la forêt)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- B.________ est propriétaire de la parcelle n°
2057 de la commune d'Hermance. Ce bien-fonds est classé en
zone de villas par le plan d'affectation annexé à la législa-
tion genevoise sur l'aménagement du territoire; il est en ou-
tre soumis à un règlement de quartier avec plan, adopté le
13
juin 1982 par le Conseil d'Etat du canton de Genève, qui dé-
finit le périmètre d'implantation de chaque logement. Le pro-
priétaire a demandé l'autorisation de construire une maison
familiale sur ce terrain; son projet a été soumis à
l'enquête
publique en novembre 1998. Les époux A.________, propriétai-
res d'une maison familiale sise sur la parcelle voisine n°
2062, se sont opposés à cette réalisation; ils ont fait va-
loir que l'implantation prévue se trouverait à proximité de
la forêt et que la distance légale de trente mètres, entre
la
lisière et le bâtiment, ne serait pas respectée.

En dépit de cette opposition, après que divers préa-
vis eurent été recueillis, le Département cantonal de l'amé-
nagement, de l'équipement et du logement a délivré l'autori-
sation de construire le 1er avril 1999, comportant une déro-
gation à la distance légale précitée. Les époux A.________
ont recouru sans succès contre cette décision, d'abord à la
commission de recours compétente, puis au Tribunal adminis-
tratif du canton de Genève. Cette juridiction a débouté les
recourants par arrêt du 20 juin 2000.

B.- Le Tribunal fédéral est saisi d'un recours de
droit administratif et d'un recours de droit public formés
par les époux A.________, tendant à l'annulation de ce der-
nier prononcé. Les recourants persistent à tenir le projet
pour contraire à la législation fédérale et cantonale sur
les

forêts, en raison d'une distance prétendument insuffisante
entre la lisière et la construction.

Invités à répondre, le propriétaire intimé conclut
au rejet des recours; le Tribunal administratif et le Dépar-
tement cantonal proposent également leur rejet. L'Office fé-
déral de l'environnement, des forêts et du paysage considère
le projet litigieux comme conforme à la législation fédérale
sur les forêts.

C.- A la demande du Juge délégué, le projet a été
soumis à la Commission consultative de la diversité biologi-
que du canton de Genève; le préavis de cet organe a été com-
muniqué aux parties et joint au dossier.

C o n s i d é r a n t e n d r o i t :

1.- En vertu de l'art. 84 al. 2 OJ, le recours de
droit public n'est recevable que dans la mesure où les
griefs
soulevés ne peuvent pas être présentés au Tribunal fédéral
par un autre moyen de droit, tel que le recours de droit ad-
ministratif.

a) Celui-ci est ouvert contre les décisions cantona-
les de dernière instance fondées sur le droit public fédéral
(art. 97, 98 let. g OJ), ou qui auraient dû être fondées sur
ce droit, à condition qu'aucune des exceptions légales ne
soit réalisée. Le recours de droit administratif est égale-
ment recevable contre des décisions fondées à la fois sur le
droit cantonal ou communal et sur le droit fédéral, dans la
mesure où la violation de dispositions de droit fédéral di-
rectement applicables est en jeu. Le Tribunal fédéral
examine
aussi, dans le cadre de cette procédure, les mesures prises
en vertu de dispositions cantonales d'exécution du droit fé-

déral dépourvues de portée indépendante; il examine en outre
les mesures prises sur la base d'autres dispositions cantona-
les, lorsque celles-ci présentent un rapport de connexité
suffisamment étroit avec les questions de droit fédéral à
élucider. Pour le surplus, en tant que l'acte attaqué est
fondé sur des dispositions cantonales qui n'ont pas ce rap-
port de connexité avec le droit fédéral, la voie du recours
de droit public est seule ouverte (ATF 124 II 409 consid.
1d/dd p. 414; voir aussi ATF 126 V 252 consid. 1a p.
253/254;
125 II 10 consid. 2a p. 13, 123 II 231 consid. 2 p. 233, 122
II 274 consid. 1a p. 277).

Le recours de droit administratif peut être formé
pour violation du droit fédéral, y compris les droits consti-
tutionnels (art. 104 let. a OJ; ATF 125 II 1 consid. 2a p.
5,
124 V 90 consid. 3 p. 92, 121 II 235 consid. 1 p. 237/238).
Le recours de droit public est recevable seulement pour vio-
lation des droits constitutionnels (art. 84 al. 1 let. a
OJ).

b) Aux termes de l'art. 17 de la loi fédérale du 4
octobre 1991 sur les forêts (LFo; RS 921.0), en vigueur de-
puis le 1er janvier 1993, les constructions et installations
projetées à proximité de la forêt ne peuvent être autorisées
que si elles n'en compromettent ni la conservation, ni le
traitement, ni l'exploitation (al. 1); les cantons fixent la
distance minimale appropriée qui doit séparer les construc-
tions et installations de la lisière de la forêt, compte
tenu
de la situation et de la hauteur prévisible du peuplement
(al. 2). Ces dispositions correspondent à celles qui étaient
prévues, auparavant, à l'art. 29 de l'ordonnance du 1er octo-
bre 1965 concernant la haute surveillance de la
Confédération
sur la police des forêts (RO 1965 p. 878, 1971 p. 1196).

Selon la jurisprudence, le principe d'après lequel
la forêt ne doit subir aucune atteinte du fait des construc-
tions établies à proximité est une règle de droit fédéral di-

rectement applicable, dont l'éventuelle violation peut être
déférée au Tribunal fédéral par la voie du recours de droit
administratif (ATF 112 Ib 320; voir aussi l'arrêt du 19 sep-
tembre 1997 in ZBl 1998 p. 444, consid. 1b); les règles can-
tonales sur la distance minimale entre les constructions et
la lisière de la forêt ont, elles, une portée indépendante
par rapport au droit fédéral et leur application ne peut
donc
être contestée, en principe, que par la voie du recours de
droit public (ATF 107 Ia 337 consid. 1b p. 338). Néanmoins,
en tant que lesdites règles imposent un examen de
l'incidence
du projet sur la conservation ou l'exploitation de la forêt,
un éventuel litige relève du recours de droit administratif
en raison de la connexité de cet examen avec l'application
de
l'art. 17 al. 1 LFo.

2.- Le Département a examiné la demande d'autorisa-
tion de construire sur la base de la loi cantonale du 2 juil-
let 1954 sur les forêts publiques et privées, alors en vi-
gueur. L'art. 13B de cette loi fixait un distance minimum de
trente mètres entre les lisières et les constructions (al.
1); le Département pouvait toutefois adopter des plans
fixant
l'alignement des constructions et le tracé des chemins en dé-
rogation à cette règle, à condition qu'il n'en résultât pas
d'atteinte à la valeur biologique de la lisière (al. 3).

La loi cantonale du 20 mai 1999 sur les forêts, en-
trée en vigueur le 15 novembre 1999, a remplacé le texte pré-
cité alors que le litige était pendant devant le Tribunal ad-
ministratif. La distance minimum reste fixée à trente mètres
(art. 11 al. 1). Des dérogations sont admissibles notamment
pour "des constructions respectant l'alignement fixé par un
plan d'affectation du sol en force au moment de l'entrée en
vigueur de la [...] loi ou s'inscrivant dans un alignement
de
constructions existantes, pour autant que la construction
nouvelle soit réalisée sur un terrain en zone à bâtir et si-
tuée à dix mètres au moins de la lisière de la forêt, et

qu'elle ne porte pas atteinte à la valeur biologique de la
lisière" (art. 11 al. 2 let. c). L'octroi d'une dérogation
est subordonné "aux intérêts de la conservation de la forêt
et de sa gestion, au bien-être des habitants, ainsi qu'à la
sécurité de ces derniers et des installations" (art. 11 al.
3); divers préavis, en particulier celui de la Commission
consultative de la diversité biologique du canton de Genève,
doivent être préalablement recueillis (art. 11 al. 2).

3.- a) Selon les recourants, après l'entrée en vi-
gueur de la nouvelle législation cantonale, le Tribunal ad-
ministratif ne pouvait plus statuer sans que ce dernier pré-
avis eût été obtenu. Celui-ci a donc été demandé dans le ca-
dre de la présente procédure; la commission interpellée a
émis un avis favorable, sans autres observations ni commen-
taires. Dans ces conditions, un éventuel vice de la
procédure
cantonale, au sujet de ce préavis, peut être considéré comme
réparé, sans qu'il soit nécessaire de renvoyer la cause à la
juridiction intimée (cf. ATF 115 Ib 472 consid. 2e/cc p. 489/
490).

b) Il ressort du dossier que la présence de forêt à
proximité de la parcelle n° 2057 a été constatée en 1997,
alors que le règlement de quartier était déjà adopté, et que
ce peuplement se trouve en dehors de la parcelle, séparé de
celle-ci par un chemin qui limite son extension. L'une des
constructions prévue par le règlement est déjà réalisée dans
la même situation, en bordure de ce chemin, sur la parcelle
voisine n° 2112.

Les recourants décrivent de façon très détaillée la
végétation constituant le peuplement, et ils soulignent lon-
guement la nécessité de veiller à sa conservation; ils n'a-
vancent toutefois aucun argument propre à rendre vraisembla-
ble que l'existence ou l'évolution de cette végétation
seront
sérieusement compromises par la présence d'une villa
nouvelle

sur la parcelle n° 2057. La conservation de la forêt ne né-
cessite pas que chaque arbre soit maintenu indéfiniment;
l'exploitation et l'entretien impliquent au contraire des
travaux d'abattage réguliers. Le fait que certains des
arbres
les plus grands seront peut-être abattus plus rapidement, en
raison de la présence d'habitations proches, ne suffit donc
pas à exclure l'octroi de l'autorisation de construire. La
lisière ne se trouvera pas sur le terrain du propriétaire
constructeur; elle en sera au contraire séparée par le
chemin
existant. Dans ces conditions, les autorités cantonales
n'abusent pas de leur pouvoir d'appréciation en jugeant que
la distance de dix mètres, qui sera effectivement maintenue
entre la villa et la lisière, est suffisante. L'arrêt
attaqué
n'apparaît donc contraire ni à l'art. 17 al. 1 LFo, ni aux
dispositions cantonales exigeant qu'une dérogation à la dis-
tance légale de trente mètres n'entraîne aucune atteinte à
la
valeur biologique de la lisière, ni aux intérêts de la con-
servation de la forêt.

c) Enfin, les recourants contestent que le règlement
de quartier du 13 juin 1982 soit équivalent à un plan d'af-
fectation du sol au sens de l'art. 11 al. 2 let. c de la nou-
velle loi cantonale. Ce grief n'a aucun rapport avec les
questions régies par la législation forestière fédérale, de
sorte qu'il ne peut être soulevé que par la voie du recours
de droit public. Or, les recourants n'ont pas qualité pour
agir par la voie de ce moyen de droit, conformément à l'art.
88 OJ, car la disposition qu'ils invoquent n'est pas desti-
née, même accessoirement, à protéger les intérêts des pro-
priétaires voisins (cf. ATF 125 II 440 consid. 1c p. 442,
119
Ia 362 consid. 1b p. 364).

4.- Le recours de droit administratif se révèle mal
fondé, de sorte qu'il doit être rejeté; le recours de droit
public est irrecevable, faute de qualité pour recourir. Les

époux A.________ doivent acquitter l'émolument judiciaire et
les dépens à allouer à l'intimé, qui obtient gain de cause.

Par ces motifs,

l e T r i b u n a l f é d é r a l :

1. Rejette le recours de droit administratif.

2. Déclare le recours de droit public irrecevable.

3. Met à la charge des recourants, solidairement en-
tre eux:
a) un émolument judiciaire de 4'000 fr.;
b) une indemnité de 3'000 fr. à payer à l'intimé à
titre de dépens.

4. Communique le présent arrêt en copie aux manda-
taires des parties, au Département de l'aménagement, de
l'équipement et du logement et au Tribunal administratif du
canton de Genève, ainsi qu'à l'Office fédéral de l'environne-
ment, des forêts et du paysage.

Lausanne, le 6 août 2001
THE/col

Au nom de la Ie Cour de droit public
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
Le Président, Le Greffier,


Synthèse
Numéro d'arrêt : 1A.236/2000
Date de la décision : 06/08/2001
1re cour de droit public

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2001-08-06;1a.236.2000 ?
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