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26/07/2001 | SUISSE | N°5C.94/2001

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 26 juillet 2001, 5C.94/2001


«/2»
5C.94/2001

IIe C O U R C I V I L E
*****************************

26 juillet 2001

Composition de la Cour: MM. les Juges Reeb, président,
Bianchi et Merkli. Greffier: M. Braconi.

_________

Dans la cause civile pendante
entre

1. A.________,
2. B.________, demandeurs et recourants, représentés par Me
Michel Renaud, avocat à Lausanne,

et

C.________, défenderesse et intimée, représentée par Me
Pierre del Boca, avocat à Lausanne;

(action en contesta

tion de revendication)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- a) Par jugement du 9 févrie...

«/2»
5C.94/2001

IIe C O U R C I V I L E
*****************************

26 juillet 2001

Composition de la Cour: MM. les Juges Reeb, président,
Bianchi et Merkli. Greffier: M. Braconi.

_________

Dans la cause civile pendante
entre

1. A.________,
2. B.________, demandeurs et recourants, représentés par Me
Michel Renaud, avocat à Lausanne,

et

C.________, défenderesse et intimée, représentée par Me
Pierre del Boca, avocat à Lausanne;

(action en contestation de revendication)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- a) Par jugement du 9 février 1993, le Tribunal
civil
du canton de Bâle-Ville a condamné solidairement D.________
et E.________ à verser à A.________ et B.________ le montant
de 290'000 fr. avec intérêts à 5% l'an sur 70'000 fr. dès le
24 juin 1991, 5% sur 175'000 fr. dès le 15 juillet 1990 et
5%
sur 45'000 fr. dès le 15 février 1991, ainsi que 32'662
fr.15
à titre de dépens.

Le 28 juillet 1993, A.________ et B.________ ont fait
notifier à D.________ un commandement de payer les sommes
de:

- 175'000 fr. plus intérêts à 5% l'an du 15 juillet 1990,
- 70'000 fr. plus intérêts à 5% l'an du 24 juin 1991,
- 45'000 fr. plus intérêts à 5% l'an du 15 février 1991 et
- 32'622 fr.15 plus intérêts à 5% l'an du 18 mars 1993.

L'opposition du poursuivi a été définitivement levée le
13 décembre suivant par le Président du Tribunal du district
d'Echallens, décision qui est définitive et exécutoire
depuis
le 21 février 1994.

b) Le 28 mai 1993, C.________, femme du débiteur pour-
suivi, est devenue l'unique propriétaire de la parcelle
n° 176 de la commune de Z.________, que les époux avaient
acquise en société simple le 31 mai 1972; selon l'extrait du
registre foncier, la cause du transfert est une donation.

c) Lors de la continuation de la poursuite, A.________
et B.________ ont reçu, le 9 septembre 1994, un
procès-verbal
de saisie constatant une saisie de salaire de 1'000 fr. par
mois. Le 15 septembre suivant, ils ont requis la saisie du
bien-fonds acquis par C.________, faisant valoir que le
transfert était fictif et avait pour seul but de léser les

droits des créanciers. Le 25 octobre, l'office des
poursuites
leur a communiqué le procès-verbal de saisie de l'immeuble
en
question et leur a imparti un délai de dix jours pour ouvrir
action.

B.- Par demande du 4 novembre 1994, A.________ et
B.________ ont conclu, avec suite de frais et dépens, à ce
que la revendication d'C.________ soit écartée et à ce que
l'immeuble litigieux soit saisi à leur profit.

Statuant, par défaut de la défenderesse, le 20 octobre
2000, la Cour civile du Tribunal cantonal vaudois a débouté
les demandeurs.

C.- A.________ et B.________ interjettent un recours en
réforme au Tribunal fédéral contre cette décision, concluant
principalement au rejet de la revendication, subsidiairement
à l'annulation du jugement attaqué et au renvoi de la cause
à
l'autorité inférieure pour nouvelle décision dans le sens
des
considérants.

L'intimée propose le rejet du recours.

C o n s i d é r a n t e n d r o i t :

1.- Exercé à temps contre une décision finale rendue
dans une contestation civile (ATF 93 II 436 consid. 1 p.
437;
81 II 82 consid. 1 in fine p. 83/84) par le tribunal suprême
du canton, le présent recours est recevable sous l'angle des
art. 44, 48 al. 1 et 54 al. 1 OJ; la valeur litigieuse étant
manifestement atteinte (cf. ATF 81 II 309), il l'est aussi
au
regard de l'art. 46 OJ.

2.- Comme l'a retenu la Cour civile, la présente cause
appelle l'application de l'ancien droit (Schüpbach, Droit et
action révocatoires, N 22 ss ad art. 292 LP); ce point
n'est,
d'ailleurs, pas remis en discussion.

3.- La cour cantonale a, en substance, rejeté l'action
pour le motif que les demandeurs n'étaient porteurs d'«aucun
acte de défaut de biens, provisoire ou définitif».

a) Il ressort des constatations de la décision attaquée
que, dans le cadre de la continuation de la poursuite
dirigée
contre D.________, les recourants ont obtenu, le 9 septembre
1994, un procès-verbal de saisie. Or, celui-ci peut tenir
lieu d'acte de défaut de biens provisoire même s'il ne le
mentionne pas expressément (ATF 75 IV 106 consid. 1 p. 110
in
fine) et, partant, conférer aux créanciers le droit d'agir
en
révocation selon les art. 285 ss aLP (art. 115 al. 2 aLP;
cf.
infra, let. b); c'est au juge civil qu'il appartient de le
qualifier pour les besoins de la cause (arrêt non publié de
la Chambre des poursuites et des faillites du 26 novembre
1937, in: SJ 1938 p. 365).

Lorsque, après avoir été saisi pendant une année, le
produit de la saisie de salaire se révèle insuffisant pour
désintéresser les poursuivants, l'office doit leur délivrer
un acte de défaut de biens; une saisie complémentaire ou une
reprise de la saisie de salaire dans la même poursuite sont
prohibées (Mathey, La saisie de salaire et de revenu, thèse
Lausanne 1989, p. 98 ss et les citations). Or, vu les sommes
en poursuite et la retenue imposée par l'office (cf. supra,
let. A/a et c), force est d'admettre que le procès-verbal de
saisie revêt, en l'espèce, la valeur d'un acte de défaut de
biens provisoire (cf. ATF 103 III 97 consid. 1 p. 104).

b) L'action en contestation de revendication peut être
motivée par le fait que le tiers a acquis l'objet litigieux

au moyen d'un acte juridique susceptible d'être révoqué,
pour
autant que le demandeur soit titulaire d'un acte de défaut
de
biens conformément à l'art. 285 al. 2 ch. 1 aLP (ATF 107 III
118 consid. 3 et les références citées; Schüpbach, op. cit.,
N 69, 211 et 225 ad art. 285 LP, avec d'autres citations).
Le
créancier qui, comme en l'occurrence, n'est porteur que d'un
acte de défaut de biens provisoire doit obtenir la
délivrance
d'un acte de défaut de biens définitif avant qu'intervienne
le jugement sur l'action révocatoire, soit sur la base d'une
réquisition de vente présentée par lui, soit ensuite de réa-
lisation sur requête d'un autre poursuivant (ATF 103 III 97
consid. 1 p. 103 et les arrêts cités). Toutefois, lorsque le
caractère révocable d'un acte juridique doit être tranché à
l'occasion d'un procès en revendication - donc à un stade où
le créancier n'est pas en mesure de demander la réalisation
et d'obtenir un acte de défaut de biens définitif -, il faut
qu'il soit possible, sur la base de l'acte de défaut de
biens
provisoire, non seulement d'exciper de la révocation, mais
encore de conduire le procès jusqu'au jugement (ATF 115 III
138 consid. 2b p. 142; 103 III 97 consid. 1 p. 104). Si le
créancier n'est pas dispensé de produire un acte de défaut
de
biens définitif, ce n'est plus l'admission de l'action, mais
la réalisation de l'objet litigieux qui dépend alors de la
délivrance d'un tel acte dans la poursuite pendante (ATF 115
III 138 consid. 2c p. 143; A. Staehelin, in: Kommentar zum
SchKG, vol. III, N 31 ad art. 285 LP).

Il s'ensuit que, contrairement à l'avis des magistrats
précédents, les recourants avaient qualité pour se prévaloir
de la révocabilité de l'attribution dont a profité
l'intimée,
lors même qu'ils n'étaient pas porteurs d'un acte de défaut
de biens définitif.

4.- Vu ce qui précède, l'autorité cantonale a violé le
droit fédéral en déboutant les recourants. La demande ayant
été rejetée en raison du défaut de légitimation active, on
ne

peut donner suite au chef de conclusions tendant à ce que la
revendication soit écartée; partant, il convient de renvoyer
l'affaire à la juridiction inférieure pour qu'elle statue au
fond (cf. Messmer/Imboden, Die eidgenössischen Rechtsmittel
in Zivilsachen, p. 173/174 et la jurisprudence citée).

Il y a lieu de mettre les frais et dépens à la charge
de
l'intimée, qui succombe (art. 156 al. 1 et 159 al. 2 OJ).

Par ces motifs,

l e T r i b u n a l f é d é r a l :

1. Admet partiellement le recours, annule le jugement
attaqué et renvoie la cause à l'autorité inférieure pour
décision sur le fond.

2. Met à la charge de l'intimée:
a) un émolument judiciaire de 6'000 fr.,
b) une indemnité de 6'000 fr. à payer aux recourants à
titre de dépens.

3. Communique le présent arrêt en copie aux mandataires
des parties et à la Cour civile du Tribunal cantonal du can-
ton de Vaud.
__________

Lausanne, le 26 juillet 2001
BRA/moh

Au nom de la IIe Cour civile
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
Le Président, Le Greffier,


Synthèse
Numéro d'arrêt : 5C.94/2001
Date de la décision : 26/07/2001
2e cour civile

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2001-07-26;5c.94.2001 ?
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