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11/07/2001 | SUISSE | N°I.148/01

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 11 juillet 2001, I.148/01


«AZA 7»
I 148/01 Kt

IIe Chambre

composée des Juges fédéraux Lustenberger, Président, Rüedi
et Ferrari; Berthoud, Greffier

Arrêt du 11 juillet 2001

dans la cause

F.________, recourant, représenté par Me Charles Munoz,
avocat, rue du Casino 1, 1400 Yverdon-les-Bains,

contre

Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud,
avenue Général-Guisan 8, 1800 Vevey, intimé,

et

Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne

A.- Par décision du 3 jui

llet 1996, l'Office de l'as-
surance-invalidité pour le canton de Vaud (l'office AI) a
alloué une rente entière d'invalidité à F._...

«AZA 7»
I 148/01 Kt

IIe Chambre

composée des Juges fédéraux Lustenberger, Président, Rüedi
et Ferrari; Berthoud, Greffier

Arrêt du 11 juillet 2001

dans la cause

F.________, recourant, représenté par Me Charles Munoz,
avocat, rue du Casino 1, 1400 Yverdon-les-Bains,

contre

Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud,
avenue Général-Guisan 8, 1800 Vevey, intimé,

et

Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne

A.- Par décision du 3 juillet 1996, l'Office de l'as-
surance-invalidité pour le canton de Vaud (l'office AI) a
alloué une rente entière d'invalidité à F.________, fondée
sur un taux d'invalidité de 100 %. Pour statuer, l'office
AI s'est fondé notamment sur l'avis du docteur G.________,
lequel avait attesté que son patient était entièrement in-
capable d'exercer sa profession de maçon en raison de dou-
leurs aux épaules et aux hanches (rapport du 29 juin 1995).

Quant au docteur X.________, médecin à la Clinique
Y.________, il avait constaté que l'assuré avait cessé de
travailler en raison de douleurs, tout en observant qu'il
devrait bénéficier d'un reclassement professionnel (rapport
du 13 mars 1995).
Dans le cadre d'une révision du droit à la rente,
l'assuré a été examiné à nouveau à la Clinique Y.________,
où il a séjourné du 16 au 17 octobre 1997. A cette occa-
sion, les docteurs M.________ et P.________ ont constaté
que l'état de santé du patient ne s'était pas modifié de
manière significative depuis l'année 1995. Quant à sa
capacité de travail, les médecins prénommés l'ont évaluée à
50 % dans un emploi de maçon, le taux étant théoriquement
de 70 à 80 % dans une activité moins contraignante physi-
quement sans mouvements répétitifs et de force. Ils ont
ajouté que la persistance des douleurs entraînerait cer-
tainement une légère diminution du rendement dans une
quelconque activité (rapport du 31 mars 1998).
L'office AI a estimé que l'assuré pourrait occuper un
emploi adapté à son handicap, dans lequel il subirait une
perte de gain de 52 %. Dès lors, par décision du 13 octobre
1999, l'office AI a remplacé la rente entière par une demi-
rente.

B.- F.________ a recouru contre cette décision devant
le Tribunal des assurances du canton de Vaud, en concluant
au maintien de sa rente entière.
Par jugement du 9 novembre 2000, la juridiction canto-
nale a rejeté le recours.

C.- F.________ interjette recours de droit administra-
tif contre ce jugement dont il demande l'annulation, avec
suite de dépens, en concluant principalement au maintien de
la rente entière, subsidiairement à la mise en oeuvre d'une
expertise.

L'intimé conclut implicitement au rejet du recours.
L'Office fédéral des assurances sociales ne s'est pas dé-
terminé.

Considérant en droit :

1.- a) Selon l'art. 28 al. 1 LAI, l'assuré a droit à
une rente entière s'il est invalide à 66 2/3 % au moins, à
une demi-rente s'il est invalide à 50 % au moins, ou à un
quart de rente s'il est invalide à 40 % au moins; dans les
cas pénibles, l'assuré peut, d'après l'art. 28 al. 1bis
LAI, prétendre une demi-rente s'il est invalide à 40 % au
moins.
Selon l'art. 28 al. 2 LAI, pour l'évaluation de l'in-
validité, le revenu du travail que l'invalide pourrait
obtenir en exerçant l'activité qu'on peut raisonnablement
attendre de lui, après exécution éventuelle de mesures de
réadaptation et compte tenu d'une situation équilibrée du
marché du travail, est comparé au revenu qu'il aurait pu
obtenir s'il n'était pas invalide.

b) Selon l'art. 41 LAI, si l'invalidité d'un bénéfi-
ciaire de rente se modifie de manière à influencer le droit
à la rente, celle-ci est, pour l'avenir, augmentée, réduite
ou supprimée. Tout changement important des circonstances,
propre à influencer le degré d'invalidité, donc le droit à
la rente, peut donner lieu à une révision de celle-ci. Le
point de savoir si un tel changement s'est produit doit
être tranché en comparant les faits tels qu'ils se présen-
taient au moment de la décision initiale de rente et les
circonstances régnant à l'époque de la décision litigieuse
(ATF 125 V 369 consid. 2 et la référence; voir également
ATF 112 V 372 consid. 2b et 390 consid. 1b).

c) Selon un principe général du droit des assurances
sociales, l'administration peut reconsidérer une décision
formellement passée en force de chose jugée et sur laquelle
une autorité judiciaire ne s'est pas prononcée quant au
fond, à condition qu'elle soit sans nul doute erronée et
que sa rectification revête une importance notable (ATF
126 V 23 consid. 4b, 46 consid. 2b, 125 V 389 consid. 3 et
les arrêts cités).
En outre, par analogie avec la révision des décisions
rendues par les autorités judiciaires, l'administration est
tenue de procéder à la révision d'une décision entrée en
force formelle lorsque sont découverts des faits nouveaux
ou de nouveaux moyens de preuve, susceptibles de conduire à
une appréciation juridique différente (ATF 126 V 24 con-
sid. 4b, 46 consid. 2b et les références).
Pour juger s'il est admissible de reconsidérer une
décision, pour le motif qu'elle est sans nul doute erronée,
il faut se fonder sur la situation juridique existant au
moment où cette décision a été rendue, compte tenu de la
pratique en vigueur à l'époque; une modification de prati-
que ne saurait guère faire apparaître l'ancienne comme sans
nul doute erronée (ATF 117 V 17 consid. 2c et les arrêts
cités; voir aussi ATF 119 V 479 consid. 1b/cc et les réfé-
rences).
Par ailleurs, le juge peut entériner une décision de
révision rendue à tort pour le motif substitué que la déci-
sion de rente initiale était sans nul doute erronée, pour
autant que sa rectification revête une importance notable
(ATF 125 V 369-370 consid. 2 et 3).

2.- a) En l'espèce, l'intimé n'a pas cité expressément
l'art. 41 LAI à l'appui de sa décision litigieuse du 13 oc-
tobre 1999. Néanmoins, à la lecture de cette décision et de
la référence qui y est faite à l'art. 88a RAI, on doit
admettre que l'intimé avait retenu que l'invalidité du

recourant s'était modifiée de manière à influencer le droit
à la rente, entre le 3 juillet 1996 et le 13 octobre 1999.
Les conditions d'une révision, au sens de l'art. 41
LAI, ne sont pourtant manifestement pas remplies. En effet,
dans leur rapport du 31 mars 1998, les docteurs M.________
et P.________ ont constaté que l'état de santé du patient
ne s'était pas modifié de manière significative depuis
l'année 1995. Par ailleurs, il ne ressort pas non plus du
dossier que les circonstances économiques auraient évolué
de façon à changer le taux d'invalidité.

b) Quant aux premiers juges, ils ont nié que les con-
ditions d'une révision de la décision initiale de rente
aient été remplies. Selon eux, on se trouverait en présence
d'un cas de révision procédurale, dès lors que l'intimé a
remplacé la rente entière par une demi-rente en se fondant
sur des faits nouveaux constatés lors de l'expertise du
COMAI du 31 mars 1998.
Les faits constatés par les docteurs M.________ et
P.________ ne sont toutefois pas nouveaux, au sens où la
jurisprudence l'entend (consid. 1c ci-dessus), puisque les
responsables du COMAI ont indiqué que l'état de santé du
patient ne s'était pas modifié de manière significative
depuis l'examen qui avait été pratiqué au COMAI en 1995. Il
ne s'agit donc pas d'un cas de révision procédurale.

c) En réalité, l'intimé a reconsidéré sa décision de
rente, comme il l'a soutenu à juste titre dans sa duplique
du 21 mars 2000. Il faut dès lors déterminer si les condi-
tions d'une reconsidération étaient remplies, c'est-à-dire
examiner si l'octroi d'une rente entière d'invalidité au
recourant, en 1996, était manifestement erroné.

3.- a) Pour pouvoir calculer le degré d'invalidité,
l'administration (ou le juge, s'il y a eu un recours) a
besoin de documents que le médecin, éventuellement aussi

d'autres spécialistes, doivent lui fournir. La tâche du
médecin consiste à porter un jugement sur l'état de santé
et à indiquer dans quelle mesure et pour quelles activités
l'assuré est incapable de travailler. En outre, les données
médicales constituent un élément utile pour déterminer
quels travaux on peut encore, raisonnablement, exiger de
l'assuré (ATF 125 V 261 consid. 4, 115 V 134 consid. 2,
114 V 314 consid. 3c, 105 V 158 consid. 1).
En ce qui concerne, par ailleurs, la valeur probante
d'un rapport médical, ce qui est déterminant c'est que les
points litigieux aient fait l'objet d'une étude circonstan-
ciée, que le rapport se fonde sur des examens complets,
qu'il prenne également en considération les plaintes expri-
mées par la personne examinée, qu'il ait été établi en
pleine connaissance de l'anamnèse, que la description du
contexte médical et l'appréciation de la situation médicale
soient claires et enfin que les conclusions de l'expert
soient dûment motivées. Au demeurant, l'élément déterminant
pour la valeur probante n'est ni l'origine du moyen de
preuve ni sa désignation comme rapport ou comme expertise,
mais bel et bien son contenu (ATF 125 V 352 consid. 3a,
122 V 160 consid. 1c et les références).

b) En l'occurrence, le rapport des docteurs M.________
et P.________ du 31 mars 1998 remplit toutes les conditions
auxquelles la jurisprudence soumet la valeur probante d'un
tel document. Plus particulièrement, l'aspect psychique du
dossier a été examiné (cf. p. 8 du rapport). Dès lors et
quoi qu'en dise le recourant, ce rapport est pertinent pour
apprécier sa capacité de travail et déterminer le genre
d'activité qui reste exigible de sa part. La requête d'ex-
pertise est donc mal fondée.

c) Jadis, l'intimé n'avait pas instruit, comme il
aurait dû le faire (cf. art. 28 al. 2 LAI), le droit de
l'assuré à des mesures de réadaptation d'ordre profession-

nel pourtant recommandées par les médecins du COMAI (à
propos de la priorité de réadaptation sur la rente, voir
ATF 108 V 212 ss, 99 V 48). De plus, l'intimé avait omis
d'examiner la nature des activités lucratives qui restaient
encore accessibles au recourant, compte tenu de son handi-
cap, et l'étendue des revenus qu'il aurait pu en retirer.
En d'autres termes, la méthode d'évaluation de l'invalidité
du recourant, telle qu'elle a été appliquée en 1996, n'é-
tait pas conforme à la loi.
En tenant compte des restrictions de la capacité de
travail du recourant dues à son état de santé, l'intimé a
estimé, lors de la procédure de reconsidération, que l'in-
téressé subirait une perte de gain de 52 % dans un emploi
adapté à son handicap; dans sa réponse du 7 décembre 1999,
il a proposé un taux de 49 %. Assisté d'un mandataire pro-
fessionnel, le recourant n'a pas mis en cause la pertinence
des données sur lesquelles l'intimé et le Tribunal cantonal
se sont fondés pour établir le revenu d'invalide. Les va-
leurs retenues dans la décision du 13 octobre 1999 ne sont
donc pas litigieuses et paraissent, au demeurant, tout à
fait plausibles.
En conséquence, la décision de rente du 3 juillet 1996
était sans nul doute erronée au sens où la jurisprudence
l'entend (cf. consid. 1c ci-dessus), car le recourant s'é-
tait vu allouer une rente entière d'invalidité alors qu'il
n'avait droit qu'à une demi-rente, compte tenu du taux
d'invalidité de 52 % (cf. art. 28 al. 1 LAI). L'administra-
tion pouvait ainsi remplacer cette prestation par une demi-
rente, comme elle l'a fait le 13 octobre 1999.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances

p r o n o n c e :

I. Le recours est rejeté.

II. Il n'est pas perçu de frais de justice.

III. Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tri-
bunal des assurances du canton de Vaud et à l'Office
fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 11 juillet 2001

Au nom du
Tribunal fédéral des assurances
Le Président de la IIe Chambre :

Le Greffier :


Synthèse
Numéro d'arrêt : I.148/01
Date de la décision : 11/07/2001
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2001-07-11;i.148.01 ?
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