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06/07/2001 | SUISSE | N°2P.70/2001

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 06 juillet 2001, 2P.70/2001


«/2»
2P.70/2001 viz

IIe C O U R D E D R O I T P U B L I C
***********************************************

6 juillet 2001

Composition de la Cour: MM. les Juges Wurzburger, président,
Hartmann et Berthoud, suppléant. Greffière: Mme Dupraz.

___________

Statuant sur le recours de droit public
formé par

A.________, à Fribourg, représenté par CAP Protection juri-
dique, rue St-Martin 26, à Lausanne,

contre

l'arrêt rendu le 25 janvier 2001 par la Cour des assurances

sociales du Tribunal administratif du canton de Fribourg,
dans la cause qui oppose le recourant à la Caisse de compen-
...

«/2»
2P.70/2001 viz

IIe C O U R D E D R O I T P U B L I C
***********************************************

6 juillet 2001

Composition de la Cour: MM. les Juges Wurzburger, président,
Hartmann et Berthoud, suppléant. Greffière: Mme Dupraz.

___________

Statuant sur le recours de droit public
formé par

A.________, à Fribourg, représenté par CAP Protection juri-
dique, rue St-Martin 26, à Lausanne,

contre

l'arrêt rendu le 25 janvier 2001 par la Cour des assurances
sociales du Tribunal administratif du canton de Fribourg,
dans la cause qui oppose le recourant à la Caisse de compen-
sation FRSP-CIFA, rue de l'Hôpital 15, à Fribourg;

(art. 9 Cst.: allocations familiales)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- A.________ est père de deux enfants nées en 1985 et
1988. En 1992, il a été mis au bénéfice de mesures de réa-
daptation de l'assurance-invalidité (AI) et a ainsi perçu
des indemnités journalières AI jusqu'au 31 juillet 1999.

Le 18 novembre 1992, la Caisse de compensation du can-
ton de Fribourg (ci-après: la Caisse cantonale) a dénié à la
femme de l'intéressé le droit à des allocations familiales
cantonales pour enfant, parce que son mari percevait des in-
demnités journalières AI comportant une allocation pour en-
fant. Cette décision n'a pas fait l'objet d'un recours.

Dans le cadre des mesures de réadaptation AI,
A.________ a suivi, du 1er août 1995 au 31 juillet 1999, un
apprentissage de dessinateur en bâtiment durant lequel il a
continué à toucher des indemnités journalières AI, en plus
de son salaire d'apprenti. Il s'est inscrit au chômage après
son apprentissage.

Le 16 septembre 1999, l'intéressé a déposé une demande
d'allocations familiales. Par décision du 17 septembre 1999,
la Caisse de compensation FRSP-CIFA (ci-après: la CIFA) a
octroyé à A.________ des allocations familiales en faveur de
ses deux enfants pour la période du 1er septembre 1997 au 31
juillet 1999. Elle a considéré que les allocations familia-
les pour la période du 1er août 1995 au 31 août 1997 étaient
prescrites selon l'art. 13 al. 2 de la loi fribourgeoise du
26 septembre 1990 sur les allocations familiales (ci-après:
la loi cantonale ou LAF).

Statuant le 25 octobre 1999 sur réclamation, la CIFA a
confirmé sa décision du 17 septembre 1999.

B.- A.________ a alors porté sa cause devant la Cour
des assurances sociales du Tribunal administratif du canton
de Fribourg (ci-après: le Tribunal administratif) qui, par
arrêt du 25 janvier 2001, a rejeté le recours dans la mesure
où il était recevable. Le Tribunal administratif a notamment
relevé que le paiement rétroactif d'allocations familiales
au-delà de vingt-quatre mois (soit au-delà du 1er septembre
1997, cf. art. 13 al. 2 LAF) n'était possible que si l'inté-
ressé était dans l'ignorance des faits ouvrant droit à pres-
tations, mais pas dans celle de sa prétention juridique. En
outre, A.________ ne pouvait se prévaloir de la protection
de la bonne foi en invoquant la confiance placée dans le
maintien d'une pratique administrative longtemps suivie,
mais contraire à la loi.

C.- Agissant par la voie du recours de droit public,
A.________ demande au Tribunal fédéral, sous suite de frais,
d'annuler l'arrêt rendu le 25 janvier 2001 par le Tribunal
administratif et de renvoyer la cause à l'autorité intimée
pour nouvelle décision dans le sens des considérants. Il in-
voque l'art. 9 Cst. Il se plaint en substance de violation
des principes de l'interdiction de l'arbitraire et de la
bonne foi.

Le Tribunal administratif et la CIFA ont expressément
renoncé à répondre au recours.

C o n s i d é r a n t e n d r o i t :

1.- Le Tribunal fédéral examine d'office et librement
la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 126 I
207 consid. 1 p. 209).

a) Sous réserve d'exceptions non réalisées en l'espèce,
le recours de droit public est de nature purement cassatoire

(ATF 125 II 86 consid. 5a p. 96). Dans la mesure où le re-
courant demande autre chose que l'annulation de l'arrêt en-
trepris - en particulier le renvoi de la cause à l'autorité
intimée pour nouvelle décision dans le sens des considé-
rants -, ses conclusions sont irrecevables.

b) Au surplus, déposé en temps utile et dans les formes
prescrites par la loi par une personne ayant manifestement
qualité pour recourir, le présent recours remplit en princi-
pe les conditions de recevabilité des art. 84 ss OJ, de sor-
te que le Tribunal fédéral peut entrer en matière.

c) Selon l'art. 90 al. 1 lettre b OJ, l'acte de recours
doit - sous peine d'irrecevabilité - contenir "un exposé des
faits essentiels et un exposé succinct des droits constitu-
tionnels ou des principes juridiques violés, précisant en
quoi consiste la violation". Lorsqu'il est saisi d'un re-
cours de droit public, le Tribunal fédéral n'a donc pas à
vérifier, de lui-même, si l'acte attaqué est en tout point
conforme au droit et à l'équité; il n'examine que les moyens
de nature constitutionnelle, invoqués et suffisamment moti-
vés dans l'acte de recours (ATF 125 I 71 consid. 1c p. 76).
En outre, dans un recours pour arbitraire fondé sur l'art. 9
Cst. (cf. l'art. 4 aCst.), le recourant ne peut pas se con-
tenter de critiquer la décision entreprise comme il le fe-
rait dans une procédure d'appel où l'autorité de recours
peut revoir librement l'application du droit (ATF 107 Ia
186). Il doit préciser en quoi la décision attaquée serait
arbitraire, ne reposant sur aucun motif sérieux et objectif,
apparaissant insoutenable ou heurtant gravement le sens de
la justice (ATF 110 Ia 1 consid. 2a p. 3/4).

C'est à la lumière de ces principes que doit être ap-
préciée l'argumentation de l'intéressé.

2.- Le recourant se plaint que l'autorité intimée ait
fait une application arbitraire de l'art. 13 LAF.

a) Selon l'art. 13 al. 1 LAF, le droit de réclamer le
paiement des allocations familiales arriérées s'éteint cinq
ans après la fin du mois pour lequel elles étaient dues.
D'après l'art. 13 al. 2 1ère phrase LAF, si l'ayant-droit
présente sa demande plus de vingt-quatre mois après la nais-
sance du droit, les allocations familiales ne sont allouées
que pour les vingt-quatre mois précédant le dépôt de la de-
mande. Elles sont allouées pour une période antérieure si
l'ayant-droit ne pouvait pas connaître les faits ouvrant
droit à prestations et qu'il présente sa demande dans les
douze mois dès le moment où il en a eu connaissance (art. 13
al. 2 2e phrase LAF).

b) Le Tribunal administratif a estimé que l'intéressé
ne pouvait pas bénéficier d'allocations familiales pour la
période antérieure au 1er septembre 1997, car il n'était pas
dans l'ignorance des faits donnant lieu au versement d'allo-
cations familiales, mais dans celle du droit à ces dernières
en raison de la décision de la Caisse cantonale du 18 novem-
bre 1992.

Le recourant ne développe pas d'argumentation démon-
trant que le Tribunal administratif aurait violé l'art. 13
LAF en dissociant l'ignorance des faits ouvrant droit à
prestations de la méconnaissance de ce droit lui-même. En
outre, l'intéressé n'invoque pas l'ignorance de faits ou-
vrant droit à prestations, mais fait valoir qu'il ne con-
naissait pas le droit à des allocations familiales vu la
décision prise le 18 novembre 1992 par la Caisse cantonale.
Dès lors, la motivation du recourant ne satisfait pas aux
exigences strictes de l'art. 90 al. 1 lettre b OJ. Le moyen
tiré de la violation du principe de l'interdiction de l'ar-
bitraire n'est par conséquent pas recevable.

3.- Le recourant reproche à l'autorité intimée d'avoir
violé le principe de la bonne foi consacré par l'art. 9 Cst.
Il prétend avoir renoncé à solliciter des allocations fami-
liales pendant des années, notamment lorsqu'il a commencé
son apprentissage, en raison de la décision de la Caisse
cantonale du 18 novembre 1992. De plus, l'employeur de sa
femme, qui était alors le canton de Fribourg, avait confirmé
le bien-fondé de cette décision; cet avis, qui expliquait
que ladite décision n'ait pas été attaquée, avait également
incité l'intéressé à s'abstenir de demander des allocations
familiales. En outre, depuis 1992, aucun changement dans la
situation personnelle du recourant ne justifiait une nouvel-
le requête d'allocations familiales.

a) La jurisprudence relative au principe de la bonne
foi établie sur la base de l'art. 4 aCst. est encore valable
au regard des art. 5 al. 3 et 9 Cst. Le principe de la bonne
foi confère au citoyen, à certaines conditions (au sujet de
ces conditions, cf. ATF 114 Ia 209 consid. 3a p. 213/214 et,
spécialement à propos de renseignements inexacts, 121 V 65
consid. 2 p. 66/67), le droit d'exiger de l'autorité qu'elle
se conforme aux assurances ou renseignements erronés qu'elle
a donnés et ne trompe pas la confiance qu'à juste titre il a
placée dans ces assurances ou renseignements (cf. ATF 121 II
473 consid. 2c p. 479).

b) En l'espèce, le recourant n'a pas reçu d'assurance
ou de renseignement erroné. D'une part, la décision prise le
18 novembre 1992 par la Caisse cantonale ne constituait ni
une assurance, ni un renseignement. D'autre part, cette
décision était conforme à la pratique administrative en vi-
gueur et à l'interprétation communément admise de la loi
cantonale au sujet du cumul des allocations familiales
cantonales et des indemnités journalières AI. Ce n'est qu'à
la suite d'un arrêt rendu le 3 mars 1994 par le Tribunal
administratif que cette pratique a été modifiée. La Caisse

cantonale ne pouvait assurément pas informer tous les des-
tinataires de ses décisions antérieures du changement de
pratique imposé par le Tribunal administratif.

En outre, c'est à tort que le recourant a attaché un
caractère quasi immuable à la décision de la Caisse cantona-
le du 18 novembre 1992. Cette décision aurait pu faire l'ob-
jet d'un recours et la solution qu'elle consacrait aurait pu
être renversée par l'autorité de recours. Or, non seulement
la femme de l'intéressé n'a pas recouru contre cette déci-
sion, mais encore le recourant a écarté la possibilité d'un
changement de pratique dans ce domaine. En réalité, au mo-
ment où il a commencé son apprentissage, l'intéressé aurait
dû s'assurer qu'il n'y avait pas eu de modification de la
pratique en vigueur plus de deux ans et demi auparavant. Il
a donc fait preuve de négligence et ne saurait justifier son
attitude par l'avis que l'employeur de sa femme avait donné
à l'époque sur la décision de la Caisse cantonale du 18 no-
vembre 1992. Il n'appartient pas maintenant à la CIFA de ré-
parer la négligence de l'intéressé par le biais de l'art. 13
LAF, alors qu'elle-même n'a pas fourni d'assurance ou de
renseignement, ni pris de décision antérieurement à celle
qui est à la base du présent litige.

Le moyen tiré d'une prétendue violation du principe de
la bonne foi n'est donc pas fondé.

4.- Vu ce qui précède, le recours doit être rejeté dans
la mesure où il est recevable.

Succombant, le recourant doit supporter les frais judi-
ciaires (art. 156 al. 1, 153 et 153a OJ).

Par ces motifs,

l e T r i b u n a l f é d é r a l :

1. Rejette le recours dans la mesure où il est rece-
vable.

2. Met à la charge du recourant un émolument judiciaire
de 2'000 fr.

3. Communique le présent arrêt en copie à la représen-
tante du recourant, à la Caisse de compensation FRSP-CIFA et
à la Cour des assurances sociales du Tribunal administratif
du canton de Fribourg.

__________

Lausanne, le 6 juillet 2001
DAC

Au nom de la IIe Cour de droit public
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
Le Président,

La Greffière,


Synthèse
Numéro d'arrêt : 2P.70/2001
Date de la décision : 06/07/2001
2e cour de droit public

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2001-07-06;2p.70.2001 ?
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