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04/07/2001 | SUISSE | N°1A.96/2001

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 04 juillet 2001, 1A.96/2001


«/2»

1A.96/2001

Ie C O U R D E D R O I T P U B L I C
**********************************************

4 juillet 2001

Composition de la Cour: MM. les Juges Aemisegger, Président,
Vice-président du Tribunal fédéral, Féraud et Favre.
Greffier: M. Kurz.

Statuant sur le recours de droit administratif
formé par

A.________, représentée par Me Alain Bionda, avocat à
Genève,

contre

l'ordonnance rendue le 4 avril 2001 par la Chambre d'accusa-
tion du canton de Genève;<

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(entraide judiciaire avec la Fédération de Russie)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivan...

«/2»

1A.96/2001

Ie C O U R D E D R O I T P U B L I C
**********************************************

4 juillet 2001

Composition de la Cour: MM. les Juges Aemisegger, Président,
Vice-président du Tribunal fédéral, Féraud et Favre.
Greffier: M. Kurz.

Statuant sur le recours de droit administratif
formé par

A.________, représentée par Me Alain Bionda, avocat à
Genève,

contre

l'ordonnance rendue le 4 avril 2001 par la Chambre d'accusa-
tion du canton de Genève;

(entraide judiciaire avec la Fédération de Russie)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- Le 27 mai 1997, le Procureur général de la Fédé-
ration de Russie a adressé à la Suisse une demande
d'entraide
judiciaire pour les besoins d'une procédure pénale dirigée
contre G.________, maire de la ville de X.________, et son
frère L.________, lesquels auraient détourné des fonds affec-
tés par le Gouvernement russe au redressement de l'économie
en Tchétchénie. Ils auraient utilisé des entreprises
fictives
en Russie et à l'étranger, et auraient transféré les fonds,
notamment en Suisse, au moyen de contrats fictifs, par le
biais de membres de leur famille. Dans un complément du 20
avril 1998, l'autorité requérante évoque l'intervention du
citoyen israélien O.________, auteur de plusieurs transferts
suspects à destination de l'UBS, de la Citibank et de la
Banque SCS Alliance. Outre des renseignements généraux sur
les avoirs de la famille G.________ en Suisse, l'autorité
requérante désire connaître l'utilisation et l'état des
comptes bancaires bénéficiaires des versements précités, et
en obtenir le blocage.

B.- Chargé d'exécuter cette demande, le Juge d'ins-
truction du canton de Genève est entré en matière le 31 mai
1999, ordonnant auprès des banques la saisie des documents
et
le blocage des comptes. Par lettre du 8 octobre 1999, la Ban-
que SCS Alliance indiqua notamment que le compte n° xxxxx
était détenu par A.________, et que Z.________ (épouse de
G.________) y disposait d'un pouvoir.

C.- Par ordonnance de clôture du 28 novembre 2000,
le juge d'instruction a confirmé la saisie des documents ban-
caires relatifs au compte n° xxxxx, ainsi que son blocage,
et
a décidé de transmettre à l'autorité requérante la lettre de
la banque indiquant l'existence de ce compte.

D.- A.________ a saisi la Chambre d'accusation gene-
voise. Elle expliquait avoir vendu à G.________ quatre immeu-
bles hérités de sa mère, raison pour laquelle elle avait
reçu
des fonds, sans être d'aucune manière impliquée dans les
faits décrits dans la demande. G.________ s'était violemment
opposé au Président de la Fédération de Russie à propos du
statut de la Tchétchénie. Il avait ensuite été gracié par le
Président Eltsine en personne, le 25 octobre 1999, de sorte
que la demande d'entraide avait un caractère politique évi-
dent.

E.- Par ordonnance du 4 avril 2001, la Chambre d'ac-
cusation a rejeté le recours. Celui-ci paraissait tardif,
mais la question a été laissée ouverte. Seule la personne
poursuivie pouvait invoquer les art. 2 let. a CEEJ (délit po-
litique) et 5 EIMP (renonciation à une sanction). Le compte
visé avait reçu des fonds en provenance de G.________, et
Z.________ y disposait d'une procuration; il y avait un lien
suffisant avec l'objet de la demande d'entraide.

F.- A.________ forme un recours de droit adminis-
tratif contre cette dernière ordonnance. Elle demande pré-
alablement la suspension de la cause jusqu'à l'obtention
d'une détermination du Parquet de la Fédération de Russie
quant au maintien de la demande. Principalement, elle
conclut
à l'annulation de l'ordonnance et à l'irrecevabilité de la
demande. Subsidiairement, elle conclut à ce que la demande
soit déclarée sans objet, que la recourante soit reconnue
comme tiers non impliqué, que le séquestre de son compte
soit
levé et que toute transmission de documents soit interdite.

La Chambre d'accusation se réfère à ses considé-
rants. L'Office fédéral de la justice conclut au rejet du
recours.

C o n s i d é r a n t e n d r o i t :

1.- Le recours est formé dans les délai et formes
utiles contre une décision de dernière instance cantonale re-
lative à la clôture de la procédure d'entraide (art. 80e
let.
a de la loi fédérale sur l'entraide internationale en
matière
pénale - EIMP, RS 351.1). En tant que titulaire d'un compte
frappé d'une mesure de séquestre, et au sujet duquel le juge
d'instruction a décidé de transmettre des renseignements, la
recourante a qualité pour recourir (art. 80h let. b EIMP,
art. 9a let. a OEIMP).

2.- La recourante se plaint d'une constatation
inexacte des faits pertinents. Le Chambre d'accusation a
considéré que l'ordonnance de clôture avait été notifiée le
28 ou le 29 novembre 2000, alors que la notification aurait
eu lieu, selon elle, le 30 novembre 2000. Le recours
cantonal
aurait par conséquent été formé en temps utile. Cette ques-
tion, laissée indécise dans l'ordonnance attaquée, peut
l'être également à ce stade.

3.- Sur le fond, la recourante reprend ses griefs
concernant le caractère politique de la demande d'entraide,
et la violation de la règle "ne bis in idem" compte tenu de
la grâce prononcée dans l'Etat requérant. La recourante sou-
tient en outre, contrairement à la Chambre d'accusation,
qu'elle devrait se voir reconnaître la qualité pour soulever
de tels griefs: la loi ne préciserait rien à ce propos, et
il
serait choquant de ne pas tenir compte de ces objections,
lorsqu'elles apparaissent évidentes.

a) Les restrictions au droit d'invoquer les défauts
de la procédure étrangère, ou l'existence d'une décision
d'acquittement, ne reposent pas sur la seule doctrine, comme
paraît le croire la recourante, mais découlent de la juris-
prudence constante du Tribunal fédéral, fondée sur les dispo-

sitions relatives à la qualité pour agir. L'intérêt digne de
protection, exigé notamment par l'art. 80h let. b EIMP,
n'existe que lorsque la situation de fait ou de droit du re-
courant peut être influencée par le sort réservé à son argu-
mentation. Dès lors, seule la personne potentiellement tou-
chée par le caractère politique de la demande, ou par une
possible violation du principe "ne bis in idem", a qualité
pour soulever ces griefs (cf. en dernier lieu ATF 126 II 324
consid. 4 p. 236, 258 consid. 2d/aa p. 260 et la jurispruden-
ce citée). Tel n'est pas le cas de la recourante, qui ne pré-
tend pas être elle-même exposée aux poursuites pénales dans
l'Etat requérant.

b) Par ailleurs, si la demande poursuivait un but
purement politique, on ne comprendrait guère que celle-ci
soit maintenue, alors que G.________ a été gracié et se trou-
ve être actuellement, comme l'explique la recourante, l'un
des "hommes-clé du pouvoir russe". Le 30 décembre 1999, l'au-
torité requérante a fait savoir que la grâce présidentielle
ne s'étendait qu'à la peine privative de liberté, et non,
par
exemple, à une éventuelle mesure de confiscation. L'entraide
requise conserve donc un objet, en tout cas dans cette pers-
pective (cf. art. 74a EIMP, 33a OEIMP).

4.- Pour le surplus, la recourante persiste à se di-
re étrangère aux agissements des frères G.________, perdant
de vue que l'examen de cette question n'incombe pas à l'auto-
rité d'entraide. La réception de versements en provenance
d'un suspect constitue un rattachement suffisant entre la re-
courante et les faits décrits et il peut, sur ce point, être
renvoyé aux considérations pertinentes de la cour cantonale
(art. 36a al. 3 OJ). Compte tenu des mécanismes utilisés par
les frères G.________, en particulier du recours à des con-
trats fictifs, les explications fournies par la recourante
devront encore être vérifiées par l'autorité requérante, sur
la base notamment des renseignements transmis par la Suisse.

La recourante n'explique pas non plus pour quelle raison
l'épouse de G.________ disposait d'une procuration sur son
propre compte. A ce stade, le principe de la
proportionnalité
est manifestement respecté puisque le juge d'instruction
s'est borné à transmettre la lettre de la banque révélant
l'existence du compte détenu par la recourante et la procura-
tion de dame Z.________.

5.- Manifestement mal fondé, le recours de droit ad-
ministratif doit être rejeté, aux frais de la recourante
(art. 156 al. 1 OJ).

Par ces motifs,

l e T r i b u n a l f é d é r a l ,

vu l'art. 36a OJ:

1. Rejette le recours.

2. Met à la charge de la recourante un émolument ju-
diciaire de 5000 fr.

3. Communique le présent arrêt en copie au manda-
taire de la recourante, au Juge d'instruction et à la
Chambre
d'accusation du canton de Genève, ainsi qu'à l'Office
fédéral
de la justice (B 106726).

Lausanne, le 4 juillet 2001
KUR/col

Au nom de la Ie Cour de droit public
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
Le Président, Le Greffier,


Synthèse
Numéro d'arrêt : 1A.96/2001
Date de la décision : 04/07/2001
1re cour de droit public

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2001-07-04;1a.96.2001 ?
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