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28/06/2001 | SUISSE | N°2A.116/2001

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 28 juin 2001, 2A.116/2001


«/2»

2A.116/2001

IIe C O U R D E D R O I T P U B L I C
***********************************************

28 juin 2001

Composition de la Cour: MM. et Mme les Juges Wurzburger,
président, Betschart et Yersin. Greffière: Mme Dupraz.

Statuant sur le recours de droit administratif
formé par

G.________, née le 21 janvier 1972,

contre

l'arrêt rendu le 30 janvier 2001 par la Ière Cour administra-
tive du Tribunal administratif du canton de Fribourg, dans
la
cause qui oppo

se la recourante au Département de la police du
canton de Fribourg;

(art. 8 CEDH: autorisation de séjour)

Vu ...

«/2»

2A.116/2001

IIe C O U R D E D R O I T P U B L I C
***********************************************

28 juin 2001

Composition de la Cour: MM. et Mme les Juges Wurzburger,
président, Betschart et Yersin. Greffière: Mme Dupraz.

Statuant sur le recours de droit administratif
formé par

G.________, née le 21 janvier 1972,

contre

l'arrêt rendu le 30 janvier 2001 par la Ière Cour administra-
tive du Tribunal administratif du canton de Fribourg, dans
la
cause qui oppose la recourante au Département de la police du
canton de Fribourg;

(art. 8 CEDH: autorisation de séjour)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- Ressortissante thaïlandaise, née le 21 janvier
1972,
G.________ est arrivée en Suisse le 31 mars 1995 au bénéfice
d'un visa valable trois mois. Le 19 juin 1995, elle a signé
une promesse de mariage avec A.________, ressortissant
suisse
né le 20 octobre 1968. Elle a ainsi obtenu une autorisation
de séjour valable jusqu'au 1er septembre 1995, date à laquel-
le elle s'est mariée. Elle s'est alors vu accorder une auto-
risation de séjour à l'année qui a été régulièrement prolon-
gée, la dernière fois jusqu'au 30 novembre 1999.

Le 31 juillet 1996, A.________ a entamé une procédure
de
divorce qui a été suspendue par la suite. En septembre 1996,
G.________ est retournée en Thaïlande. Elle y a accouché le
26 février 1997 d'un fils, M.________, dont le père serait
français. Elle a confié son fils à sa mère et est revenue
seule en Suisse en avril/mai 1997. Elle est repartie pour la
Thaïlande en septembre 1997 et y a donné naissance, le 14
janvier 1998, à un fils, S.________, qui a la nationalité
suisse. Elle est revenue en Suisse en mai 1998 avec ses deux
fils mais, en août 1998, elle a renvoyé M.________ en Thaï-
lande. Le 27 juillet 1998, A.________ a requis la reprise de
la procédure de divorce précitée. Par jugement du 14 mai
1999, le Tribunal civil d'arrondissement de la Singine a pro-
noncé le divorce des époux A.________. L'autorité parentale
sur S.________ et sa garde ont été attribuées au père et la
mère a été astreinte à verser une pension alimentaire men-
suelle de 400 fr. pour S.________. Il a été interdit à la mè-
re, bénéficiant d'un droit de visite, - qui avait menacé
d'emmener son second fils en Thaïlande - de se rendre à
l'étranger avec S.________. Le 24 juillet 2000, la Cour d'ap-
pel du Tribunal cantonal du canton de Fribourg a déclaré ir-
recevable le recours de G.________ contre certains points du
jugement susmentionné du 14 mai 1999.

La pension alimentaire que G.________ doit verser à
A.________ pour son fils, en vertu du jugement précité du 14
mai 1999, a donné lieu à une saisie qui a abouti à la déli-
vrance, le 9 juin 2000, d'un acte de défaut de biens pour
8'681,55 fr. En octobre 2000, A.________ a renoncé à recou-
vrer cette pension par l'intermédiaire du Bureau des
pensions
alimentaires du canton de Fribourg.

Le 20 octobre 2000, le Département de la police du can-
ton de Fribourg (ci-après: le Département cantonal) a refusé
de renouveler l'autorisation de séjour de G.________ et im-
parti à l'intéressée un délai de trente jours dès la notifi-
cation de cette décision pour quitter le territoire [fribour-
geois]. Le Département cantonal a notamment retenu que
G.________ était peu intégrée en Suisse, mais qu'elle avait
gardé des attaches très fortes avec sa patrie. L'intéressée
ayant invoqué l'art. 8 CEDH en raison de son droit de visite
sur son fils S.________, le Département cantonal a procédé à
une pesée des intérêts en présence et considéré que
l'intérêt
public était prépondérant en l'espèce.

B.- Par arrêt du 30 janvier 2001, la Ière Cour adminis-
trative du Tribunal administratif du canton de Fribourg (ci-
après: le Tribunal administratif) a rejeté le recours de
G.________ contre la décision du Département cantonal du 20
octobre 2000. Le Tribunal administratif a relevé en particu-
lier que la renonciation de A.________ "à exiger le paiement
de la pension alimentaire" pour S.________ ne libérait pas
l'intéressée de l'obligation que lui imposait le jugement
susmentionné du 14 mai 1999. G.________ n'assumait pas
toutes
ses responsabilités envers S.________, puisqu'elle ne contri-
buait pas à son entretien. De plus, il résultait du comporte-
ment de l'intéressée qu'elle n'avait pas la volonté de trou-
ver du travail et préférait rester dépendante financièrement
de l'ami dont elle partageait la vie. Elle négligeait ses de-
voirs essentiels envers son fils S.________, de sorte que sa

relation avec lui ne justifiait pas une protection de l'art.
8 CEDH. Au demeurant, même si l'art. 8 CEDH était applicable
en l'espèce, l'intérêt public au renvoi de l'intéressée l'em-
porterait sur l'intérêt privé, car la relation familiale en-
tre G.________ et son fils S.________ se réduisait au simple
exercice du droit de visite.

C.- G.________ a recouru au Tribunal fédéral contre
l'arrêt du Tribunal administratif du 30 janvier 2001. Elle
conclut implicitement à la prolongation de son autorisation
de séjour. Elle conteste notamment l'argumentation de l'auto-
rité intimée selon laquelle elle ne serait pas intégrée,
n'aurait pas la volonté de trouver un emploi et manquerait
d'intérêt pour son fils S.________. Elle explique ce que ce
dernier représente pour elle et les liens respectifs qu'elle
a avec ses deux fils.

Le Tribunal administratif conclut au rejet du recours
en
se référant à l'arrêt attaqué. La Direction de la justice,
de
la police et des affaires militaires du canton de Fribourg a
renoncé à formuler des observations, tout en se reportant à
la décision précitée du Département cantonal du 20 octobre
2000 et à l'arrêt entrepris.

L'Office fédéral des étrangers propose de rejeter le re-
cours dans la mesure où il est recevable.

C o n s i d é r a n t e n d r o i t :

1.- a) Le Tribunal fédéral examine d'office et
librement
si le recours dont il est saisi doit être traité comme un re-
cours de droit administratif ou comme un recours de droit pu-
blic (ATF 118 Ib 326 consid. 1 p. 329). Il est dès lors sans
importance que la recourante n'ait pas précisé dans son mé-
moire la voie de droit qu'elle entendait utiliser. Le
recours

de droit public ayant un caractère subsidiaire (art. 84 al.
2
OJ), il convient d'examiner d'abord si le présent recours
est
recevable en tant que recours de droit administratif.

b) Selon l'art. 100 al. 1 lettre b ch. 3 OJ, le recours
de droit administratif n'est pas recevable en matière de po-
lice des étrangers contre l'octroi ou le refus d'autorisa-
tions auxquelles le droit fédéral ne confère pas un droit.
D'après l'art. 4 de la loi fédérale du 26 mars 1931 sur le
séjour et l'établissement des étrangers (LSEE; RS 142.20),
les autorités compétentes statuent librement, dans le cadre
des prescriptions légales et des traités avec l'étranger,
sur
l'octroi ou le refus d'autorisations de séjour ou d'établis-
sement. En principe, l'étranger n'a pas de droit à l'octroi
d'une autorisation de séjour. Ainsi, le recours de droit ad-
ministratif est irrecevable, à moins que ne puisse être invo-
quée une disposition particulière du droit fédéral ou d'un
traité, accordant le droit à la délivrance d'une telle auto-
risation (ATF 126 I 81 consid. 1a p. 83).

aa) D'après l'art. 7 al. 1 LSEE, le conjoint étranger
d'un ressortissant suisse a droit à l'octroi et à la prolon-
gation de l'autorisation de séjour. Selon la jurisprudence,
pour juger de la recevabilité du recours de droit administra-
tif, seule est déterminante la question de savoir si un ma-
riage au sens formel existe (ATF 124 II 289 consid. 2b
p. 291).

La recourante a obtenu une autorisation de séjour en
raison de son mariage avec un Suisse. Cependant, ce mariage
a
été dissous par le divorce. Dès lors, le présent recours est
irrecevable au regard de l'art. 7 al. 1 LSEE.

bb) Un étranger peut, selon les circonstances, se préva-
loir du droit au respect de sa vie privée et familiale garan-
ti par l'art. 8 par. 1 CEDH pour s'opposer à l'éventuelle sé-

paration de sa famille et obtenir ainsi une autorisation de
séjour. Encore faut-il, pour pouvoir invoquer cette disposi-
tion, que la relation entre l'étranger et une personne de sa
famille ayant le droit de s'établir en Suisse (en principe
nationalité suisse ou autorisation d'établissement) soit
étroite et effective (ATF 122 II 1 consid. 1e p. 5).

La recourante a un fils de nationalité suisse, qui vit
avec son père en Suisse. Elle n'a pas l'autorité parentale
sur cet enfant ni sa garde. Elle ne participe pas à son en-
tretien contrairement à ce qui a été ordonné dans le
jugement
de divorce, mais elle exerce actuellement son droit de
visite
sur lui. On peut douter qu'elle entretienne avec ce fils une
relation étroite et effective protégée par l'art. 8 CEDH et
que le présent recours soit par conséquent recevable. Toute-
fois, cette question peut rester indécise car le recours
doit
de toute façon être rejeté.

c) Au surplus, déposé en temps utile et dans les formes
prescrites par la loi, le présent recours est en principe re-
cevable comme recours de droit administratif en vertu des
art. 97 ss OJ.

2.- D'après l'art. 104 OJ, le recours de droit adminis-
tratif peut être formé pour violation du droit fédéral, y
compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation (lettre
a) ainsi que pour constatation inexacte ou incomplète des
faits pertinents, sous réserve de l'art. 105 al. 2 OJ, (let-
tre b). Le Tribunal fédéral vérifie d'office l'application
du
droit fédéral, qui englobe notamment les droits constitution-
nels des citoyens (ATF 124 II 517 consid. 1 p. 519; 123 II
385 consid. 3 p. 388), sans être lié par les motifs invoqués
par les parties (art. 114 al. 1 in fine OJ). En revanche,
lorsque le recours est dirigé, comme en l'espèce, contre la
décision d'une autorité judiciaire, le Tribunal fédéral est
lié par les faits constatés dans cette décision, sauf s'ils

sont manifestement inexacts ou incomplets ou s'ils ont été
établis au mépris de règles essentielles de procédure (art.
105 al. 2 OJ). En outre, le Tribunal fédéral ne peut pas re-
voir l'opportunité de l'arrêt entrepris, le droit fédéral ne
prévoyant pas un tel examen en la matière (art. 104 lettre c
ch. 3 OJ).

3.- a) Le droit au respect de la vie privée et
familiale
garanti par l'art. 8 par. 1 CEDH n'est pas absolu. Une ingé-
rence dans l'exercice de ce droit est possible selon l'art.
8
par. 2 CEDH, pour autant que cette ingérence soit prévue par
la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société
démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la
sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défen-
se de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à
la protection de la santé ou de la morale, ou à la
protection
des droits et libertés d'autrui. La question de savoir si,
dans un cas d'espèce, les autorités de police des étrangers
sont tenues d'accorder une autorisation de séjour fondée sur
l'art. 8 CEDH doit être résolue sur la base d'une pesée de
tous les intérêts publics et privés en présence (ATF 122 II
1
consid. 2 p. 5/6; 120 Ib 22 consid. 4a p. 25). Il faut qu'il
existe des liens familiaux vraiment forts dans les domaines
affectif et économique pour que l'intérêt public à une poli-
tique restrictive en matière de séjour des étrangers et d'im-
migration passe au second plan (ATF 120 Ib 1 consid. 3c
p. 5).

En ce qui concerne l'intérêt privé à l'octroi d'une au-
torisation de séjour, il faut constater qu'un droit de
visite
peut en principe être exercé même si le parent intéressé vit
à l'étranger, au besoin en aménageant les modalités de ce
droit pour ce qui touche à sa fréquence et à sa durée. A la
différence de ce qui se passe en cas de vie commune, il
n'est
pas indispensable que le parent au bénéfice d'un droit de vi-
site et l'enfant vivent dans le même pays. Il faut prendre
en

considération l'intensité de la relation entre le parent et
l'enfant, ainsi que la distance qui séparerait l'étranger de
la Suisse au cas où l'autorisation de séjour lui serait refu-
sée (ATF 120 Ib 22 consid. 4a p. 25).

b) Lorsque le Tribunal civil d'arrondissement de la Sin-
gine a prononcé le divorce des époux A.________, le 14 mai
1999, S.________ était un enfant de seize mois seulement.
Pourtant, contrairement à ce qui est usuel pour un enfant de
cet âge, il n'a été placé ni sous la garde ni sous
l'autorité
parentale de sa mère. Cela s'explique toutefois dans la mesu-
re où la relation entre la recourante et son second fils
n'atteignait pas l'intensité habituelle d'un tel lien.
Depuis
lors, la situation a évolué; l'intéressée exerce son droit
de
visite, mais elle ne remplit pas ses obligations économiques
à l'égard de S.________. En réalité, elle n'a jamais versé
la
pension alimentaire qu'elle devait payer pour lui. En revan-
che, l'intéressée, qui est entretenue par son nouvel ami, ar-
rive à envoyer 700 fr. par mois en Thaïlande pour son fils
M.________ et pour d'autres membres de sa famille. De plus,
elle dépense chaque mois des centaines de francs (plus de
500
fr., d'après le jugement précité du 14 mai 1999) en communi-
cations téléphoniques avec sa patrie, notamment avec
M.________ qu'elle appellerait tous les quatre jours
environ.
On ne comprend dès lors pas pourquoi la recourante n'arrive
pas à contribuer financièrement à l'entretien de S.________.
Au demeurant, si l'intéressée ne peut ou ne veut pas
utiliser
l'argent que lui donne son ami pour S.________,
il lui incom-
be de gagner l'argent nécessaire à l'entretien de son second
fils. Il est vrai que l'absence d'autorisation de séjour
peut
compliquer la recherche d'un emploi. Cependant, la
recourante
n'a pas apporté la preuve qu'elle avait effectué des démar-
ches sérieuses pour obtenir un emploi. Force est donc de
constater qu'elle n'a pas fourni les efforts nécessaires
pour
avoir une relation économique étroite avec son fils
S.________.

Un départ de l'intéressée pour son pays d'origine com-
pliquerait certes l'exercice de son droit de visite sur
S.________ qui pourrait toutefois s'effectuer dans le cadre
de séjours à but touristique. D'ailleurs, la Thaïlande étant
une destination touristique, les voyages entre ce pays et la
Suisse pourraient vraisemblablement s'effectuer à des prix
relativement modérés. En outre, il ressort du dossier que,
bien qu'en Suisse, la recourante a su maintenir sa relation
avec son fils M.________ qui vit en Thaïlande; dès lors, on
ne voit pas pourquoi elle ne pourrait pas, de Thaïlande, gar-
der des contacts avec S.________ vivant en Suisse, même si
c'est au foyer de son ex-mari et non dans sa propre famille.

Ainsi, il apparaît que l'intérêt public à pratiquer une
politique restrictive en matière de séjour des étrangers et
d'immigration - en particulier pour assurer un rapport équi-
libré entre l'effectif de la population suisse et celui de
la
population étrangère résidante ainsi que pour améliorer la
situation du marché du travail et assurer un équilibre opti-
mum en matière d'emploi (cf. ATF 120 Ib 1 consid. 5 p. 4/
5) -, c'est-à-dire en l'espèce à ne pas prolonger l'autorisa-
tion de séjour de l'intéressée qui, résidant en Suisse
depuis
le printemps 1995, n'a jamais gardé d'emploi durable et n'ar-
rive que difficilement à s'exprimer dans une langue nationa-
le, l'emporte sur l'intérêt de la recourante à pouvoir
rester
en Suisse où vit son second fils sur lequel elle a un droit
de visite.

4.- Vu ce qui précède, le recours doit être rejeté dans
la mesure où il est recevable.

Succombant, la recourante doit supporter les frais judi-
ciaires (art. 156 al. 1, 153 et 153a OJ).

Par ces motifs,

l e T r i b u n a l f é d é r a l :

1. Rejette le recours dans la mesure où il est receva-
ble.

2. Met à la charge de la recourante un émolument judi-
ciaire de 1'000 fr.

3. Communique le présent arrêt en copie à la
recourante,
au Département de la police et à la Ière Cour administrative
du Tribunal administratif du canton de Fribourg, ainsi qu'à
l'Office fédéral des étrangers.

Lausanne, le 28 juin 2001
DAC/vlc

Au nom de la IIe Cour de droit public
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
Le Président,

La Greffière,


Synthèse
Numéro d'arrêt : 2A.116/2001
Date de la décision : 28/06/2001
2e cour de droit public

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2001-06-28;2a.116.2001 ?
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