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27/06/2001 | SUISSE | N°6S.363/2001

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 27 juin 2001, 6S.363/2001


«/2»
6S.363/2001/ROD

C O U R D E C A S S A T I O N P E N A L E
**************************************************

27 juin 2001

Composition de la Cour: M. Schubarth, Président, M. Kolly
et Mme Escher, Juges. Greffière: Mme Angéloz.
___________

Statuant sur le pourvoi en nullité
formé par

X.________, représenté par Me Philippe Paratte, avocat à
Neuchâtel,

contre

l'arrêt rendu le 11 avril 2001 par la Cour d'appel pénal
du Tribunal cantonal fribourgeois dans la cause

qui
oppose le recourant au Ministère public du canton de
F r i b o u r g;

(infraction à la LStup)

Vu les pièc...

«/2»
6S.363/2001/ROD

C O U R D E C A S S A T I O N P E N A L E
**************************************************

27 juin 2001

Composition de la Cour: M. Schubarth, Président, M. Kolly
et Mme Escher, Juges. Greffière: Mme Angéloz.
___________

Statuant sur le pourvoi en nullité
formé par

X.________, représenté par Me Philippe Paratte, avocat à
Neuchâtel,

contre

l'arrêt rendu le 11 avril 2001 par la Cour d'appel pénal
du Tribunal cantonal fribourgeois dans la cause qui
oppose le recourant au Ministère public du canton de
F r i b o u r g;

(infraction à la LStup)

Vu les pièces du dossier, d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- Depuis mars 1996, X.________ exploite à
Fribourg une boutique où il vend des fleurs et des
feuilles de chanvre séchées dans des coussins ou des
sachets portant la mention "tisane" ainsi que divers
articles habituellement utilisés par les personnes qui
fument de la drogue, tels que pipes à eau et shiloms, et
du matériel pour confectionner des joints.

De mars à novembre 1996, à Fribourg, il a cultivé,
dans son jardin et, en pots, dans son appartement, du
chanvre destiné à la fabrication de coussins et de ti-
sanes. Durant la même période, il a acheté 101 kg de
marijuana, sous forme de coussins thérapeutiques et de
tisanes, auprès de la société Z.________ Sàrl. Il reven-
dait régulièrement cette marchandise dans sa boutique,
sous forme de tisanes, conditionnées en sachets vendus 30
ou 50 francs, réalisant un bénéfice de 20 francs par sa-
chet, ou de coussins thérapeutiques, contenant chacun 1
kg de marijuana, qu'il vendait au prix de 200 à 220
francs l'unité, lui procurant un gain d'environ 100
francs. Le 27 novembre 1996, une perquisition a été
effectuée par la police au domicile de X.________ à
Fribourg, lors de laquelle 11,985 kg de chanvre séché ont
été séquestrés; un coussin thérapeutique et 62 sachets,
portant l'inscription "tisane" et contenant de la mari-
juana, ont par ailleurs été saisis dans sa boutique et
séquestrés.

Du mois de juin au 2 octobre 1998, X.________, qui
s'était établi au Landeron, y a cultivé du chanvre. Lors
d'une visite domiciliaire, le 2 octobre 1998, la police
neuchâteloise a découvert 18 plantes de chanvre cultivé

en hydroculture ainsi que des plantes séchées de canna-
bis, destinées à la production commerciale de boutures
pour écoulement dans la boutique de Fribourg; ces plantes
ont été séquestrées, de même que cinq sachets Mini-Grip
contenant des graines de chanvre.

B.- Par jugement du 28 janvier 2000, le Juge de
police de l'arrondissement de la Sarine a condamné
X.________, pour infraction à la loi fédérale sur
les stupéfiants (art. 19 ch. 1 al. 1 et al. 4 LStup), à
la peine de 3 mois d'emprisonnement avec sursis pendant
2 ans; il a par ailleurs renoncé à révoquer un sursis
accordé antérieurement, fixé à 3000 francs la créance
compensatrice en faveur de l'Etat et ordonné la con-
fiscation et la destruction des 11 kg de chanvre sé-
questrés. Il a été retenu que, de mars à novembre 1996,
à Fribourg, l'accusé avait cultivé 11,895 kg de chanvre
dans son jardin et son appartement pour en faire des
coussins et des tisanes et vendu 75 kg de fleurs de
chanvre dans sa boutique, réalisant ainsi un bénéfice
minimum d'environ 7500 francs, et que, du mois de juin au
2 octobre 1998, il avait cultivé du chanvre au Landeron
pour son magasin de Fribourg.

Statuant le 11 avril 2001 sur appel du condamné, la
Cour d'appel pénal du Tribunal cantonal fribourgeois l'a
rejeté, confirmant le jugement qui lui était déféré.

C.- X.________ se pourvoit en nullité au Tribunal
fédéral. Se plaignant d'une violation de l'art. 19 LStup,
il conclut à l'annulation de l'arrêt attaqué.

C o n s i d é r a n t e n d r o i t :

1.- Faisant valoir qu'il n'a pas été procédé à une
analyse du chanvre qu'il cultivait et vendait, le recou-
rant reproche à la cour cantonale de l'avoir condamné
pour infraction à la LStup, sans qu'il ait été établi que
le chanvre litigieux présentait une teneur en THC suffi-
sante pour que l'on puisse admettre qu'il pouvait être
consommé comme stupéfiant.

a) Selon la jurisprudence, tombe notamment sous le
coup de l'art. 19 ch. 1 LStup la culture et la vente de
chanvre, autant que ces comportements visent l'extraction
de stupéfiants (ATF 126 IV 60 consid. 2a p. 62 s.). L'in-
fraction est objectivement réalisée lorsque l'auteur
cultive ou vend du chanvre pouvant être consommé comme
stupéfiant; tel est en particulier le cas s'il est établi
que la teneur en THC du chanvre cultivé ou vendu dépasse
la limite légale supérieure admise pour le chanvre des-
tiné à la production industrielle, alimentaire ou agri-
cole (ATF 126 IV 198 consid. 2 p. 201), soit 0,3 % (ATF
126 IV 198 consid. 1 p. 200). Sur le plan subjectif,
l'infraction est en tout cas réalisée lorsque l'auteur
agit avec dol direct, c'est-à-dire lorsqu'il sait que le
chanvre qu'il cultive ou vend sera consommé comme stupé-
fiant et le cultive ou le vend néanmoins, acceptant ainsi
qu'il en soit fait un tel usage (ATF 126 IV 60 consid. 2b
p. 63 s.); à tout le moins s'il cultive ou vend du
chanvre ayant une teneur en THC supérieure à la limite
légale, le dol éventuel est même suffisant (ATF 126 IV
198 consid. 2 p. 201).

b) Le chanvre cultivé et vendu par le recourant n'a
certes pas fait l'objet d'une analyse aux fins de déter-
miner quelle était sa teneur en THC. Cela ne suffit ce-

pendant pas à exclure qu'il pouvait être consommé comme
stupéfiant. L'analyse du chanvre, en tant qu'elle permet
de déterminer sa teneur en THC et, partant, son effet
psychotrope, est sans doute le moyen le plus adéquat et
le plus sûr pour établir s'il peut être consommé comme
stupéfiant; il ne s'agit toutefois que d'un moyen de
preuve parmi d'autres. La réalisation de l'élément
objectif de l'infraction peut aussi être admise sur la
base d'un ensemble d'éléments ou d'indices convergents
propres à l'établir de manière suffisante. A titre
d'exemple, on peut mentionner les éléments ou indices
suivants: l'auteur admet lui-même que le chanvre qu'il
cultive ou vend peut être consommé comme stupéfiant, il
est établi que des personnes qui ont acquis le chanvre
l'ont consommé comme stupéfiant, l'auteur vend des par-
ties de la plante ayant une forte teneur en THC, il
écoule ses produits à des prix nettement plus élevés
que ceux des mêmes produits dépourvus d'effet psycho-
trope, il attire l'attention de ses clients sur le fait
que la consommation comme stupéfiant des produits qu'il
leur vend est punissable ou leur demande une décharge, il
vend également des objets habituellement utilisés par des
fumeurs de drogue, etc.

L'arrêt attaqué constate - ce qui relève du fait
et lie donc la Cour de céans (art. 277bis PPF) - que le
recourant savait que les produits qu'il vendait comme
tisanes et coussins pouvaient être utilisés comme stu-
péfiant et qu'il a du reste admis qu'ils avaient un
certain effet psychotrope. Il retient en outre qu'il
a été établi que des acheteurs avaient effectivement
pu fumer du chanvre vendu par le recourant; de plus,
les prix payés pour certains coussins, soit 600 à
1000 francs, correspondaient au prix de la marijuana
vendue comme stupéfiant sur le marché; en sus des
"coussins thérapeutiques" et des tisanes", le recourant

vendait également des articles habituellement utilisés
par des fumeurs de drogue (pipes à eau, shiloms, matériel
pour confectionner des joints); il s'entourait de précau-
tions, ne vendant qu'à des clients majeurs, auxquels il
demandait une décharge; au demeurant, peu auparavant, en
février 1996, le recourant avait été condamné pour avoir
cultivé du chanvre destiné à la production de stupéfiants
et pour en avoir consommé. Il résulte par ailleurs des
constatations de fait cantonale que, dans des coussins ou
dans des sachets portant la mention "tisane", le recou-
rant a vendu non seulement des feuilles mais des fleurs
de chanvre, lesquelles sont une partie de la plante à
plus forte teneur en THC (ATF 126 IV 60 consid. 2a in
fine p. 63); il en résulte également que le recourant
vendait les sachets de tisane au prix de 30 ou 50 francs
et les coussins au prix de 200 à 220 francs, réalisant un
bénéfice de 20 francs par sachet et d'environ 100 francs
par coussin. Sur la base de cet ensemble d'éléments
convergents, il pouvait être admis sans violation du
droit fédéral que le chanvre litigieux pouvait être
consommé comme stupéfiant.

c) Le recourant ne conteste pas qu'il a agi avec
dol direct, comme le retient l'arrêt attaqué, qui n'ajou-
te en effet qu'à titre subsidiaire que le recourant a "à
tout le moins" agi avec dol éventuel. Au demeurant, sur
la base d'une appréciation des preuves, l'arrêt attaqué
constate, ce qui relève du fait, que le recourant a vendu
le chanvre litigieux en sachant qu'il était consommé
comme stupéfiant et en acceptant qu'il en soit fait un
tel usage.

d) Ainsi, le recourant a cultivé et vendu du
chanvre en vue de l'extraction de stupéfiants, agissant
avec dol direct. Sa condamnation pour infraction à la
LStup ne viole donc pas le droit fédéral.

2.- Le pourvoi doit dès lors être rejeté et le
recourant, qui succombe, supportera les frais (art. 278
al. 1 PPF).

Par ces motifs,

l e T r i b u n a l f é d é r a l ,

1. Rejette le pourvoi.

2. Met à la charge du recourant un émolument
judiciaire de 2000 francs.

3. Communique le présent arrêt en copie au manda-
taire du recourant, au Ministère public du canton de
Fribourg et à la Cour d'appel pénal du Tribunal cantonal
fribourgeois.
__________

Lausanne, le 27 juin 2001

Au nom de la Cour de cassation pénale
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
Le Président,

La Greffière,


Synthèse
Numéro d'arrêt : 6S.363/2001
Date de la décision : 27/06/2001
Cour de cassation pénale

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2001-06-27;6s.363.2001 ?
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