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26/06/2001 | SUISSE | N°1P.744/2000

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 26 juin 2001, 1P.744/2000


«/2»
1P.744/2000

Ie C O U R D E D R O I T P U B L I C
**********************************************

26 juin 2001

Composition de la Cour: MM. les Juges Aemisegger, Président,
Vice-président du Tribunal fédéral, Féraud et Mme la Juge
suppléante Pont Veuthey. Greffier: M. Jomini.

_________

Statuant sur le recours de droit public
formé par

A.________, représenté par Me Philippe Girod, avocat à Ge-
nève,

contre

l'arrêt rendu le 23 octobre 2000 par la Chambre p

énale de la
Cour de justice de la République et canton de Genève, dans
la cause qui oppose le recourant au Procureur généra...

«/2»
1P.744/2000

Ie C O U R D E D R O I T P U B L I C
**********************************************

26 juin 2001

Composition de la Cour: MM. les Juges Aemisegger, Président,
Vice-président du Tribunal fédéral, Féraud et Mme la Juge
suppléante Pont Veuthey. Greffier: M. Jomini.

_________

Statuant sur le recours de droit public
formé par

A.________, représenté par Me Philippe Girod, avocat à Ge-
nève,

contre

l'arrêt rendu le 23 octobre 2000 par la Chambre pénale de la
Cour de justice de la République et canton de Genève, dans
la cause qui oppose le recourant au Procureur général de la
République et canton de G e n è v e, et à B.________, re-
présentée par Me Guy Fontanet, avocat à Genève;

(arbitraire)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- Par arrêt du 23 octobre 2000, la Chambre péna-
le de la Cour de justice de la République et canton de Genè-
ve a confirmé le jugement rendu le 21 mars 2000 par le Tri-
bunal de police à l'encontre de A.________, reconnaissant
celui-ci coupable d'abus de confiance (ancien art. 140 CP)
ainsi que de lésions corporelles simples (art. 123 CP), et
le condamnant à six mois d'emprisonnement, sous déduction de
deux mois et dix jours de détention préventive, ainsi qu'aux
frais de la procédure.

En résumé, la Cour cantonale a retenu les faits
suivants au sujet des lésions corporelles - la contestation
ne portant pas, devant le Tribunal fédéral, sur les éléments
constitutifs de l'abus de confiance: en février 1997,
A.________ a eu deux altercations avec B.________, qui était
alors son épouse, et avec laquelle les relations ont été
houleuses au cours du mariage. Celle-ci, se livrant depuis
1994 à la prostitution à Genève, avait décidé de cesser
cette activité; or A.________ menait un train de vie élevé
grâce aux revenus que son épouse obtenait en se prostituant
et il n'exerçait plus d'activité lucrative en tout cas
depuis l'été 1996, de sorte qu'il pouvait être fortement
contrarié par l'idée de se retrouver sans ressources. Une
altercation s'est ainsi produite le 25 février 1997 au domi-
cile conjugal; B.________ a reçu plusieurs coups et, après
que la police est intervenue dans l'appartement, elle s'est
rendue à l'hôpital où un médecin a constaté notamment une
tuméfaction du nez avec hématome, trois coupures (superfi-
cielles, bien nettes) d'environ 7 cm au niveau du cou, un
hématome sur la gauche du front et une petite rougeur à
l'angle externe de l'oeil gauche. La Cour cantonale a relevé
que A.________ ne contestait pas avoir donné deux coups de
poing à B.________; ils sont à l'origine de la tuméfaction

du nez, de l'hématome dans la région nasale, de l'hématome
au front et de la marque à l'angle de l'oeil. Outre ces
coups au visage, A.________ a également provoqué les trois
coupures au cou de sa victime, soit au moyen d'un tesson de
bouteille, soit au moyen d'un couteau de cuisine, l'hypothè-
se de l'utilisation de ce dernier instrument semblant plus
vraisemblable.

B.- Agissant par la voie du recours de droit pu-
blic, A.________ demande au Tribunal fédéral d'annuler l'ar-
rêt de la Chambre pénale, en tant qu'il le reconnaît coupa-
ble de lésions corporelles simples. Invoquant l'art. 9 Cst.,
il se plaint d'arbitraire dans la constatation des faits et
l'appréciation des preuves.

Le Procureur général conclut au rejet du recours.

L'intimée B.________ conclut elle aussi au rejet du
recours.

La Chambre pénale se réfère à son arrêt, sans pren-
dre de conclusions.

C.- Le recourant, représenté par un avocat, deman-
de l'assistance judiciaire. Aucune pièce n'a été produite à
l'appui de cette requête, dans le délai spécialement fixé à
cet effet. Il n'a pas été statué à ce sujet au cours de
l'instruction; le recourant n'a cependant pas été tenu de
fournir des sûretés en garantie des frais judiciaires pré-
sumés (cf. art. 150 al. 1 OJ).

L'intimée B.________, représentée par un avocat,
demande également l'assistance judiciaire. Il n'a pas non
plus, en l'état, été statué sur cette requête.

C o n s i d é r a n t e n d r o i t :

1.- Le Tribunal fédéral examine d'office et libre-
ment la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF
127 III 41 consid. 2a p. 42; 126 I 207 consid. 1 p. 209 et
les arrêts cités).

Contre un jugement en matière pénale rendu en der-
nière instance cantonale, la voie du recours de droit public
est ouverte, à l'exclusion de celle du pourvoi en nullité,
au condamné qui se plaint de la violation de garanties cons-
titutionnelles, en contestant notamment les constatations de
fait de l'autorité cantonale (art. 84 al. 1 let. a, art. 86
al. 1 et art. 88 OJ). Le présent recours a été formé dans le
délai légal (art. 89 al. 1 OJ). Il y a lieu d'entrer en ma-
tière.

2.- Le recourant se plaint d'arbitraire dans les
constatations de fait et l'appréciation des preuves, en se
référant exclusivement aux coupures constatées sur le cou de
l'intimée après l'altercation du 25 février 1997. Selon lui,
les déclarations de la victime seraient contradictoires à ce
sujet, et incompatibles avec le témoignage d'un des gendar-
mes appelé à intervenir dans l'appartement. Dans sa version,
le recourant reproche à son ex-épouse une mise en scène des-
tinée à lui nuire - elle se serait infligée elle-même les
trois coupures au cou - et il indique que différents élé-
ments pouvaient remettre en cause la crédibilité de la vic-
time, tandis que rien ne prouve qu'il aurait lui-même provo-
qué ces blessures.

a) Selon la jurisprudence relative à l'art. 9
Cst., les constatations de fait et le résultat de l'appré-
ciation de preuves sont arbitraires s'ils sont insoutenables
ou en contradiction flagrante avec la situation effective

(ATF 126 I 168 consid. 3a p. 170; 125 I 166 consid. 2a
p. 168; 125 II 10 consid. 3a p. 15, 129 consid. 5b p. 134;
124 IV 86 consid. 2 p. 88 et les arrêts cités).

b) Le recourant, qui ne conteste pas avoir frappé
son épouse au visage et lui avoir ainsi causé des blessures
(hématomes, tuméfaction du nez), ne prétend plus, comme il
l'avait fait devant les juridictions cantonales, avoir agi
en état de légitime défense. Certains faits, constitutifs à
eux seuls de lésions corporelles simples - même si l'on fait
abstraction des coupures au cou -, ne sont donc pas liti-
gieux.

c) Le recourant reproche à la Cour cantonale
d'avoir écarté le témoignage "probant" d'un gendarme. Or il
n'expose pas en quoi ce témoignage corroborerait sa version
de l'automutilation de la victime. Certes, ce gendarme a dé-
claré qu'à aucun moment l'intimée ne lui avait dit, lors de
son intervention, que son mari avait employé un couteau. On
ne saurait cependant en déduire que le gendarme avait
constaté une mise en scène de la part de l'intimée, voire
recueilli des indices d'une automutilation. L'arrêt attaqué
retient que le gendarme n'a pas observé de près la victime,
qui se trouvait en état de choc et qui n'a donc pas décrit
les circonstances précises de l'agression. Le gendarme en
question et son collègue n'ont du reste procédé à aucune in-
vestigation précise; ils ont entendu les protagonistes, le
recourant évoquant alors une tentative de suicide de son
épouse au moyen d'un tesson de bouteille, tandis que l'in-
timée reprochait à son mari d'avoir essayé de lui entailler
le cou avec cet instrument. En d'autres termes, la Cour can-
tonale n'avait pas à écarter le témoignage de ce gendarme;
elle l'a au contraire pris en considération dans l'ensemble
des éléments et indices à charge.

d) Cela étant, les circonstances de l'altercation
litigieuses ont été établies de façon suffisamment convain-
cante dans l'arrêt attaqué. Il apparaît qu'à la suite d'une
précédente dispute, quelques jours plus tôt, au cours de la-
quelle l'intimée avait déjà reçu des coups, elle craignait
les réactions du recourant; une attitude violente de sa
part, à cette période, était plausible. Dans ces circonstan-
ces, peu importent les incertitudes subsistant au sujet de
l'instrument - couteau ou tesson de bouteille - employé pour
provoquer les coupures, car c'est un élément secondaire. Par
ailleurs, rien ne laisse entrevoir un état dépressif de
l'intimée, qui inscrirait les blessures au cou dans le
contexte d'une tentative de suicide. En définitive, les cri-
tiques du recourant au sujet des faits constatés ne sont pas
concluantes. Aussi la version retenue par la Cour cantonale
n'apparaît-elle pas insoutenable, de sorte que le grief
d'arbitraire se révèle mal fondé.

3.- Il s'ensuit que le recours de droit public
doit être rejeté. Il apparaissait d'emblée dépourvu de chan-
ces de succès: la demande d'assistance judiciaire formée par
le recourant doit également être rejetée (art. 152 al. 1
OJ). Quoi qu'il en soit, quand bien même il avait été invité
à déposer des pièces relatives à sa situation financière, le
recourant avait renoncé à démontrer qu'il était dans le be-
soin.

Dans ces conditions, l'émolument judiciaire doit
être mis à la charge du recourant (art. 153, 153a et 156 al.
1 OJ). Il aura en outre à verser à l'intimée une indemnité,
à titre de dépens, pour ses "frais indispensables" occasion-
nés par la procédure de recours de droit public, en l'occur-
rence ses frais d'avocat (art. 159 al. 1 et 2 OJ).

L'allocation de dépens à l'intimée rend sans objet
sa demande d'assistance judiciaire. Cela étant, au cas où

les dépens ne pourraient pas être recouvrés (cf. art. 152
al. 2 OJ), la rémunération de l'avocat pourrait faire l'ob-
jet ultérieurement d'une décision distincte du Tribunal fé-
déral.

Par ces motifs,

l e T r i b u n a l f é d é r a l ,

vu l'art. 36a OJ:

1. Rejette le recours;

2. Rejette la demande d'assistance judiciaire
présentée par le recourant;

3. Met à la charge du recourant:
a) un émolument judiciaire de 3'000 fr.;
b) une indemnité de 2'000 fr., à verser à
B.________ à titre de dépens;

4. Communique le présent arrêt en copie aux manda-
taires du recourant et de l'intimée, au Procureur général et
à la Cour de justice de la République et canton de Genève.

__________

Lausanne, le 26 juin 2001
JIA/moh

Au nom de la Ie Cour de droit public
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
Le Président, Le Greffier,


Synthèse
Numéro d'arrêt : 1P.744/2000
Date de la décision : 26/06/2001
1re cour de droit public

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2001-06-26;1p.744.2000 ?
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