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25/06/2001 | SUISSE | N°2A.127/2001

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 25 juin 2001, 2A.127/2001


2A.127/2001
«/2»

IIe C O U R D E D R O I T P U B L I C
***********************************************

25 juin 2001

Composition de la Cour: MM. les Juges Wurzburger, président,
Müller et Meylan, juge suppléant. Greffière: Mme Rochat.

Statuant sur le recours de droit administratif
formé par

ST.________, représentée par Me Michel De Palma, avocat à
Sion,

contre

l'arrêt rendu le 9 février 2001 par la Cour de droit public
du Tribunal cantonal du canton du Valais, dans la c

ause qui
oppose la recourante au Conseil d'Etat du canton du Valais;

(art. 7 al. 1 LSEE: non-prolongation de l'a...

2A.127/2001
«/2»

IIe C O U R D E D R O I T P U B L I C
***********************************************

25 juin 2001

Composition de la Cour: MM. les Juges Wurzburger, président,
Müller et Meylan, juge suppléant. Greffière: Mme Rochat.

Statuant sur le recours de droit administratif
formé par

ST.________, représentée par Me Michel De Palma, avocat à
Sion,

contre

l'arrêt rendu le 9 février 2001 par la Cour de droit public
du Tribunal cantonal du canton du Valais, dans la cause qui
oppose la recourante au Conseil d'Etat du canton du Valais;

(art. 7 al. 1 LSEE: non-prolongation de l'autorisation de
séjour; abus de droit)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- Ressortissante marocaine née en 1969,
SS.________ est entrée en Suisse pour la première fois le 1er
janvier 1995. Elle y a fait la connaissance de T.________,
ressortissant suisse alors sous tutelle, qu'elle n'a pu épou-
ser que le 17 octobre 1997, après levée de l'opposition du
tuteur. Elle a ainsi obtenu une autorisation annuelle de
séjour qui lui a été renouvelée jusqu'au 16 octobre 1999.

Les époux ont vécu séparés depuis le 12 janvier
1999, à la suite d'une procédure de mesures protectrices de
l'union conjugale engagée à la requête de l'épouse, qui se
plaignait notamment d'un problème d'alcoolisme de son mari.

Entendu le 1er juin 1999 par les autorités communa-
les de X.________, T.________ a fait état d'une "séparation
momentanée début décembre 1998, prolongée au 23 décembre
1998". Il précisait que "les choses étaient en train de s'ar-
ranger" et que les époux feraient bientôt domicile commun à
Sion, au domicile de son épouse.

Entendue le 12 juillet 1999 par le Contrôle des ha-
bitants de la Ville de Sion, ST.________ a indiqué qu'elle
et
son mari étaient sur le point de reprendre la vie commune
dans l'appartement qu'elle avait loué à Sion; elle avait en
effet l'intention de tenter une reprise de la vie commune,
car son mari avait cessé de boire. Elle a aussi ajouté
qu'elle n'avait jamais voulu se séparer de son mari, mais
que
c'était lui qui l'avait mise à la rue le 23 décembre 1998.

Encore entendu le 15 juillet 1999 par cette même au-
torité, T.________ a déclaré qu'il vivait toujours dans sa

maison de X.________ et n'avait aucune intention de la quit-
ter, qu'il rendait effectivement visite à sa femme à Sion
sans pour autant s'installer chez elle, et qu'il était dispo-
sé à reprendre la vie commune si sa femme acceptait de rega-
gner le domicile conjugal à X.________.

Par décision du 17 mars 2000, le Service de l'état
civil et des étrangers du canton du Valais a refusé de pro-
longer l'autorisation de séjour de ST.________.

B.- Le recours de l'intéressée contre cette décision
a été rejeté, par prononcé du Conseil d'Etat du canton du
Valais du 25 octobre 2000.

Saisi également d'un recours de ST.________, le Tri-
bunal cantonal (Cour de droit public) l'a rejeté par arrêt
du
9 février 2000. Il a tout d'abord refusé d'ordonner les mesu-
res d'instruction requises par la recourante, à savoir l'au-
dition de témoins, l'édition du dossier de tutelle de
T.________ et l'édition du dossier de l'état civil de la
commune de X.________, au motif que tous les éléments perti-
nents pour savoir si la recourante commettait ou non un abus
de droit en se prévalant de son mariage ressortaient des piè-
ces du dossier. Sur le fond, il a admis l'existence d'un
abus
de droit en retenant qu'aucun élément ne démontrait que les
deux époux avaient tenté d'une quelconque manière de repren-
dre la vie commune et qu'il fallait au contraire admettre
qu'ils n'avaient plus réellement d'intérêts ou de véritables
projets d'avenir communs.

C.- Agissant par la voie du recours de droit admi-
nistratif, ST.________ conclut, avec suite de frais et dé-
pens, à l'annulation de l'arrêt du Tribunal cantonal du 9
février 2001, la cause étant renvoyée à l'autorité cantonale
pour une nouvelle décision dans le sens des considérants. A
titre préalable, elle présente aussi une demande
d'assistance

judiciaire et requiert que l'effet suspensif soit accordé à
son recours.

Le Tribunal cantonal a renoncé à se déterminer sur
le recours. Le Conseil d'Etat conclut à son rejet. L'Office
fédéral des étrangers propose également de rejeter le re-
cours.

D.- Le recours a bénéficié de l'effet suspensif à
titre superprovisoire.

Le 27 avril 2001, la recourante a encore produit
deux pièces nouvelles, dont une lettre de son employeur
adressée au Service de l'état civil et des étrangers le 24
avril 2001.

C o n s i d é r a n t e n d r o i t :

1.- a) Selon l'art. 100 al. 1 lettre b ch. 3 OJ, le
recours de droit administratif n'est pas recevable en
matière
de police des étrangers contre l'octroi ou le refus d'autori-
sations auxquelles le droit fédéral ne confère par un droit.
D'après l'art. 4 de la loi fédérale sur le séjour et l'éta-
blissement des étrangers (LSEE; RS 142.20), les autorités
compétentes statuent librement, dans le cadre des prescrip-
tions légales et de traités avec l'étranger, sur l'octroi ou
le refus d'autorisations de séjour ou d'établissement.
Ainsi,
le recours de droit administratif est irrecevable, à moins
que ne puisse être invoquée une disposition particulière du
droit fédéral ou d'un traité accordant le droit à la déli-
vrance d'une telle autorisation (ATF 127 II 60 consid. 1a
p. 62 et les arrêts cités).

b) En vertu de l'art. 7 al. 1 LSEE, le conjoint
étrangers d'un ressortissant suisse a droit à l'octroi et à
la prolongation de l'autorisation de séjour. Après un séjour
régulier et ininterrompu de cinq ans, il a droit à l'autori-
sation d'établissement; ce droit s'éteint lorsqu'il existe
un
motif d'expulsion. Selon l'alinéa 2 de la même disposition,
ce droit n'existe pas lorsque le mariage a été contracté
dans
le but d'éluder les dispositions sur le séjour de l'établis-
sement des étrangers. Il n'existe pas non plus lorsque le
conjoint étranger invoque abusivement une union conjugale
qui
ne subsiste plus que de façon formelle (ATF 127 II 49
consid.
4a et les arrêts cités).

Dans le cas particulier, la recourante est toujours
mariée à un ressortissant suisse. Le recours est donc receva-
ble sous cet angle. C'est en revanche une question de fond
que de déterminer si le droit qu'elle peut prétendre en
vertu
de l'art. 7 al. 1 LSEE s'est éteint ou n'existe pas pour
l'une des causes énumérées par cette disposition.

c) La recourante invoque également l'art. 8 CEDH.

Un étranger peut, selon les circonstances, se pré-
valoir du droit au respect de sa vie privée et familiale ga-
ranti par cette disposition pour s'opposer à l'éventuelle sé-
paration de sa famille et obtenir ainsi une autorisation de
séjour. Encore faut-il que la relation entre l'étranger et
une personne de sa famille ayant le droit de s'établir en
Suisse (nationalité suisse ou autorisation d'établissement)
soit étroite et effective (ATF 122 II 1 consid. 1e p. 5, 289
consid. 1c p. 292 et les arrêts cités).

Comme on le verra, la relation entre les époux ne
saurait, dans le cas particulier, être qualifiée d'étroite
et

effective, de sorte que cette disposition n'est pas applica-
ble (ATF 118 Ib 145 consid. 5 p. 152); partant, le recours
est irrecevable sous cet angle.

d) Lorsque, comme en l'espèce, la décision émane
d'une autorité judiciaire, le Tribunal fédéral est, en vertu
de l'art. 105 al. 2 OJ, lié par les faits constatés par la
décision attaquée, à moins qu'ils ne soient manifestement
inexacts ou incomplets ou qu'ils aient été établis au mépris
de règles essentielles de procédure (ATF 123 II 49 consid.
4b
p. 51).

Dans ce cas, la possibilité d'alléguer des faits
nouveaux ou de faire valoir de nouveaux moyens de preuve est
très restreinte. Selon la jurisprudence, seules sont admissi-
bles dans ce cas les preuves que l'instance inférieure
aurait
dû retenir d'office, et dont le défaut d'administration cons-
titue une violation de règles essentielles de procédure. En
particulier, on ne saurait tenir compte, en principe, de mo-
difications ultérieures de l'état de fait. Les parties ne
sauraient non plus invoquer devant le Tribunal fédéral des
faits nouveaux qu'elles auraient été en mesure - ou qu'il
leur appartenait, en vertu de leur devoir de collaborer à
l'instruction de la cause - de faire valoir devant la juri-
diction inférieure déjà (ATF 121 II 97 consid. 1c p. 99-100,
avec des références de doctrine et de jurisprudence).

Les pièces produites par la recourante pour la pre-
mière fois devant le Tribunal fédéral, de surcroît après
l'échéance du délai de recours, doivent donc être
retranchées
du dossier.

e) Le recours respectant par ailleurs les formes lé-
gales, il y a lieu d'entrer en matière dans cette mesure.

2.- La décision attaquée se fonde essentiellement
sur l'abus de droit que commettrait la recourante en se pré-
valant de l'art. 7 al. 1 LSEE pour demander la prolongation
de son autorisation de séjour.

a) Il y a abus de droit notamment lorsqu'une insti-
tution juridique est utilisée à l'encontre de son but pour
réaliser des intérêts que cette institution juridique n'est
pas destinée à protéger. Le Tribunal fédéral a affirmé à plu-
sieurs reprises que le fait d'invoquer l'art. 7 al. 1 LSEE
peut être constitutif d'un abus de droit en l'absence même
d'un mariage contracté dans le but d'éluder les dispositions
sur le séjour et l'établissement des étrangers. L'existence
d'un tel abus doit être appréciée dans chaque cas
particulier
et avec retenue, seul l'abus manifeste pouvant être pris en
considération. Elle ne peut être déduite du simple fait que
les époux vivent séparés et il ne suffit pas non plus qu'une
procédure de divorce soit entamée. Toutefois, il y a abus de
droit lorsque le conjoint étranger invoque un mariage n'exis-
tant plus que formellement dans le seul but d'obtenir une au-
torisation de séjour, car ce but n'est pas protégé par
l'art.
7 LSEE (ATF 127 II 49 consid. 5a p. 56; 123 II 49 consid. 4
et 5 p. 50; 121 II 97 consid, 4a p. 103/104).

b) En l'espèce, la Cour cantonale a retenu que les
époux n'avaient plus réellement d'intérêts ou de véritables
projets d'avenir communs, qu'ils avaient d'ailleurs passé da-
vantage de temps séparés qu'ensemble, ce qui permettait de
conclure que les liens du mariage étaient atteints au point
qu'une réconciliation semblait difficilement envisageable.

La recourante taxe cette affirmation de "totalement
fausse" en se fondant sur les déclarations de son mari selon
lesquelles ce dernier lui rendait visite à Sion et était dis-
posé à reprendre la vie commune si elle acceptait de réinté-
grer le domicile conjugal à X.________. Elle ne conteste ce-
pendant pas que les époux vivent séparés depuis le mois de

janvier 1999 et qu'ils n'ont, depuis lors, jamais repris la
vie commune ni même tenté de le faire. La recourante ne pré-
tend pas davantage que, malgré leur domicile séparé, elle-mê-
me et son époux entretiendraient des relations suffisamment
étroites et suivies pour pouvoir être qualifiées de vie de
couple, ou que le refus de la juridiction cantonale d'ordon-
ner les mesures probatoires qu'elle avait requises l'aurait
privée de la possibilité d'établir l'existence de telles re-
lations. Il faut dès lors constater que le Tribunal cantonal
n'a établi les faits ni de manière manifestement inexacte ou
incomplète, ni en violation de règles essentielles de la pro-
cédure, de sorte que le Tribunal fédéral est lié par l'état
de fait de l'arrêt déféré (art. 105 al. 2 OJ).

Dans ces conditions, la version des faits présentée
par la recourante n'est pas de nature à infirmer la constata-
tion que son mariage ne lui sert actuellement qu'à demeurer
en Suisse pour y travailler (ATF 127 II 49 consid. 5d p.
59).
La Cour cantonale pouvait dès lors, sans abuser de son pou-
voir d'appréciation, considérer que la recourante commettait
un abus en invoquant son mariage avec T.________ pour obte-
nir la prolongation de son autorisation de séjour.

3.- Il résulte de ce qui précède que le recours doit
être rejeté dans la mesure où il est recevable.
Manifestement
mal fondé, il peut être traité selon la procédure simplifiée
de l'art. 36a OJ. Comme il était au demeurant d'emblée dé-
pourvu de toute chance de succès, la demande d'assistance ju-
diciaire présentée par la recourante doit être rejetée (art.
152 al. 1 OJ). Il y a lieu dès lors de mettre les frais judi-
ciaires à la charge de la recourante, en tenant compte de sa
situation financière (art. 156 al. 1, 153 et 153a OJ).

Au vu de l'issue du recours, la demande d'effet sus-
pensif devient sans objet.

Par ces motifs,

l e T r i b u n a l f é d é r a l ,

vu l'art. 36a OJ:

1. Rejette le recours dans la mesure où il est rece-
vable.

2. Rejette la demande d'assistance judiciaire.

3. Met à la charge de la recourante un émolument ju-
diciaire de 500 fr.

4. Communique le présent arrêt en copie au mandatai-
re de la recourante, au Conseil d'Etat et au Tribunal canto-
nal du canton du valais, ainsi qu'à l'Office fédéral des
étrangers.
_______________

Lausanne, le 25 juin 2001
ROC/elo

Au nom de la IIe Cour de droit public
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
Le Président,

La Greffière,


Synthèse
Numéro d'arrêt : 2A.127/2001
Date de la décision : 25/06/2001
2e cour de droit public

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2001-06-25;2a.127.2001 ?
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