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20/06/2001 | SUISSE | N°K.129/00

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 20 juin 2001, K.129/00


«AZA 7»
K 129/00 Mh

Ière Chambre

composée des Juges fédéraux Lustenberger, Président, Schön,
Spira, Ferrari et Ursprung; Addy, Greffier

Arrêt du 20 juin 2001

dans la cause

A.________, recourante, représentée par Maître Daniel
Cipolla, avocat, rue du Rhône 3, 1920 Martigny,

contre

Mutuelle Valaisanne, rue du Nord 5, 1920 Martigny, intimée,

et

Tribunal cantonal des assurances, Sion

A.- En 1998, A.________ était assurée auprès de la
Mutuelle Valaisanne

pour une indemnité journalière en cas
de maladie de 55 francs par jour, assortie d'un délai d'at-
tente de 30 jours.

Le 11 déc...

«AZA 7»
K 129/00 Mh

Ière Chambre

composée des Juges fédéraux Lustenberger, Président, Schön,
Spira, Ferrari et Ursprung; Addy, Greffier

Arrêt du 20 juin 2001

dans la cause

A.________, recourante, représentée par Maître Daniel
Cipolla, avocat, rue du Rhône 3, 1920 Martigny,

contre

Mutuelle Valaisanne, rue du Nord 5, 1920 Martigny, intimée,

et

Tribunal cantonal des assurances, Sion

A.- En 1998, A.________ était assurée auprès de la
Mutuelle Valaisanne pour une indemnité journalière en cas
de maladie de 55 francs par jour, assortie d'un délai d'at-
tente de 30 jours.

Le 11 décembre 1998, elle a remis à la Mutuelle
Valaisanne trois certificats médicaux qui attestaient
respectivement les incapacités de travail suivantes :

- 50 % du 1er au 30 novembre 1998 (certificat du 4 novembre
1998 du docteur B.________)

- 50 % à partir du 11 novembre 1998 (certificat du 10 no-
vembre 1998 du docteur C.________).

- 50 % du 6 octobre au 20 novembre 1998 et 100 % dès le
21 novembre 1998 (certificat du 24 novembre 1998 du
docteur B.________)

Comme les différentes périodes d'incapacité de travail
médicalement attestées ne concordaient pas, la Mutuelle
Valaisanne a demandé des précisions au docteur B.________.
Dans un premier rapport (du 28 décembre 1998), ce médecin a
fait état d'une incapacité de travail de 50 % à partir du
1er août 1998 déjà; dans un second rapport (du 12 février
1999), il a précisé qu'il avait examiné l'assurée pour la
première fois le 6 octobre 1998, date à laquelle le
diagnostic d'acromégalie était «quasi confirmé» et une
intervention chirurgicale prévue pour le 26 novembre
suivant; il a par ailleurs confirmé que la capacité de
travail était, à son sens, vraisemblablement réduite dans
une mesure de 50 % depuis le mois d'août 1998 déjà, en
indiquant que des renseignements complémentaires pouvaient
être obtenus auprès de la doctoresse D.________. A la
demande de la Mutuelle Valaisanne, celle-ci a indiqué
qu'entre le 13 février et le 29 juillet 1998, elle avait vu
l'assurée à six reprises dans son cabinet, mais qu'elle
n'avait durant cette période attesté aucune incapacité de
travail (rapport du 8 mars 1999).
Par décision du 25 mars 1999, la Mutuelle Valaisanne a
informé l'assurée qu'elle ne lui verserait pas d'indemnités
journalières pour la période allant du 1er août au 5 octo-
bre 1998, au motif que l'annonce d'une incapacité de tra-
vail lui était parvenue tardivement pour cette période et
que l'existence même d'une telle incapacité ne pouvait,

faute d'attestation médicale fiable, être admise au degré
de la vraisemblance prépondérante. A.________ a formé oppo-
sition contre cette décision, en produisant un certificat
médical du docteur E.________ établi le 25 mars 1999 et
libellé de la manière suivante :

«Je, soussigné, certifie que (A.________) a dû être
mise à l'arrêt de travail à 100 % dès le 12 août 1998 pour
des importantes céphalées frontales accompagnées de trou-
bles asthénopiques qui, dans la recherche étiologique, ont
amené au diagnostic qui a été détaillé par les rapports du
Dr. B.________ et du Dr. F.________.»

Par décision du 18 mai 1999, la Mutuelle Valaisanne a
rejeté l'opposition.

B.- A.________ a recouru contre cette décision devant
le Tribunal des assurances du canton du Valais.
A titre de mesure d'instruction, la Cour a ordonné la
production du dossier de l'assurance-chômage de l'assurée.
Les pièces versées en cause par la caisse de chômage ont
révélé que A.________ s'était annoncée dès le mois d'août
1998 au chômage, en indiquant qu'elle recherchait une
activité à 50 % et qu'elle ne présentait pas, avant le mois
d'octobre 1998, d'incapacité de travail.
Par jugement du 21 juin 2000, le Tribunal cantonal a
rejeté le recours.

C.- A.________ interjette recours de droit administra-
tif contre ce jugement dont elle requiert l'annulation, en
concluant au versement de l'indemnité journalière assurée
pour la période du 1er août au 5 octobre 1998, sous suite
de frais et dépens.
La Mutuelle Valaisanne conclut au rejet du recours,
tandis que l'Office fédéral des assurances sociales ne
s'est pas déterminé.

Considérant en droit :

1.- Le litige porte sur le droit de la recourante à
des indemnités journalières pour perte de gain durant la
période du 1er août au 5 octobre 1998.

2.- a) Le versement d'une indemnité journalière par
l'assurance-maladie est subordonné à l'existence d'une
incapacité de travail, totale ou partielle (art. 72 al. 2
LAMal). Est considéré comme incapable de travailler l'as-
suré qui, à la suite d'une atteinte à la santé, ne peut
plus exercer son activité habituelle ou ne peut l'exercer
que d'une manière limitée ou encore avec le risque d'ag-
graver son état (ATF 114 V 283 consid. 1c, 111 V 239 con-
sid. 1b). Pour déterminer le taux de l'incapacité de
travail, il faut, selon la jurisprudence, établir dans
quelle mesure l'assuré ne peut plus, en raison de l'attein-
te à la santé, exercer son activité antérieure, compte tenu
de sa productivité effective et de l'effort qu'on peut
raisonnablement exiger de lui. En revanche, l'estimation
médico-théorique de l'incapacité de travail n'est pas
déterminante (ATF 114 V 283 consid. 1c et les références).
Ces principes, développés sous l'empire de la LAMA,
sont également applicables sous le nouveau régime de la
LAMal (VSI 2000 p. 159 consid. 3b; RAMA 1998 no KV 45
p. 430).

b) Par ailleurs, le fait de s'être assuré pour une
indemnité journalière d'un montant donné et d'avoir payé
les primes correspondantes n'ouvre pas forcément droit au
versement de la somme assurée; l'assuré doit encore prouver
l'existence d'une incapacité de travail et d'une perte de
salaire ou de gain consécutive à la maladie (ATF 110 V 322
consid. 5; RAMA 1990 no K 829 p. 8 consid. 3c; Gebhard
Eugster, Krankenversicherung, in : Schweizerisches Bundes-
verwaltungsrecht [SBVR], Soziale Sicherheit, ch. 377 et
369).

3.- a) Selon les premiers juges, les attestations du
docteur B.________ sont «par trop fluctuantes pour être
suivies». Quant au certificat du docteur E.________, dans
la mesure où il fait remonter l'incapacité de travail au
12 août 1998, soit à une date différente de celle indiquée
par le docteur B.________ pour ce même mois (1er août), ils
considèrent que cela ne fait que rendre plus incertaine
encore l'existence d'une incapacité de travail déterminante
en août 1998. Au degré de la vraisemblance prépondérante,
ils ont fixé le début de celle-ci au 6 octobre 1998.

b) Cette opinion ne peut être suivie.
Certes, le docteur B.________ a-t-il passablement
varié dans ses déclarations, attestant d'abord une inca-
pacité de travail déterminante dès le 1er novembre 1998
(certificat du 4 novembre 1998), puis à partir du 6 octobre
1998 (certificat du 24 novembre 1998) et, enfin, depuis le
1er août 1998 (rapports des 28 décembre 1998 et 12 février
1999). Toutefois, le docteur E.________ a formellement
certifié que la recourante avait «dû être mise à l'arrêt de
travail à 100 % dès le 12 août 1998 pour des importantes
céphalées frontales accompagnées de troubles asthénopiques»
(rapport du 25 mars 1999). Précise et motivée, cette attes-
tation médicale ne peut, sans autre examen, être écartée,
d'autant qu'elle fait état de troubles qui n'ont pas été
mentionnés par le docteur B.________, ni d'ailleurs par
aucun autre médecin.
A cet égard, les indications données par les docteurs
C.________ et D.________ ne permettent pas, contrairement à
l'opinion des premiers juges, d'exclure la survenance d'une
incapacité de travail durant le mois d'août 1998 déjà. Ces
médecins ne se sont, en effet, à aucun moment prononcés
spécifiquement sur la question du début de l'incapacité de
travail; cette question ne leur a du reste pas été posée
(cf. le questionnaire adressé par la Mutuelle Valaisanne au
docteur C.________, le 11 janvier 1999). A cela s'ajoute

que la doctoresse D.________ n'est plus intervenue dans le
traitement de la recourante depuis la fin du mois de
juillet 1998 (soit avant la période déterminante), tandis
que le docteur C.________ ne l'a prise en charge qu'à
partir du mois d'octobre 1998 (soit après la période
déterminante). Or, au vu du certificat établi par le
docteur E.________, tout porte à croire que celui-ci a, au
contraire de ses deux confrères, examiné la recourante
durant le mois d'août 1998.

c) Les premiers juges devaient donc, à tout le moins,
s'ils avaient des doutes sur le bien-fondé de l'apprécia-
tion du docteur E.________, interpeller celui-ci et lui
demander de fournir toute précision utile, notamment quant
aux éléments qui lui ont permis d'arrêter aussi précisément
qu'il l'a fait le début de l'incapacité de travail au
12 août 1998.
Un complément d'instruction sur ce point n'est toute-
fois pas nécessaire, car le recours doit de toute façon
être rejeté pour un autre motif.

4.- a) Ni la LAMal ni l'OAMal ne contiennent, sous
réserve de l'art. 111 OAMal - inapplicable en l'espèce -,
de disposition prescrivant aux assurés l'obligation d'an-
noncer sans retard à leur caisse-maladie la survenance d'un
cas d'assurance, singulièrement une incapacité de travail.
A fortiori aucune sanction n'est-elle prévue, dans le
régime légal, en cas d'avis tardif (Maurer, Das neue
Krankenversicherungsrecht, Bâle/Francfort-sur-le-Main 1996,
p. 116).
Sous l'empire de la LAMA, la jurisprudence avait
admis, en l'absence de dispositions légales, que les
caisses-maladie pouvaient prévoir, dans leurs statuts ou
leurs règlements, des prescriptions d'ordre en matière
d'obligation d'annoncer un cas d'assurance. Dans ce cadre,
elles étaient en particulier autorisées à refuser leurs
prestations jusqu'au jour où elles recevaient un avis en
bonne et due forme, pour autant qu'on pût raisonnablement
exiger de l'assuré qu'il fît l'annonce à temps. Si la

violation de cette obligation apparaissait excusable,
aucune sanction ne pouvait, en règle générale, être appli-
quée. La sanction devait en outre respecter le principe de
proportionnalité (ATF 104 V 10 consid. 2 et les références;
RAMA 1990 n° K 842 p. 173).

b) Dans le régime de l'assurance facultative d'une
indemnité journalière, la LAMal (art. 67 ss) n'a pas
apporté de grand changement par rapport à la réglementation
qui était en vigueur du temps de la LAMA (cf. ATF 126 V 495
consid. 2b et les références). La jurisprudence rappelée au
considérant précédent reste donc pleinement valable sous
l'empire du nouveau droit (Gebhard Eugster, Krankenversi-
cherung, in: Schweizerisches Bundesverwaltungsrecht [SBVR],
Soziale Sicherheit, p. 206, note 934), d'autant plus que
celui-ci attribue désormais un rôle important - renforcé
par rapport à l'ancien droit - aux médecins-conseils des
assureurs pour le contrôle des prestations et des frais
(arrêt A. du 21 mars 2001, prévu pour la publication,
K 87/00, consid. 2d et les références; Message du Conseil
fédéral concernant la révision de l'assurance-maladie du
6 novembre 1991, FF 1992 I 172). Or, la possibilité donnée
aux caisses d'instaurer des sanctions en cas d'annonce
tardive vise précisément à faciliter un tel contrôle, en ce
sens que celui-ci, généralement effectué avec l'aide des
médecins-conseils des assureurs, sera d'autant plus aisé à
mettre en oeuvre et efficace qu'il interviendra rapidement
(Maurer, op. cit., p. 116).
Les caisses-maladie demeurent ainsi libres, en prin-
cipe, de prévoir dans leurs statuts ou leurs règlements des
prescriptions d'ordre en matière d'obligation d'annoncer un
cas d'assurance. Ces prescriptions peuvent être assorties
de sanctions qui doivent toutefois s'exercer dans les
limites du principe de proportionnalité (cf. art. 5 al. 2
Cst.; ATF 124 V 126 consid. 8b). En particulier, un retard
qui n'est pas imputable à une faute ou une négligence de
l'assuré ne doit pas entraîner de sanction (RAMA 1990
n° K 829 p. 4).

c) Les conditions particulières de l'assurance indi-
viduelle d'une indemnité journalière de la Mutuelle
Valaisanne (ci-après : les conditions d'assurance), dans
leur version - déterminante en l'espèce - en vigueur en
novembre 1998, disposent à leur art. 4 ch. 3 :

«En cas d'incapacité de travail totale ou partielle,
l'assuré doit en informer la caisse dans un délai de 3 à
6 jours à compter du début de l'interruption de travail et
ce par l'intermédiaire d'un certificat médical. Si l'annon-
ce parvient à la caisse après ce délai, le jour où il (sic)
est donné est réputé premier jour d'incapacité de travail.
Les prestations ne seront pas accordées pour les jours qui
précèdent l'envoi tardif du certificat médical, sous
déduction du délai de 6 jours à compter du début de la
prise en charge».

Comme on l'a dit, un avis tardif ne justifie pas une
sanction si l'assuré peut se prévaloir d'un motif excu-
sable. En l'occurrence, la recourante n'a informé l'intimée
que le 11 décembre 1998 d'une incapacité de travail qui
serait survenue à partir du 6 octobre 1998, et c'est plus
tard encore qu'une incapacité de travail remontant au
1er août 1998 a été signalée à la caisse par le docteur
B.________ (rapport du 28 décembre 1998).
Certes, la recourante prétend qu'elle «a fait tout son
possible pour annoncer son invalidité au plus tôt» mais
que, «perturbée et désorientée, elle a été incitée à agir
de façon déraisonnée et irréfléchie» et qu'en définitive,
«elle n'était pas en mesure de s'occuper de problèmes
administratifs qui la dépassaient». Non étayées, ces
allégations ne sont guère convaincantes. Au demeurant, la
recourante a été en mesure de s'inscrire à l'assurance-
chômage et d'accomplir, dès le mois d'août 1998, toutes
les
formalités nécessaires pour bénéficier des indemnités de
chômage (recherches personnelles d'emploi, observation des
prescriptions de contrôle...). Elle aurait donc également
été capable, durant la même période, de demander à son
médecin traitant un certificat médical, puis de le trans-
mettre sans délai à la caisse. De près de cinq mois, le

retard de la recourante n'est par conséquent pas excusable
et justifie une sanction en application de l'art. 4 ch. 3
précité des conditions d'assurance de l'intimée.
Le recours est mal fondé.

5.- La recourante, qui succombe, ne saurait prétendre
une indemnité de dépens pour l'instance fédérale (art. 159
al. 1 en corrélation avec l'art. 135 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances

p r o n o n c e :

I. Le recours est rejeté.

II. Il n'est pas perçu de frais de justice.

III. Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tri-
bunal cantonal des assurances du canton du Valais et à
l'Office fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 20 juin 2001

Au nom du
Tribunal fédéral des assurances
Le Président de la Ière Chambre :

Le Greffier :


Synthèse
Numéro d'arrêt : K.129/00
Date de la décision : 20/06/2001
Cour des assurances sociales

Analyses

Art. 72 LAMal: Annonce tardive d'une incapacité de travail dans l'assurance facultative d'une indemnité journalière. Les assureurs peuvent prévoir dans leurs statuts ou leurs règlements, aux mêmes conditions que sous l'ancien droit, des sanctions en cas d'annonce tardive d'une incapacité de travail.


Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2001-06-20;k.129.00 ?
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