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11/06/2001 | SUISSE | N°C.276/99

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 11 juin 2001, C.276/99


«AZA 7»
C 276/99 Mh

IIIe Chambre

composée des Juges fédéraux Schön, Spira et Widmer;
Beauverd, Greffier

Arrêt du 11 juin 2001

dans la cause

A.________, recourant, représenté par Maître Jörn-Albert
Bostelmann, avocat, avenue Ritz 31, 1950 Sion 2,

contre

Caisse publique cantonale valaisanne de chômage, Place du
Midi 40, 1951 Sion, intimée,

et

Commission cantonale de recours en matière de chômage, Sion

A.- Par contrat conclu avec B.________, président d

e
X.________, A.________ a été engagé en qualité d'adminis-
trateur général de ce club pour une durée de trois ans et
trois mois ...

«AZA 7»
C 276/99 Mh

IIIe Chambre

composée des Juges fédéraux Schön, Spira et Widmer;
Beauverd, Greffier

Arrêt du 11 juin 2001

dans la cause

A.________, recourant, représenté par Maître Jörn-Albert
Bostelmann, avocat, avenue Ritz 31, 1950 Sion 2,

contre

Caisse publique cantonale valaisanne de chômage, Place du
Midi 40, 1951 Sion, intimée,

et

Commission cantonale de recours en matière de chômage, Sion

A.- Par contrat conclu avec B.________, président de
X.________, A.________ a été engagé en qualité d'adminis-
trateur général de ce club pour une durée de trois ans et
trois mois à compter du 1er avril 1996. Le salaire annuel
était fixé à 144 000 fr.

Le 12 décembre 1997, B.________ a soumis à A.________
un projet de convention, aux termes de laquelle ce dernier
acceptait le paiement de son salaire jusqu'au 31 décembre
1997, ainsi que le versement d'une indemnité pour rupture
des relations de travail d'un montant de 40 000 fr. Le
travailleur a adhéré à cette convention le 16 décembre
1997.
A.________ a requis l'octroi d'une indemnité de
chômage à partir du 3 février 1998.
Par commandement de payer du 23 mars 1998, le prénommé
a requis de B.________ le paiement de deux montants de
12 000 fr. avec intérêt à 5 % l'an à partir, respective-
ment, du 31 janvier et du 28 février 1998. Le débiteur
ayant fait opposition à ce commandement de payer, le
créancier a obtenu la mainlevée provisoire pour la totalité
de ses créances (décision du Tribunal des districts de
Y.________ et Z.________ du 20 avril 1998).
B.________ ayant introduit une action en libération de
dettes devant le Tribunal du travail du canton du Valais,
les parties ont passé une transaction le 24 juin 1998. Aux
termes de cette transaction, B.________ reconnaissait
devoir à A.________ une indemnité de 50 000 fr. - sous
déduction d'un montant de 20 000 fr. déjà payé - «pour
solde de tout compte en liquidation totale du litige». Ce
document indiquait en outre que la Caisse publique
cantonale valaisanne de chômage (ci-après : la caisse)
déclarait n'avoir pas de prétention à faire valoir contre
B.________ et avait informé l'assuré qu'une sanction
pourrait être prise contre lui.
Par décision du 8 juillet 1998, la caisse a prononcé
la suspension du droit de l'assuré à l'indemnité de chômage
d'une durée de 40 jours pour faute grave. Elle a considéré
qu'«en acceptant une résiliation anticipée des rapports de
travail, par signature du procès-verbal de conciliation du

24 juin 1998, (l'intéressé avait) renoncé à faire valoir
des prétentions (de salaire) envers (son) ancien em-
ployeur».

B.- Saisie d'un recours contre cette décision, la
Commission cantonale valaisanne de recours en matière de
chômage l'a rejeté par jugement du 9 novembre 1998.

C.- A.________ interjette recours de droit adminis-
tratif contre ce jugement, dont il requiert l'annulation,
en concluant, sous suite de frais et dépens, à l'annulation
de la suspension de son droit à l'indemnité de chômage.
La juridiction cantonale propose le rejet du recours,
tandis que la caisse a renoncé à se déterminer. Le
Secrétariat d'Etat à l'économie n'a pas présenté de
préavis.

Considérant en droit :

1.- Dans la procédure de recours concernant l'octroi
ou le refus de prestations d'assurance, le pouvoir d'examen
du Tribunal fédéral des assurances n'est pas limité à la
violation du droit fédéral - y compris l'excès et l'abus du
pouvoir d'appréciation - mais s'étend également à l'oppor-
tunité de la décision attaquée. Le tribunal n'est alors pas
lié par l'état de fait constaté par la juridiction infé-
rieure, et il peut s'écarter des conclusions des parties à
l'avantage ou au détriment de celles-ci (art. 132 OJ).
Le Tribunal fédéral des assurances n'étant pas lié par
les motifs que les parties invoquent (art. 114 al. 1 en
corrélation avec l'art. 132 OJ), il examine d'office si le
jugement attaqué viole des normes de droit public fédéral
ou si la juridiction de première instance a commis un excès

ou un abus de son pouvoir d'appréciation (art. 104 let. a
OJ). Il peut ainsi admettre ou rejeter un recours sans
égard aux griefs soulevés par le recourant ou aux raisons
retenues par le premier juge (ATF 122 V 36 consid. 2b,
119 V 28 consid. 1b, 442 consid. 1a et les références).

2.- a) Le recourant reproche aux premiers juges
d'avoir violé son droit d'être entendu en refusant d'en-
tendre les témoins dont il avait requis l'audition. Selon
lui, ces témoignages étaient de nature à apporter la preuve
qu'il eût été risqué de maintenir ses prétentions contre
B.________ : ses chances de succès étaient aléatoires, les
frais de procédure élevés et l'affaire d'autant plus
complexe que la qualité d'employeur du prénommé n'était pas
certaine. Ces témoignages auraient ainsi permis aux
premiers juges de constater qu'il n'avait pas renoncé
fautivement à faire valoir des prétentions de salaire
contre son dernier employeur, au détriment de l'assurance.

b) Le droit d'être entendu - qui comprend notamment le
droit pour le justiciable de fournir des preuves quant aux
faits de nature à influer sur le sort de la décision (ATF
124 I 51 consid. 3a, 242 consid. 2, 124 II 137 consid. 2b,
124 V 181 consid. 1a, 375 consid. 3b et les références) -
est une garantie constitutionnelle de caractère formel
(art. 29 al. 2 Cst.), dont la violation doit entraîner
l'annulation de la décision attaquée, indépendamment des
chances de succès du recourant sur le fond (ATF 124 V 183
consid. 4a, 122 II 469 consid. 4a et les arrêts cités).
En l'occurrence, il n'est toutefois pas nécessaire
d'examiner plus avant le bien-fondé du grief soulevé par le
recourant. En effet, les témoignages requis par le recou-
rant n'étaient pas de nature à influer sur l'issue de la
présente cause, comme cela ressort des considérants
suivants.

3.- a) Aux termes de l'art. 30 al. 1 LACI, le droit de
l'assuré à l'indemnité est suspendu lorsqu'il est établi
que celui-ci est sans travail par sa propre faute (let. a)
ou a renoncé à faire valoir des prétentions de salaire ou
d'indemnisation envers son dernier employeur, cela au
détriment de l'assurance (let. b).

b) Les premiers juges ont confirmé la décision liti-
gieuse de suspension du droit à l'indemnité de chômage,
motif pris qu'en concluant, le 24 juin 1998, une trans-
action avec B.________, l'assuré avait renoncé, au
détriment de l'assurance-chômage, à faire valoir des pré-
tentions de salaire contre son dernier employeur au sens de
l'art. 30 al. 1 let. b LACI.

c) Ce point de vue est mal fondé, dans la mesure où le
comportement reproché au recourant ne pouvait pas entraîner
une suspension de l'indemnité de chômage en vertu de
l'art. 30 al. 1 let. b LACI. Cette sanction suppose en
effet que le travailleur est toujours disposé à exécuter le
travail convenu, mais que l'employeur refuse l'exécution
offerte, se trouvant ainsi en demeure de l'accepter
(art. 324 al. 1 CO; Thomas Nussbaumer, Arbeitslosen-
versicherung, in : Schweizerisches Bundesverwaltungsrecht
[SBVR], soziale Sicherheit, ch. 699 p. 255; Jacqueline
Chopard, Die Einstellung in der Anspruchsberechtigung,
thèse Zurich 1997, p. 133). Ce motif de suspension doit
être distingué de la suspension en raison d'un chômage dû à
la propre faute de l'assuré (art. 30 al. 1 let. a LACI), ce
qui suppose que le comportement de celui-ci a joué un rôle
causal dans la survenance du chômage, constituant ainsi une
violation de l'obligation d'éviter le chômage (ATF 122 V 38
consid. 3a). Tel est le cas notamment lorsque l'assuré
accepte la résiliation anticipée des rapports de travail
signifiée par l'employeur (Thomas Nussbaumer, op. cit.
no 699 p. 255; Jacqueline Chopard, op. cit. p. 133).

d) En l'espèce, la transaction judiciaire du 24 juin
1998 a été précédée d'une convention des 12/16 décembre
1997, selon laquelle les parties sont convenues du paiement
du salaire jusqu'au 31 décembre 1997 et du versement d'une
indemnité pour rupture des relations de travail d'un mon-
tant de 40 000 fr. Force est dès lors de constater qu'en
adhérant à cette convention, l'assuré a accepté la décision
de l'employeur de renoncer à la continuation du contrat de
travail jusqu'à son terme. D'ailleurs, la rupture anticipée
du contrat de travail au 31 décembre 1997 a été expressé-
ment confirmée dans la transaction judiciaire du 24 juin
1998. Le présent cas est donc comparable à celui de l'as-
suré qui accepte un licenciement ne respectant pas le délai
contractuel ou légal de congé (arrêt L. du 10 mai 2001,
C 76/00) ou consent, sur proposition de son employeur, à
réduire la durée contractuelle du délai de congé (arrêt non
publié V. du 11 novembre 1999, C 149/99).
Le comportement du recourant ne peut dès lors pas
faire l'objet d'une mesure de suspension en vertu de
l'art. 30 al. 1 let. b LACI, comme l'ont admis les premiers
juges, mais est susceptible de tomber sous le coup des
art. 30 al. 1 let. a LACI et 44 al. 1 let. a ou b OACI.

4.- a) Aux termes de l'art. 44 al. 1 OACI, est notam-
ment réputé sans travail par sa propre faute l'assuré qui,
par son comportement, en particulier par la violation de
ses obligations contractuelles de travail, a donné à son
employeur un motif de résiliation du contrat de travail
(let. a) ou qui a résilié lui-même le contrat de travail,
sans avoir été préalablement assuré d'obtenir un autre
emploi, sauf s'il ne pouvait être exigé de lui qu'il
conservât son ancien emploi (let. b).

b) En l'espèce, les pièces versées au dossier ne
permettent pas de savoir si, en acceptant la décision de
l'employeur de renoncer à la continuation du contrat de

travail jusqu'à son terme, le recourant a eu un comporte-
ment fautif tombant sous le coup de l'art. 44 al. 1 let. a
ou b OACI. Dans le jugement entrepris, il est fait état
d'une lettre - qui n'a pas été versée au dossier - adressée
par l'employeur à l'assuré le 5 novembre 1997, aux termes
de laquelle ce dernier a été congédié en raison d'un manque
de confidentialité, de problèmes de gestion interne du club
et de démarches insuffisantes en ce qui concerne la re-
cherche de sponsors. En revanche, selon l'attestation de
l'employeur du 22 février 1998, la résiliation des rapports
de travail a eu lieu au motif que le «mandat (était) termi-
né avec l'association à X.________».
Dans ces conditions, il convient de renvoyer la cause
à la caisse intimée pour qu'elle rende, après complément
d'instruction, une nouvelle décision sur une suspension
éventuelle du droit du recourant à l'indemnité de chômage
en vertu des art. 30 al. 1 let. a LACI et 44 al. 1 let. a
ou b OACI.

5.- Le recourant, qui est représenté par un avocat,
obtient gain de cause. Il a droit à une indemnité de dépens
à la charge de la caisse intimée, qui succombe (art. 159
al. 1 OJ).
Compte tenu de l'issue de la procédure cantonale, les
premiers juges ont refusé d'accorder des dépens au recou-
rant (chiffre 3 du dispositif du jugement attaqué). Il
n'appartient pas au Tribunal fédéral des assurances d'in-
viter l'autorité cantonale à statuer à nouveau sur cette
question, attendu qu'en matière d'assurance-chômage, il
n'existe pas de droit aux dépens fondé sur la législation
fédérale au sens de l'art. 104 let. a OJ (cf. l'art. 103
LACI). Mais le recourant, qui a obtenu gain de cause en
instance fédérale, a la faculté de demander aux premiers
juges de se prononcer à nouveau sur ce point, au regard de
l'issue définitive du litige.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances

p r o n o n c e :

I. Le recours est admis en ce sens que le jugement de la
Commission cantonale valaisanne de recours en matière
de chômage du 9 novembre 1998 et la décision de la
Caisse publique cantonale valaisanne de chômage du
8 juillet 1998 sont annulés, la cause étant renvoyée à
la caisse pour instruction complémentaire au sens des
considérants et nouvelle décision.

II. Il n'est pas perçu de frais de justice.

III. La caisse intimée versera au recourant la somme de
1500 fr. (y compris la taxe à la valeur ajoutée) à
titre de dépens pour l'instance fédérale.

IV. Le présent arrêt sera communiqué aux parties, à la
Commission cantonale valaisanne de recours en matière
de chômage et au Secrétariat d'Etat à l'économie.

Lucerne, le 11 juin 2001

Au nom du
Tribunal fédéral des assurances
Le Président de la IIIe Chambre :

Le Greffier :


Synthèse
Numéro d'arrêt : C.276/99
Date de la décision : 11/06/2001
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2001-06-11;c.276.99 ?
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