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22/05/2001 | SUISSE | N°2A.512/2000

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 22 mai 2001, 2A.512/2000


2A.512/2000
«/2»

IIe C O U R D E D R O I T P U B L I C
************************************************

22 mai 2001

Composition de la Cour: MM. et Mme les Juges Wurzburger, pré-
sident, Hartmann et Yersin. Greffière: Mme Dupraz.

Statuant sur le recours de droit administratif
formé par

P.________, représenté par Me Laurent Métrailler, avocat à
Monthey,

contre

l'arrêt rendu le 28 septembre 2000 par la Cour de droit pu-
blic du Tribunal cantonal du canton du Valais, dans la

cause
qui oppose le recourant au Conseil d'Etat du canton du Va-
lais;

(art. 7 al. 1 et 10 al. 1 LSEE ainsi ...

2A.512/2000
«/2»

IIe C O U R D E D R O I T P U B L I C
************************************************

22 mai 2001

Composition de la Cour: MM. et Mme les Juges Wurzburger, pré-
sident, Hartmann et Yersin. Greffière: Mme Dupraz.

Statuant sur le recours de droit administratif
formé par

P.________, représenté par Me Laurent Métrailler, avocat à
Monthey,

contre

l'arrêt rendu le 28 septembre 2000 par la Cour de droit pu-
blic du Tribunal cantonal du canton du Valais, dans la cause
qui oppose le recourant au Conseil d'Etat du canton du Va-
lais;

(art. 7 al. 1 et 10 al. 1 LSEE ainsi que 8 CEDH:
autorisation de séjour)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- Ressortissant yougoslave, né le 26 juillet 1966,
P.________ a épousé le 18 décembre 1985 S.________, une com-
patriote veuve née le 15 décembre 1958, titulaire d'une auto-
risation d'établissement en Suisse qui avait de son premier
mariage une fille née en 1979. L'intéressé est arrivé en
Suisse le 24 février 1986 et a bénéficié, pour pouvoir vivre
auprès de sa femme, d'une autorisation de séjour à l'année
qui a été régulièrement prolongée, la dernière fois jusqu'au
24 janvier 1998.

Par jugement du 20 juin 1995, le Tribunal correc-
tionnel du district de Vevey a condamné P.________ a
dix-huit
mois de réclusion et à 1'000 fr. d'amende avec sursis et dé-
lai d'épreuve en vue de radiation anticipée au casier judi-
ciaire de cinq ans pour attentats à la pudeur des enfants
qualifiés, violation simple des règles de la circulation,
ivresse au volant, dérobade à une prise de sang et violation
des devoirs en cas d'accident; il a en outre ordonné l'expul-
sion de l'intéressé du territoire suisse pendant dix ans,
avec sursis pendant cinq ans. Sur recours, la Cour de cassa-
tion pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud a
confirmé
ce jugement par arrêt du 21 juillet 1995.

Le 19 février 1998, l'Office cantonal de contrôle
des habitants et de police des étrangers du canton de Vaud a
refusé de prolonger l'autorisation de séjour de P.________
et
lui a imparti un délai d'un mois dès la notification de
cette
décision pour quitter le territoire vaudois; il s'est fondé
sur le comportement de l'intéressé, notamment sur sa condam-
nation précitée du 20 juin 1995, et sur sa situation finan-

cière. Par arrêt du 21 avril 1998, le Tribunal administratif
du canton de Vaud a rejeté le recours de P.________ contre
cette décision et imparti à l'intéressé un délai échéant le
30 avril 1998 pour quitter le territoire vaudois.

B.- Par jugement du 18 mai 1998, le Tribunal civil
du district de Vevey a prononcé le divorce des époux
PS.________.

Le 19 mai 1998, P.________ a déposé une demande
d'asile. Il a été attribué au canton d'Argovie et a reçu en
conséquence une autorisation de séjour "N" pour requérant
d'asile, indiquant notamment qu'il était domicilié à Aarau.

Le 4 décembre 1998, P.________ a épousé W.________,
ressortissante suisse, née le 16 janvier 1957. Les époux
PW.________ se sont installés à C.________. Le 28 décembre
1998, P.________ a déposé une "demande de prolongation d'au-
torisation de séjour et de travail" que le Service de l'état
civil et des étrangers du canton du Valais (ci-après: le Ser-
vice cantonal) a rejetée le 6 octobre 1999 en impartissant à
l'intéressé un délai échéant le 15 novembre 1999 pour
quitter
le territoire valaisan. Le Service cantonal s'est fondé en
particulier sur la condamnation susmentionnée du 20 juin
1995, en se référant à la jurisprudence en matière de délits
sexuels. Il a également considéré qu'en se mariant avec
P.________, sa femme devait envisager qu'il ne puisse pas sé-
journer en Suisse.

C.- Par jugement du 10 mai 2000, le Juge I de Mon-
they a condamné l'intéressé à 800 fr. d'amende pour lésions
corporelles simples.

Par décision du 25 mai 2000, l'Office fédéral des
réfugiés a notamment rejeté la demande d'asile de P.________

et imparti à l'intéressé un délai échéant le 31 août 2000
pour quitter la Suisse.

D.- Par décision du 31 mai 2000, le Conseil d'Etat
du canton du Valais (ci-après: le Conseil d'Etat) a rejeté
le
recours de P.________ contre la décision du Service cantonal
du 6 octobre 1999, en reprenant la motivation de l'autorité
inférieure.

E.- Par arrêt du 28 septembre 2000, la Cour de droit
public du Tribunal cantonal du canton du Valais (ci-après:
le
Tribunal cantonal) a rejeté le recours de P.________ contre
la décision du Conseil d'Etat du 31 mai 2000 et confirmé cet-
te décision. Le Tribunal cantonal a retenu en particulier la
gravité des actes commis ayant abouti à la condamnation pré-
citée du 20 juin 1995, le comportement général de
l'intéressé
et sa situation financière.

F.- Agissant par la voie du recours de droit admi-
nistratif, P.________ demande au Tribunal fédéral, sous
suite
de frais et dépens, d'annuler l'arrêt du Tribunal cantonal
du
28 septembre 2000 et de prolonger son autorisation de séjour
jusqu'au 31 décembre 2001. Il reproche notamment à
l'autorité
intimée d'avoir abusé de son pouvoir d'appréciation et
d'avoir violé les art. 6 par. 2 et 8 CEDH. Il demande la pro-
duction de différents dossiers.

Le Conseil d'Etat conclut au rejet du recours, en se
référant aux observations du Service cantonal. L'Office fédé-
ral des étrangers propose de rejeter le recours. Hors délai,
le Tribunal cantonal a expressément renoncé à se déterminer
sur le recours.

C o n s i d é r a n t e n d r o i t :

1.- Le Tribunal fédéral examine d'office et libre-
ment la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF
126
III 274 consid. 1 p. 275).

a) Selon l'art. 100 al. 1 lettre b ch. 3 OJ, le re-
cours de droit administratif n'est pas recevable en matière
de police des étrangers contre l'octroi ou le refus d'autori-
sations auxquelles le droit fédéral ne confère pas un droit.
D'après l'art. 4 de la loi fédérale du 26 mars 1931 sur le
séjour et l'établissement des étrangers (LSEE; RS 142.20),
les autorités compétentes statuent librement, dans le cadre
des prescriptions légales et des traités avec l'étranger,
sur
l'octroi ou le refus d'autorisations de séjour ou d'établis-
sement. En principe, l'étranger n'a pas de droit à l'octroi
d'une autorisation de séjour. Ainsi, le recours de droit ad-
ministratif est irrecevable, à moins que ne puisse être invo-
quée une disposition particulière du droit fédéral ou d'un
traité, accordant le droit à la délivrance d'une telle auto-
risation (ATF 126 I 81 consid. 1a p. 83).

aa) D'après l'art. 7 al. 1 LSEE, le conjoint étran-
ger d'un ressortissant suisse a droit à l'octroi et à la
prolongation de l'autorisation de séjour. Selon la jurispru-
dence, pour juger de la recevabilité du recours de droit ad-
ministratif, seule est déterminante la question de savoir si
un mariage au sens formel existe (ATF 124 II 289 consid. 2b
p. 291).

L'intéressé est marié avec une Suissesse, de sorte
que le recours est recevable.

bb) Un étranger peut, selon les circonstances, se
prévaloir du droit au respect de sa vie privée et familiale

garanti par l'art. 8 par. 1 CEDH pour s'opposer à l'éventuel-
le séparation de sa famille et obtenir ainsi une
autorisation
de séjour. Encore faut-il, pour pouvoir invoquer cette dispo-
sition, que la relation entre l'étranger et une personne de
sa famille ayant le droit de s'établir en Suisse (en
principe
nationalité suisse ou autorisation d'établissement) soit
étroite et effective (ATF 122 II 1 consid. 1e p. 5).

Le recourant vit avec sa femme de nationalité suisse
et il n'est pas contesté qu'ils entretiennent une relation
étroite et effective. Dès lors, le recours est aussi receva-
ble au regard de l'art. 8 CEDH.

b) Au surplus, déposé en temps utile et dans les
formes prescrites par la loi, le présent recours est en prin-
cipe recevable en vertu des art. 97 ss OJ.

2.- D'après l'art. 104 OJ, le recours de droit admi-
nistratif peut être formé pour violation du droit fédéral, y
compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation (lettre
a) ainsi que pour constatation inexacte ou incomplète des
faits pertinents, sous réserve de l'art. 105 al. 2 OJ, (let-
tre b). Le Tribunal fédéral vérifie d'office l'application
du
droit fédéral, qui englobe notamment les droits constitution-
nels des citoyens (ATF 124 II 517 consid. 1 p. 519; 123 II
385 consid. 3 p. 388), sans être lié par les motifs invoqués
par les parties (art. 114 al. 1 in fine OJ). En revanche,
lorsque le recours est dirigé, comme en l'espèce, contre la
décision d'une autorité judiciaire, le Tribunal fédéral est
lié par les faits constatés dans cette décision, sauf s'ils
sont manifestement inexacts ou incomplets ou s'ils ont été
établis au mépris de règles essentielles de procédure (art.
105 al. 2 OJ). En outre, le Tribunal fédéral ne peut pas re-
voir l'opportunité de l'arrêt entrepris, le droit fédéral ne
prévoyant pas un tel examen en la matière (art. 104 lettre c
ch. 3 OJ).

3.- Le recourant a demandé la production des dos-
siers du Tribunal cantonal, du Conseil d'Etat et du Service
cantonal. Le premier dossier a été produit par le Tribunal
cantonal et les deux autres par le Conseil d'Etat. Dès lors,
la réquisition d'instruction de l'intéressé est sans objet.

4.- a) Selon l'art. 7 al. 1 LSEE, le droit du con-
joint étranger d'un ressortissant suisse à l'octroi et à la
prolongation d'une autorisation de séjour s'éteint lorsqu'il
existe un motif d'expulsion. D'après l'art. 10 al. 1 LSEE,
l'étranger peut être expulsé de Suisse notamment s'il a été
condamné par une autorité judiciaire pour crime ou délit
(lettre a) ou si sa conduite, dans son ensemble, et ses
actes
permettent de conclure qu'il ne veut pas s'adapter à l'ordre
établi dans le pays qui lui offre l'hospitalité ou qu'il
n'en
est pas capable (lettre b).

De même, le droit au respect de la vie privée et fa-
miliale garanti par l'art. 8 par. 1 CEDH n'est pas absolu.
Une ingérence dans l'exercice de ce droit est possible selon
l'art. 8 par. 2 CEDH, pour autant que cette ingérence soit
prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans
une société démocratique, est nécessaire à la sécurité natio-
nale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays,
à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions
pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à
la
protection des droits et libertés d'autrui.

Le refus d'octroyer une autorisation de séjour au
conjoint étranger d'un ressortissant suisse, respectivement
le refus de la prolonger, sur la base de l'art. 10 al. 1 let-
tres a et b LSEE suppose une pesée des intérêts en présence
tant en vertu de l'art. 7 al. 1 LSEE que de l'art. 8 par. 2
CEDH (cf. ATF 120 Ib 6 consid. 4a p. 12/13) et l'examen de
la
proportionnalité de la mesure (cf. art. 11 al. 3 LSEE; ATF
116 Ib 113 consid. 3c p. 117). Pour apprécier ce qui est

équitable, l'autorité doit tenir compte notamment de la gra-
vité de la faute commise par l'étranger, de la durée de son
séjour en Suisse et du préjudice qu'il aurait à subir avec
sa
famille du fait de l'expulsion, respectivement du refus d'ac-
corder ou de prolonger une autorisation de séjour, (cf. art.
16 al. 3 du règlement d'exécution du 1er mars 1949 de la
LSEE
- RSEE; RS 142.201).

b) Quand le refus d'octroyer, respectivement de pro-
longer, une autorisation de séjour se fonde sur la
commission
d'une infraction, la peine infligée par le juge pénal est le
premier critère lorsqu'il s'agit d'évaluer la gravité de la
faute et de procéder à la pesée des intérêts.

Pour procéder à cette pesée des intérêts, l'autorité
de police des étrangers s'inspire de considérations différen-
tes de celles qui guident l'autorité pénale. Ainsi, la déci-
sion du juge pénal d'ordonner ou non l'expulsion d'un condam-
né étranger en application de l'art. 55 CP, ou de l'ordonner
en l'assortissant d'un sursis, respectivement la décision
que
prend l'autorité compétente de suspendre l'exécution de
cette
peine accessoire, est dictée, au premier chef, par des consi-
dérations tirées des perspectives de réinsertion sociale de
l'intéressé; pour l'autorité de police des étrangers, c'est
en revanche la préoccupation de l'ordre et de la sécurité pu-
blics qui est prépondérante. Il en découle que
l'appréciation
faite par l'autorité de police des étrangers peut avoir pour
l'intéressé des conséquences plus rigoureuses que celle de
l'autorité pénale (ATF 120 Ib 129 consid. 5b p. 132 et la ju-
risprudence citée).

Selon la jurisprudence applicable au conjoint étran-
ger d'un ressortissant suisse, une condamnation à deux ans
de
privation de liberté constitue la limite à partir de laquel-
le, en général, il y a lieu de refuser l'autorisation de sé-
jour quand il s'agit d'une demande d'autorisation initiale
ou

d'une requête de prolongation d'autorisation déposée après
un
séjour de courte durée (ATF 120 Ib 6 consid. 4b p. 14 se ré-
férant à l'arrêt Reneja, ATF 110 Ib 201). Ce principe vaut
même lorsqu'on ne peut pas - ou difficilement - exiger de
l'épouse suisse de l'étranger qu'elle quitte la Suisse, ce
qui empêche de fait les conjoints de vivre ensemble d'une ma-
nière ininterrompue. En effet, lorsque l'étranger a
gravement
violé l'ordre juridique en vigueur et qu'il a ainsi été con-
damné à une peine d'au moins deux ans de détention,
l'intérêt
public à son éloignement l'emporte normalement sur son inté-
rêt privé - et celui de sa famille - à pouvoir rester en
Suisse. Cette référence à une quotité de
peine de détention
de deux ans n'a cependant qu'un caractère indicatif. Une au-
torisation de séjour pourra être refusée même lorsque cette
quotité n'est pas atteinte. Au demeurant, la jurisprudence
est rigoureuse en matière de trafic de drogue important et
d'atteinte grave à l'intégrité corporelle, en particulier de
viols (Alain Wurzburger, La jurisprudence récente du
Tribunal
fédéral en matière de police des étrangers, in RDAF 1997 1
267, p. 308).

c) En l'espèce, il existe au moins un motif d'expul-
sion, puisque l'intéressé a été condamné par une autorité ju-
diciaire pour "crime ou délit" (art. 10 al. 1 lettre a
LSEE).
Le recourant s'est vu infliger une peine de dix-huit mois de
réclusion, ce qui est certes inférieur à la limite de deux
ans rappelée ci-dessus. Cependant, il s'est rendu coupable
en
particulier d'attentats à la pudeur des enfants qualifiés,
la
victime étant sa belle-fille qui avait à l'époque des faits
de dix à treize ans environ. Le Tribunal correctionnel du
district de Vevey a d'ailleurs relevé que les faits commis
étaient particulièrement vils et graves, d'autant qu'ils
s'étaient prolongés sur plusieurs années et avaient eu lieu
sur une victime qui aurait dû au contraire pouvoir compter
sur l'aide du recourant pour son éducation et son développe-
ment. Il a également souligné que les conséquences pour le

bien-être passé et futur de la victime étaient à l'évidence
importantes. Toutefois, il a tenu à prononcer une peine com-
patible avec le sursis, en raison de l'absence d'antécédents
de l'intéressé, de l'avis des experts psychiatres, du compor-
tement du recourant depuis la commission des actes en cause
ainsi que de l'importance pour la victime et sa mère de ne
pas perdre leur principal soutien financier. Il a ajouté que
le recourant devrait être conscient que la peine particuliè-
rement clémente prononcée à son encontre se justifiait essen-
tiellement pour des raisons d'opportunité (cf. le jugement
susmentionné du 20 juin 1995 p. 16/17). Dans ces conditions,
la condamnation prononcée le 20 juin 1995 par le Tribunal
correctionnel du district de Vevey à l'encontre du recourant
suffisait à justifier le refus de lui délivrer une autorisa-
tion de séjour. On ne saurait suivre l'intéressé quand il re-
proche à l'autorité intimée d'avoir abusé de son pouvoir
d'appréciation en omettant les éléments que le jugement pré-
cité du 20 juin 1995 a retenus en sa faveur. En effet, ledit
jugement a pris ces éléments en compte pour la fixation de
la
peine et le Tribunal cantonal a bien relevé que cette peine
était "inférieure aux deux ans mentionnés dans la jurispru-
dence". Quant au fait que le recourant a repris la vie commu-
ne avec la victime et sa mère, il n'est pas pertinent
puisque
cela a été un échec.

L'autorité intimée a également retenu le mauvais
comportement général de l'intéressé (art. 10 al. 1 lettre b
LSEE), puisque la police avait été mise en oeuvre à quatre
reprises en sept ans à cause de ses agissements. Compte tenu
du libellé de l'arrêt attaqué, on ne saurait cependant admet-
tre avec l'intéressé que le Tribunal cantonal ait violé la
présomption d'innocence consacrée à l'art. 6 par. 2 CEDH. En
effet, l'autorité intimée a bien distingué ce comportement
des condamnations visées par l'art. 10 al. 1 lettre a LSEE
et
relevé que le recourant avait partiellement admis les faits
au cours d'interrogatoires. L'intéressé est mal venu de

reprocher au Tribunal cantonal d'avoir retenu à son encontre
des actes contraires à l'ordre juridique dans la mesure où
il
les a lui-même reconnus. Au demeurant, il n'avait pas été
condamné seulement une fois au moment où l'arrêt entrepris
est tombé: en plus de la condamnation précitée du 20 juin
1995, il avait fait l'objet d'une condamnation le 10 mai
2000
pour des faits datant du 1er octobre 1999.

Le recourant se plaint en outre que l'autorité in-
timée ait considéré qu'il avait persisté à demeurer dans le
canton de Vaud malgré les injonctions des autorités lui
ayant
ordonné de quitter ce territoire et l'existence d'une procé-
dure d'asile impliquant sa résidence dans le canton d'Argo-
vie. L'intéressé a déposé une demande d'asile le 19 mai 1998
et a été attribué au canton d'Argovie. Dans la procédure de
recours devant le Tribunal cantonal, il a invoqué qu'il fai-
sait ménage commun avec W.________, domiciliée à Aigle, de-
puis le 24 décembre 1997. Il est donc mal venu de reprocher
à
l'autorité intimée d'avoir considéré, conformément aux indi-
cations qu'il lui avait données, qu'il était resté dans le
canton de Vaud sans respecter les injonctions des autorités.

d) Dès lors, il convient d'examiner si l'arrêt atta-
qué est justifié sur la base des intérêts en présence et
s'il
respecte le principe de la proportionnalité.

Le 20 juin 1995, le Tribunal correctionnel de Vevey
a condamné le recourant notamment pour attentats à la pudeur
des enfants qualifiés. Il a stigmatisé le comportement de
l'intéressé en des termes particulièrement sévères. Or, la
jurisprudence se montre spécialement rigoureuse envers les
étrangers s'étant rendus coupables de délits sexuels d'une
certaine gravité (ATF 122 II 433 consid. 2c p. 436). De
plus,
si l'expertise psychiatrique prise en compte dans le
jugement
précité du 20 juin 1995 a estimé peu probable une récidive,

elle n'a pas exclu de nouveaux actes punissables et a consi-
déré que l'intéressé avait une personnalité immature à
traits
pervers, polymorphes et "masochiques", lesdits traits de ca-
ractère étant assimilables à un développement mental incom-
plet. Par ailleurs, le recourant a vécu en Suisse au
bénéfice
d'une autorisation de séjour pendant quelque douze ans, soit
jusqu'au 24 janvier 1998. Depuis lors toutefois, il y est
seulement toléré en raison des différentes procédures qu'il
y
a introduites. En revanche, il a vécu jusqu'en février 1986,
soit jusqu'à dix-neuf ans et demi, dans son pays d'origine
et
y a donc passé toute sa jeunesse et son adolescence. Il
s'agit là d'un point capital, car c'est durant cette période
de la vie que se forge la personnalité, en fonction de l'en-
vironnement culturel. La durée du séjour de l'intéressé en
Suisse n'est donc pas déterminante, d'autant plus que le Tri-
bunal fédéral a déjà admis l'expulsion d'étrangers condamnés
pour délits sexuels qui séjournaient en Suisse depuis plus
longtemps que le recourant (arrêts non publiés du 3 décembre
1999 en la cause F., consid. 3d, et du 7 juillet 1997 en la
cause Q., consid. 3). En outre, il ressort du dossier qu'en
1999, le recourant a fait l'objet d'une poursuite pour envi-
ron 4'900 fr. et d'un acte de défaut de biens pour environ
33'500 fr. Ces éléments ont été retenus par l'arrêt
entrepris
et n'ont pas été contestés dans le présent recours. Ainsi,
la
situation financière de l'intéressé est mauvaise, ce qui va
à
l'encontre d'une bonne intégration. Par ailleurs, on ne sau-
rait admettre avec le recourant que sa femme ignorait au mo-
ment de leur mariage que lui-même ne pourrait peut-être pas
demeurer en Suisse et qu'ils devraient éventuellement vivre
leur vie de couple à l'étranger. En effet, l'Office cantonal
de contrôle des habitants et de police des étrangers du can-
ton de Vaud a refusé de prolonger l'autorisation de séjour
de
l'intéressé par décision du 19 février 1998. A cette époque,
le recourant faisait ménage commun avec W.________ qui est
intervenue en tant qu'employeur, par lettre du 6 avril 1998,
dans la procédure de recours au Tribunal administratif du

canton de Vaud contre la décision précitée du 19 février
1998
et, par lettre du 2 juillet 1998, dans la procédure d'asile
de l'intéressé. Ainsi, W.________ savait que le recourant
n'arrivait pas à obtenir une autorisation de séjour en
Suisse
quand elle l'a épousé le 4 décembre 1998. Elle ne pouvait
donc pas exclure que son mari doive quitter la Suisse avec
toutes les conséquences que cela entraînerait pour leur vie
de couple de même que sur le plan financier. Quant à l'argu-
ment que l'intéressé tire du soutien financier qu'il apporte
aux enfants de sa femme, il n'est pas pertinent. En effet,
les relations que le recourant entretient avec eux sont des
liens de beau-père à beaux-enfants. Or, de tels liens de pa-
renté par alliance ne bénéficient pas de la protection de
l'art. 8 par. 1 CEDH qui pourrait fonder l'octroi d'une auto-
risation de séjour à l'intéressé (cf. ATF 120 Ib 257 consid.
1d p. 260/261; 115 Ib 1 consid. 2a et 2b p. 4/5; arrêt non
publié du 26 février 1998 en la cause M., consid. 5c).

e) Il apparaît dès lors que l'intérêt public qu'il y
a à éloigner de Suisse le recourant l'emporte sur l'intérêt
privé de ce dernier et de sa femme à pouvoir vivre ensemble
dans ce pays.

Ainsi, l'autorité intimée a procédé à une pesée des
intérêts en présence qui n'est pas critiquable, notamment au
regard de l'art. 8 CEDH et elle a respecté le principe de la
proportionnalité. De façon plus générale, elle n'a pas violé
le droit fédéral ni excédé son pouvoir d'appréciation. Au
surplus, elle a respecté l'art. 6 par. 2 CEDH.

5.- Vu ce qui précède, le recours doit être rejeté.

Succombant, le recourant doit supporter les frais
judiciaires (art. 156 al. 1, 153 et 153a OJ) et n'a pas
droit
à des dépens (art. 159 al. 1 OJ).

Par ces motifs,

l e T r i b u n a l f é d é r a l :

1. Rejette le recours.

2. Met à la charge du recourant un émolument judi-
ciaire de 2'000 fr.

3. Communique le présent arrêt en copie au mandatai-
re du recourant, au Conseil d'Etat et à la Cour de droit pu-
blic du Tribunal cantonal du canton du Valais, ainsi qu'à
l'Office fédéral des étrangers.

Lausanne, le 22 mai 2001
DAC/elo

Au nom de la IIe Cour de droit public
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
Le Président,

La Greffière,


Synthèse
Numéro d'arrêt : 2A.512/2000
Date de la décision : 22/05/2001
2e cour de droit public

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2001-05-22;2a.512.2000 ?
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