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21/05/2001 | SUISSE | N°I.623/00

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 21 mai 2001, I.623/00


«AZA 7»
I 623/00 Mh

IIe Chambre

composée des Juges fédéraux Meyer, Rüedi et Ferrari;
Métral, Greffier

Arrêt du 21 mai 2001

dans la cause

A.________, recourant, représenté par la Fédération suisse
pour l'intégration des handicapés (FSIH), Place Grand-
Saint-Jean 1, 1003 Lausanne,

contre

Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud,
avenue Général-Guisan 8, 1800 Vevey, intimé,

et

Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne

A.-

A.________ a travaillé comme employé de voirie à
Y.________ depuis 1988. Après plusieurs périodes d'arrêt de
travail en 1995, son médec...

«AZA 7»
I 623/00 Mh

IIe Chambre

composée des Juges fédéraux Meyer, Rüedi et Ferrari;
Métral, Greffier

Arrêt du 21 mai 2001

dans la cause

A.________, recourant, représenté par la Fédération suisse
pour l'intégration des handicapés (FSIH), Place Grand-
Saint-Jean 1, 1003 Lausanne,

contre

Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud,
avenue Général-Guisan 8, 1800 Vevey, intimé,

et

Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne

A.- A.________ a travaillé comme employé de voirie à
Y.________ depuis 1988. Après plusieurs périodes d'arrêt de
travail en 1995, son médecin traitant, le docteur
B.________, a attesté d'une incapacité de travail complète
dès le 30 mars 1996.

A.________ était au bénéfice d'une assurance perte de
gain en cas de maladie, conclue par son employeur auprès de
l'Elvia société suisse d'assurances. Celle-ci a chargé le
docteur C.________, spécialiste FMH en chirurgie orthopé-
dique, d'une expertise relative à la capacité de travail du
prénommé. Dans son rapport, daté du 7 octobre 1996, ce pra-
ticien a fait état de lombo-sciatalgies droites chroniques
sur spondylolisthésis de degré II de L5 sur S1, entraînant
une incapacité de travail de 50 % dans la profession exer-
cée jusqu'alors; ces affections n'empêchaient en revanche
pas l'assuré d'exercer une activité semi-assise ne nécessi-
tant pas le port de charges supérieures à 10 kg de façon
régulière. Le docteur C.________ a également constaté
qu'une forte surcharge psychogène pouvait avoir une
influence supplémentaire sur la capacité de travail de
l'assuré.
Le docteur D.________, spécialiste FMH en psychiatrie
et en psychothérapie, a notamment posé le diagnostic de
troubles somatoformes douloureux chroniques. Selon ce
praticien, l'incapacité de travail en relation avec les
troubles psychiques constatés était alors de 20 %, mais une
réadaptation professionnelle devait être entreprise rapi-
dement pour avoir des chances de succès (rapport du 26 no-
vembre 1996).
Entre-temps, A.________ avait demandé à l'Office de
l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud (ci-après :
l'office AI) de lui allouer des mesures de reclassement
dans une nouvelle profession (demande de prestations du
7 novembre 1996). Le 21 novembre 1996, le docteur
B.________ a adressé à cet office un rapport médical
faisant état d'un spondylolisthésis entraînant une inca-
pacité de travail de 50 % dans la profession exercée
jusqu'alors, à laquelle s'ajoutait une incapacité de
travail de 10 à 20 % en raison de troubles psychiques. Le
médecin traitant de l'assuré se référait aux expertises
dont avaient été chargés les docteurs C.________ et
D.________ et indiquait que des mesures d'ordre profes-
sionnel devaient être allouées immédiatement par l'assu-
rance-invalidité.

Le conseiller en orientation professionnelle de l'of-
fice AI a considéré que A.________ ne disposait plus des
ressources physiques et morales nécessaires à son retour
dans l'économie. Seule était envisageable une reprise du
travail dans une structure protégée, ce qui ne permettait
d'espérer qu'un revenu de l'ordre de 650 fr. par mois; il
n'était pas même certain que l'assuré puisse travailler
dans un tel cadre, au vu de son état psycho-affectif (rap-
port du 23 décembre 1997).
Par décision du 1er février 2000, notifiée le 14 fé-
vrier 2000, l'office AI a rejeté sa demande de prestations.

B.- Par jugement du 27 juillet 2000, le Tribunal des
assurances du canton de Vaud a rejeté le recours de l'as-
suré contre cette décision. Il a retenu qu'un reclassement
professionnel n'entrait pas en considération au vu du
manque de motivation de l'assuré, mais que la capacité de
travail résiduelle de ce dernier, telle qu'attestée médi-
calement, excluait un taux d'invalidité ouvrant droit à une
rente.

C.- A.________ interjette un recours de droit adminis-
tratif contre ce jugement, dont il demande l'annulation. Il
conclut à ce que son droit à une rente entière d'invalidité
soit constaté et au renvoi de la cause à l'office AI pour
qu'il en fixe le montant et détermine le jour à partir
duquel elle sera allouée. L'intimé se réfère au jugement
entrepris, alors que l'Office fédéral des assurances
sociales ne s'est pas déterminé.

Considérant en droit :

1.- Lorsque, comme en l'espèce, le litige porte sur
l'octroi ou le refus de prestations d'assurance, le pouvoir
d'examen du Tribunal fédéral des assurances n'est pas limi-
té à la violation du droit fédéral - y compris l'excès et

l'abus du pouvoir d'appréciation - mais s'étend également à
l'opportunité de la décision attaquée. Le tribunal n'est
alors pas lié par l'état de fait constaté par la juridic-
tion inférieure, et il peut s'écarter des conclusions des
parties à l'avantage ou au détriment de celles-ci (art. 132
OJ).

2.- a) Selon l'art. 4 al. 1 LAI, l'invalidité est la
diminution de la capacité de gain, présumée permanente ou
de longue durée, qui résulte d'une atteinte à la santé
physique ou mentale provenant d'une infirmité congénitale,
d'une maladie ou d'un accident.
Pour l'évaluation de l'invalidité, le revenu du tra-
vail que l'invalide pourrait obtenir en exerçant l'activité
qu'on peut raisonnablement attendre de lui, après exécution
éventuelle de mesures de réadaptation et compte tenu d'une
situation équilibrée du marché du travail, est comparé au
revenu qu'il aurait pu obtenir s'il n'était pas invalide
(art. 28 al. 2 LAI).

b) Parmi les atteintes à la santé psychique suscepti-
bles de provoquer une invalidité au sens de l'art. 4 al. 1
LAI, on doit mentionner - à part les maladies mentales
proprement dites - les anomalies psychiques qui équivalent
à des maladies. On ne considère pas comme des conséquences
d'un état psychique maladif, donc pas comme des affections
à prendre en charge par l'assurance-invalidité, les diminu-
tions de la capacité de gain que l'assuré pourrait empêcher
en faisant preuve de bonne volonté; la mesure de ce qui est
exigible doit être déterminée aussi objectivement que pos-
sible. Il faut donc établir si et dans quelle mesure un
assuré peut, malgré son infirmité mentale, exercer une
activité que le marché du travail lui offre, compte tenu de
ses aptitudes. Le point déterminant est ici de savoir
quelle activité peut raisonnablement être exigée dans son
cas. Pour admettre l'existence d'une incapacité de gain
causée par une atteinte à la santé mentale, il n'est donc

pas décisif que l'assuré exerce une activité lucrative
insuffisante; il faut bien plutôt se demander s'il y a lieu
d'admettre que la mise à profit de sa capacité de travail
ne peut, pratiquement, plus être raisonnablement exigée de
lui, ou qu'elle serait même insupportable pour la société
(ATF 102 V 165; VSI 2000 p. 153 consid. 2a et les réfé-
rences).

3.- a) Le recourant a dû cesser d'exercer son ancienne
profession en raison de ses atteintes à la santé. Toute-
fois, d'après les expertises médicales figurant au dossier,
il pouvait encore, à la fin de l'année 1996, effectuer des
travaux en position semi-assise ne nécessitant pas le port
de charges supérieures 10 kg de manière régulière; dans une
profession adaptée à ce handicap, sa capacité de travail
était de 80 %, car des troubles somatoformes douloureux
s'ajoutaient aux lésions physiques constatées. Les experts
ont insisté sur le fait que les troubles psychiques du
recourant étaient en voie de devenir chroniques et que des
mesures d'ordre professionnel devaient être prises sans
délai afin de mettre un terme à cette évolution. Ainsi,
dans son rapport du 26 novembre 1996, le docteur D.________
a exposé que le recourant se constituait progressivement
une identité d'invalide et a souligné le caractère évolutif
de ses troubles somatoformes douloureux en précisant qu'ils
causaient alors («actuellement») une incapacité de travail
de 20 %.

b) Le 1er février 2000, l'office AI s'est prononcé sur
le droit du recourant à une rente d'invalidité, retenant
implicitement que des mesures de reclassement professionnel
auraient été vouées à l'échec et n'entraient donc plus en
considération. Au vu des constatations du service de
réadaptation de l'intimé, cette renonciation à des mesures
d'ordre professionnel n'est pas critiquable.

c) Alors que la juridiction cantonale a considéré que,
sur le vu des certificats médicaux, l'assuré ne présentait
pas une incapacité de gain de 40 % au moins, l'assuré
soutient, en se fondant sur le rapport du conseiller en
orientation, que son degré d'invalidité est de 84 %.
Contrairement à l'opinion des premiers juges, les
expertises des docteurs C.________ et D.________, rendues
trois ans plus tôt, sont insuffisantes pour évaluer la
capacité de travail du recourant au moment de la décision
litigieuse. En effet, à la fin de l'année 1996, ces experts
signalaient déjà le risque que les troubles psychiques du
recourant pouvaient s'aggraver, en l'absence d'un rapide
reclassement dans une nouvelle profession. Par la suite, le
service de réadaptation de l'intimé, dont le premier entre-
tien d'un conseiller avec l'assuré a eu lieu une année plus
tard, a estimé que seul un travail dans une structure pro-
tégée pouvait encore être exigé, si bien qu'aucune mesure
de reclassement n'a été entreprise. Dans ces conditions, un
complément d'instruction s'avère nécessaire pour déterminer
si, comme le prévoyaient les experts, la santé du recourant
s'est péjorée, en particulier sur le plan psychique. Il y
aura lieu ensuite d'évaluer les conséquences de cet état de
santé sur la capacité de travail et de gain du recourant.
Aussi, la cause sera renvoyée à l'office intimé pour
qu'il prenne une nouvelle décision, après avoir mis en
oeuvre une instruction complémentaire sous forme d'une
expertise pluridisciplinaire.

4.- Le recourant, qui obtient gain de cause, est re-
présenté par le Service juridique de la Fédération suisse
pour l'intégration des handicapés (FSIH). Il a droit à une
indemnité de dépens à la charge de l'intimé (art. 135 en
corrélation avec l'art. 159 OJ; ATF 126 V 11 consid. 2).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances

p r o n o n c e :

I. Le recours est admis en ce sens que le jugement du
27 juillet 2000 du Tribunal des assurances du canton
de Vaud ainsi que la décision du 1er février 2000 de
l'Office de l'assurance-invalidité pour le canton de
Vaud sont annulés, la cause étant renvoyée à cet
office pour complément d'instruction au sens des
motifs et nouvelle décision.

II. Il n'est pas perçu de frais de justice.

III. L'intimé versera au recourant la somme de 2000 fr.
(y compris la taxe sur la valeur ajoutée) à titre de
dépens pour la procédure fédérale.

IV. Le Tribunal des assurances du canton de Vaud statuera
sur les dépens pour la procédure de première instance,
au regard de l'issue de la procédure de dernière
instance.

V. Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au
Tribunal des assurances du canton de Vaud, à la Caisse
cantonale vaudoise de compensation et à l'Office
fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 21 mai 2001

Au nom du
Tribunal fédéral des assurances
Le juge présidant la IIe Chambre :

Le Greffier :


Synthèse
Numéro d'arrêt : I.623/00
Date de la décision : 21/05/2001
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2001-05-21;i.623.00 ?
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