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21/05/2001 | SUISSE | N°C.424/00

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 21 mai 2001, C.424/00


«AZA 7»
C 424/00 Rl

IIIe Chambre

composée des Juges fédéraux Schön, Spira et Widmer; Vallat,
Greffier

Arrêt du 21 mai 2001

dans la cause

Service de l'emploi, Instance juridique chômage, rue
Marterey 5, 1014 Lausanne, recourant,

contre

D.________, recourant, représenté par Monsieur T.________,

et

Tribunal administratif du canton de Vaud, Lausanne

A.- D.________ est titulaire d'une licence ès sciences
économiques. De retour en Suisse après une mission

humanitaire bénévole de six mois en Inde,il a offert ses

services au Comité international de la Croix-Rouge (CICR).
Il a, par ...

«AZA 7»
C 424/00 Rl

IIIe Chambre

composée des Juges fédéraux Schön, Spira et Widmer; Vallat,
Greffier

Arrêt du 21 mai 2001

dans la cause

Service de l'emploi, Instance juridique chômage, rue
Marterey 5, 1014 Lausanne, recourant,

contre

D.________, recourant, représenté par Monsieur T.________,

et

Tribunal administratif du canton de Vaud, Lausanne

A.- D.________ est titulaire d'une licence ès sciences
économiques. De retour en Suisse après une mission
humanitaire bénévole de six mois en Inde,il a offert ses

services au Comité international de la Croix-Rouge (CICR).
Il a, par ailleurs, déposé, le 9 avril 1999, une demande
d'indemnités de chômage, dès le 29 mars 1999, auprès de la
Caisse publique cantonale vaudoise de chômage
(ci-après : la caisse).
A la suite des recherches d'emploi effectuées par
l'assuré dans le cadre du contrôle de son chômage, l'entre-
prise L.________ SA lui a proposé, par lettre du 3 mai
1999, un emploi d'analyste financier, pour un salaire
mensuel brut de 5700 fr. payé treize fois l'an. L'entrée en
fonction était fixée au 28 juin 1999. L'assuré a accepté
cette offre. Cependant, par lettre du 31 mai 1999, le CICR
a informé D.________ que sa candidature avait été retenue
et qu'il était invité à participer à un «cours d'intégra-
tion», du 5 au 10 septembre 1999. Cette lettre précisait
notamment que, durant cette semaine, les candidats ne
seraient pas au bénéfice d'un contrat de travail, qui
pourrait toutefois être conclu à l'issue du cours, pour une
date à déterminer selon les disponibilités des candidats,
mais au plus tard dans les quatre mois. L'assuré a alors
informé L.________ SA de son intention de ne pas travailler
au sein de cette entreprise au-delà du 31 août 1999,
ensuite de quoi il fut convenu, d'entente entre D.________
et L.________ SA, de renoncer à cet engagement.
Par décision du 3 août 1999, la caisse a prononcé la
suspension du droit de l'assuré aux indemnités de chômage
pour une durée de 35 jours à compter du 28 juin 1999, au
motif qu'il était au chômage par sa propre faute, ayant
refusé l'emploi convenable qui lui était proposé.
D.________ a recouru contre cette décision devant le
Service de l'emploi de l'Etat de Vaud (ci-après : le
service de l'emploi). Ce dernier a rejeté le recours, par
décision du 21 décembre 1999, et confirmé la suspension au
motif substitué que l'assuré n'avait pas fait tout ce qu'on
pouvait raisonnablement attendre de lui pour trouver un
travail convenable.

B.- Contre cette décision, l'assuré a interjeté re-
cours devant le Tribunal administratif du canton de Vaud.
Par jugement du 28 novembre 2000, ce dernier a admis par-
tiellement le recours et ramené la durée de la suspension
de 35 à 15 jours.

C.- Le service de l'emploi interjette recours de droit
administratif contre ce jugement, en concluant à son annu-
lation.
L'intimé conclut implicitement au rejet du recours.
La caisse et le Secrétariat d'Etat à l'économie ont
renoncé à se déterminer.

Considérant en droit :

1.- a) Aux termes de l'art. 30 al. 1 let. c LACI, le
droit de l'assuré à l'indemnité de chômage est suspendu
lorsqu'il est établi que celui-ci ne fait pas tout ce qu'on
peut raisonnablement exiger de lui pour trouver un travail
convenable. Selon l'art. 44 al. 2 OACI, si l'assuré refuse
sans motif valable un emploi réputé convenable qui n'a pas
été assigné officiellement, ses recherches d'emploi sont
également considérées comme insuffisantes.

b) En l'espèce, il est constant que l'intimé s'est vu
proposer, ensuite des recherches effectuées durant la pé-
riode de contrôle, un poste d'analyste financier auquel il
a ensuite renoncé, d'entente avec l'employeur, afin de
pouvoir participer ultérieurement à un stage de formation,
dans la perspective d'un engagement par le CICR. En l'ab-
sence de tout indice contraire, il faut admettre que ce
travail, qui correspondait à ses aptitudes et lui garantis-
sait une rémunération de l'ordre de 75 000 fr. l'an, était
convenable au sens de l'art. 16 al. 1 LACI, ce que l'intimé
n'a, du reste, jamais contesté.

Quant aux motifs qui ont conduit l'assuré à renoncer à
ce poste, ils ne permettent pas, au regard de l'obligation
qui lui incombait d'entreprendre tout ce que l'on pouvait
raisonnablement exiger de lui pour abréger son chômage
(art. 17 al. 1 LACI), de justifier son refus. En privilé-
giant l'éventualité d'un engagement par le CICR, il ne
pouvait en effet ignorer qu'il prolongerait son chômage.
C'est dès lors à juste titre que les premiers juges ont
considéré le comportement de l'intimé comme fautif au sens
des dispositions précitées.

2.- a) Selon l'art. 30 al. 3 LACI, la durée de la
suspension est proportionnelle à la gravité de la faute.
Elle est de 1 à 15 jours en cas de faute légère, 16 à
30 jours en cas de faute de gravité moyenne, et 31 à
60 jours en cas de faute grave (art. 45 al. 2 let. a à c
OACI). Il y a notamment faute grave lorsque l'assuré refuse
un emploi réputé convenable sans motif valable (art. 45
al. 3 OACI).

b) En l'espèce, le recourant reproche aux premiers
juges d'avoir retenu l'existence de motifs justifiant de
prononcer une suspension d'une durée inférieure au minimum
prévu dans un tel cas, en vertu de l'art. 45 al. 2 let. c
et al. 3 OACI.
Dans sa jurisprudence, le Tribunal fédéral des assu-
rances a jugé que l'art. 45 al. 3 OACI ne constitue qu'un
principe dont l'administration et le juge des assurances
peuvent s'écarter lorsque des circonstances particulières
le justifient et que, dans ce sens, le pouvoir d'apprécia-
tion de l'une et de l'autre n'est pas limité à la durée
minimum de suspension fixée pour les cas de faute grave
(DTA 2000 no 9 p. 49 consid. 4 b/aa). Toutefois, de telles
circonstances ne sont pas réalisées en l'espèce. Peu impor-
te en effet, au regard de l'obligation de l'intimé de ré-
duire la durée de son chômage, qu'il n'ait pas voulu, comme

l'ont retenu les premiers juges, dissimuler à L.________ SA
son intention de la quitter à bref délai si ses perspecti-
ves d'engagement par le CICR se concrétisaient, qu'il ait
pu nourrir de sérieux espoirs à cet égard et qu'il n'ait
été au chômage que depuis deux mois lorsqu'il a refusé
l'emploi qui lui était proposé. En renonçant à la proposi-
tion de L.________ SA au profit d'un possible engagement au
CICR, l'intimé a délibérément choisi de prolonger son
chômage durant la période de deux mois s'étendant entre le
début convenu de son emploi chez L.________ SA et le cours
d'intégration, ce qui constituait déjà une faute grave. Il
a, par ailleurs, pris le risque que cette situation se
prolonge encore en cas de refus ultérieur du CICR. La
suspension prononcée par la caisse pour une durée de
35 jours, proche de la limite inférieure prévue par
l'ordonnance dans de tels cas, était dès lors justifiée.
Il faut ainsi admettre que les premiers juges ont
abusé de leur pouvoir d'appréciation en se fondant, pour
réduire la durée de la suspension de 35 à 15 jours, sur des
considérations qui manquent de pertinence et sont étrangè-
res au but visé par les art. 17, 30 al. 1 let. c LACI et 45
OACI (ATF 123 V 152 consid. 2).

3.- Les considérations qui précèdent amenant la cour
de céans à annuler le jugement du Tribunal administratif du
28 novembre 2000 et à confirmer la décision du recourant du
21 décembre 1999, il convient encore d'examiner si ce der-
nier, saisi d'un recours dirigé contre une décision de
suspension prononcée par la caisse en vertu de l'art. 30
al. 1 let. a LACI, était fondé à confirmer cette décision
au motif substitué tiré de l'art. 30 al. 1 let. c LACI
quand bien même l'office régional de placement eût été
initialement compétent pour prononcer une telle suspension
(art. 10 al. 1 let. g de la loi vaudoise du 25 septembre
1996 sur l'emploi et l'aide aux chômeurs [LEAC; RSV 8.1 D],
30 al. 2 première phrase, 85 al. 1 let. g et 85b al. 1

LACI). Tel est le cas. Selon la jurisprudence, en effet,
l'autorité cantonale de recours examine librement l'exis-
tence et la qualification juridique d'un motif de suspen-
sion au regard des art. 30 al. 1 LACI et 44 OACI (ATF
122 V 37 consid. 2c). Ce principe, qui découle de
l'art. 103 al. 4 LACI, s'applique également, dans les
cantons ayant institué un double degré de juridiction, à
l'autorité de recours de première instance, à tout le moins
lorsque cette dernière, conformément au droit cantonal,
connaît des recours dirigés contre toutes les décisions de
suspension, qu'elles émanent des caisses (art. 30 al. 2
dernière phrase LACI) ou de l'autorité cantonale (art. 30
al. 2 première phrase et 85 al. 1 let. g LACI). Cette
condition est donnée en l'espèce (art. 56 al. 3 LEAC). Par
ailleurs, il ressort des pièces du dossier que l'office
régional de placement a été appelé à se déterminer devant
le service de l'emploi (lettre du 18 août 1999) et que
l'intimé a pu, à son tour, prendre position sur l'argumen-
tation de ce dernier, qui faisait explicitement référence à
l'obligation de l'assuré d'entreprendre tout ce qu'on peut
raisonnablement exiger de lui pour éviter le chômage ou
l'abréger. Il faut ainsi admettre que les parties ont été
en mesure d'exercer leur droit d'être entendues (ATF
122 V 37 consid. 2c).
C'est dès lors à juste titre que le recourant a renon-
cé à renvoyer la cause à l'office régional de placement
compétent pour prononcer une suspension en application de
l'art. 30 al. 1 let. c LACI. Cette manière de procéder se
justifiait en outre, comme l'a exposé le service de l'em-
ploi dans sa décision du 21 décembre 1999, par des motifs
d'économie de procédure, dès lors que seule était en cause
la qualification juridique des faits déterminants, ces
derniers n'étant pas contestés, et que l'office régional de
placement, dans sa détermination, avait clairement manifes-
té son opinion en faveur de la confirmation de la suspen-
sion.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances

p r o n o n c e :

I. Le recours est admis et le jugement du Tribunal admi-
nistratif du canton de Vaud, du 28 novembre 2000, est
annulé.

II. Il n'est pas perçu de frais de justice.

III. Le présent arrêt sera communiqué aux parties, à la
Caisse publique cantonale vaudoise de chômage, au
Tribunal administratif du canton de Vaud ainsi qu'au
Secrétariat d'Etat à l'économie.

Lucerne, le 21 mai 2001

Au nom du
Tribunal fédéral des assurances
Le Président de la IIIe Chambre :

Le Greffier :


Synthèse
Numéro d'arrêt : C.424/00
Date de la décision : 21/05/2001
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2001-05-21;c.424.00 ?
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