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10/05/2001 | SUISSE | N°C.76/00

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 10 mai 2001, C.76/00


«AZA 7»
C 76/00 Mh

IIe Chambre

composée des Juges fédéraux Lustenberger, Président, Meyer
et Ferrari; Vallat, Greffier

Arrêt du 10 mai 2001

dans la cause

Secrétariat d'Etat à l'économie, Bundesgasse 8, 3003 Berne,
recourant,

contre

A.________, intimé,

et

Tribunal administratif du canton de Berne, Berne

A.- A.________ a été engagé comme décolleteur par
l'entreprise X.________ dès le 8 mars 1999. Selon les
termes du contrat adressé à l'employé

par lettre du 5 mars
1999, il était prévu une période d'essai de trois mois. En
outre, pendant les trois premiers mois, le congé pouvait
...

«AZA 7»
C 76/00 Mh

IIe Chambre

composée des Juges fédéraux Lustenberger, Président, Meyer
et Ferrari; Vallat, Greffier

Arrêt du 10 mai 2001

dans la cause

Secrétariat d'Etat à l'économie, Bundesgasse 8, 3003 Berne,
recourant,

contre

A.________, intimé,

et

Tribunal administratif du canton de Berne, Berne

A.- A.________ a été engagé comme décolleteur par
l'entreprise X.________ dès le 8 mars 1999. Selon les
termes du contrat adressé à l'employé par lettre du 5 mars
1999, il était prévu une période d'essai de trois mois. En
outre, pendant les trois premiers mois, le congé pouvait
être donné avec préavis d'une semaine, puis d'un mois
durant la première année.

A une date indéterminée, employeur et travailleur ont
convenu, oralement, de prolonger la période d'essai d'un
mois. A.________ a été licencié au 16 juillet 1999, au
motif déclaré qu'il ne répondait pas aux exigences du
poste.
Le 15 juillet 1999, A.________ s'est annoncé à
l'office du travail afin de bénéficier de prestations de
l'assurance-chômage. Par décision du 23 septembre 1999, la
Caisse de chômage du canton de Berne (la caisse de chômage)
a suspendu l'assuré dans l'exercice de son droit à l'indem-
nité pour une période de 20 jours, pour avoir renoncé à
faire valoir des prétentions de salaire envers son emplo-
yeur.

B.- A.________ a recouru contre cette décision, dont
il demandait l'annulation devant le Tribunal administratif
du canton de Berne. Par jugement du 28 janvier 2000, la
juridiction cantonale a admis le recours et annulé la
décision de la caisse de chômage. En bref, les premiers
juges ont considéré qu'il ne pouvait être prononcé de sanc-
tion fondée sur l'art. 30 al. 1 let. b LACI au regard de la
Convention n° 168 de l'OIT concernant la promotion de l'em-
ploi et la protection contre le chômage, du 21 juin 1988
(Convention n° 168).

C.- Le Secrétariat d'Etat à l'économie (seco) inter-
jette recours de droit administratif contre ce jugement
dont il demande l'annulation, partant la confirmation de la
sanction prononcée par la caisse de chômage.
L'assuré n'a pas répondu.

Considérant en droit :

1.- a) Les premiers juges ont exposé les principes
applicables en matière de droit du travail - conditions

formelles de validité de clauses contractuelles, temps
d'essai, résiliation immédiate et délai de résiliation,
conséquences d'une résiliation injustifiée et d'une rési-
liation qui ne respecte pas les délais légaux; on peut s'y
référer. Ils ont toutefois laissé ouverte la question de la
date à laquelle le congé a été donné, à tort dès lors qu'il
s'agit d'en déterminer les conséquences différentes tant au
point du vue du droit du travail que de l'assurance-chôma-
ge.
Sauf convention contraire, le congé n'est soumis à
aucune forme; il peut être donné oralement ou par écrit et
prend effet dès qu'il est parvenu au cocontractant, confor-
mément au principe de la réception. La confirmation écrite
d'un congé donné antérieurement de vive voix prend effet à
compter du jour où il a été donné verbalement (Tercier, Les
contrats spéciaux, 2ème éd., Zurich 1995, n° 2811).

b) Selon les renseignements fournis à la caisse de
chômage par l'employeur et par l'employé, le congé a été
donné oralement le 9 juillet 1999 pour le 16 juillet, soit
en toutes hypothèses, à une date postérieure à l'échéance
du temps d'essai, dont les premiers juges ont, au demeu-
rant, démontré de manière pertinente que sa durée allait à
l'encontre de dispositions impératives de la loi. Ce congé
est ainsi survenu alors que, achevé le temps d'essai, les
parties étaient liées par un contrat de travail de durée
indéterminée. On doit en déduire en droit qu'il s'agit
d'une résiliation d'un contrat de travail qui ne respecte
pas le délai contractuel et légal de congé d'un mois, le-
quel, dans le cas particulier, arrivait à terme le 31 août
1999.
La date de l'expédition de la lettre de congé
(16 juillet 1999) n'est sous cet aspect pas déterminante
pour fixer celle où le congé a été donné. Au regard notam-
ment de la déclaration de l'intimé selon laquelle le congé
a été donné oralement et par écrit, elle doit être comprise

comme une confirmation du congé donné oralement. D'ail-
leurs, on ne comprendrait pas comment l'assuré pourrait
s'annoncer à l'office du travail le 15 juillet si la rési-
liation n'avait été donnée que par lettre du lendemain.
Il s'ensuit que le congé donné n'est pas un licencie-
ment immédiat fondé sur de justes motifs (art. 337 CO) dont
il y aurait lieu, cas échéant, d'examiner le bien-fondé.

2.- a) Selon la jurisprudence, le comportement du
salarié qui consiste à accepter un congé donné par un em-
ployeur en violation du délai contractuel ou légal, à con-
sentir à la résiliation anticipée des rapports de travail
ou à refuser la continuation du contrat jusqu'à son terme
est susceptible de tomber sous le coup de l'art. 30 al. 1
let. a LACI (ATF 112 V 324 consid. 2b). En effet, dans le
cas où, par exemple, le congé a été donné sans respecter le
délai légal ou contractuel, l'employé n'est pas fondé à
élever des prétentions de salaire ou en dommages-intérêts
pour la période allant jusqu'au terme régulier du contrat
lorsqu'il l'accepte sans opposition. Or, en l'absence de
droit à un salaire, il ne peut ainsi pas y avoir renoncia-
tion à faire valoir des prétentions au sens de l'art. 30
al. 1 let. b LACI (cf. Jacqueline Chopard, Die Einstellung
in der Anspruchsberechtigung, thèse Zurich 1997, p. 133
sv).

b) Comme la suspension du droit à l'indemnité de chô-
mage doit être également examinée à la lumière de la Con-
vention n° 168 entrée en vigueur pour la Suisse le 17 octo-
bre 1991 (ATF 124 V 230, 124 V 234), les premiers juges ont
procédé à une analyse des dispositions des art. 30 al. 1
let. b LACI et 20 et 21 de la Convention n° 168. Ils sont
arrivés à la conclusion que le droit international, en
particulier la Convention précitée, ne permettait pas de
sanctionner d'une suspension l'assuré qui renonçait à faire
valoir des prétentions de salaire ou d'indemnisation envers

son dernier employeur, au détriment de l'assurance. C'est
essentiellement pour ce motif qu'ils ont annulé la sanction
prononcée par la caisse de chômage.
Toutefois, ainsi qu'on l'a vu plus haut (consid. 2b et
3a), le comportement de l'intimé n'est pas susceptible de
relever de l'art. 30 al. 1 let. b LACI si bien qu'il n'y a
pas lieu de se prononcer sur la compatibilité de la dispo-
sition précitée avec le droit international, question qui
en l'état peut demeurer ouverte.

3.- a) Dans sa jurisprudence publiée (ATF 124 V 230,
124 V 234; cf. le commentaire de G. Riemer-Kafka in RSAS
1999 p. 71), le Tribunal fédéral des assurances a jugé les
dispositions des art. 30 al. 1 let. a et c LACI, ainsi que
44 al. 1 let. b OACI compatibles avec la Convention n° 168.
La notion d'inexigibilité de l'art. 44 al. 1 let. b OACI
doit cependant être interprétée conformément à la conven-
tion qui permet de sanctionner celui qui a quitté volontai-
rement son emploi sans motif légitime (art. 20 let. c con-
vention). Par ailleurs, la disposition de l'art. 44 al. 1
let. a OACI a également été jugée compatible avec la Con-
vention n° 168 (Arrêt M. du 17 octobre 2000, C 53/00). Il
n'existe pas de motifs en l'état de s'écarter de cette
jurisprudence.

b) Dans le cas d'espèce, on ne décèle pas de comporte-
ment fautif de l'assuré tombant sous le coup de l'art. 44
al. 1 let. a ou b OACI. Le contrat de travail a été résilié
par l'employeur pour des motifs qui ne permettent pas de
déduire l'existence d'un comportement constitutif d'une
violation de ses obligations par l'employé. Ainsi qu'on l'a
retenu, il s'agissait en effet d'une inadéquation objective
au poste de travail occupé. Par ailleurs, au vu de l'atti-
tude de l'employeur, manifestée notamment par sa lettre de
congé, on ne peut retenir que l'assuré aurait - sur le plan

subjectif - quitté volontairement son emploi. Dans ces
conditions, une suspension du droit à l'indemnité n'était
pas justifiée.

par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances

p r o n o n c e :

I. Le recours est rejeté.

II. Il n'est pas perçu de frais de justice.

III. Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tri-
bunal administratif du canton de Berne, Cour des af-
faires de langue française, ainsi qu'à l'Office canto-
nal de l'industrie, des arts et métiers et du travail
du canton de Berne, Division caisse d'assurance-chôma-
ge.

Lucerne, le 10 mai 2001

Au nom du
Tribunal fédéral des assurances
p. le Président de la IIe Chambre :

Le Greffier :


Synthèse
Numéro d'arrêt : C.76/00
Date de la décision : 10/05/2001
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2001-05-10;c.76.00 ?
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