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10/05/2001 | SUISSE | N°2A.317/2000

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 10 mai 2001, 2A.317/2000


2A.317/2000
«/2»

IIe C O U R D E D R O I T P U B L I C
***********************************************

10 mai 2001

Composition de la Cour: MM. et Mme les Juges Wurzburger,
président, Hartmann, Hungerbühler, Müller et Yersin.
Greffier: M. Dayer.
______________

Statuant sur le recours de droit administratif
formé par

T.________, représenté par Me Jacques Python, avocat à
Genève,

contre

la décision prise le 31 mai 2000 par la Commission fédérale
des banques;>
(entraide administrative internationale demandée par la
Commission française des opérations de bourse)

Vu les pièces...

2A.317/2000
«/2»

IIe C O U R D E D R O I T P U B L I C
***********************************************

10 mai 2001

Composition de la Cour: MM. et Mme les Juges Wurzburger,
président, Hartmann, Hungerbühler, Müller et Yersin.
Greffier: M. Dayer.
______________

Statuant sur le recours de droit administratif
formé par

T.________, représenté par Me Jacques Python, avocat à
Genève,

contre

la décision prise le 31 mai 2000 par la Commission fédérale
des banques;

(entraide administrative internationale demandée par la
Commission française des opérations de bourse)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- Le 12 novembre 1996, la société X.________ a dé-
posé un projet d'offre publique d'échange des titres de la
société Y.________. La Commission française des opérations
de
bourse (ci-après: la COB) a alors ouvert une enquête pour
s'assurer que les transactions réalisées auparavant
n'avaient
pas été effectuées dans des conditions contraires aux dispo-
sitions légales et réglementaires françaises relatives, no-
tamment, à l'usage d'une information privilégiée. Son atten-
tion avait en effet été attirée par une augmentation du
cours
de l'action Y.________ (de 110,60 francs français [ci-après:
FF] à 116,90 FF) survenue le 8 novembre 1996 ainsi que par
le
cours atteint par cette action (136 FF) lors de la reprise
des cotations suivant l'annonce de l'offre publique
précitée.
Elle avait également constaté que, dès le 4 novembre 1996,
6'000 lots d'options Y.________ avaient été échangés quoti-
diennement alors que la moyenne habituelle était de l'ordre
de 1'000 à 2'000 lots.

Au fil de ses investigations, la COB a notamment dé-
couvert que, le 4 novembre 1996, la banque Z.________, à
Lausanne, avait acquis 1'000 options Y.________ échéant au
mois de décembre par l'intermédiaire de la société de bourse
C.________.

B.- Le 11 mai 1999, la COB a requis l'assistance de
la Commission fédérale des banques (ci-après: la Commission
fédérale) afin d'obtenir des informations sur l'identité du
ou des clients pour le compte du ou desquels ce dernier
achat
avait été effectué ainsi que sur l'identité de la personne
ayant donné l'ordre d'y procéder; elle souhaitait également
connaître les raisons de cette acquisition et, le cas
échéant, la date et le prix de cession des titres. Elle s'en-

gageait à ce que l'information reçue soit traitée de manière
confidentielle et précisait que si les renseignements
fournis
révélaient des faits susceptibles d'une qualification
pénale,
elle pourrait être tenue de les transmettre au Procureur de
la République.

Le 26 mai 1999, la Commission fédérale a demandé à
la banque Z.________ de lui communiquer les informations re-
quises par la COB ainsi que les documents d'ouverture de
compte, les relevés de transactions et tout document ou ex-
plication donnant une indication quant aux motifs de l'opéra-
tion en cause. Le 17 juin 1999, cette banque lui a remis les
informations et documents souhaités indiquant que
T.________,
domicilié à A.________ (France), avait donné l'ordre d'achat
des options et était titulaire du compte (auprès de la suc-
cursale de Genève) grâce auquel cette acquisition avait été
réalisée. Ces titres avaient en outre été revendus les 20 et
22 novembre 1996 pour un montant total de l'ordre de
1'503'000 FF. Le bénéfice de l'opération s'élevait à environ
1'356'000 FF.

C.- T.________ s'est opposé à la demande d'entraide
de la COB. Il a soutenu en substance qu'il avait acquis les
options Y.________ à la suite d'articles de presse qui, dès
la fin du mois de septembre 1996, avaient fait état d'un rap-
prochement des sociétés X.________ et Y.________. L'achat
réalisé ne représentait en outre pas une opération exception-
nelle, ni par son montant, ni par sa nature. Par ailleurs,
dans la mesure où ses avoirs déposés auprès de la banque
Z.________ n'avaient pas été déclarés au fisc français, l'oc-
troi de l'entraide requise lui ferait perdre à l'avenir
toute
chance d'obtenir l'agrément de la COB pour occuper une fonc-
tion de commissaire aux comptes auprès de sociétés
françaises
cotées en bourse.

D.- Par décision du 26 août 1999, la Commission fé-
dérale a notamment décidé d'accorder l'entraide administra-
tive à la COB et de lui transmettre les informations communi-
quées par la banque Z.________ de même que les
déterminations
de T.________ (chiffre 1 du dispositif). Elle l'a également
autorisée à retransmettre ces éléments, le cas échéant, aux
autorités pénales compétentes (chiffres 3 du dispositif).

E.- Le 24 février 2000, le Tribunal fédéral a par-
tiellement admis le recours de T.________ et annulé cette
dernière décision dans la mesure où elle autorisait l'autori-
té requérante, en l'état du dossier, à communiquer des infor-
mations aux autorités pénales françaises. Il a notamment es-
timé que l'Office fédéral de la police n'avait pas valable-
ment consenti à cette retransmission en se contentant d'appo-
ser sa signature au bas d'une lettre de la Commission fédéra-
le dont le contenu était des plus sommaire.

F.- Par courrier du 17 avril 2000, ladite Commission
a expliqué de manière détaillée à cet Office les raisons
pour
lesquelles elle était d'avis que la COB devait être
autorisée
à retransmettre des informations aux autorités pénales de
son
pays. Le 8 mai 2000, cet Office a donné son accord motivé à
une telle retransmission.

Le 31 mai 2000, la Commission fédérale a autorisé
l'autorité requérante à communiquer auxdites autorités péna-
les les informations figurant au chiffre 1 du dispositif de
la décision précitée du 26 août 1999, tout en lui rappelant
qu'elle était tenue d'indiquer à ces autorités que l'utili-
sation de ces informations était limitée à la poursuite du
délit d'usage d'une information privilégiée (chiffre 1 du
dispositif). Elle précisait en outre que tous les obstacles
empêchant la transmission desdites informations à l'autorité
requérante étaient ainsi levés (chiffre 2 du dispositif).

Cette décision ne serait toutefois exécutée qu'à l'échéance
d'un délai de trente jours après sa notification à
T.________, si aucun recours n'était déposé dans ce délai au-
près du Tribunal fédéral (chiffre 3 du dispositif).

G.- Agissant par la voie du recours de droit admi-
nistratif, l'intéressé requiert du Tribunal fédéral l'annula-
tion de cette décision; subsidiairement, il lui demande d'in-
viter la Commission fédérale à requérir de la COB un complé-
ment d'information et à rendre une nouvelle décision. A son
avis, les conditions permettant à l'autorité intimée d'auto-
riser, dans sa décision accordant l'entraide administrative,
une éventuelle retransmission d'informations par l'autorité
requérante aux autorités pénales françaises compétentes ne
seraient pas remplies. Par ailleurs, plusieurs exigences de
l'entraide judiciaire en matière pénale ne seraient pas sa-
tisfaites.

La Commission fédérale conclut au rejet du recours.

H.- Par ordonnance du 25 août 2000, le Président de
la IIe Cour de droit public a admis la requête d'effet sus-
pensif formulée par le recourant.

C o n s i d é r a n t e n d r o i t :

1.- a) La décision attaquée peut faire l'objet d'un
recours de droit administratif au sens des art. 97 ss OJ
(cf.
art. 39 de la loi fédérale du 24 mars 1995 sur les bourses
et
le commerce des valeurs mobilières [LBVM; RS 954.1]; ATF 125
II 65 consid. 1 p. 69, 79 consid. 2 p. 80).

b) Titulaire du compte bancaire faisant l'objet des
renseignements dont la communication est litigieuse, l'inté-

ressé a qualité pour recourir (cf. art. 103 lettre a OJ; ATF
125 II 65 consid. 1 p. 69).

2.- a) Saisi d'un recours de droit administratif, le
Tribunal fédéral vérifie d'office l'application du droit fé-
déral, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation
(cf. art. 104 lettre a OJ; ATF 125 II 497 consid. 1b/aa p.
500). Il examine en particulier librement dans quelle mesure
la coopération internationale doit être accordée. S'il est
lié par les conclusions des parties, il ne l'est pas en re-
vanche par leurs motifs et peut admettre le recours pour
d'autres raisons que celles avancées par le recourant ou, au
contraire, confirmer la décision attaquée pour d'autres mo-
tifs que ceux retenus par l'autorité intimée (cf. art. 114
al. 1 OJ; ATF 125 II 497 consid. 1b/aa p. 500 et la jurispru-
dence citée).

b) Bien qu'elle soit indépendante de l'administra-
tion, la Commission fédérale n'est pas une autorité judiciai-
re au sens de l'art. 105 al. 2 OJ, de sorte que le Tribunal
fédéral n'est pas lié par les faits qu'elle a retenus (cf.
ATF 115 Ib 55 consid. 2a p. 57).

L'intéressé soutient que l'autorité intimée a cons-
taté des faits pertinents de manière inexacte ou incomplète
(cf. art. 104 lettre b OJ). Dans la mesure où il entend lui
faire grief de n'avoir pas retenu qu'il avait acquis les op-
tions Y.________ litigieuses en se fondant uniquement sur
des
informations parues dans la presse financière spécialisée et
non en tirant profit d'une information privilégiée, il perd
de vue que cette autorité n'a pas pris position sur cette
question et n'avait d'ailleurs pas à le faire (cf. arrêt des-
tiné à publication du 9 mars 2001 en la cause X. contre Com-
mission fédérale des banques, consid. 5c et les références
citées). Il ne saurait dès lors lui reprocher d'avoir consta-
té les faits de manière inexacte ou incomplète sur ce point.

3.- Dans son arrêt précité du 24 février 2000, le
Tribunal fédéral a notamment estimé que la COB était une au-
torité de surveillance des marchés financiers respectant
l'exigence de confidentialité (consid. 3), que sa requête
d'entraide administrative était suffisamment motivée
(consid.
4d) et respectait le principe de la proportionnalité
(consid.
4e). Elle a également considéré que cette autorité ne
pouvait
utiliser les informations qui lui seraient transmises à des
fins fiscales ou s'en servir en dehors de sa mission de con-
trôle des opérations de bourse (consid. 4e). Par ailleurs,
rien ne permettait de supposer qu'elle ne respecterait pas
son obligation d'obtenir l'accord préalable de la Commission
fédérale avant de retransmettre des informations à des auto-
rités non pénales (consid. 7b). Enfin, elle ne pouvait en
l'état être autorisée à effectuer une telle retransmission à
des autorités pénales, l'Office fédéral de la police n'y
ayant pas valablement consenti (cf. consid. 7c/bb). Dans ces
conditions, l'octroi de l'entraide administrative
nécessitait
encore d'obtenir la garantie que cette interdiction serait
respectée (consid. 7c/cc).

Cet arrêt est entré en force (cf. art. 38 OJ), de
sorte qu'il n'y a pas lieu de revenir sur les points qu'il a
définitivement tranchés, comme le relève à juste titre la dé-
cision attaquée (cf. consid. 1 de celle-ci). Ainsi, le recou-
rant ne peut demander l'annulation complète de cette
décision
en mettant à nouveau en cause la motivation - qu'il juge in-
suffisante - de la demande d'entraide administrative de la
COB (cf. p. 7 de son mémoire de recours) ou en se prévalant
derechef du risque que cette dernière le dénonce aux autori-
tés fiscales françaises ou le sanctionne professionnellement
(cf. p. 7-13 dudit mémoire). Dans cette mesure, ses conclu-
sions sont irrecevables.

Le présent litige est dès lors limité à la question
de savoir si l'autorité requérante peut ou non être
autorisée
à retransmettre des informations aux autorités pénales fran-
çaises compétentes.

4.- a) Aux termes de l'art. 38 al. 2 lettre c LBVM,
les informations reçues par l'autorité étrangère de surveil-
lance des bourses et du commerce des valeurs mobilières ne
peuvent être transmises à des autorités compétentes et à des
organismes ayant des fonctions de surveillance dictées par
l'intérêt public qu'avec l'assentiment préalable de l'autori-
té de surveillance suisse ou en vertu d'une autorisation gé-
nérale contenue dans un traité international; lorsque l'en-
traide judiciaire en matière pénale est exclue, aucune infor-
mation ne peut être transmise à des autorités pénales; l'au-
torité de surveillance décide en accord avec l'Office
fédéral
de la police (depuis le 1er juillet 2000, c'est l'Office fé-
déral de la justice qui est l'Office en charge de l'entraide
judiciaire en matière pénale, cf. art. 7 al. 6a de l'ordon-
nance du 17 novembre 1999 sur l'organisation du Département
fédéral de justice et police [Org DFJP; RS 172.213.1]).

b) Cette disposition oblige concrètement la Commis-
sion fédérale à ne pas perdre le contrôle de l'utilisation
des informations après leur transmission à l'autorité étran-
gère de surveillance (principe dit du "long bras"; "Prinzip
der langen Hand"; cf. arrêt destiné à publication précité du
9 mars 2001, consid. 6b et la jurisprudence citée).

Les autorités étrangères se surveillance ne sont
toutefois pas tenues de faire une déclaration contraignante
selon le droit international public, mais doivent s'engager,
notamment, à mettre tout en oeuvre pour respecter le
principe
dit du "long bras" (exigence qualifiée en anglais de "best
efforts" ou de "best endeavour") dans l'hypothèse d'une re-
transmission d'informations à d'autres autorités, pénales ou

non. Aussi longtemps que l'Etat requérant respecte effective-
ment ce principe et qu'il n'existe aucun signe qu'il ne le
fasse pas dans le cas concret, rien ne s'oppose à accorder
l'entraide administrative. S'il devait s'avérer que l'autori-
té requérante ne puisse plus se conformer à ce principe en
raison de sa législation
interne ou d'une décision contrai-
gnante à laquelle elle n'a pas les moyens de s'opposer, la
Commission fédérale devrait alors refuser l'entraide (cf.
arrêt destiné à publication précité du 9 mars 2001, consid.
6b et les arrêts cités).

c) Dans un courrier du 26 mars 1999 adressé au Pré-
sident de l'autorité intimée, le Président de la COB a notam-
ment indiqué qu'une retransmission d'informations à une auto-
rité pénale n'interviendrait qu'après assentiment de la Com-
mission fédérale. Certes, dans l'arrêt précité du 24 février
2000, le Tribunal fédéral a jugé que cette déclaration ne
permettait pas de prévoir le comportement de l'autorité re-
quérante au cas où l'autorité intimée refuserait de donner
son accord, de sorte que cette dernière ne pouvait donner
suite à la demande d'entraide administrative qu'après avoir
obtenu l'assurance qu'un tel refus serait respecté (cf. con-
sid. 7c/aa et 7c/cc de cet arrêt; cf. également ATF 126 II
86
consid. 7d/aa p. 94 et 7d/cc p. 95). La jurisprudence a tou-
tefois évolué depuis lors. Ainsi, dans une récente affaire
concernant également une demande d'entraide administrative
présentée par la COB, le Tribunal fédéral a considéré que le
principe dit du "long bras" ne s'opposait pas à l'octroi de
cette entraide si aucun élément concret ne permettait de sup-
poser que l'autorité requérante ne respecterait pas son enga-
gement précité du 26 mars 1999 (cf. arrêt destiné à publica-
tion précité du 9 mars 2001, consid. 6c et la jurisprudence
citée). A cet égard, le recourant se prévaut certes d'un
avis
de droit selon lequel le droit français empêcherait la COB
d'honorer sa promesse. Il ne s'agit toutefois que d'une ana-
lyse juridique privée faite à sa demande qui, sans que le sé-

rieux et la compétence de ses auteurs ne soient mis en
doute,
ne suffit pas pour faire obstacle à la requête d'entraide
administrative (cf. dans ce sens ATF 126 II 409 consid.
4b/bb
p. 413). Par ailleurs, le fait que l'autorité requérante a
l'obligation légale de communiquer certaines informations au
Procureur de la République (cf. consid. 6a ci-dessous) ne
saurait, en soi, conduire au refus de cette entraide. En ef-
fet, dans la mesure où la Commission fédérale est elle-même
soumise à un devoir similaire (cf. art. 35 al. 6 LBVM), il
ne
se justifie pas de soumettre l'octroi de l'entraide adminis-
trative à la condition que l'autorité requérante étrangère
ne
soit pas astreinte à une obligation de ce genre (cf. dans ce
sens ATF 126 II 409 consid. 4b/aa p. 412-413; arrêt destiné
à
publication précité du 9 mars 2001, consid. 6c).

d) Dès lors, même si l'autorisation de retransmettre
des informations aux autorités pénales française compétentes
ne peut, comme en l'espèce (cf. consid. 6e ci-dessous), être
accordée à la COB, le principe dit du "long bras" ne
s'oppose
en principe pas à ce que l'entraide administrative lui soit
tout de même octroyée (cf. consid. 6f ci-dessous), contraire-
ment à ce que pense le recourant.

5.- a) Les renseignements fournis à l'autorité re-
quérante dans le cadre de l'entraide administrative le sont
avant tout pour lui permettre d'exercer sa mission de sur-
veillance des marchés; ils peuvent cependant l'amener à soup-
çonner l'existence d'un délit d'initié. Si tel est le cas,
il
lui appartient alors d'effectuer des investigations supplé-
mentaires puis de décider si, compte tenu des renseignements
obtenus, elle doit saisir les autorités pénales compétentes.
A cet égard, elle ne peut leur communiquer les informations
fournies par la Commission fédérale qu'avec l'autorisation
de
cette dernière (cf. art. 38 al. 2 lettre c LBVM et consid. 4
ci-dessus). L'autorité intimée, de même que l'Office fédéral
de la police, se prononcent sur la base des éléments dont
ils

disposent et doivent, au besoin, demander des compléments
d'information à l'autorité requérante. Ils sont tenus d'exa-
miner si toutes les conditions matérielles de l'entraide pé-
nale internationale sont remplies, notamment si l'exigence
de
la double incrimination est satisfaite.

Une telle procédure en deux temps permet de ne pas
soumettre à des exigences trop élevées l'octroi, dans un pre-
mier temps, de l'entraide administrative à l'autorité requé-
rante. Cette dernière pourra ainsi obtenir rapidement les in-
formations dont elle a besoin pour sa mission de
surveillance
des marchés (cf. arrêt destiné à publication précité du 9
mars 2001, consid. 7a et les arrêts cités).

b) Si, lors du dépôt de sa demande d'entraide admi-
nistrative, les investigations de l'autorité requérante sont
déjà suffisamment avancées et font apparaître la nécessité
d'une éventuelle retransmission d'informations aux autorités
pénales étrangères compétentes, la Commission fédérale peut
directement y consentir dans sa décision accordant ladite en-
traide. Ce consentement est toutefois soumis à des exigences
plus élevées que celles nécessaires à l'octroi de ladite en-
traide. Des variations significatives du volume des titres
échangés et de leur cours peu avant une annonce de rachat de
société ne sont en particulier pas suffisantes. L'autorité
intimée doit disposer d'éléments supplémentaires insolites
lui permettant de soupçonner concrètement et avec un minimum
de vraisemblance l'existence d'un comportement tombant sous
le coup du droit pénal. Il ne faut cependant pas poser d'exi-
gences trop sévères quant à l'exposé des faits figurant dans
la demande, notamment parce qu'il n'est pas encore possible
de savoir avec certitude si, compte tenu de ses investiga-
tions ultérieures, l'autorité requérante transmettra ou non
-
malgré l'autorisation de la Commission fédérale - ses infor-
mations aux autorités pénales étrangères compétentes.

Ainsi, pour pouvoir simultanément accorder l'entrai-
de administrative à l'autorité requérante et l'autoriser à
retransmettre les informations qui lui sont fournies aux au-
torités pénales étrangères compétentes, la Commission fédéra-
le doit avoir connaissance - outre de la variation du cours
des titres en cause et de l'augmentation de leur volume
d'échanges durant une période sensible - d'indices lui per-
mettant de soupçonner concrètement et de manière vraisembla-
ble l'utilisation d'une information privilégiée par l'inté-
ressé en rapport avec la transaction examinée. Si tel n'est
pas le cas, la question d'une telle retransmission d'informa-
tions devra faire l'objet d'une nouvelle procédure et d'une
décision séparée ultérieure (cf. lettre a ci-dessus ainsi
que
arrêt destiné à publication précité du 9 mars 2001, consid.
7b avec la jurisprudence citée).

6.- a) La COB peut être tenue de transmettre au Pro-
cureur de la République des informations révélant des faits
susceptibles d'une qualification pénale (cf. art. 12-2 al. 3
de l'ordonnance no 67-833 du 28 septembre 1967 instituant
une
commission des opérations de bourse et relative à l'informa-
tion des porteurs de valeurs mobilières et à la publicité de
certaines opérations de bourse; cf. également art. 40 al. 2
du Code de procédure pénale français; Thierry Amy, Entraide
administrative internationale en matière bancaire, boursière
et financière, thèse Lausanne 1998, p. 600; arrêt destiné à
publication précité du 9 mars 2001, consid. 8a et les réfé-
rences citées).

b) Selon le recourant, la requête d'entraide de la
COB ne ferait état d'aucun soupçon déterminé à son égard. La
Commission fédérale ne pouvait dès lors simultanément
statuer
sur sa demande et l'autoriser à retransmettre, le cas
échéant, aux autorités pénales compétentes des informations
qui lui seraient fournies.

c) L'autorité requérante n'a pas expressément solli-
cité une telle autorisation. Elle a toutefois clairement in-
diqué à l'autorité intimée qu'elle pourrait être tenue de
saisir le Procureur de la République si des informations en
sa possession révélaient une infraction pénale. La
Commission
fédérale pouvait considérer d'office cette indication comme
une demande d'autorisation implicite (cf. dans ce sens arrêt
destiné à publication précité du 9 mars 2001, consid. 8b et
la jurisprudence citée).

d) L'autorité intimée a soumis à l'Office fédéral de
la police une prise de position détaillée sur laquelle celui-
ci s'est déterminé de manière circonstanciée. Elle a dès
lors
recueilli son consentement conformément aux exigences posées
par l'arrêt précité du 24 février 2000 (cf. consid. 7c/bb de
celui-ci; cf. également ATF 126 II 86 consid. 7d/bb p. 94-95
et les références citées).

e) Au moment de prendre sa décision, la Commission
fédérale savait, vu les informations figurant dans la
requête
de la COB, que les achats litigieux d'options Y.________
avaient été effectués peu de jours avant l'annonce publique
du projet de reprise de cette société par X.________, dans
une période marquée par une importante augmentation des tran-
sactions sur lesdites options ainsi que par un mouvement
inhabituel du cours de l'action Y.________.

Au cours de ses investigations, elle avait en outre
découvert que le recourant était l'auteur des achats mis en
cause et avait réalisé un bénéfice considérable lors de la
revente des options acquises. Elle avait en outre appris
qu'il exerçait en France des mandats de commissaire aux comp-
tes au sein de plusieurs sociétés cotées en bourse et qu'il
ne réalisait habituellement pas d'investissements hautement

spéculatifs, tels des achats d'options (sur la notion d'op-
tion, cf. Carlo Lombardini, Droit et pratique de la gestion
de fortune, Bâle 1997, p. 159 ss).

Même s'ils peuvent susciter certaines questions sur
le comportement de l'intéressé en rapport avec la
transaction
examinée, ces éléments - que l'autorité intimée connaissait
déjà en prenant sa décision du 26 août 1999 et qu'elle n'a
nullement cherché à compléter à la suite de l'arrêt du 24 fé-
vrier 2000 - demeurent insuffisants pour faire naître un
soupçon concret et vraisemblable de délit d'initié. En
effet,
s'il ne paraît pas exclu qu'en raison de ses activités le re-
courant ait pu avoir accès à des informations "privilégiées"
concernant la reprise de la société Y.________ par
X.________, aucun élément du dossier ne permet, pour l'ins-
tant, de tenir cette hypothèse pour vraisemblable. Aucun
lien
entre ces deux sociétés et celles au sein desquelles il exer-
çait ses mandats de commissaires aux comptes n'a en particu-
lier été établi.

En l'état, la Commission fédérale ne dispose dès
lors pas d'informations suffisantes lui permettant d'autori-
ser l'autorité requérante à retransmettre aux autorités pé-
nales françaises compétentes les informations qui lui sont
fournies. Dans ces conditions, il est superflu d'examiner en-
core si, comme le soutient l'intéressé, l'autorité intimée a
violé le principe de la spécialité au sens du droit en matiè-
re d'entraide judiciaire pénale (sur ce principe, cf. Robert
Zimmermann, La coopération judiciaire internationale en ma-
tière pénale, Berne 1999, n. 481 ss p. 371 ss) ou si la re-
quête de la COB constituait une recherche indéterminée de
moyens de preuve ("fishing expedition") prohibée dans le ca-
dre d'une telle entraide (cf. ATF 121 II 241 consid. 3a p.
243 et la jurisprudence citée). Il est également inutile de
décider si la Commission fédérale a considéré à bon droit -

en se référant à l'art. VIII de l'accord du 28 octobre 1996
entre le Conseil fédéral suisse et le Gouvernement de la Ré-
publique française en vue de compléter la Convention euro-
péenne d'entraide judiciaire en matière pénale du 20 avril
1959 (RS 0.351.934.92) entré en vigueur le 1er mai 2000 -
que
le principe de la double incrimination ne s'appliquait pas
au
cas particulier pour le motif qu'aucune mesure coercitive ne
devait être mise en oeuvre. Le bien-fondé de cette opinion
paraît au demeurant douteux dans la mesure où la jurispruden-
ce considère en principe la saisie et la remise de documents
bancaires comme des mesures coercitives (cf. SJ 1985 p. 372
consid. 5c p. 380).

f) Par conséquent, conformément à la procédure en
deux temps mentionnée ci-dessus (cf. consid. 5a), et dans la
mesure où il n'y a pas lieu de mettre en doute les engage-
ments pris par l'autorité requérante de ne retransmettre des
informations à des autorités pénales (cf. consid. 4 ci-des-
sus), ou non pénales (cf. consid. 7b de l'arrêt précité du
24
février 2000 cité au consid. 3 ci-dessus), qu'avec l'accord
de la Commission fédérale, l'entraide administrative peut
lui
être accordée. Ladite Commission lui communiquera dès lors
les informations qu'elle a obtenues de la banque Z.________
ainsi que les déterminations de T.________, en lui rappelant
en outre expressément que toute retransmission de ces élé-
ments à d'autres autorités (pénales ou non pénales) ne peut
avoir lieu qu'avec son accord préalable. Si, après avoir pou-
rsuivi ses investigations, la COB devait notamment juger né-
cessaire de porter ces éléments à la connaissance du Procu-
reur de la République, il lui incombera auparavant de solli-
citer l'autorisation de l'autorité intimée (cf. dans ce sens
arrêt destiné à publication précité du 9 mars 2001, consid.
8e).

7.- Vu ce qui précède, le présent recours doit être
partiellement admis dans la mesure où il est recevable et le
chiffre 1 du dispositif de la décision attaquée annulé. Les
chiffres 2 et 4 du dispositif sont confirmés. En
particulier,
vu le montant modeste de frais mis à la charge du recourant
par l'autorité intimée, il est superflu que celle-ci les mo-
difie.

N'obtenant que partiellement gain de cause, l'inté-
ressé supporte une part des frais de la présente procédure
(cf. art. 156 al. 1 et 3, 153 et 153a OJ). L'intérêt pécu-

niaire de la Confédération n'étant pas en cause, aucun frais
judiciaires ne peut être mis à sa charge (cf. art. 156 al. 2
OJ; ATF 126 II 126 consid. 7 p. 143).

Le recourant a droit à des dépens réduits (art. 159
al. 1 et 3 OJ).

Par ces motifs,

l e T r i b u n a l f é d é r a l :

1. Admet partiellement le recours dans la mesure où
il est recevable et annule le chiffre 1 du dispositif de la
décision prise le 31 mai 2000 par la Commission fédérale des
banques.

2. Met un émolument judiciaire de 1'500 fr. à la
charge du recourant.

3. Dit que la Commission fédérale des banques verse-
ra au recourant une indemnité réduite de 1'500 fr. à titre
de
dépens.

4. Communique le présent arrêt en copie au mandatai-
re du recourant ainsi qu'à la Commission fédérale des ban-
ques.
____________

Lausanne, le 10 mai 2001
DBA/elo

Au nom de la IIe Cour de droit public
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
Le Président,

Le Greffier,


Synthèse
Numéro d'arrêt : 2A.317/2000
Date de la décision : 10/05/2001
2e cour de droit public

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2001-05-10;2a.317.2000 ?
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