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30/04/2001 | SUISSE | N°H.340/00

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 30 avril 2001, H.340/00


«AZA 7»
H 340/00 Rl

IIe Chambre

composée des Juges fédéraux Lustenberger, Président, Meyer
et Ferrari; Métral, Greffier

Arrêt du 30 avril 2001

dans la cause

H.________, recourant, représenté par Maître Aba Neeman,
avocat, Place de l'Eglise 2, 1870 Monthey,

contre

Caisse cantonale valaisanne de compensation, avenue
Pratifori 22, 1950 Sion, intimée,

et

Tribunal cantonal des assurances, Sion

A.- Le 14 juillet 1997, la société D.________ SA, dont
H.__

______ est l'administrateur unique depuis 1992, a
obtenu un sursis concordataire d'une durée de six mois.

Le 4 décembre 1997, ell...

«AZA 7»
H 340/00 Rl

IIe Chambre

composée des Juges fédéraux Lustenberger, Président, Meyer
et Ferrari; Métral, Greffier

Arrêt du 30 avril 2001

dans la cause

H.________, recourant, représenté par Maître Aba Neeman,
avocat, Place de l'Eglise 2, 1870 Monthey,

contre

Caisse cantonale valaisanne de compensation, avenue
Pratifori 22, 1950 Sion, intimée,

et

Tribunal cantonal des assurances, Sion

A.- Le 14 juillet 1997, la société D.________ SA, dont
H.________ est l'administrateur unique depuis 1992, a
obtenu un sursis concordataire d'une durée de six mois.

Le 4 décembre 1997, elle proposait à ses créanciers, parmi
lesquels figurait la Caisse cantonale valaisanne de
compensation (ci-après : la caisse), un concordat prévoyant
de leur verser un dividende de 10 %, pour solde de compte.
Faute d'un nombre suffisant d'adhésions, le juge du dis-
trict de Monthey en a refusé l'homologation. Il a prononcé
la faillite de la société le 16 mars 1998.
La caisse a produit une créance de 31 219 fr. relative
aux cotisations AVS/AI/APG/AC impayées pour la période de
janvier à juillet 1997 ainsi qu'à un solde de cotisations
pour l'année 1996, y compris les intérêts moratoires. Le
27 novembre 1998, elle a pris une décision de réparation du
dommage par laquelle elle réclamait à H.________ le
paiement de 31 219 fr., sous déduction d'un éventuel divi-
dende à percevoir dans la faillite de la société.

B.- Le prénommé ayant fait opposition à cette déci-
sion, la caisse a porté le cas devant le Tribunal des assu-
rances du canton du Valais. Par jugement du 21 août 2000,
la juridiction cantonale a condamné l'ancien administrateur
de D.________ SA à payer à la caisse le montant de
31 219 fr.

C.- H.________ interjette un recours de droit admi-
nistratif contre ce jugement en concluant, sous suite de
frais et dépens, à sa réforme et au rejet de la demande de
la caisse. Celle-ci conclut au rejet du recours, alors que
l'Office fédéral des assurances sociales ne s'est pas
déterminé.

Considérant en droit :

1.- La décision litigieuse n'ayant pas pour objet
l'octroi ou le refus de prestations d'assurance, le Tribu-
nal fédéral des assurances doit se borner à examiner si les

premiers juges ont violé le droit fédéral, y compris par
l'excès ou par l'abus de leur pouvoir d'appréciation, ou si
les faits pertinents ont été constatés d'une manière mani-
festement inexacte ou incomplète, ou s'ils ont été établis
au mépris de règles essentielles de procédure (art. 132 en
corrélation avec les art. 104 let. a et b et 105 al. 2 OJ).

2.- Le recourant soulève tout d'abord le moyen tiré de
la péremption du droit de la caisse à lui demander la répa-
ration du dommage qu'elle a subi. D'après lui, elle con-
naissait son dommage depuis le 14 août 1997 déjà; en effet,
elle lui a écrit à cette date qu'elle ne pourrait pas
adhérer sans réserve au concordat, dans la mesure où cela
lui ferait perdre ses droits contre les organes de
D.________ SA, découlant de l'art. 52 LAVS.

a) L'art. 82 RAVS règle la prescription du droit de la
caisse de compensation de demander la réparation du domma-
ge. Un tel droit se prescrit lorsque la caisse ne le fait
pas valoir par une décision de réparation dans l'année
après qu'elle a eu connaissance du dommage et, en tout cas,
à l'expiration d'un délai de cinq ans à compter du fait
dommageable (al. 1). Lorsque ce droit dérive d'un acte
punissable soumis par le code pénal à un délai de prescrip-
tion de plus longue durée, ce délai est applicable (al. 2).
En dépit de la terminologie dont use l'art. 82 RAVS, les
délais institués par cette norme ont un caractère péremp-
toire (ATF 121 III 388 consid. 3b, 119 V 92 consid. 3,
118 V 195 consid. 2b et les références).
Par moment de la "connaissance du dommage" au sens de
l'art. 82 al. 1 RAVS, il faut entendre, en règle générale,
le moment où la caisse de compensation aurait dû se rendre
compte, en faisant preuve de l'attention raisonnablement
exigible, que les circonstances effectives ne permettaient
plus d'exiger le paiement des cotisations, mais pouvaient
entraîner l'obligation de réparer le dommage (ATF
121 III 388 consid. 3b, 119 V 92 consid. 3, 118 V 195 con-

sid. 3a et les références). En règle ordinaire, lorsque le
dommage résulte d'une faillite, ce moment coïncide avec
celui où la caisse est informée de sa collocation dans la
liquidation. Toutefois, la caisse peut, en raison de cir-
constances spéciales, acquérir cette connaissance avant le
dépôt de l'état de collocation, par exemple à l'occasion
d'une assemblée des créanciers où elle apprend qu'aucun
dividende ne sera distribué aux créanciers de sa classe
(ATF 118 V 195 sv. consid. 3a-b); de même peut-il être
exigé d'elle qu'elle se renseigne sur les motifs ayant
conduit au refus d'homologation d'un concordat (VSI 1995
p. 169).

b) La correspondance dont fait état le recourant ne
démontre pas que l'intimée disposait d'informations parti-
culières sur les comptes de D.________ SA en août 1997.
Tout au plus peut-on en déduire qu'elle n'entendait pas
renoncer à ses droits contre les organes de la société,
dans l'hypothèse où elle subirait un dommage dans le cadre
du concordat. Cela ne suffit pas à considérer que la caisse
connaissait son dommage, ou pouvait le connaître en faisant
preuve de l'attention raisonnablement exigible.
Ce n'est qu'en recevant le bilan concordataire de la
société, en décembre 1997, qu'elle disposait d'informations
suffisantes pour pouvoir se déterminer. Sa décision du
28 novembre 1998 a donc été rendue avant l'échéance du
délai d'une année dès la connaissance du dommage.

3.- a) La condition essentielle de l'obligation de
réparer le dommage consiste, selon le texte même de
l'art. 52 LAVS, dans le fait que l'employeur a, intention-
nellement ou par négligence grave, violé les prescriptions
et ainsi causé un préjudice. L'intention et la négligence
constituent différentes formes de la faute. L'art. 52 LAVS
consacre en conséquence une responsabilité pour faute
résultant du droit public. Il n'y a obligation de réparer

le dommage, dans un cas concret, que s'il n'existe aucune
circonstance justifiant le comportement fautif de
l'employeur ou excluant l'intention et la négligence grave.
A cet égard, on peut envisager qu'un employeur cause un
dommage à la caisse de compensation en violant intention-
nellement les prescriptions en matière d'AVS, sans que cela
entraîne pour autant une obligation de réparer le préjudi-
ce. Tel est le cas lorsque l'inobservation des prescrip-
tions apparaît, au vu des circonstances, comme légitime et
non fautive (ATF 108 V 186 consid. 1b, 193 consid. 2b; RCC
1985 p. 603 consid. 2, 647 consid. 3a). Ainsi, il peut
arriver qu'en retardant le paiement de cotisations,
l'employeur parvienne à maintenir son entreprise en vie,
par exemple lors d'une passe délicate dans la trésorerie.
Mais il faut alors, pour qu'un tel comportement ne tombe
pas ultérieurement sous le coup de l'art. 52 LAVS, que l'on
puisse admettre que l'employeur avait, au moment où il a
pris sa décision, des raisons sérieuses et objectives de
penser qu'il pourrait s'acquitter des cotisations dues dans
un délai raisonnable (ATF 108 V 188; RCC 1992 p. 261 con-
sid. 4b).

b) aa) Le recourant conteste que le dommage subi par
l'intimée puisse lui être imputé à faute, bien qu'il n'ait
pas veillé au paiement des cotisations sociales dues par
D.________ SA à l'intimée pendant la période litigieuse. Il
fait valoir que cette société a rencontré des difficultés
financières dès la fin du mois d'avril 1996, mais que
d'importants investissements personnels lui permettaient
d'espérer un prochain assainissement. D'après lui, ce n'est
qu'à partir du mois de mars 1997 qu'il pouvait douter du
règlement intégral des cotisations en souffrance; en effet,
l'établissement bancaire, principal créancier de la socié-
té, avait dénoncé, pour le 28 février 1997, les crédits
dont elle bénéficiait jusqu'alors. Le recourant expose
avoir ensuite maintenu l'entreprise en activité pendant une

courte période seulement, tout en faisant son possible pour
rembourser sa dette envers l'intimée. A cet égard, il
allègue lui avoir versé, le 9 juin 1997, un montant de
62 749 fr. 25 représentant un arriéré de cotisations dues
pour l'année 1996.

bb) De telles circonstances ne sont pas de nature à
légitimer le comportement du recourant. En effet, il en
ressort que D.________ SA ne faisait pas face à un défaut
temporaire de liquidités dû à la subite dénonciation d'un
crédit bancaire, mais à des difficultés financières qui se
sont étendues sur de nombreux mois, au point que la société
avait déjà un important retard dans le paiement des cotisa-
tions AVS/AI/APG/AC au début de l'année 1997. A ce moment,
elle ne parvenait toujours pas, non seulement à régler sa
dette envers l'intimée, mais encore à assumer les cotisa-
tions courantes, malgré les investissements personnels du
recourant. Ce dernier a ainsi maintenu son entreprise en
activité sans pouvoir faire valoir de perspectives concrè-
tes d'assainissement; dans ce contexte, la dénonciation,
pour le 28 février 1997, des crédits bancaires dont avait
bénéficié la société n'est que la conséquence d'une situa-
tion financière précaire depuis plusieurs mois. Partant, il
lui appartient de supporter le dommage qu'il a causé fauti-
vement à l'intimée.

4.- Compte tenu de l'issue du litige, les frais de la
procédure, qui n'est pas gratuite en l'occurrence (art. 134
OJ a contrario), seront supportés par le recourant.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances

p r o n o n c e :

I. Le recours est rejeté.

II. Les frais de la cause, consistant en un émolument de
justice de 3000 fr., sont mis à la charge du recourant
et sont compensés avec l'avance de frais, d'un même
montant, qu'il a versée.

III. Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tri-
bunal des assurances du canton du Valais et à l'Office
fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 30 avril 2001

Au nom du
Tribunal fédéral des assurances
Le Président de la IIe Chambre :

Le Greffier :


Synthèse
Numéro d'arrêt : H.340/00
Date de la décision : 30/04/2001
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2001-04-30;h.340.00 ?
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