La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

30/04/2001 | SUISSE | N°H.312/00

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 30 avril 2001, H.312/00


«AZA 7»
H 312/00 Kt

IIe Chambre

composée des Juges fédéraux Lustenberger, Président, Meyer
et Ferrari; Berset, Greffière

Arrêt du 30 avril 2001

dans la cause

Office fédéral des assurances sociales, Effingerstrasse 20,
3003 Berne, recourant,

contre

S.________, intimé,

et

Tribunal cantonal de la République et canton du Jura,
Porrentruy

A.- S.________, né le 21 juillet 1935, a bénéficié
d'une retraite anticipée de la prévoyance professionnelle à


partir du 1er août 1997 (pension de retraite et rente-pont
AVS). Par lettre du 20 mars 1997, la Caisse de pensions du
canton du Jura l...

«AZA 7»
H 312/00 Kt

IIe Chambre

composée des Juges fédéraux Lustenberger, Président, Meyer
et Ferrari; Berset, Greffière

Arrêt du 30 avril 2001

dans la cause

Office fédéral des assurances sociales, Effingerstrasse 20,
3003 Berne, recourant,

contre

S.________, intimé,

et

Tribunal cantonal de la République et canton du Jura,
Porrentruy

A.- S.________, né le 21 juillet 1935, a bénéficié
d'une retraite anticipée de la prévoyance professionnelle à
partir du 1er août 1997 (pension de retraite et rente-pont
AVS). Par lettre du 20 mars 1997, la Caisse de pensions du
canton du Jura l'a informé que la rente pont AVS serait
versée jusqu'au 31 juillet 1999 et qu'il pouvait demander à
percevoir une rente de vieillesse anticipée dès le 1er août
1999.

Le 27 août 1999, S.________ a déposé une demande de
rente de vieillesse (avec versement anticipé) auprès de la
Caisse de compensation du canton du Jura (ci-après : la
caisse).
Par décision du 15 septembre 1999, la caisse l'a
informé de son refus de lui octroyer une rente AVS antici-
pée, au motif que la demande était tardive.

B.- Saisi d'un recours contre cette décision, le
Tribunal cantonal de la République et canton du Jura,
Chambre des assurances, par jugement du 12 juillet 2000,
l'a admis, au regard du principe de la bonne foi, et a
alloué au recourant une rente AVS anticipée du 1er août
1999 au 31 juillet 2000.

C.- L'Office fédéral des assurances sociales inter-
jette un recours de droit administratif contre ce jugement
dont il demande l'annulation.
S.________ conclut au rejet du recours en se prévalant
de sa bonne foi.
La caisse ne s'est pas déterminée.

Considérant en droit :

1.- a) Introduit par la 10 ème révision de la LAVS,
l'art. 40 AVS prévoit, à son premier alinéa, que les hommes
et les femmes qui remplissent les conditions d'octroi d'une
rente ordinaire de vieillesse peuvent obtenir son versement
anticipé d'un ou deux ans. Dans ces cas, le droit à la
rente prend naissance, pour les hommes, le premier jour du
mois suivant 64 ou 63 ans révolus, pour les femmes le pre-
mier jour du mois suivant 63 ou 62 ans révolus.
L'art. 67 RAVS précise les conditions d'exercice de ce
droit. L'alinéa 1 dispose, notamment, que l'ayant droit
doit remettre une formule de demande dûment remplie à la

caisse de compensation compétente. Selon l'alinéa 1bis,
introduit par l'ordonnance du Conseil fédéral du 29 novem-
bre 1995, seul l'ayant droit ou son représentant légal peut
faire valoir le droit à la rente anticipée ordinaire de
vieillesse. Ce droit ne peut être requis rétroactivement.

b) L'instauration de la rente anticipée constitue l'un
des quatre piliers de la 10 ème révision de la LAVS (FF
1990 II p. 5 sv, 46 sv). Selon le rapport de mars 1988 du
Conseil fédéral sur l'âge flexible de la retraite, la
retraite anticipée désigne la possibilité de décaler, par
rapport à l'âge légal, le moment de l'ouverture du droit à
la rente. La somme des prestations dues à l'âge normal de
la retraite est répartie, en cas d'anticipation, sur une
période plus longue (p. 28 sv, ch. 61). L'assuré a le choix
entre une rente non réduite qu'il touchera à l'âge de la
retraite et le versement anticipé d'une rente réduite. Si
l'on se fonde sur une espérance de vie moyenne, les coûts
de ces deux possibilités devraient être égaux dans chaque
hypothèse (ibidem. p. 15, ch. 41).

2.- a) En l'espèce, il est constant que l'intimé a
atteint l'âge de 64 ans le 21 juillet 1999. Il pouvait dès
lors prétendre au versement d'une rente de vieillesse
anticipée, dès le 1er août 1999. Sa demande de rente anti-
cipée de vieillesse n'a été déposée que le 27 août 1999,
soit presque un mois après la date à partir de laquelle
courait son droit à cette prestation. Ce droit a dès lors
été requis de manière rétroactive au sens de l'art. 67
al. 1bis RAVS.

b) Le RAVS est un règlement fondé sur l'art. 154 al. 2
LAVS, qui charge le Conseil fédéral d'édicter des disposi-
tions aux fins d'exécution de la loi. Un tel règlement a
pour fonction de concrétiser les dispositions légales et,
le cas échéant, de combler des lacunes d'importance secon-

daire, dans la mesure où l'exécution de la loi l'exige; les
normes d'exécution doivent cependant s'en tenir au cadre
légal et ne peuvent en particulier contenir des règles nou-
velles qui limiteraient les droits des administrés ou leur
imposeraient de nouveaux devoirs, même si ces règles sont
compatibles avec le but de la loi (ATF 126 V 269 sv. con-
sid. 4b et les références).
L'art. 67 al. 1bis, qui précise les modalités d'exer-
cice du droit à une rente anticipée de vieillesse, se situe
dans le cadre d'une norme d'exécution au sens précité. Il
vise à empêcher une demande rétroactive de versement anti-
cipé d'une rente de vieillesse. Dans cette mesure, on ne
voit pas, et les premiers juges ne le prétendent d'ailleurs
pas, que cette disposition sorte manifestement du cadre de
la délégation de compétence donnée au Conseil fédéral.
D'une part, il y aurait contradiction fondamentale à per-
mettre un effet rétroactif à une demande tardive de verse-
ment anticipé et d'autre part il s'agit aussi de prévenir
d'éventuels abus comme une demande de versement anticipé
d'une rente émanant d'héritiers d'un assuré décédé entre-
temps (cf. VSI 1996 p. 43).

c) Il en découle que, déposée par l'intimé environ un
mois après l'accomplissement de sa 64 ème année, sa demande
de rente anticipée de vieillesse était tardive au sens de
l'art. 67 al. 1bis RAVS, conjointement avec l'art. 40 al. 1
LAVS.

3.- a) L'office recourant fait valoir que, contraire-
ment à ce qu'ont retenu les premiers juges, les conditions
d'application du principe de la bonne foi n'étaient pas
réunies, de sorte que le droit de l'intimé à une rente
anticipée de vieillesse devait être nié.

b) Les principes que la jurisprudence déduisait de
l'art. 4 al. 1 aCst., en ce qui concerne le droit à la

protection de la bonne foi, valent également sous le régime
de l'art. 9 Cst. (ATF 126 II 387 consid. 3a). C'est ainsi
qu'un renseignement ou une décision erronés peuvent obliger
l'administration à consentir à un administré un avantage
contraire à la loi, si certaines conditions - cumulatives -
sont réunies. En particulier, il est nécessaire que l'admi-
nistré se soit fondé sur le renseignement (inexact) obtenu
pour prendre des dispositions qu'il ne saurait modifier
sans subir de préjudice (cf. ATF 121 V 66 consid. 2a et les
références). En l'espèce toutefois, l'intimé ne prétend pas
avoir été amené à prendre des dispositions préjudiciables
sur lesquelles il ne peut pas revenir et rien au dossier ne
permet d'admettre que tel a été le cas. A cet égard, ainsi
qu'il résulte du consid. 1b ci-dessus, les conséquences
financières respectives d'un choix entre une rente antici-
pée réduite et une rente non réduite à l'âge normal sont
équivalentes. L'intimé ne saurait donc bénéficier de la
garantie constitutionnelle du droit à la protection de la
bonne foi (cf. DTA 1999 no 40 p. 237 consid. 3; voir aussi
RSAS 1999 p. 387 consid. 4b).
Cette condition de l'application du principe de la
bonne foi n'étant pas remplie, il n'est pas nécessaire
d'examiner, en particulier, si le renseignement prétendu-
ment erroné donné à l'intimé par la Caisse de pensions dans
sa lettre du 20 mars 1997 pouvait être imputé à l'autorité
compétente pour octroyer des rentes de vieillesse, soit la
Caisse de compensation du Jura (cf. SVR 2001 KV no 3 p. 6
consid. 3e).

4.- En conclusion, la caisse était en droit de nier le
droit de l'intimé à une rente anticipée de vieillesse pour
la période du 1er août 1999 au 31 juillet 2000.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances,

p r o n o n c e :

I. Le recours est admis et le jugement du 12 juillet 2000
du Tribunal cantonal de la République et canton du
Jura, Chambre des assurances, est annulé.

II. Il n'est pas perçu de frais de justice.

III. Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tri-
bunal cantonal de la République et canton du Jura,
Chambre des assurances, et à la Caisse de compensation
du canton du Jura.

Lucerne, le 30 avril 2001

Au nom du
Tribunal fédéral des assurances
Le Président de la IIe Chambre :

La Greffière :


Synthèse
Numéro d'arrêt : H.312/00
Date de la décision : 30/04/2001
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2001-04-30;h.312.00 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award