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23/04/2001 | SUISSE | N°1P.565/2000

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 23 avril 2001, 1P.565/2000


«/2»
1P.565/2000

Ie C O U R D E D R O I T P U B L I C
**********************************************

23 avril 2001

Composition de la Cour: MM. les juges Aemisegger, président,
vice-président du Tribunal fédéral, Nay et Aeschlimann.
Greffier: M. Thélin.

Statuant sur le recours de droit public
formé par

X.________ , représenté par Me Jean-Pierre Bloch, avocat à
Lausanne,

contre

l'arrêt rendu le 19 janvier 2000 par la Cour de cassation
pénale du Tribunal cantonal du

canton de Vaud;

(répartition des frais judiciaires)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s s...

«/2»
1P.565/2000

Ie C O U R D E D R O I T P U B L I C
**********************************************

23 avril 2001

Composition de la Cour: MM. les juges Aemisegger, président,
vice-président du Tribunal fédéral, Nay et Aeschlimann.
Greffier: M. Thélin.

Statuant sur le recours de droit public
formé par

X.________ , représenté par Me Jean-Pierre Bloch, avocat à
Lausanne,

contre

l'arrêt rendu le 19 janvier 2000 par la Cour de cassation
pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud;

(répartition des frais judiciaires)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- Dès le 10 mai 1996, les autorités judiciaires vau-
doises ont ouvert une enquête pénale contre Y.________ et
Z.________ qui étaient soupçonnés de se livrer, avec un
troisième individu encore inconnu, à un important trafic
de stupéfiants. L'enquête comportait la surveillance de
plusieurs raccordements téléphoniques, fixes ou mobiles.

Y.________ et Z.________ ont été arrêtés le 22 août
1996 à l'occasion d'une opération de police qui a permis la
saisie de 500 g d'héroïne. L'élucidation de leur activité
criminelle s'est poursuivie dans le cadre d'une autre en-
quête qui était déjà en cours. La surveillance des raccor-
dements téléphoniques a alors pris fin.

Le troisième suspect a été ensuite identifié en la per-
sonne de X.________, qui continuait d'utiliser l'un des rac-
cordements précédemment surveillés. Cette surveillance a
donc été rétablie dès le 7 octobre 1996, puis maintenue jus-
qu'à l'arrestation de X.________ le 1er novembre suivant.

Le 22 juillet 1998, le Juge d'instruction a ordonné la
disjonction des causes de Y.________ et Z.________, d'une
part, et de X.________, d'autre part. Par ordonnance du 7
août 1998, il a renvoyé ce dernier devant le Tribunal cor-
rectionnel du district de Lausanne.

Le 28 octobre 1999, ce tribunal a reconnu X.________
coupable d'infraction grave à la législation sur les stupé-
fiants. Il lui a infligé la peine de dix-sept mois d'empri-
sonnement avec sursis durant trois ans; il l'a également
condamné à supporter la totalité des frais du procès pénal,
arrêtés à 48'812 fr.10.

B.- X.________ a recouru à la Cour de cassation pénale
du Tribunal cantonal. Sans critiquer le verdict de culpabi-
lité ni la peine infligée, il a soutenu que la charge des
frais était excessive et que les premiers juges auraient dû
ne lui imputer qu'une partie du montant précité. La Cour de
cassation pénale a rejeté le recours par arrêt du 19 janvier
2000.

C.- Agissant par la voie du recours de droit public,
X.________ requiert le Tribunal fédéral d'annuler ce pro-
noncé; il se plaint d'une application arbitraire des dispo-
sitions cantonales relatives aux frais judiciaires pénaux.
Une demande d'assistance judiciaire est jointe au recours.

Invités à répondre, le Ministère public cantonal et
les juridictions intimées ont renoncé à déposer des obser-
vations.

C o n s i d é r a n t e n d r o i t :

1.- Une décision est arbitraire, donc contraire aux
art. 4 aCst. ou 9 Cst., lorsqu'elle viole gravement une
norme ou un principe juridique clair et indiscuté, ou con-
tredit d'une manière choquante le sentiment de la justice
et de l'équité. Le Tribunal fédéral ne s'écarte de la solu-
tion retenue par l'autorité cantonale de dernière instance
que si sa décision apparaît insoutenable, en contradiction
manifeste avec la situation effective, adoptée sans motifs
objectifs ou en violation d'un droit certain. En outre, il
ne suffit pas que les motifs de la décision soient insoute-
nables; encore faut-il que celle-ci soit arbitraire dans son
résultat. A cet égard, il ne suffit pas non plus qu'une so-
lution différente de celle retenue par l'autorité cantonale
puisse être tenue pour également concevable, ou apparaisse

même préférable (ATF 126 I 168 consid. 3a p. 170; 125 I 166
consid. 2a p. 168; 125 II 10 consid. 3a p. 15, 129 consid.
5b p. 134).

2.- En droit vaudois, l'imputation des frais judiciai-
res est régie par les dispositions suivantes du code de pro-
cédure pénale:

Art. 155

Les frais comprennent l'ensemble des émoluments et des
débours dus par les parties [...].
...

Art. 157

En règle générale, si le prévenu est condamné à une pei-
ne, les frais sont mis à sa charge.

S'il y a plusieurs prévenus, les frais sont répartis en-
tre eux.

Lorsque l'équité l'exige, le juge peut ne mettre qu'une
partie des frais à la charge du condamné, notamment
quand ce dernier a été libéré du chef de certaines des
infractions retenues contre lui par l'ordonnance de ren-
voi.

Art. 160

Lorsque plusieurs personnes sont condamnées aux frais,
chacune d'elles ne répond que de la quote-part mise à sa
charge.

Toutefois, le juge peut, par une décision motivée, or-
donner que les parties condamnées aux frais, ou certai-
nes d'entre elles, en seront tenues solidairement.

a) Le recourant fait valoir que le montant proche de
50'000 fr. mis à sa charge l'empêchera de retrouver une si-
tuation financière saine, bien que lui-même et son épouse
travaillent régulièrement et amortissent leurs dettes. Le
Tribunal correctionnel aurait dû, à son avis, "faire preuve
d'une certaine mansuétude à son égard", compte tenu que sa
culpabilité ne "saurait être qualifiée de lourde", puisque
ce tribunal ne lui a finalement infligé qu'une peine assor-

tie du sursis. Il affirme encore que dans la pratique judi-
ciaire vaudoise, ordinairement, des frais pénaux aussi im-
portants sont liés à une peine de plusieurs années de réclu-
sion.

Cette argumentation méconnaît que l'infraction commise
est en elle-même grave, puisque la peine minimum prévue par
la loi n'est pas inférieure à un an d'emprisonnement et
qu'une peine plus longue, de dix-sept mois, a d'ailleurs été
prononcée contre le recourant. Celui-ci n'est pas autorisé à
sous-estimer à la fois sa propre culpabilité et la gravité
de la peine infligée, sur la base du fait que le Tribunal
correctionnel, pour tenir compte de ses antécédents et de
sa situation personnelle favorables, a décidé d'assortir
cette peine du sursis. En présence d'une infraction grave
à la législation sur les stupéfiants, il n'est en principe
pas arbitraire d'appliquer strictement le principe de la
causalité, tel qu'il est consacré par l'art. 157 al. 1 CPP
vaud., et d'imputer la totalité des frais d'enquête au con-
damné. En l'occurrence, on n'aperçoit pas de disproportion
flagrante entre l'importance de la peine prononcée et celle
du montant des frais, alors même que ce dernier apparaît en
effet élevé. Le grief d'arbitraire se révèle donc, de ce
point de vue, mal fondé.

b) Les débours comprennent notamment, à raison d'envi-
ron 25'000 fr., les frais de surveillance téléphonique et de
traduction des dialogues qui se déroulaient en albanais. Le
recourant fait valoir que dans une large mesure, en particu-
lier au début de l'enquête, cette surveillance concernait
aussi les deux autres prévenus; à son avis, les débours cor-
respondants auraient donc dû être répartis et il est arbi-
traire de les lui imputer en entier.

Les art. 157 al. 2 et 160 al. 1 CPP vaud. prévoient
sans équivoque qu'en principe, chaque condamné n'a à répon-

dre que des frais qui le concernent personnellement. De tou-
te évidence, cette réglementation n'exige pas que le juge se
livre à une analyse complexe et détaillée des frais pour ef-
fectuer leur répartition entre les débiteurs; au contraire,
une imputation approximative et schématique doit être admi-
se. En l'espèce toutefois, on ne discerne aucun motif rai-
sonnable d'imputer exclusivement au recourant la totalité
des frais de surveillance téléphonique: ce dernier n'a été
surveillé seul que pendant trois semaines environ, juste
avant son arrestation; auparavant, les trois suspects
avaient été surveillés ensemble durant plus de trois mois.
L'arrêt attaqué ne contient non plus aucune indication con-
cluante sur ce point. L'évaluation des frais imputables au
recourant personnellement, évaluation à laquelle celui-ci a
en principe droit, ne peut pas être omise pour cette seule
raison qu'une disjonction de causes est intervenue et que
les autres prévenus ne sont pas jugés simultanément. Une
telle simplification pourrait se justifier, à la rigueur,
si les montants en jeu apparaissaient insignifiants, mais
il n'est pas admissible que le recourant soit grevé, sans
raison particulière, d'une dette supplémentaire de plusieurs
milliers de francs. Celui-ci se plaint donc à bon droit
d'une application arbitraire de l'art. 157 al. 2 CPP vaud.

L'arrêt attaqué doit ainsi être annulé; il appartiendra
à la Cour de cassation pénale de prendre une nouvelle déci-
sion sur la répartition des débours.

3.- Le recourant qui obtient gain de cause a droit à
des dépens, de sorte qu'il n'est pas nécessaire de statuer
sur sa demande d'assistance judiciaire.

Par ces motifs,

l e T r i b u n a l f é d é r a l :

1. Admet le recours et annule l'arrêt attaqué.

2. Dit qu'il n'est pas perçu d'émolument judiciaire.

3. Dit que le canton de Vaud versera une indemnité de
1'000 fr. au recourant à titre de dépens.

4. Communique le présent arrêt en copie au mandataire
du recourant, au Tribunal correctionnel du district de Lau-
sanne, au Ministère public et à la Cour de cassation pénale
du Tribunal cantonal du canton de Vaud.

Lausanne, le 23 avril 2001
THE/mnv

Au nom de la Ie Cour de droit public
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
Le Président,

Le Greffier,


Synthèse
Numéro d'arrêt : 1P.565/2000
Date de la décision : 23/04/2001
1re cour de droit public

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2001-04-23;1p.565.2000 ?
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