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12/04/2001 | SUISSE | N°5P.41/2001

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 12 avril 2001, 5P.41/2001


«/2»
5P.41/2001

IIe C O U R C I V I L E
*****************************

12 avril 2001

Composition de la Cour: M. Reeb, président, M. Raselli,
Mme Nordmann, M. Merkli et M. Meyer, juges.
Greffier: M. Braconi.

__________

Statuant sur le recours de droit public
formé par

L.________, représenté par Me Soli Pardo, avocat à Genève,

contre

l'arrêt rendu le 14 décembre 2000 par la 1ère Section de la
Cour de justice du canton de Genève dans la cause opposant
le
r

ecourant à B.________ SA, représentée par Me Maurice
Turrettini, avocat à Genève;

(art. 9 Cst.; mainlevée d'opposition)

...

«/2»
5P.41/2001

IIe C O U R C I V I L E
*****************************

12 avril 2001

Composition de la Cour: M. Reeb, président, M. Raselli,
Mme Nordmann, M. Merkli et M. Meyer, juges.
Greffier: M. Braconi.

__________

Statuant sur le recours de droit public
formé par

L.________, représenté par Me Soli Pardo, avocat à Genève,

contre

l'arrêt rendu le 14 décembre 2000 par la 1ère Section de la
Cour de justice du canton de Genève dans la cause opposant
le
recourant à B.________ SA, représentée par Me Maurice
Turrettini, avocat à Genève;

(art. 9 Cst.; mainlevée d'opposition)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- Dans le cadre d'une poursuite introduite par
B.________ SA contre L.________, le Tribunal de première ins-
tance de Genève a, le 1er septembre 1997, accordé la mainle-
vée provisoire de l'opposition au commandement de payer à
concurrence de 175'000 fr. avec intérêts à 5% dès le 1er jan-
vier 1996. Le poursuivi a été intégralement débouté de ses
conclusions en libération de dette par les juridictions gene-
voises; il a retiré le recours en réforme interjeté au Tribu-
nal fédéral (4C.394/1999).

B.- B.________ SA ayant laissé périmer cette poursuite,
elle a fait notifier à L.________, le 7 février 2000, un nou-
veau commandement de payer la somme de 175'000 fr. plus inté-
rêts à 5% du 1er janvier 1996, auquel le poursuivi a formé
derechef opposition.

Par jugement du 20 juillet 2000, le Tribunal de
première
instance de Genève a refusé la mainlevée définitive.
Statuant
le 14 décembre suivant, la 1ère Section de la Cour de
justice
a annulé cette décision et levé définitivement l'opposition
au commandement de payer.

C.- Agissant par la voie du recours de droit public au
Tribunal fédéral, L.________ conclut à l'annulation de cet
arrêt.

L'intimée propose le rejet du recours dans la mesure de
sa recevabilité; la cour cantonale se réfère aux
considérants
de sa décision.

D.- Par ordonnance du 22 février 2001, le Président de
la cour de céans a attribué l'effet suspensif au recours.

C o n s i d é r a n t e n d r o i t :

1.- Interjeté à temps contre une décision qui prononce,
en dernière instance cantonale, la mainlevée définitive de
l'opposition (ATF 120 Ia 256 consid. 1a p. 257), le présent
recours est recevable sous l'angle des art. 86 al. 1, 87 et
89 al. 1 OJ.

2.- En premier lieu, le recourant reproche à la Cour de
justice d'avoir, par une application arbitraire de l'art.
292
al. 1 let. c LPC/GE, outrepassé sa cognition. Il fait
valoir,
en substance, que cette disposition ne vise qu'une
«violation
qualifiée» de la loi; or, tel n'est pas le cas en l'espèce,
la question litigieuse étant - de l'aveu même des magistrats
d'appel - «controversée».

Selon la jurisprudence, l'autorité qui statue avec
plein
pouvoir d'examen, alors qu'elle ne jouit que d'une cognition
restreinte tombe dans l'arbitraire (ATF 116 III 70 consid.
2b
p. 71 et les arrêts cités). L'autorité inférieure n'encourt
pas ce grief (cf. arrêt non publié de la IIe Cour civile
dans
la cause 5P.455/1999, consid. 2a). Dans le cadre de l'appel
extraordinaire - voie de recours ouverte contre les
prononcés
de mainlevée (ATF 106 Ia 88 consid. 1 p. 90/91) -, la Cour
de
justice peut revoir librement l'appréciation juridique des
faits et l'interprétation de la loi; sa cognition n'est donc
pas limitée à l'arbitraire ou à la violation «manifeste» du
droit (André Schmidt, Le pouvoir d'examen en droit de la
Cour
en cas d'appel pour violation de la loi en procédure civile
genevoise, SJ 1995 p. 521 ss et les citations).

3.- En second lieu, le recourant se plaint d'arbitraire
dans l'application de l'art. 80 al. 1 LP; il soutient que le

jugement rendu sur l'action en libération de dette, même
s'il
établit sa qualité de débiteur, ne constitue pas un titre de
mainlevée définitive.

a) L'action en libération de dette instituée à l'art.
83
al. 2 LP est une action (négatoire) de droit matériel qui
aboutit à un jugement revêtu de l'autorité de la chose jugée
en dehors de la poursuite en cours quant à l'existence de la
créance litigieuse (ATF 124 III 207 consid. 3a p. 208; 83
III
75 p. 77; 47 III 103 p. 104; Amonn/Gasser, Grundriss des
Schuldbetreibungs- und Konkursrechts, 6e éd., § 4 N. 49, §
19
N. 104); elle est le pendant de l'action en reconnaissance
de
dette, au sens de l'art. 79 LP, dont elle ne se distingue
que
par le renversement du rôle procédural des parties (ATF 124
III 207 consid. 3a p. 208/209; 116 II 131 consid. 2 p. 132;
95 II 617 consid. 2 p. 621; 91 II 108 consid. 2b p. 111 et
les arrêts cités). Sans doute, le jugement rejetant l'action
n'emporte-t-il aucune condamnation pécuniaire du poursuivi;
il n'en demeure pas moins qu'il constate définitivement la
qualité d'obligé de celui-ci (Daniel Staehelin, Kommentar
zum
SchKG, vol. I, N. 59 ad art. 83 LP et les références
citées),
en sorte qu'il n'apparaît pas arbitraire de lui attribuer, à
l'égal d'un jugement condamnatoire, le caractère d'un titre
apte à la mainlevée définitive de l'opposition (RSJ VII/1910
p. 65/66 n° 66; Panchaud/Caprez, La mainlevée d'opposition,
1ère éd., § 99 let. b; Eugen Fischer, Rechtsöffnungspraxis
in
Basel-Stadt, BJM 1980 p. 120/121). En cela, il se distingue,
notamment, d'une décision de modération, qui se borne à
fixer
les honoraires d'avocat sans statuer sur le principe même de
la dette et, partant, ne peut être assimilée à un jugement
au
sens de l'art. 80 LP (ATF 106 Ia 337 consid. 3 p. 340; 38 I
504, p. 507 et les arrêts cités). Enfin, il n'est pas
décisif
que son dispositif n'indique pas le montant dont le
poursuivi
est reconnu débiteur; le juge de la mainlevée peut, en
effet,
se reporter aux motifs du jugement pour déterminer si et
dans

quelle mesure ce dernier constitue un titre qui justifie la
continuation de la poursuite (ATF 79 I 327 consid. 2 p. 330;
Panchaud/Caprez, op. cit., 2e éd., § 112 ch. 2). La solution
de l'autorité inférieure n'est, certes, pas unanimement
reçue
en doctrine (Staehelin, ibidem, N. 62; Peter Stücheli, Die
Rechtsöffnung, thèse Zurich 2000, p. 222); mais il ne suffit
pas que l'opinion inverse soit concevable, voire préférable,
pour fonder une violation de l'art. 9 Cst. (ATF 126 III 438
consid. 3 in fine p. 440).

b) C'est en outre à tort que le recourant tire argument
de la possibilité pour le poursuivant (défendeur) de prendre
des conclusions reconventionnelles en paiement dans le
procès
en libération de dette (à ce sujet: ATF 41 III 310 consid. 5
p. 311 ss; 58 I 165 consid. 3 in fine p. 170). Il n'y a rien
d'insoutenable à admettre, comme la cour cantonale, que de
telles conclusions ne sauraient avoir pour objet la créance
déduite en poursuite, le seul rejet de l'action en
libération
de dette ayant déjà pour conséquence de rendre définitive la
mainlevée (cf. art. 83 al. 3 LP;
Jaeger/Walder/Kull/Kottmann,
SchKG, vol. I, 4e éd., N. 14 ad art. 83 LP). Cet effet ne se
rattache du reste qu'au sort de l'action (principale)
ouverte
par le poursuivi; pour le montant qui lui a été alloué sur
la
base de ses conclusions reconventionnelles, le poursuivant
ne
peut demander la continuation de la poursuite pendante, mais
il doit en introduire une nouvelle (ATF 41 III 310 consid. 5
p. 313; 57 II 324 consid. 1 p. 325). Or, il est constant que
le procès en libération de dette portait uniquement sur la
créance en poursuite.

4.- En conclusion, le recours doit être rejeté, avec
suite de frais et dépens à la charge de son auteur (art. 156
al. 1 et 159 al. 2 OJ).

Par ces motifs,

l e T r i b u n a l f é d é r a l :

1. Rejette le recours.

2. Met à la charge du recourant:
a) un émolument judiciaire de 5'000 fr.,
b) une indemnité de 5'000 fr. à payer
à l'intimée à titre de dépens.

3. Communique le présent arrêt en copie aux mandataires
des parties et à la 1ère Section de la Cour de justice du
canton de Genève.

__________

Lausanne, le 12 avril 2001
BRA/frs

Au nom de la IIe Cour civile
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE :
Le Président,

Le Greffier,


Synthèse
Numéro d'arrêt : 5P.41/2001
Date de la décision : 12/04/2001
2e cour civile

Analyses

Art. 80 al. 1 LP; mainlevée définitive de l'opposition. Il n'est pas arbitraire de prononcer la mainlevée définitive de l'opposition sur la base d'un jugement rejetant l'action en libération de dette ouverte par le poursuivi lors d'une précédente poursuite (en l'occurrence périmée) relative à la même prétention (consid. 3).


Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2001-04-12;5p.41.2001 ?
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