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06/04/2001 | SUISSE | N°2P.301/2000

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 06 avril 2001, 2P.301/2000


«/2»
2P.301/2000

IIe C O U R D E D R O I T P U B L I C
***********************************************

6 avril 2001

Composition de la Cour: MM. et Mme les Juges Wurzburger,
président, Hungerbühler et Yersin.
Greffier: M. de Vries Reilingh.

Statuant sur le recours de droit public
formé par

A.________, représenté par Me Patrick Stoudmann, avocat à
Lausanne,

contre

la décision prise le 30 octobre 2000 par le Conseil d'Etat
du canton de Vaud;

(renvoi pour just

es motifs d'un fonctionnaire cantonal)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- Dès...

«/2»
2P.301/2000

IIe C O U R D E D R O I T P U B L I C
***********************************************

6 avril 2001

Composition de la Cour: MM. et Mme les Juges Wurzburger,
président, Hungerbühler et Yersin.
Greffier: M. de Vries Reilingh.

Statuant sur le recours de droit public
formé par

A.________, représenté par Me Patrick Stoudmann, avocat à
Lausanne,

contre

la décision prise le 30 octobre 2000 par le Conseil d'Etat
du canton de Vaud;

(renvoi pour justes motifs d'un fonctionnaire cantonal)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- Dès le 1er mai 1987, l'Etat de Vaud, Association
pour la restauration du Château B.________, a engagé
A.________ par contrat de droit privé en qualité de gar-
dien-jardinier au Château B.________ (ci-après: le Château).
Celui-ci a été nommé à ce poste comme fonctionnaire dès le
1er avril 1989.

B.- Le 16 août 1994, l'Intendant du Château (ci-après:
l'Intendant), C.________, a reproché à l'intéressé notamment
d'avoir modifié en son absence le plan de travail de fin
juillet 1994 afin de prendre plus de vacances - contraire-
ment aux instructions données - et d'avoir quitté son poste
le dernier jour de travail à 14 heures 50 déjà, sans avoir
exécuté toutes les tâches demandées et sans avertir ses col-
lègues. En 1992 déjà, A.________ aurait profité de ses va-
cances d'été pour porter la durée des siennes de 25 à 28
jours, alors qu'auparavant il avait été informé de la durée
trop longue de son absence en pleine saison. L'Intendant lui
a en outre reproché son comportement, son manque d'allant
et d'initiative et sa peine à s'intégrer dans le travail
d'équipe et lui a demandé formellement de corriger ces man-
quements.

Le 15 juin 1999, confirmant un entretien de fin mai
1999, C.________ a signifié une mise en garde à l'intéressé,
l'informant que la poursuite de son activité au Château se-
rait désormais conditionnée par une amélioration très signi-
ficative, immédiate et durable de la qualité de son travail,
faute de quoi une procédure de renvoi serait engagée contre
lui. Il attendait notamment un meilleur engagement dans son
activité, une solidarité effective avec ses collègues et, de

manière générale, une meilleure exécution de toutes ses tâ-
ches (nettoyage, gardiennage, jardinage, etc.).

C.- Le 18 juin 1999, A.________ a contacté le groupe
D.________ - compétent notamment pour traiter les plaintes
pour harcèlement psychologique en vertu de l'art. 5 de l'ar-
rêté vaudois du 23 juin 1999 relatif à la lutte contre le
harcèlement au travail dans l'administration vaudoise - au-
près duquel il s'est plaint des agissements de son supérieur
hiérarchique, C.________. La médiation ayant été refusée et
la situation s'étant par la suite dégradée, ledit groupe a
décidé, avec l'accord de l'intéressé, de mener une investi-
gation en vue d'établir les faits dont se plaignait celui-
ci.

Le 10 février 2000, le groupe précité a rendu un rap-
port relatif au conflit entre A.________ et C.________
adressé au Chef du Département des institutions et des re-
lations extérieures (DIRE) du canton de Vaud (ci-après: le
Chef du Département). Ayant procédé à des investigations et
à l'audition de plusieurs personnes citées par A.________
et C.________, il a notamment conclu que l'Intendant n'avait
pas eu de comportements hostiles visant à nuire à
A.________. Il n'a en particulier pas constaté d'agissements
relevant du mobbing de la part de C.________ envers celui-
là.

D.- Par courrier du 2 mars 2000, l'Intendant a reproché
à l'intéressé d'avoir eu une attitude très désagréable en-
vers des visiteurs du Château et l'a prié d'éviter à l'ave-
nir tout débordement de même nature.

Par lettre du 28 avril 2000, il lui a demandé d'affir-
mer sur l'honneur qu'il n'était pour rien dans la dispari-
tion de plusieurs objets. En outre, il l'a également solli-
cité de remettre en place l'outillage et le matériel appar-

tenant au Château, de ne pas accumuler sur et devant le ves-
tiaire d'un collègue ses affaires personnelles ou du maté-
riel, de cesser d'envenimer la situation, d'obéir aux ordres
et consignes pour les tâches de nettoyage et de gardiennage,
d'être plus organisé, rapide, efficace et propre dans son
travail, de ne pas quitter le Château et son domaine sans
avertir et sans justification et d'être plus avenant, poli
et agréable avec les visiteurs du Château, ses collègues de
travail et lui-même.

Le 1er mai 2000, l'Intendant a adressé copie de son
courrier précité ainsi que de ceux des 16 août 1994 et 15
juin 1999 au Chef du Département en lui signalant que l'at-
titude de A.________ au travail empirait, tout particulière-
ment ces derniers mois, au point que presque tous ses collè-
gues s'en plaignaient et qu'un conflit quasi-permanent ré-
gnait avec plusieurs d'entre eux. Il ne pouvait plus conti-
nuer à travailler ainsi avec lui.

Le 8 mai 2000, deux collègues de travail de l'intéres-
sé, dont celui avec lequel celui-ci devait travailler en
paire, se sont plaints de son comportement auprès du Chef du
Département. Ils lui reprochaient en substance de ne pas ef-
fectuer son travail, de rendre le leur impossible, notamment
en cachant leurs outils de travail, de mettre ses affaires
devant leur vestiaire, de démonter systématiquement le por-
te-savon ainsi que de les insulter et provoquer. Cette si-
tuation, qui se dégradait de jour en jour, aurait eu des
conséquences pour leur santé. Ils priaient le Chef du Dépar-
tement de prendre une décision rapidement avant que la si-
tuation ne s'aggrave davantage.

Le même jour, l'épouse d'un collègue de travail s'est
également adressée audit chef en lui demandant d'agir rapi-
dement "dans un sens ou dans un autre".

Le 9 mai 2000, l'Intendant a signalé à l'Administrateur
de l'Association du Château n'avoir aucune réaction de
A.________ à sa lettre du 28 avril 2000. Il faisait égale-
ment état d'un incident survenu le 7 mai 2000 au cours du-
quel celui-ci - qui continuait à "disparaître" pendant de
longues périodes et à travailler au ralenti - aurait versé
du savon liquide sur la radio de l'un de ses collègues.

E.- Le 24 mai 2000, le Chef du Département a décidé de
suspendre l'intéressé de son activité professionnelle avec
effet immédiat et d'ouvrir, "dans les plus brefs délais", la
procédure de renvoi pour justes motifs à son encontre. Il a
maintenu le versement de son traitement.

Le 29 mai 2000, par l'intermédiaire de son avocat,
A.________ a affirmé sur l'honneur qu'il n'était pour rien
dans la disparition d'objets reprochée le 28 avril 2000. Il
s'est également engagé à remettre en place, comme il l'au-
rait toujours fait, l'outillage et le matériel appartenant
au Château.

Le 7 juillet 2000, le Chef du Département a transmis à
l'intéressé le rapport exposant les motifs de renvoi.

Le 11 octobre 2000, celui-ci a été entendu par une dé-
légation du Conseil d'Etat du canton de Vaud (ci-après: le
Conseil d'Etat).

Le 30 octobre 2000, le Conseil d'Etat l'a renvoyé -
avec effet au jour même - pour justes motifs au sens de
l'art. 89 de la loi vaudoise du 9 juin 1947 sur le statut
général des fonctions publiques cantonales (ci-après: le
Statut; RSV 1.6). Il lui a reproché en substance son com-
portement envers ses collègues - en particulier ses insultes
et provocations - qu'il a jugées inadmissibles, constituant
à elles seules un motif justifiant le renvoi immédiat, son

impolitesse avec des visiteurs du Château ainsi que ses man-
quements au travail, notamment la mauvaise qualité de ce
dernier, ses "disparitions" fréquentes et sa désobéissance.
Pour toutes ces raisons, la poursuite des rapports de tra-
vail ne pouvait être exigée de l'Etat de Vaud, le lien de
confiance étant définitivement détruit.

F.- Agissant par la voie du recours de droit public,
A.________ demande l'annulation de la décision précitée. In-
voquant l'art. 9 Cst., il reproche au Conseil d'Etat une ap-
préciation arbitraire des preuves ainsi qu'une application
arbitraire du droit cantonal.

Ledit Conseil conclut à l'irrecevabilité du recours,
subsidiairement à son rejet.

C o n s i d é r a n t e n d r o i t :

1.- a) Le Tribunal fédéral examine d'office et libre-
ment la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF
126 I 207 consid. 1 p. 209; III 274 consid. 1 p. 275 et la
jurisprudence citée).

b) Selon l'art. 88 OJ, le recours de droit public est
ouvert uniquement à celui qui est atteint par l'acte attaqué
dans ses intérêts personnels et juridiquement protégés. Le
recours formé pour sauvegarder l'intérêt général ou ne vi-
sant qu'à préserver des intérêts de fait est en revanche
irrecevable (ATF 126 I 43 consid. 1a p. 44). La protection
contre l'arbitraire inscrite à l'art. 9 Cst. (cf. également
art. 4 aCst.) - qui doit être respectée dans toute activité
administrative de l'Etat - ne confère pas à elle seule la
qualité pour agir au sens de l'art. 88 OJ. La qualité pour
former un recours fondé sur l'art. 9 Cst. dépend bien plutôt

du fait que la législation dont l'application arbitraire est
alléguée accorde un droit au recourant ou a pour but de le
protéger d'une atteinte à ses intérêts (ATF 126 I 81 consid.
3b p. 85-86; 123 I 279 consid. 3c/aa p. 280; 41 consid. 5b
p. 42-43; 122 I 44 consid. 2b et 3b/bb p. 45-47; 121 I 267
consid. 2 p. 269 et les références citées). Le Tribunal fé-
déral a jugé que l'employé de la fonction publique qui re-
çoit son congé n'a qualité pour former un recours de droit
public que si le droit cantonal fait dépendre son licen-
ciement de conditions matérielles (ATF 126 I 33 consid. 1
p. 34; cf. également ATF 120 Ia 110 consid. 1a p. 112).

En vertu de l'art. 89 du Statut, le Conseil d'Etat ou
le Tribunal cantonal pour l'ordre judiciaire peut en tout
temps ordonner la cessation des fonctions pour justes motifs
(al. 1). Constituent de justes motifs le fait que le fonc-
tionnaire ne remplit plus les conditions dont dépend la no-
mination et toutes autres circonstances qui font que, selon
les règles de la bonne foi, la poursuite des rapports de
service ne peut pas être exigée (al. 2). Il y a donc lieu
d'admettre que l'intéressé a qualité pour recourir au sens
de l'art. 88 OJ, contrairement à ce que soutient le Conseil
d'Etat, du moment que le droit public vaudois fait dépendre
le licenciement d'une condition matérielle (existence de
justes motifs; cf. également ATF 126 I 33 consid. 1 p. 34
et l'arrêt cité).

c) Au surplus, déposé en temps utile contre une déci-
sion finale prise en dernière instance cantonale, qui ne
peut être attaquée que par la voie du recours de droit pu-
blic, le présent recours est en principe recevable au regard
des art. 84 ss OJ.

2.- a) Sauf exceptions non réalisées en l'espèce, le
Tribunal fédéral examine sous l'angle de l'arbitraire, dans
le cadre d'un recours de droit public, l'interprétation et

l'application du droit cantonal (Walter Kälin, Das Verfahren
der staatsrechtlichen Beschwerde, 2ème éd. Berne 1994,
p. 164 ss).

b) En vertu de l'art. 90 al. 1 lettre b OJ, l'acte de
recours doit, à peine d'irrecevabilité, contenir un exposé
succinct des droits constitutionnels ou des principes juri-
diques violés et préciser en quoi consiste la violation.
Lorsqu'il est saisi d'un recours de droit public, le Tribu-
nal fédéral n'a donc pas à vérifier de lui-même si la déci-
sion entreprise est en tous points conforme au droit et à
l'équité. Il n'examine que les griefs d'ordre constitution-
nel invoqués et suffisamment motivés dans l'acte de recours
(ATF 125 I 71 consid. 1c p. 76; 115 Ia 27 consid. 4a p. 30;
114 Ia 317 consid. 2b p. 318). En outre, dans un recours
pour arbitraire fondé sur l'art. 9 Cst. (cf. art. 4 aCst.),
le recourant ne peut se contenter de critiquer la décision
attaquée comme il le ferait dans une procédure d'appel où
l'autorité de recours peut revoir librement l'application du
droit. Il doit préciser en quoi cette décision serait arbi-
traire, ne reposerait sur aucun motif sérieux et objectif,
apparaîtrait insoutenable ou heurterait gravement le sens de
la justice (ATF 125 I 492 consid. 1b p. 495 et la jurispru-
dence citée).

L'acte de recours ne satisfait que partiellement à ces
exigences.

3.- A titre de moyen de preuve, le recourant demande la
production du dossier de la cause et le rapport du groupe
D.________ du 10 février 2000 par le Conseil d'Etat.

A la demande du Tribunal fédéral, celui-ci a produit le
dossier de la cause qui comprend notamment le rapport préci-
té. Sa demande est dès lors sans objet.

Pour le surplus, l'autorité de céans s'estime suffisam-
ment renseignée, de sorte qu'il n'y a pas lieu d'ordonner
d'autres mesures d'instruction (cf. art. 95 al. 1 par renvoi
de l'art. 113 OJ).

4.- Une décision est arbitraire lorsqu'elle contredit
clairement la situation de fait, lorsqu'elle viole gravement
une norme ou un principe juridique clair et indiscuté, ou
lorsqu'elle heurte d'une manière choquante le sentiment de
la justice et de l'équité. A cet égard, le Tribunal fédéral
ne s'écarte de la solution retenue par l'autorité cantonale
de dernière instance que si elle apparaît insoutenable, en
contradiction manifeste avec la situation effective, adoptée
sans motifs objectifs ou en violation d'un droit certain. De
plus, il ne suffit pas que les motifs de la décision atta-
quée soient insoutenables, encore faut-il que cette dernière
soit arbitraire dans son résultat. Il n'y a en outre pas ar-
bitraire du seul fait qu'une autre solution que celle de
l'autorité intimée paraît concevable, voire préférable (ATF
125 I 166
consid. 2a p. 168 et la jurisprudence citée). La
nouvelle Constitution n'a pas amené de changement à cet
égard (cf. art. 8 et 9 Cst.; ATF 126 I 168 consid. 3a
p. 170).

5.- a) L'intéressé fait grief au Conseil d'Etat d'avoir
fondé sa décision sur les témoignages de deux collègues en
conflit avec lui qui auraient un intérêt évident à lui nui-
re. Cette autorité aurait également porté des accusations
contre lui qu'il avait démenties et, ne disposant pas d'au-
tres moyens de preuve, elle ne saurait persister à l'en
croire responsable sans violer le principe de l'interdiction
de l'arbitraire. Les faits reprochés ne pourraient dès lors
fonder son renvoi pour justes motifs.

b) Ainsi qu'elle le relève, l'autorité intimée a basé
sa décision non seulement sur les déclarations des deux col-

lègues et de l'Intendant, mais aussi sur le rapport du grou-
pe D.________ du 10 février 2000 qui est intervenu à la de-
mande du recourant. En effet, elle a estimé que les membres
dudit groupe avaient relevé dans leur rapport que selon tous
les gardiens entendus - dont les témoignages convergeaient -
l'intéressé avait un comportement provocateur et agressif
et s'en prenait à tous les gardiens à tour de rôle. Ces der-
niers affirmaient qu'ils avaient été insultés publiquement
par le recourant qui manquait d'esprit d'équipe et qui, ré-
gulièrement, ne faisait pas son travail, d'autres devant
l'effectuer à sa place (cf. p. 7 et 8 de la décision en-
treprise). Le Conseil d'Etat lui a en outre reproché son
impolitesse avec des visiteurs du Château dont l'un s'était
plaint (cf. p. 9 de la décision attaquée). Ses longues ab-
sences avaient également été constatées par le groupe
D.________ (cf. p. 10 de la décision querellée), de même
que le fait qu'il ne suivait pas les instructions données
par l'Intendant (cf. p. 11 de ladite décision).

Dès lors que l'autorité intimée a fondé sa décision non
seulement sur les déclarations des deux collègues précités,
mais aussi sur celles de l'Intendant, de visiteurs du Châ-
teau et sur le rapport du groupe D.________, le grief soule-
vé par l'intéressé est mal fondé. Par ailleurs, au vu des
dépositions concordantes de toutes ces personnes, le Conseil
d'Etat disposait de suffisamment d'éléments pour retenir
comme avérés les manquements et reproches que le recourant
conteste. Ceux-ci ressortent d'ailleurs clairement du rap-
port du groupe D.________.

6.- a) Le recourant estime que le renvoi aurait dû être
précédé d'un avertissement. Un renvoi sans avertissement
préalable ne serait envisageable que pour des faits parti-
culièrement graves, ce qui ne serait pas le cas en l'espèce,
de sorte que la décision attaquée serait arbitraire. Le ren-
voi immédiat ne serait par ailleurs admissible qu'en tant

qu'ultima ratio au cas où d'autres mesures moins incisives
pour le fonctionnaire ne pourraient être envisagées. Le Con-
seil d'Etat n'aurait examiné que très sommairement cette
possibilité, de sorte que sa décision serait également arbi-
traire pour cette raison. Enfin, l'intéressé estime que le
laps de temps entre l'annonce de l'ouverture de la procédure
de renvoi et l'ouverture effective de celle-ci aurait été
trop long, dès lors que la résiliation immédiate devait sui-
vre de peu la reconnaissance des justes motifs. Partant, la
décision prise le 30 octobre 2000 par l'autorité intimée se-
rait arbitraire.

b) L'art. 90 al. 2 du Statut précise qu'à moins que les
faits ne justifient la cessation immédiate des rapports de
service, le renvoi doit être précédé d'un avertissement
écrit.

En l'espèce, le Conseil d'Etat a considéré que la pro-
cédure de renvoi pour justes motifs avait été ouverte sans
avoir été précédée d'un avertissement formel au sens de la
disposition précitée. Il a ensuite examiné la question de
savoir si les faits justifiaient une résiliation immédiate.
Il a estimé que dans la mesure où l'Intendant avait adressé
déjà le 28 avril 2000 une sérieuse mise en garde à l'inté-
ressé et que la situation s'était par la suite considérable-
ment dégradée - le recourant ne faisant plus son travail et
employant son temps à cacher le matériel et les outils de
ses collègues contre lesquels il se livrait à des actes de
provocation -, des mesures immédiates s'imposaient. Par ail-
leurs, celui-ci avait déjà été dûment averti le 15 juin 1999
qu'une procédure de renvoi serait ouverte si la qualité de
son travail ne s'améliorait pas rapidement et de manière
significative. Or, ces mises en garde n'avaient jamais eu
d'effet sur son comportement, de sorte qu'on pouvait admet-
tre qu'un avertissement formel aurait été sans résultat.

Le recourant ne critique pas cette appréciation qui
n'est pas insoutenable. L'autorité intimée était en effet
fondée à renoncer à l'avertissement préalable prévu par
l'art. 90 al. 2 du Statut dès lors qu'une telle mesure au-
rait de toute façon été sans effet et qu'une décision ayant
des conséquences immédiates s'imposait.

c) S'agissant du laps de temps qui s'est écoulé entre
sa suspension avec effet immédiat et la notification du rap-
port exposant les motifs du renvoi par le Chef du Départe-
ment - moment que l'intéressé considère comme l'ouverture
formelle de la procédure de renvoi pour justes motifs -, il
n'a pas été particulièrement long, de sorte que le recourant
ne saurait en tirer aucune conclusion en sa faveur. Peu im-
porte au demeurant quand la procédure de renvoi a été effec-
tivement ouverte; les art. 84 ss du Statut ne prescrivent en
effet pas de délai dans lequel la procédure de renvoi pour
justes motifs doit être ouverte. Par ailleurs, dans la mesu-
re où l'intéressé a été suspendu et licencié en raison des
mêmes reproches - formulés tant dans la décision de suspen-
sion prise le 24 mai 2000 que dans le rapport exposant les
motifs de son renvoi du 7 juillet 2000 et dans la décision
de renvoi du 30 octobre 2000 -, il était, dès sa suspension,
au courant des motifs de sa mise à pied, de sorte qu'il
n'est pas non plus fondé à reprocher au Conseil d'Etat
d'avoir attendu longtemps entre la connaissance desdits
motifs et une décision concrète basée sur ceux-ci.

On ne saurait non plus reprocher audit Conseil un com-
portement contradictoire: en suspendant avec effet immédiat
le recourant, il a démontré que les rapports de travail ne
pouvaient perdurer, même si le renvoi est intervenu ulté-
rieurement. A cet égard, la situation est différente de
celle d'un employeur soumis au droit privé qui ne connaît
pas l'institution de la suspension; de plus, en droit privé,

le délai séparant la survenance des motifs de renvoi et le
renvoi lui-même a une autre signification.

d) Dès lors que les conditions du renvoi pour justes
motifs au sens de l'art. 89 du Statut étaient remplies,
l'autorité intimée n'était pas non plus tenue de considérer
une autre mesure - moins incisive - que le licenciement avec
effet immédiat. En effet, bien que l'art. 91 du Statut per-
mette au Conseil d'Etat d'ordonner, au lieu de la cessation
des fonctions, le déplacement à un autre poste, celui-ci
n'en a pas l'obligation. Le grief soulevé par le recourant
doit dès lors être rejeté.

7.- Vu ce qui précède, le présent recours doit être re-
jeté dans la mesure où il est recevable.

Succombant, l'intéressé doit supporter les frais judi-
ciaires (art. 156 al. 1, 153 et 153a OJ) et n'a pas droit à
des dépens (art. 159 al. 1 OJ).

Par ces motifs,

l e T r i b u n a l f é d é r a l :

1. Rejette le recours dans la mesure où il est receva-
ble.

2. Met un émolument judiciaire de 2'000 fr. à la charge
du recourant.

3. Dit qu'il n'est pas alloué de dépens.

4. Communique le présent arrêt en copie au mandataire
du recourant et au Conseil d'Etat du canton de Vaud.

Lausanne, le 6 avril 2001
DVR/mnv

Au nom de la IIe Cour de droit public
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
Le Président,

Le Greffier,


Synthèse
Numéro d'arrêt : 2P.301/2000
Date de la décision : 06/04/2001
2e cour de droit public

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2001-04-06;2p.301.2000 ?
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