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03/04/2001 | SUISSE | N°U.371/99

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 03 avril 2001, U.371/99


«AZA 7»
U 371/99 Mh

IIe Chambre

composée des Juges fédéraux Lustenberger, Président, et
Ferrari, Ribaux, suppléant; von Zwehl, Greffière

Arrêt du 3 avril 2001

dans la cause

R.________, France, recourant, ayant élu domicile chez
S.________,

contre

Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents,
Fluhmattstrasse 1, Lucerne, intimée,

et

Tribunal administratif du canton de Genève, Genève

A.- R.________ travaillait depuis octobre 1992 en
qualité

de chauffeur de poids lourds au service de la
société Y.________. A ce titre, il était assuré contre le
risque d'accidents professi...

«AZA 7»
U 371/99 Mh

IIe Chambre

composée des Juges fédéraux Lustenberger, Président, et
Ferrari, Ribaux, suppléant; von Zwehl, Greffière

Arrêt du 3 avril 2001

dans la cause

R.________, France, recourant, ayant élu domicile chez
S.________,

contre

Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents,
Fluhmattstrasse 1, Lucerne, intimée,

et

Tribunal administratif du canton de Genève, Genève

A.- R.________ travaillait depuis octobre 1992 en
qualité de chauffeur de poids lourds au service de la
société Y.________. A ce titre, il était assuré contre le
risque d'accidents professionnels et non professionnels
auprès de la Caisse nationale suisse d'assurance en cas
d'accidents (CNA).

Le 19 octobre 1995, il est tombé d'une échelle d'une
hauteur de 2,5 mètres environ, à son domicile. Les médecins
de l'Hôpital Z.________, où il a séjourné durant une se-
maine, ont constaté une fracture-tassement du mur antérieur
de L1 sans lésion médullaire et attesté une incapacité de
travail totale dès le jour de la chute. Deux tentatives de
reprise du travail - aux mois de février et mars 1996 -
dans des activités plus légères au sein de l'entreprise se
sont soldées par un échec. A l'initiative du docteur
M.________, médecin d'arrondissement de la CNA, l'assuré a
alors accompli un séjour à la Clinique X.________ du 22 ju-
illet au 11 octobre 1996 (cf. rapport de sortie du 15 dé-
cembre 1996). Une troisième tentative de reprise du travail
au terme de ce séjour s'étant à nouveau révélée infruc-
tueuse, R.________ a été derechef convoqué auprès du
docteur M.________ pour un examen final. Dans son rapport
du 28 janvier 1997, ce dernier a confirmé chez l'assuré
l'existence d'une capacité de travail entière dans une
activité adaptée moyennant certaines limitations (alter-
nance des positions assis/debout, introduction de pauses
régulières durant les heures de travail, éviter les mou-
vements répétitifs sollicitant le tronc et le port de
charges lourdes); il a, en outre, estimé le taux de
l'atteinte à l'intégrité à 20 %.
Sur la base de cette appréciation médicale et après
avoir procédé à une enquête économique, la CNA a alloué à
R.________ une rente fondée sur un taux d'invalidité de
40 % à partir du 1er avril 1998, ainsi qu'une indemnité
pour atteinte à l'intégrité de 20 % (décision du 30 octobre
1998). A la suite de l'opposition formée par l'assuré, et
après avoir mis en oeuvre d'autres mesures d'instruction,
la CNA a confirmé sa prise de position dans une nouvelle
décision du 3 mai 1999.

B.- L'assuré a recouru contre cette décision devant le
Tribunal administratif du canton de Genève qui l'a débouté
par jugement du 21 septembre 1999.

C.- R.________ interjette recours de droit adminis-
tratif contre ce jugement dont il requiert l'annulation. Il
conclut principalement à l'octroi d'une rente fondée sur un
taux d'invalidité de 80 % et, subsidiairement, au renvoi de
la cause à la juridiction cantonale pour instruction com-
plémentaire sous la forme d'une expertise.
La CNA conclut au rejet du recours, tandis que l'Offi-
ce fédéral des assurances sociales ne s'est pas déterminé.

Considérant en droit :

1.- Dans la procédure de recours concernant l'octroi
ou le refus de prestations d'assurance, le pouvoir d'examen
du Tribunal fédéral des assurances n'est pas limité à la
violation du droit fédéral - y compris l'excès et l'abus du
pouvoir d'appréciation - mais s'étend également à l'oppor-
tunité de la décision attaquée. Le tribunal n'est alors pas
lié par l'état de fait constaté par la juridiction infé-
rieure, et il peut s'écarter des conclusions des parties à
l'avantage ou au détriment de celles-ci (art. 132 OJ).

2.- En instance cantonale, le recourant n'a pas con-
testé le taux de l'indemnité pour atteinte à l'intégrité
arrêté par l'intimée. La décision sur opposition du 3 mai
1999 est ainsi entrée en force sur ce point dès lors que la
question de la causalité n'est ici pas litigieuse (cf. ATF
119 V 347, 110 V 51 consid. 3c; RAMA 1999 U 323 98). Le
litige porte donc uniquement sur l'évaluation du degré
d'invalidité présenté par le recourant ensuite de l'at-
teinte qu'il a subie à sa colonne lombaire.

Les premiers juges ont correctement exposé les dispo-
sitions légales et la jurisprudence applicables au présent
cas, de sorte qu'on peut renvoyer à leurs considérants.

3.- En l'occurrence, la juridiction cantonale a impli-
citement fait siennes les conclusions du docteur M.________
et considéré qu'on pouvait raisonnablement exiger du recou-
rant qu'il mette à profit sa capacité de travail dans la
mesure fixée par ce médecin. Elle a ainsi confirmé le taux
d'invalidité de 40 % retenu par l'intimée.
Pour sa part, le recourant conteste l'appréciation qui
a été faite de sa capacité de travail en lui opposant
l'avis de son médecin traitant, le docteur O.________,
selon lequel son état de santé s'est progressivement aggra-
vé au point de justifier un taux d'invalidité de 80 %. Il
fait également valoir qu'il n'existe pas d'emploi sur le
marché du travail qui serait compatible avec les limi-
tations imposées par son handicap tant celles-ci sont
restrictives.

4.- a) Le docteur M.________, médecin d'arrondisse-
ment de la CNA, s'est prononcé à plusieurs reprises sur
l'état de santé de l'assuré (les 3 octobre 1996, 28 janvier
1997 et 26 février 1999). Au cours de ces examens succes-
sifs, il a constaté que la fracture du mur antérieur de L1
s'était correctement consolidée et que l'état de cette ver-
tèbre était stationnaire depuis 1997. En raison toutefois
de la persistance de douleurs résiduelles, il a conclu que
l'assuré n'était plus en mesure de travailler dans son
ancienne activité; à ses yeux, celles-ci n'entravaient en
revanche pas l'exercice d'une activité professionnelle
adaptée, sans port de charges lourdes, ni flexion répé-
titive du tronc et permettant des changements fréquents de
position (assis/debout) ainsi que des pauses régulières
pour reposer la colonne lombaire (rapport du 26 février
1999).

b) Rendu au terme d'une étude fouillée du dossier mé-
dical de l'assuré et à l'issue de trois examens cliniques
effectués à quelques mois d'intervalle, le rapport du
docteur M.________ remplit toutes les exigences auxquelles
la jurisprudence soumet la valeur probante d'un tel docu-
ment (ATF 125 V 352 ss consid. 3a et 3b/ee) et contraire-
ment à ce que prétend le recourant, il n'existe aucune
raison de s'en écarter.
Dans un certificat médical daté du 18 octobre 1999, le
docteur O.________ a certes fait état d'une «invalidité» de
80 % consécutive à une aggravation de l'état de santé de
l'assuré. A elle seule, cette appréciation ne permet toute-
fois pas de douter du bien-fondé des conclusions auxquelles
est parvenu le docteur M.________. D'une part, l'opinion du
docteur O.________ est insuffisamment motivée et ne fait en
définitive que restituer les plaintes subjectives de son
patient. D'autre part, ce praticien assimile faussement in-
capacité de travail avec invalidité. L'invalidité est en
effet avant tout une notion économique qui ne se confond
pas forcément avec le degré d'incapacité de travail fonc-
tionnelle de l'assuré (art. 18 al. 2 LAA). Du reste, quand
bien même l'état de santé du recourant aurait évolué dans
le sens indiqué par son médecin traitant, cette circonstan-
ce ne serait pas déterminante parce que seul est décisif
l'état de fait existant au moment où la décision litigieuse
a été rendue (ATF 121 V 366 consid. 1d et la référence).
Les faits survenus postérieurement et qui ont modifié la
situation doivent normalement faire l'objet d'une nouvelle
décision administrative (ATF 121 V 366 consid. 1b).
Il y a ainsi lieu de retenir - sans qu'il soit encore
nécessaire de mettre en oeuvre une nouvelle expertise médi-
cale comme le demande le recourant (cf. ATF 124 V 94 con-
sid. 4b, 122 V 162 consid. 1d) - que ce dernier jouit d'une
capacité de travail entière dans une activité adaptée, sous
les réserves décrites par le docteur M.________.

5.- Il reste à examiner si sa capacité de gain rési-
duelle a été correctement déterminée.

a) S'agissant du revenu sans invalidité, on peut s'en
tenir au montant de 5100 fr. fixé par l'intimée, qui s'est
basée sur les données fournies par l'employeur pour l'année
de référence 1998. Le recourant ne conteste d'ailleurs pas
ce montant.

b) Quant au revenu d'invalide, il doit être évalué en
fonction de la situation professionnelle concrète de l'in-
téressé. En l'absence d'un revenu effectivement réalisé, on
peut se référer aux salaires tels qu'ils ressortent des
enquêtes statistiques officielles (ATF 126 V 76 sv con-
sid. 3b/aa et bb).
La mesure dans laquelle les salaires ressortant des
statistiques doivent être réduits, dépend de l'ensemble des
circonstances personnelles et professionnelles du cas par-
ticulier (limitations liées au handicap, âge, années de
service, nationalité/catégorie d'autorisation de séjour et
taux d'occupation) et résulte d'une évaluation dans les
limites du pouvoir d'appréciation. Une déduction globale
maximum de 25 % sur le salaire statistique permet de tenir
compte des différents éléments qui peuvent influencer le
revenu d'une activité lucrative (ATF 126 V 79 sv. con-
sid. 5b/aa.cc).

aa) Dans le cas particulier, la CNA a retenu un revenu
d'invalide de l'ordre de 3200 fr. Pour cela, elle s'est
fondée sur plusieurs descriptions de poste de travail
(DPT), en particulier les DPT nos 780, 823 et 1344 qui se
réfèrent aux emplois respectivement d'aide en atelier,
d'employé au pré-montage et d'opérateur. Ces activités ont
en commun le fait qu'elles sont légères, qu'elles permet-

tent l'alternance des positions assis/debout ainsi que
l'introduction de pauses régulières, et qu'elles n'exigent
pas le port de charges dépassant les 5 kilos. Aussi, doit-
on considérer qu'elles sont, médicalement parlant, tout à
fait à la portée du recourant. Il s'ensuit que le montant
de 3200 fr. - de surcroît inférieur à la stricte moyenne
des salaires de base offerts pour les postes précités -
n'est pas critiquable.

bb) Au demeurant, on n'aboutirait pas à résultat dif-
férent pour le recourant en s'appuyant sur les données éco-
nomiques statistiques. Le salaire de référence est dans ce
cas celui que peuvent prétendre les hommes effectuant des
activités simples et répétitives dans le secteur privé
(valeur centrale), à savoir 4268 fr. par mois (Office fédé-
ral de la statistique, Enquête sur sur la structure des
salaires 1998, TA1 p. 25). Comme les salaires bruts stan-
dardisés tiennent compte d'un horaire de travail de
40 heures, soit une durée hebdomadaire inférieure à la
moyenne usuelle dans les entreprises en 1998 (41,9 heures;
La Vie économique 1999/8, annexe p. 27, Tabelle B9.2), ce
montant doit être fixé à 4470 fr. Or, même si l'on procède
à une réduction de ce salaire à hauteur de 25 % - soit la
déduction globale maximale - pour tenir compte en parti-
culier de l'ensemble des restrictions émises par le docteur
M.________, le revenu d'invalide à prendre en considération
s'élève encore à 3352 fr.

c) Ainsi, que l'on se fonde sur les DPT, comme l'a
fait l'intimée, ou sur les statistiques salariales, le taux
d'invalidité de 40 % retenu par l'assureur-accidents ne
prête pas flanc à la critique.
Le recours se révèle mal fondé.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances

p r o n o n c e :

I. Le recours est rejeté.

II. Il n'est pas perçu de frais de justice.

III. Le présent arrêt sera communiqué au parties, au
Tribunal administratif du canton de Genève et à
l'Office fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 3 avril 2001

Au nom du
Tribunal fédéral des assurances
Le Président de la IIe Chambre :

La Greffière :


Synthèse
Numéro d'arrêt : U.371/99
Date de la décision : 03/04/2001
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2001-04-03;u.371.99 ?
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