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30/03/2001 | SUISSE | N°U.280/00

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 30 mars 2001, U.280/00


«AZA 7»
U 280/00 Mh

IIIe Chambre

composée des Juges fédéraux Schön, Spira et Widmer; Wagner,
Greffier

Arrêt du 30 mars 2001

dans la cause

WINTERTHUR Assurances, General Guisan Strasse 40,
Winterthur, recourante, représentée par Maître Michel
Bergmann, avocat, rue de Hesse 8-10, Genève,

contre

A.________, intimée, représentée par Me Muriel
Pierrehumbert, avocate, avenue de Champel 4, Genève,

et

Tribunal administratif du canton de Genève, Genève

A.- Dans la cause opposant A.________ à la WINTERTHUR
Assurances, le Tribunal fédéral des assurances, par arrêt
du 14 novembre 1995, a ...

«AZA 7»
U 280/00 Mh

IIIe Chambre

composée des Juges fédéraux Schön, Spira et Widmer; Wagner,
Greffier

Arrêt du 30 mars 2001

dans la cause

WINTERTHUR Assurances, General Guisan Strasse 40,
Winterthur, recourante, représentée par Maître Michel
Bergmann, avocat, rue de Hesse 8-10, Genève,

contre

A.________, intimée, représentée par Me Muriel
Pierrehumbert, avocate, avenue de Champel 4, Genève,

et

Tribunal administratif du canton de Genève, Genève

A.- Dans la cause opposant A.________ à la WINTERTHUR
Assurances, le Tribunal fédéral des assurances, par arrêt
du 14 novembre 1995, a annulé le jugement du Tribunal
administratif de la République et canton de Genève, du
21 juin 1994, et la décision sur opposition du 10 août
1993, renvoyé la cause à la WINTERTHUR pour instruction

complémentaire au sens des considérants et nouvelle déci-
sion. Les faits déterminants sont exposés de manière
détaillée dans l'arrêt précité, auquel soit renvoi.

B.- La WINTERTHUR a confié une expertise au docteur
D.________, spécialiste FMH en neurochirurgie. Le 22 no-
vembre 1996, ce praticien a renoncé au mandat.
Sur demande de la WINTERTHUR, le docteur R.________,
spécialiste FMH en psychiatrie-psychothérapie et médecin
répondant du Centre X.________, a accepté de procéder à une
expertise, qu'il a effectuée conjointement avec le docteur
H.________, spécialiste FMH en neurologie et médecin asso-
cié du X.________, et avec la psychologue B.________, éga-
lement du X.________.
A.________ a été examinée le 13 mai 1997 par le
docteur R.________ et la psychologue B.________ et le
17 juin 1997 par le docteur H.________. Sur requête du neu-
rologue, les médecins de l'Institut Y.________ ont procédé
le 23 juin 1997 à des radiographies de la colonne cervi-
cale, y compris des clichés fonctionnels en flexion et
extension, ainsi qu'à une imagerie par résonance magnétique
(IRM) cervicale. Ils ont conclu à des troubles statiques et
fonctionnels du rachis cervical, à un discret pincement de
C4-C5 et à une discopathie C5-C6. Ils indiquaient que des
lésions ligamentaires n'étaient pas évidentes sur l'examen
IRM, notamment que le ligament transverse était intact et
qu'il n'y avait pas d'instabilité vertébrale aux manoeuvres
fonctionnelles.
Selon un rapport des docteurs R.________ et H.________
et de la psychologue B.________, du 22 septembre 1997,
A.________ présente un status après probable distorsion
cervicale simple lors de l'accident du 26 novembre 1990 et
un status après possible distorsion cervicale simple et
contusion faciale lors de l'accident du 5 septembre 1991,
des troubles neurologiques multiples fonctionnels sans

évidence de lésions structurelles sous-jacentes, un syn-
drome fibromyalgique diffus et un processus de revendica-
tion dans le cadre d'une pathologie du caractère, non
compliante. Aussi bien sur le plan somatique que psycholo-
gique, il n'y a pas d'incapacité de travail en relation de
causalité naturelle avec les différents accidents dont elle
a été victime.
Par décision du 10 mars 1998, la WINTERTHUR a refusé
d'entrer en matière sur une demande de contre-expertise ou
d'examen complémentaire présentée par l'assurée et nié
depuis le 1er juin 1992 tout lien de causalité entre les
événements des 26 novembre 1990 et 5 septembre 1991 et
l'atteinte à sa santé. Mettant un terme le 31 mai 1992 au
versement des indemnités journalières en cas d'incapacité
de travail et à la prise en charge des frais médicaux, elle
a refusé toute rente d'invalidité, mais accepté d'allouer à
A.________ une indemnité pour atteinte à l'intégrité physi-
que de 9720 fr.
L'assurée a formé opposition contre cette décision.
Par décision du 29 janvier 1999, la WINTERTHUR a rejeté
l'opposition et réformé la décision attaquée en défaveur
de A.________ en ce sens qu'elle n'avait pas droit à une
indemnité pour atteinte à l'intégrité.

C.- Par jugement du 23 mai 2000, le Tribunal adminis-
tratif de la République et canton de Genève a admis le re-
cours formé par A.________ contre cette décision, annulé
celle-ci et renvoyé la cause à la WINTERTHUR pour qu'elle
procède à une instruction complémentaire au sens des con-
sidérants.

D.- La WINTERTHUR interjette recours de droit adminis-
tratif contre ce jugement, en concluant, sous suite de dé-
pens, à l'annulation de celui-ci.
A.________ conclut, sous suite de dépens, au rejet du
recours, ce que propose également la CONCORDIA, assureur-
maladie de celle-ci.

Considérant en droit :

1.- a) Les premiers juges ont retenu les griefs d'or-
dre formel soulevés par l'intimée. Selon eux, les docteurs
R.________ et H.________ et la psychologue B.________ n'ont
pas été choisis dans des conditions lui permettant de faire
valoir ses droits de partie. Au contraire, elle aurait dû
être associée au libellé des questions et se voir offrir la
faculté de faire valoir, le cas échéant, des motifs de ré-
cusation à l'égard des médecins ou d'autres personnes que
l'assureur entendait désigner. La cause a été renvoyée à la
recourante pour qu'elle commette un nouvel expert, dont la
mission consiste à répondre aux questions complémentaires
formulées par le tribunal administratif.

b) La recourante conteste ce qui précède. Elle fait
valoir pour l'essentiel que l'expertise du 27 (recte : 22)
septembre 1997 a pleine valeur probante et qu'elle répond à
toutes les questions posées par la Cour de céans dans l'ar-
rêt du 14 novembre 1995.

2.- Le Tribunal fédéral des assurances est, au même
titre que la juridiction cantonale et les parties, lié par
les considérants de son arrêt du 14 novembre 1995 auxquels
renvoie le dispositif (ATF 117 V 241 consid. 2a et les
références; RAMA 1999 n° U 331 p. 127 consid. 2).

3.- a) Dans le domaine de l'assurance-accidents obli-
gatoire régi par la loi fédérale du 20 mars 1981 (LAA), le
Tribunal fédéral des assurances a jugé que, cette loi ne
contenant pas de normes relatives à l'administration des
preuves ou au droit des parties de collaborer à l'instruc-
tion de leur cause, il fallait s'en remettre aux règles de
la loi fédérale sur la procédure administrative (PA) qui
s'appliquent non seulement à la Caisse nationale suisse
d'assurance en cas d'accidents (CNA), mais également, par

analogie et avec la même rigueur (ATF 120 V 361 sv. con-
sid. 1c) aux assureurs privés autorisés à pratiquer l'as-
surance-accidents obligatoire à teneur de l'art. 68 al. 1
LAA (ATF 125 V 353 consid. 3b/bb; Roger Peter, Der Sach-
verständige im Verwaltungsverfahren der obligatorischen
Unfallversicherung, thèse Bâle 1999, pp. 4 ss).
Aux termes de l'art. 19 PA, les art. 37, 39 à 41 et
43 à 61 de la procédure civile fédérale (PCF) sont appli-
cables par analogie à la procédure probatoire. Lorsqu'il
ordonne une expertise, l'assureur-accidents doit donc s'en
tenir à la procédure prévue aux art. 57 ss PCF, veillant
ainsi à ce que les parties puissent collaborer à l'adminis-
tration des preuves (RAMA 1993 n° U 167 p. 96 consid. 5b).
C'est ainsi que l'assureur doit donner à l'assuré l'occa-
sion de s'exprimer sur le libellé des questions à poser à
l'expert et de proposer des modifications et des adjonc-
tions (art. 57 al. 2 PCF). Au surplus, il doit lui laisser
la possibilité de présenter des objections à l'encontre des
personnes qu'il se propose de désigner comme experts
(art. 58 al. 2 PCF). Enfin, l'assuré doit avoir la faculté
de requérir des éclaircissements et des compléments ou une
nouvelle expertise (art. 60 al. 1 in fine PCF; ATF
125 V 335 consid. 3a et les arrêts cités). Le droit d'une
partie de se déterminer sur un rapport d'expertise découle,
du reste, de son droit d'être entendue (ATF 120 V 362 con-
sid. 1c; RAMA 1999 n° U 350 p. 480; Spira, La preuve en
droit des assurances sociales, Mélanges en l'honneur de
Henri-Robert Schüpbach, Bâle 2000, p. 269).

b) En l'espèce, l'intimée a été informée par l'assu-
reur du choix de l'expert et sa mandataire a eu la possi-
bilité de faire valoir ses objections à l'encontre de
celui-ci dans sa prise de position du 20 décembre 1996.
L'art. 58 al. 2 PCF, applicable par analogie, n'en exige
pas plus (ATF 125 V 335 ss consid. 3a et b; RAMA 2000
n° U 369 p. 104 consid. 2b).

Par lettre du 13 janvier 1997, l'assureur a informé
l'intimée que le docteur R.________ s'était adjoint les
services du neurologue H.________ pour effectuer l'exper-
tise. Lui remettant le questionnaire destiné au docteur
R.________, il lui laissait toute latitude pour poser à
l'expert ses propres questions. Dans sa réponse du 31 jan-
vier 1997, l'intimée a demandé que l'expertise soit dirigée
par un spécialiste en neurochirurgie ou neurologie et que
l'expert indique, avant de répondre aux questions 2 et 3
posées par l'assureur au docteur R.________, quels sont ses
constatations et diagnostics par rapport aux questions
posées par le Tribunal fédéral des assurances au consid. 3
de l'arrêt du 14 novembre 1995. Là encore, l'art. 57 al. 2
PCF, applicable par analogie, a été respecté.
Enfin, toujours par l'intermédiaire de sa mandataire,
l'intimée a pu présenter le 15 décembre 1997 des observa-
tions et donc requérir des éclaircissements et des complé-
ments sur le rapport des experts du 22 septembre 1997,
conformément à la règle prévue à l'art. 60 al. 1 in fine
PCF (ATF 120 V 361 ss consid. 1b et c; RAMA 2000 n° U 369
p. 104 consid. 2b déjà cité).
Dès lors, on ne peut pas suivre les premiers juges ni
l'intimée lorsqu'ils contestent la régularité de la procé-
dure ordonnée par la recourante à la suite de l'arrêt du
Tribunal fédéral des assurances du 14 novembre 1995.

4.- Sur le fond, il apparaît, contrairement à l'avis
des premiers juges, qu'il n'y a aucune raison de commettre
un nouvel expert et de renvoyer le dossier de la cause, à
cette fin, à la recourante. Cela contreviendrait aux prin-
cipes de célérité et d'économie de la procédure (ATF
126 V 249 consid. 4a).
En réalité, ce sont les juges cantonaux eux-mêmes qui
auraient dû, s'ils l'estimaient nécessaire, compléter
l'instruction en posant aux experts les questions qu'ils
entendaient voir élucider. Il n'y a toutefois pas lieu de

leur renvoyer encore une fois le dossier à cette fin. En
effet, le rapport d'expertise circonstancié du 22 septembre
1997 répond clairement et de manière complète aux questions
laissées ouvertes dans l'arrêt du 14 novembre 1995 et per-
met d'exclure l'existence d'un rapport de causalité natu-
relle entre les troubles somatiques et psychiques de l'in-
timée et les accidents des 26 novembre 1990 et 5 septembre
1991.
Il en résulte que le recours est bien fondé et que le
jugement attaqué doit être purement et simplement annulé.

5.- La recourante, représentée par un avocat, obtient
gain de cause. Elle ne saurait, toutefois, prétendre une
indemnité de dépens pour l'instance fédérale. En effet, les
autorités et les organisations chargées de tâches de droit
public n'ont en principe pas droit à des dépens lors-
qu'elles obtiennent gain de cause (art. 159 al. 2 en corré-
lation avec l'art. 135 OJ). Comptent au nombre des organi-
sations chargées de tâches de droit public notamment la
CNA, les autres assureurs-accidents, les caisses-maladie et
les caisses de pension (consid. 6 de l'ATF 120 V 352).
Exceptionnellement des dépens peuvent être alloués lors-
qu'en raison de la particularité ou de la difficulté du
cas, le recours à un avocat indépendant était nécessaire
(ATF 119 V 456 consid. 6b; RAMA 1995 no K 955 p. 6). Tel
n'est pas le cas en l'espèce.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances

p r o n o n c e :

I. Le recours est admis et le jugement du Tribunal admi-
nistratif de la République et canton de Genève, du
23 mai 2000, est annulé.

II. Il n'est pas perçu de frais de justice ni alloué de
dépens.

III. Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au
Tribunal administratif de la République et canton de
Genève, à la CONCORDIA et à l'Office fédéral des
assurances sociales.

Lucerne, le 30 mars 2001

Au nom du
Tribunal fédéral des assurances
Le Président de la IIIe Chambre :

Le Greffier :


Synthèse
Numéro d'arrêt : U.280/00
Date de la décision : 30/03/2001
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2001-03-30;u.280.00 ?
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