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23/03/2001 | SUISSE | N°6S.778/2000

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 23 mars 2001, 6S.778/2000


«/2»
6S.778/2000/ROD

C O U R D E C A S S A T I O N P E N A L E
*************************************************

23 mars 2001

Composition de la Cour: M. Schubarth, Président,
MM. Schneider et Kolly, Juges. Greffière: Mme Revey.

Statuant sur le pourvoi en nullité
formé par

M.________, représenté par Me Christian Favre, avocat à
Lausanne,

contre

le jugement rendu le 19 juillet 2000 par la Cour d'appel
pénale II du Tribunal cantonal valaisan, dans la cause qui
oppose le

recourant au Ministère public du V a l a i s
c e n t r a l;

(art. 22 al. 1, 41, 55, 63 et 111 CP: délit manqué...

«/2»
6S.778/2000/ROD

C O U R D E C A S S A T I O N P E N A L E
*************************************************

23 mars 2001

Composition de la Cour: M. Schubarth, Président,
MM. Schneider et Kolly, Juges. Greffière: Mme Revey.

Statuant sur le pourvoi en nullité
formé par

M.________, représenté par Me Christian Favre, avocat à
Lausanne,

contre

le jugement rendu le 19 juillet 2000 par la Cour d'appel
pénale II du Tribunal cantonal valaisan, dans la cause qui
oppose le recourant au Ministère public du V a l a i s
c e n t r a l;

(art. 22 al. 1, 41, 55, 63 et 111 CP: délit manqué de
meurtre par dol éventuel; fixation de la peine;
sursis à l'expulsion)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- M.________, ressortissant de l'ex-
Yougoslavie né en 1963, a été condamné le 31 mai 1999 par
le Tribunal du IIe arrondissement pour le district de
Sion à sept ans de réclusion et à l'expulsion du terri-
toire suisse pendant quinze ans, pour délit manqué de
meurtre, homicide par négligence, lésions corporelles par
négligence, mise en danger de la vie d'autrui, utilisa-
tion frauduleuse d'un ordinateur, recel et violation de
l'art. 33 al. 1 let. a de la loi fédérale sur les armes.

B.- Statuant le 19 juillet 2000, la Cour d'appel
pénale II du Tribunal cantonal valaisan a partiellement
admis l'appel formé par l'intéressé contre ce prononcé,
au sens où elle a réduit la peine à cinq ans et demi de
réclusion, compte tenu notamment d'une expertise psy-
chiatrique ordonnée entre-temps.

S'agissant du délit manqué de meurtre, le Tribunal
cantonal a constaté en substance les faits suivants:

M.________ nourrissait à l'encontre de G.________
une profonde rancune, notamment parce que celui-ci ne
l'avait pas défendu lors d'une bagarre survenue le 18
mars 1997 au Centre F.________ à Sion, où se retrouvaient
des ressortissants de l'ex-Yougoslavie. Après cette
altercation, l'intéressé s'était du reste senti menacé et
s'était procuré un pistolet qu'il portait sur lui chaque
fois qu'il se rendait au Centre précité.

Le soir du 6 avril 1997, remarquant la voiture
de G.________ parquée devant le Centre précité,

M.________ a décidé de discuter avec lui. Voulant
disposer, à ses dires, d'un moyen de défense s'il se
trouvait en état d'infériorité, il a glissé dans sa
ceinture le pistolet qu'il avait chargé de neuf balles,
l'une d'elles étant engagée dans le canon. Le chien
n'étant toutefois armé qu'à moitié, un coup nécessitait
une pression relativement importante (5 kg).

L'intéressé a requis un tiers d'appeler G.________,
mais celui-ci ne s'est pas déplacé. M.________ l'a alors
rejoint à l'étage de l'établissement, passablement
fréquenté, où il était attablé en compagnie de trois
compatriotes, et lui a ordonné de l'accompagner dehors.
G.________ ayant refusé, M.________ l'a tiré par le bras,
le faisant chuter au sol, puis a lancé son pied contre sa
tête. G.________ a esquivé le coup et s'est relevé. Tous
deux se sont empoignés et l'intéressé a sorti son pisto-
let. Un premier coup est parti alors que M.________ frap-
pait la tête de G.________ avec le dessus de la crosse de
l'arme. L'intéressé a toutefois continué à frapper de la
même manière. Durant la lutte, l'arme s'est trouvée
pointée en direction du visage de G.________, qui a vu le
trou noir du canon. Une deuxième balle a été tirée, puis
une troisième qui a touché le poignet d'un client avant
de traverser le torse d'un autre homme. L'annonce de
cette dernière lésion, dont la victime est décédée peu
après, a mis fin à la bagarre. G.________ a subi des
plaies superficielles et des ecchymoses.

Le Tribunal cantonal a constaté par ailleurs que
les coups de feu ne pouvaient résulter des chocs de la
crosse sur la tête de G.________, de sorte que, durant la
lutte, M.________ tenait le doigt sur la gâchette. En
outre, l'arme ne pouvant tirer en rafale, force était de
retenir que l'intéressé avait pressé la détente à chaque
coup, étant précisé qu'une fois la première balle tirée,

le mécanisme automatique armait complètement le chien, si
bien qu'une pression de 1.5 kg suffisait à faire feu.

C.- Agissant par la voie du pourvoi en nullité,
M.________ demande au Tribunal fédéral d'annuler le
jugement du 19 juillet 2000 du Tribunal cantonal et de
renvoyer la cause à cette autorité pour nouvelle ins-
truction et nouvelle décision dans le sens des consi-
dérants. Il conteste s'être rendu coupable de délit
manqué de meurtre par dol éventuel, soutient que la peine
infligée est excessivement sévère et affirme enfin que
l'expulsion doit être assortie du sursis.

D.- Il n'a pas été requis d'observations.

C o n s i d é r a n t e n d r o i t :

1.- Saisi d'un pourvoi en nullité, le Tribunal
fédéral est lié par les constatations de fait contenues
dans la décision attaquée (art. 277bis al. 1 PPF). L'ap-
préciation des preuves et les constatations de fait qui
en découlent ne peuvent pas faire l'objet d'un pourvoi en
nullité, sous réserve de la rectification d'une inadver-
tance manifeste. Le recourant ne peut pas présenter de
griefs contre des constatations de fait, ni de faits ou
de moyens de preuve nouveaux (art. 273 al. 1 let. b PPF).
Dans la mesure où il présenterait un état de fait qui
s'écarte de celui contenu dans la décision attaquée, il
ne serait pas possible d'en tenir compte. Autrement dit,
le raisonnement juridique doit être mené exclusivement
sur la base de l'état de fait retenu par l'autorité

cantonale (ATF 126 IV 65 consid. 1; 124 IV 81 consid. 2a,
92 consid. 1 et les arrêts cités).

Le pourvoi en nullité, qui a un caractère cassa-
toire (art. 277ter al. 1 PPF), ne peut être formé que
pour violation du droit fédéral et non pour violation
directe d'un droit de rang constitutionnel (art. 269
PPF).

La Cour de cassation n'est pas liée par les motifs
invoqués, mais elle ne peut aller au-delà des conclusions
du recourant (art. 277bis PPF), lesquelles doivent être
interprétées à la lumière de leur motivation (ATF 126 IV
65 consid. 1; 124 IV 53 consid. 1; 123 IV 125 consid. 1).

2.- Le recourant conteste en premier lieu s'être
rendu coupable de délit manqué de meurtre par dol éven-
tuel sur G.________.

a) Selon l'autorité intimée, le recourant est entré
au Centre F.________ muni d'un pistolet chargé, qu'il
entendait utiliser au cas où la situation tournerait en
sa défaveur. Il ne pouvait ignorer que son arme était
prête à tirer moyennant une pression de 5 kg. Ce no-
nobstant, il s'est battu avec G.________ en tenant l'arme
à la main, le doigt sur la gâchette, en sachant ainsi
qu'à tout instant ce doigt pouvait presser la détente et
une balle atteindre son adversaire dans le corps à corps
engagé. En adoptant ce comportement - dont il ne pouvait
ignorer l'extrême dangerosité - le recourant a pris en
compte qu'il pouvait tuer G.________ et accepté ce
résultat. A supposer que la conscience du risque créé par
l'usage qu'il faisait de l'arme n'ait pas été pleine et
entière, elle le serait forcément devenue au premier coup

de feu, renforçant par-là même son acceptation de la
réalisation très probable du risque.

En conséquence, toujours selon le Tribunal canto-
nal, le recourant a commis un meurtre par dol éventuel
(art. 111 CP). Toutefois, dès lors que G.________ n'a pas
été atteint par une balle en raison de circonstances
indépendantes de la volonté du recourant, il convient
d'appliquer l'art. 22 al. 1 CP réprimant le délit manqué.

b) De son côté, le recourant affirme n'avoir commis
à l'encontre de G.________ qu'une mise en danger de la
vie d'autrui (art. 129 CP) et des lésions corporelles
(art. 122 ss CP).

Sous l'angle juridique, le recourant soutient que
le droit pénal suisse ne connaît pas la figure du délit
manqué par dol éventuel. Il paraît extrêmement difficile,
au plan intellectuel, de concevoir que l'auteur a envisa-
gé le résultat dommageable (la mort de son adversaire),
qu'il a agi néanmoins en s'accommodant de ce résultat
s'il se produisait (dol éventuel), qu'il est allé jus-
qu'au bout de son activité coupable sans que ce résultat
ne survienne (délit manqué) et qu'il doive être puni pour
un résultat non voulu comme tel et qui ne s'est pas pro-
duit. Un tel raisonnement est insoutenable, car il re-
vient à sanctionner tous les résultats possibles d'un
acte, que le cours des événements a néanmoins exclu. En
conséquence, toujours selon le recourant, les actes qui
lui sont reprochés quant à G.________ sont saisis par les
qualifications de mise en danger de la vie d'autrui et de
lésions corporelles uniquement.

S'agissant des faits, le recourant conteste avoir
envisagé et accepté que G.________ ait pu être mor-
tellement atteint. Jusqu'à l'instant où il l'a saisi par

le bras, le risque d'une bagarre et d'une issue mortelle
n'était qu'une hypothèse parmi d'autres. Ce n'est que
dans la lutte, sous l'attaque de G.________, qu'il a
choisi de se défendre en prenant son arme et en le frap-
pant sur la tête avec la crosse. Toutefois, rien dans
l'état de fait n'autorise à retenir qu'il ait voulu sa
mort, même à ce moment-là, fût-ce à titre de dol éven-
tuel. Sa seule intention était de se défendre et de maî-
triser son adversaire. Il n'a du reste jamais tiré sur
lui.

c) aa) Selon la jurisprudence, il y a dol éventuel
lorsque l'auteur envisage le résultat dommageable, mais
agit néanmoins, même s'il ne le souhaite pas, parce qu'il
s'en accommode pour le cas où il se produirait (ATF 125
IV 242 consid. 3c; 123 IV 155 consid. 1a, 202 consid. 4c;
121 IV 249 consid. 3a).

La jurisprudence a répété à plusieurs reprises,
avec la doctrine, que l'équivalence des deux formes de
dol - direct et éventuel - vaut également par rapport à
la tentative, et cela pour toutes les formes de tentative
(ATF 122 IV 246 consid. 3a; 120 IV 17 consid. 2c, 199
consid. 3e; 112 IV 65 consid. 3b; ATF du 7 mars 2000
publié in SJ 2000 I 358, consid. 4; Stefan Trechsel/Peter
Noll, Schweizerisches Strafrecht, Allg. Teil I, 5e éd.,
Zurich 1998, p. 169; Günter Stratenwerth, Allg. Teil. I,
2e éd., Berne 1996, § 12 n° 20; voir aussi Monika
Kölz-Ott, Eventualvorsatz und Versuch, thèse Zurich 1974,
p. 98 ss), y compris le délit manqué.

Du reste, la jurisprudence a déjà eu l'occasion de
sanctionner un délit manqué de meurtre par dol éventuel
(ATF 103 IV 65 consid. I2; Favre/Pellet/Stoudmann, Code
pénal annoté, Lausanne 1997, nos 1.1 et 1.2 ad art. 111;
voir également les arrêts de la Cour d'assises zurichoise

exposés par Philipp Maier/Rolf Schöning, Bermerkungen zur
bundesgerichtlichen Rechtsprechung zum Eventualvorsatz,
RPS 2000 p. 270 ss, spéc. p. 280 et 282).

En particulier, contrairement à ce que soutient le
recourant, le délit manqué par dol éventuel n'équivaut
pas à punir un auteur pour un "résultat non voulu comme
tel et qui ne s'est pas produit", et ne revient pas da-
vantage à "sanctionner tous les résultats possibles d'un
acte mais que le cours des événements a exclu". En effet,
pour qu'un acte réalise une infraction par dol éventuel,
il faut non seulement qu'il existe un risque qu'un dom-
mage puisse en résulter, mais encore que l'auteur sache
que ce danger existe (Wissensmoment) et qu'il s'accommode
de ce résultat (Willensmoment) même s'il préfère l'évi-
ter, étant encore précisé que seule la négligence peut
entrer en ligne de compte s'il le refuse consciemment
(cf. la distinction entre dol éventuel et négligence
consciente, ATF 125 IV 242 consid. 3c; 119 IV 1 consid.
5a; ATF du 11 novembre 1987 publié in SJ 1988 401,
consid. 4b).

Par ailleurs, le délit manqué de meurtre par dol
éventuel se distingue de la mise en danger de la vie
d'autrui (art. 129 CP) au sens où, dans la seconde hypo-
thèse, l'auteur adopte volontairement un comportement qui
crée un danger de mort imminent pour autrui, mais refuse,
même à titre éventuel, la réalisation de ce risque (ATF
107 IV 163 consid. 3; Bernard Corboz, Les principales
infractions, vol. II, Berne 1999, n° 26 ad art. 129 CP).

bb) Ce que l'auteur savait, voulait ou ce dont il
s'accommodait relève du contenu de la pensée, soit de
faits "internes" qui, en tant que faits, ne peuvent en
principe pas être revus dans le cadre d'un pourvoi en
nullité (art. 273 al. 1 let. b et 277bis PPF), même si

l'autorité cantonale s'est prononcée à cet égard, en
l'absence d'aveux de l'auteur, en se fondant sur des
éléments extérieurs révélateurs (ATF 125 IV 242 consid.
3c). Toutefois, la question de savoir si les éléments
extérieurs retenus en tant que révélateurs du contenu de
la conscience et de la volonté, autorisent à admettre que
l'auteur a agi par dol éventuel, relève du droit. Ainsi,
lorsque l'autorité cantonale a déduit l'élément subjectif
du dol éventuel sur la base d'éléments extérieurs, faute
d'aveux de l'auteur, les questions de fait et de droit se
chevauchent sur certains points. Le Tribunal fédéral peut
dès lors revoir, dans une certaine mesure, si ces élé-
ments extérieurs ont été correctement appréciés au regard
de la notion juridique du dol éventuel. En conséquence,
le juge doit exposer ces éléments extérieurs le plus
exhaustivement possible, afin que l'on puisse discerner
ce qui l'a conduit à retenir que l'auteur a envisagé le
résultat dommageable et s'en est accommodé (cf. ATF 125
IV 242 consid. 3c; 121 IV 249 consid. 3a/aa; Martin
Schubarth, Einheitsbeschwerde, PJA 1992 p. 849 ss, spéc.
p. 851 s.).

Parmi les éléments extérieurs permettant de con-
clure que l'auteur s'est accommodé du résultat domma-
geable pour le cas où il se produirait figure notamment

la probabilité (connue par l'auteur) de la réalisation du
risque et l'importance de la violation du devoir de pru-
dence. Plus celles-ci sont grandes, plus sera fondée la
conclusion que l'auteur, malgré d'éventuelles dénéga-
tions, avait accepté l'éventualité de la réalisation du
résultat dommageable (ATF 119 IV 1 consid. 5a; voir aussi
ATF 109 IV 137 consid. 2b; plus récemment ATF 125 IV 242
consid. 3c in fine et 121 IV 249 consid. 3a/aa). Peuvent
également constituer des éléments extérieurs révélateurs
les mobiles de l'auteur et la manière dont il a agi (ATF
125 IV 242 consid. 3c in fine).

En l'occurrence, il n'est pas contesté que le re-
courant s'est rendu à la rencontre de G.________ muni
d'un pistolet contenant neuf balles, dont l'une dans le
canon, le chien à moitié armé, en sachant à la fois qu'il
allait au devant d'une discussion litigieuse et qu'une
pression de 5 kg suffisait à lâcher un coup. Ce faisant,
il ne pouvait ignorer que ce comportement créait déjà un
risque pour la vie de G.________. Il a encore accru ce
danger en effectuant lui-même, selon les constatations de
fait du Tribunal cantonal qui lient le Tribunal fédéral,
le geste de violence qui a déclenché le corps à corps,
puis en sortant son arme et en l'utilisant pour frapper
G.________ avec la crosse, le doigt sur la détente. De
plus, il ne s'est nullement arrêté lorsque le premier
coup est parti, ce qui armait complètement le chien et
augmentait encore la probabilité de tirs supplémentaires.
Enfin, l'arme s'est trouvée au cours de la lutte pointée
vers le visage de G.________ si près que celui-ci "a vu
le trou noir du canon" (cf. ATF 121 IV 67 consid. 2
concernant le danger créé par une arme à feu).

Dans ces conditions, tant la probabilité de la
réalisation du risque que l'imprévoyance coupable étaient
extrêmement élevées, ce qui constitue déjà des indices
déterminants que le recourant avait envisagé et accepté
la possibilité que G.________ soit mortellement atteint.
A cela s'ajoute encore que le recourant nourrissait une
profonde rancune envers lui.

Force est ainsi de conclure que le recourant n'en-
tendait pas se limiter à créer un danger de mort imminent
pour G.________ (cf. art. 129 CP), ni à lui causer des
lésions corporelles (cf. art. 122 ss CP), mais qu'il
avait envisagé et accepté la possibilité que G.________
soit tué, si ce n'est déjà en montant à l'étage, en tout
cas après le premier coup de feu.

Peu importe à cet égard que, comme le soutient le
recourant, la possibilité d'une bagarre et d'une issue
mortelle ne fût qu'une hypothèse parmi d'autres quand il
est monté à l'étage, dès lors qu'il n'a pas refusé, en
tout cas par la suite, la réalisation d'un risque fatal.
Il n'est pas davantage déterminant qu'il n'ait initiale-
ment pas voulu se venger, cas échéant, mais uniquement se
défendre au mieux.

3.- Le recourant soutient ensuite que la quotité
de la peine est exagérément sévère. A l'appui, il se
réfère aux "résultats de l'expertise psychiatrique", aux
"renseignements favorables" recueillis sur son compte, à
sa réaction de détresse après les actes, et au fait qu'il
n'a pas voulu le décès du client mortellement atteint.

a) Tout en exigeant que la peine soit fondée sur la
faute, l'art. 63 CP n'énonce pas de manière détaillée et
exhaustive les éléments qui doivent être pris en considé-
ration, ni les conséquences exactes qu'il faut en tirer
quant à la fixation de la peine; cette disposition
confère donc au juge un large pouvoir d'appréciation. Les
éléments pertinents pour la fixation de la peine ont été
exposés de manière détaillée dans les ATF 117 IV 112
consid. 1 et 116 IV 288 consid. 2a, auxquels il suffit de
se référer.

Même s'il est vrai que la Cour de cassation examine
librement s'il y a eu violation du droit fédéral, elle ne
peut admettre un pourvoi en nullité portant sur la quoti-
té de la peine, compte tenu du pouvoir d'appréciation
reconnu en cette matière à l'autorité cantonale, que si
la sanction a été fixée en dehors du cadre légal, si elle
est fondée sur des critères étrangers à l'art. 63 CP, si
les éléments d'appréciation prévus par cette disposition

n'ont pas été pris en compte ou enfin si la peine appa-
raît exagérément sévère ou clémente au point que l'on
doive parler d'un abus du pouvoir d'appréciation (ATF 124
IV 286 consid. 4a; 123 IV 49 consid. 2a, 150 consid. 2a;
122 IV 156 consid. 3b, 241 consid. 1a, 299 consid. 2a).

b) En l'occurrence, le Tribunal cantonal a retenu
en substance que les fautes commises par le recourant
étaient extrêmement graves. Pour assouvir sa vengeance
envers G.________, contre lequel il élevait des reproches
sans grande importance, il n'avait pas hésité à mettre en
danger la vie de plusieurs personnes, provoquant la mort
d'une d'entre elles et blessant deux autres. Il était
parfaitement calme au moment des actes. Ce mépris total
pour la vie humaine révélait une personnalité sans
scrupule. Sa malhonnêteté était encore dénotée par le
recel de valeurs et l'utilisation de cartes bancaires
volées. Par la suite, il s'était montré abattu par le
décès survenu, voire la blessure infligée au tiers, mais
il n'avait jamais regretté vraiment ce qu'il avait fait
subir à G.________ ni aux autres personnes présentes à
l'étage du Centre. Il n'avait pas davantage manifesté de
véritable repentir par un geste concret envers les
victimes. Ses antécédents n'étaient
au demeurant pas mauvais.

S'agissant de la responsabilité pénale, le Tribunal
cantonal a retenu que, selon les experts, le recourant
présentait un développement mental incomplet au moment
des faits, en raison d'un trouble de la personnalité
paranoïaque, ce qui impliquait une diminution légère de
la faculté de se déterminer d'après l'appréciation du
caractère illicite de l'acte. La Cour se ralliait ainsi
aux constatations des experts qui chiffraient à quelque
25 % la diminution de la responsabilité.

En conclusion, le Tribunal cantonal a retenu qu'une
peine de base de sept ans, réduite à cinq ans et demi
compte tenu de la responsabilité diminuée, apparaissait
adéquate.

Il ressort de ce qui précède que l'autorité intimée
ne s'est pas laissée guider par des critères étrangers à
l'art. 63 CP, pas plus qu'elle n'a omis des éléments im-
portants. Enfin, elle n'a pas davantage abusé de son pou-
voir d'appréciation en fixant la quotité de la mesure.
Une peine de base de sept ans ne punit pas excessivement
sévèrement celui qui entre dans un établissement public
fréquenté muni d'un pistolet chargé et au chien partiel-
lement armé, en sachant qu'il va au devant d'une discus-
sion litigieuse, puis qui provoque lui-même une bagarre,
au cours de laquelle il tire trois fois de suite, ce qui
met les clients en danger de mort imminent, blesse l'un
d'entre eux et en tue un autre.

En particulier, l'autorité intimée n'a pas violé le
droit fédéral en retenant que la douleur du recourant
après les actes n'équivalait pas à un repentir sincère,
ni en estimant la diminution de responsabilité à 25%.
Enfin, elle ne pouvait tenir compte dans la fixation de
la peine du fait que le recourant n'a pas voulu causer le
décès d'un tiers, dès lors qu'elle a déjà pris cet élé-
ment en compte en qualifiant cette infraction d'homicide
par négligence, et non de meurtre.

4.- Enfin, le recourant fait grief à l'autorité
cantonale d'avoir refusé d'assortir l'expulsion du sur-
sis.

a) Selon l'art. 55 al. 1 CP, le juge peut expulser
du territoire suisse, pour une durée de 3 à 15 ans, tout

étranger condamné à la réclusion ou à l'emprisonnement.
Il dispose d'un large pouvoir d'appréciation et ne viole
le droit fédéral que s'il ne fonde pas sa décision sur
les critères pertinents ou s'il abuse de son pouvoir
d'appréciation en prenant une décision exagérément sévère
ou clémente (ATF 123 IV 107 consid. 1 in fine; 104 IV 222
consid. 1b).

Selon l'art. 41 ch. 1 al. 1 CP, le juge peut sus-
pendre l'exécution de l'expulsion, si les antécédents et
le caractère du condamné font prévoir que cette mesure le
détournera de commettre d'autres crimes ou délits. L'oc-
troi ou le refus du sursis à l'expulsion dépend exclusi-
vement du pronostic relatif au comportement futur du
condamné en Suisse; peu importe en revanche de savoir si
les chances de resocialisation sont meilleures en Suisse
ou dans son pays d'origine. Pour décider si le sursis
serait de nature à détourner l'accusé de commettre de
nouvelles infractions, l'autorité cantonale doit se
livrer à une appréciation d'ensemble. Elle doit tenir
compte des circonstances de l'infraction, des antécédents
de l'auteur et de tous les autres éléments propres à
éclairer l'ensemble du caractère de l'accusé et ses
chances d'amendement. Il est contraire au droit fédéral
d'accorder un poids particulier à certaines circonstances
visées par l'art. 41 CP, et de négliger ou d'omettre
d'autres critères pertinents (ATF 123 IV 107 consid. 4a).

En cette matière, le juge dispose d'un large pou-
voir d'appréciation, de sorte que la Cour de cassation ne
peut intervenir, en considérant le droit fédéral comme
violé, que si la décision attaquée ne repose pas sur les
critères légaux ou si elle apparaît exagérément sévère ou
clémente, au point que l'on doive parler d'un abus du
pouvoir d'appréciation (ATF 119 IV 195 consid. 3b; 117 IV
3 consid. 2b).

b) En l'occurrence, le Tribunal cantonal a prononcé
l'expulsion du recourant pendant quinze ans en relevant,
d'une manière qui lie le Tribunal fédéral, que le recou-
rant n'était pas intégré en Suisse, bien qu'il y séjourne
depuis 1987-1988. Par ailleurs, le lien avec son épouse
vivant en Suisse était pour le moins distendu, puisque
les conjoints étaient séparés de fait depuis plus de
quatre ans. En outre, sa conscience morale peu développée
et les risques réels d'une récidive s'opposaient à l'oc-
troi du sursis.

c) Le recourant ne conteste nullement ces éléments,
mais souligne qu'il reste marié à une personne vivant en
Suisse et qu'il a travaillé régulièrement jusqu'à ce que
la maladie l'en empêche.

Toutefois, dès lors qu'il est démontré qu'un pro-
nostic favorable ne peut être posé, l'autorité cantonale
n'a nullement abusé de son pouvoir d'appréciation en
refusant le sursis, d'autant que le recourant est séparé
de son épouse et ne fait valoir aucun autre lien parti-
culier avec la Suisse.

5.- Vu ce qui précède, le pourvoi en nullité est
mal fondé et doit être rejeté. Succombant, le recourant
doit supporter les frais judiciaires (art. 278 al. 1
aPPF). Il n'y a toutefois pas lieu d'allouer des dépens à
l'autorité qui obtient gain de cause (art. 159 al. 2 OJ).

Par ces motifs,

l e T r i b u n a l f é d é r a l ,

1. Rejette le pourvoi.

2. Met un émolument judiciaire de 2'000 fr. à la
charge du recourant.

3. Communique le présent arrêt en copie au manda-
taire du recourant, au Ministère public du Valais central
ainsi qu'à la Cour d'appel pénale II du Tribunal cantonal
valaisan.
__________

Lausanne, le 23 mars 2001

Au nom de la Cour de cassation pénale
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
Le Président,

La Greffière,


Synthèse
Numéro d'arrêt : 6S.778/2000
Date de la décision : 23/03/2001
Cour de cassation pénale

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2001-03-23;6s.778.2000 ?
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