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15/03/2001 | SUISSE | N°U.194/00

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 15 mars 2001, U.194/00


«AZA 7»
U 194/00 + U 396/00 Rl

Ière Chambre

composée des Juges fédéraux Lustenberger, Président, Schön,
Spira, Rüedi et Widmer; Addy, Greffier

Arrêt du 15 mars 2001

dans la cause

S.________, recourant, représenté par Maître Jacques
Borowsky, avocat, rue Ferdinand-Hodler 7, Genève,

contre

Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents,
Fluhmattstrasse 1, Lucerne, intimée,

et

Caisse-maladie pour les industries du bois et des branches
annexes, Boulevar

d James-Fazy 18, Genève, recourante,

contre

Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents,
Fluhmattstrasse 1, ...

«AZA 7»
U 194/00 + U 396/00 Rl

Ière Chambre

composée des Juges fédéraux Lustenberger, Président, Schön,
Spira, Rüedi et Widmer; Addy, Greffier

Arrêt du 15 mars 2001

dans la cause

S.________, recourant, représenté par Maître Jacques
Borowsky, avocat, rue Ferdinand-Hodler 7, Genève,

contre

Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents,
Fluhmattstrasse 1, Lucerne, intimée,

et

Caisse-maladie pour les industries du bois et des branches
annexes, Boulevard James-Fazy 18, Genève, recourante,

contre

Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents,
Fluhmattstrasse 1, Lucerne, intimée,

et

Tribunal administratif du canton de Genève, Genève

A.- S.________ travaillait comme manoeuvre de chantier
au service de Z.________ et Cie SA. A ce titre, il était
assuré contre le risque d'accident professionnel et non

professionnel auprès de la Caisse nationale suisse
d'assurance en cas d'accidents (CNA).
Le 14 juillet 1997, le prénommé a été victime d'un
accident professionnel au cours duquel, selon la déclara-
tion remplie par son employeur, «il s'est fait coincer la
main droite entre un pilier et un profilé métallique en
déposant un bloc de béton». Il a subi une fracture oblique
diaphysaire proximale du pouce droit qui a nécessité diffé-
rentes mesures médicales, notamment une ostéosynthèse par
plaque et vis. Un traitement par gouttes nasales V.________
s'est également révélé nécessaire à la suite de l'appari-
tion d'une algodystrophie. En dépit de ces soins,
S.________ n'a plus été en mesure de reprendre son travail,
se plaignant de douleurs persistantes irradiant dans tout
le bras droit, de la main à l'épaule.
Le cas a été pris en charge par la CNA, qui a adressé
l'assuré à la Clinique de réadaptation Y.________. A l'is-
sue du séjour, qui s'est déroulé du 14 janvier au
13 février 1998, les médecins de la clinique ont livré
l'appréciation suivante : «les seules données cliniques ne
permettent pas d'expliquer l'importance des douleurs dont
se plaint le patient ni le manque de force musculaire dont
il fait preuve. Il existe une extension des symptômes sur
fond de troubles d'adaptation post-traumatique avec symptô-
mes d'agitation dépressive» (rapport de sortie du
26 février 1998). Peu après, l'assuré a encore été examiné
par le docteur M.________, médecin d'arrondissement de la
CNA. Ce dernier est parvenu à la conclusion que «l'absence
de force et la non utilisation de la main droite n'est pas
en relation de causalité avec l'accident de manière ni
certaine ni probable», ajoutant qu'«une capacité de travail
comme ouvrier dans le bâtiment et le génie civil peut être
effectuée de manière complète en temps et en rendement»
(rapport du 1er avril 1998).

Par décision du 14 avril 1998, la CNA a mis fin à son
intervention à partir du 27 avril 1998, en considérant
qu'au-delà de cette date il n'existait plus d'atteinte à la
santé imputable à l'accident assuré. Cette décision a fait
l'objet d'une opposition de l'assuré ainsi que de son assu-
reur-maladie, la Caisse-maladie pour les industries du
bois, du bâtiment et branches annexes (ci-après : la CMBB).
Cette dernière a produit un rapport d'expertise établi le
28 juillet 1998 par le docteur D.________, spécialiste FMH
en médecine interne. A côté des lésions déjà constatées
(fracture de la phalange du pouce droit et algodystrophie),
l'expert a mis en évidence une déchirure du ligament trian-
gulaire du carpe ainsi qu'une lésion du ligament pyrami-
do-lunaire; selon lui, «le lien de causalité entre l'acci-
dent et les lésions est tout à fait clair». Cette conclu-
sion a été contestée par le docteur B.________, spécialiste
FMH en chirurgie et médecin-chef de l'équipe médicale de
médecine des accidents de la CNA. Vu notamment le
déroulement de l'accident, ce spécialiste a considéré que
les lésions décrites par le docteur D.________, en
particulier la déchirure du ligament triangulaire, étaient
plutôt d'origine dégénérative que traumatique (rapport du
15 décembre 1998).
Par une seule et même décision du 16 avril 1999, la
CNA a rejeté les oppositions formées par S.________ et la
CMBB.

B.- Ceux-ci ont tous deux recouru contre cette déci-
sion sur opposition, en produisant des rapports établis
respectivement le 5 juillet 1999 par le docteur C.________,
médecin-responsable au Département de chirurgie de
X.________, et le 23 juillet 1999 par le docteur
A.________, ancien chef de clinique de X.________. Pour
l'essentiel, ces médecins ont conclu à l'existence d'un
lien de causalité entre l'accident du 14 juillet 1997 et
les problèmes de santé rencontrés par l'assuré. Sur le vu
de ces nouvelles pièces médicales, la CNA a sollicité du

docteur B.________ une nouvelle appréciation du cas. Dans
un rapport du 22 octobre 1999, ce médecin a confirmé les
conclusions auxquelles il était parvenu dans sa première
prise de position, en réfutant catégoriquement le point de
vue des docteurs C.________ et A.________. A la suite de
l'édition du dossier AI, un rapport médical du 17 août 1999
émanant du docteur W.________, spécialiste FMH en
psychiatrie, a également été versé en cause.
Par jugement du 11 avril 2000, le Tribunal administra-
tif de la République et canton de Genève a rejeté les re-
cours dont il était saisi, après avoir joint les causes.

C.- Par écritures séparées du même jour, S.________ et
la CMBB interjettent chacun un recours de droit adminis-
tratif contre ce jugement dont ils requièrent l'annulation.
L'assuré conclut, sous suite de dépens, à l'octroi d'une
rente d'invalidité fondée sur une perte de gain de 100 %
ainsi qu'à l'allocation d'une indemnité pour atteinte à
l'intégrité d'un taux de 50 %. Il demande par ailleurs
d'accorder l'effet suspensif à son recours «afin de sauve-
garder ses droits». Pour sa part, la CMBB conclut à ce
qu'il soit dit que la CNA «doit assumer toutes les consé-
quences du sinistre». Subsidiairement, elle requiert la
mise en oeuvre d'une expertise médicale «confiée à un spé-
cialiste totalement indépendant des parties».
La CNA conclut au rejet des recours, tandis que l'Of-
fice fédéral des assurances sociales ne s'est pas détermi-
né.

D.- Par écriture du 9 novembre 2000, S.________ a
produit une décision du 21 septembre 2000, aux termes de
laquelle l'Office AI du canton de Genève lui a reconnu le
droit à une rente ordinaire simple d'invalidité à partir du
1er juillet 1998, ainsi qu'une rente ordinaire complémen-
taire pour son épouse.

considérant en droit :

1.- Les recours de droit administratif concernent des
faits de même nature, portent sur des questions juridiques
communes et sont dirigés contre le même jugement, de sorte
qu'il se justifie de les réunir et de les liquider dans un
seul arrêt (ATF 123 V 215 consid. 1, 120 V 466 consid. 1 et
les références; Poudret, Commentaire de la loi fédérale
d'organisation judiciaire, vol. I, p. 343 s.).

2.- Le litige porte sur le droit de S.________ à des
prestations de la CNA après le 26 avril 1998.
Le droit aux prestations découlant d'un accident assu-
ré suppose d'abord, entre l'événement dommageable de
caractère accidentel et l'atteinte à la santé, un lien de
causalité naturelle. Les principes que la jurisprudence a
développés à propos de cette notion ont été correctement
exposés par les premiers juges, si bien qu'il suffit de
renvoyer aux considérants de leur jugement.

3.- a) Comme les motifs que font valoir S.________ et
la CMBB à l'appui de leurs conclusions respectives se
recoupent largement, il se justifie de les examiner simul-
tanément. Ainsi, les recourants soutiennent-ils pour l'es-
sentiel, en s'appuyant sur l'appréciation des docteurs
D.________, C.________ et A.________, que les problèmes de
santé dont souffre l'assuré sont dus, au degré de la
vraisemblance prépondérante, à l'accident du 14 juillet
1997. Ils écartent l'opinion divergente du docteur
B.________ parce que celui-ci a fondé ses conclusions sur
la seule base du dossier, sans avoir personnellement
examiné l'assuré.
Du moment que l'appréciation du docteur B.________
repose sur un examen approfondi des nombreuses pièces
médicales au dossier, la CNA soutient qu'on ne saurait
douter de la «fiabilité» de cette appréciation, si bien que
l'existence d'un lien de causalité entre l'accident et les
troubles présentés par l'assuré doit être niée.

b) En premier lieu, il convient de relever que, con-
trairement à ce que laissent entendre les recourants, les
appréciations des docteurs C.________, A.________ et
D.________ ne sont guère superposables. En effet, alors que
le dernier nommé met principalement les douleurs de
l'assuré et l'incapacité de travail qui en découle sur le
compte des lésions du ligament triangulaire du carpe, ses
deux confrères considèrent au contraire que la
symptomatologie douloureuse trouve son origine dans
l'algodystrophie apparue peu de temps après l'accident.
Cette dernière opinion ne résiste pas aux objections
soulevées par le docteur B.________ dans sa seconde prise
de position. Comme le relève ce médecin, l'algodystrophie
s'est en effet, selon les constatations médicales au
dossier, rapidement résorbée à la suite du traitement par
gouttes nasales Miacalcic. Ainsi, dans un rapport du
11 novembre 1997 le docteur M.________ relevait-il déjà que
cette affection était «au décours», tandis que dans leur
rapport de sortie du 26 février 1998, les médecins de
Y.________ ont constaté qu'«en ce qui concerne
l'algodystrophie ancienne, il n'existe aujourd'hui que des
signes discrets d'un stade tardif». Enfin, dans son
expertise du 28 juillet 1998, le docteur D.________ notait
également que cette «maladie était dans une phase
pratiquement inactive», si bien qu'elle ne pouvait «être
responsable des douleurs telles que décrites par le
patient» (rapport p. 7). L'opinion, au demeurant peu éta-
yée, des docteurs C.________ et A.________ ne saurait donc
être suivie, d'autant que ces médecins n'ont, semble-t-il,
pas eu connaissance de toutes les pièces médicales au
dossier. On ne comprendrait sinon pas pourquoi ils n'ont
pas soufflé mot de l'appréciation du docteur B.________, se
bornant à évoquer celle du docteur D.________.

c) Cela étant, il faut maintenant confronter les
points de vue respectifs des deux médecins prénommés.

aa) Les éléments qui ont conduit le docteur D.________
à mettre l'accident assuré en relation de causalité avec la
lésion du ligament triangulaire du carpe sont de plusieurs
ordres. D'une part, ce médecin retient qu'«au moment de
l'écrasement (de la main), le patient, par un mouvement de
retrait, a effectué une torsion en pro-supination du poi-
gnet, geste propre à déchirer cette structure fibro-carti-
lagineuse». D'autre part, il estime qu'au regard de la
morphologie de la déchirure, en particulier de sa largeur,
celle-ci est plutôt d'ordre traumatique que dégénérative,
ce que tendrait aussi à démontrer le fait que «la fuite de
liquide à l'arthrographie est tout à fait claire et abon-
dante et n'a rien de commun avec une fuite d'origine dégé-
nérative, plus ténue et plus difficile à mettre en éviden-
ce». Enfin, il relève que l'assuré est d'un âge moyen et
que les signes dégénératifs révélés par les radiographies
sont «absolument mineurs», ce qui corroborerait également,
à la lumière de la littérature médicale, la thèse d'une
lésion d'origine traumatique.

bb) Cette thèse est réfutée par le docteur B.________
qui conteste en premier lieu le déroulement de l'accident
tel que pris en compte par son confrère. Car, à ses yeux,
«une personne sur le point de subir une compression massive
de la phalange proximale de son pouce jusqu'à la fracture
de celle-ci ne veut ou ne peut pas retirer ou retourner
activement sa main pour échapper aux douleurs extrêmement
violentes (...), mais est au contraire comme paralysée». Il
ajoute, en renvoyant à des études réalisées à l'étranger,
que même si l'accident s'était déroulé conformément à la
description qu'en a faite le docteur D.________, cela ne
changerait rien, car «d'un point de vue biomécanique, tant
les mouvements de retournement de la main (pro-/supination)
qu'une traction transversales sont inaptes à causer une
déchirure du LT (ligament triangulaire du carpe)». Il fait
également remarquer que les différents médecins ayant exa-

miné l'assuré - notamment à Y.________ - n'ont pas fait
état de douleurs particulières dans la région de
l'articulation cubito-carpale du poignet, comme cela aurait
dû être le cas si celle-ci avait subi un traumatisme.
Enfin, se référant lui aussi à la littérature scientifique
et à des études menées à l'étranger, il affirme qu'il n'est
tout simplement pas possible, en l'état des connaissances
médicales, et même sur la base d'un examen arthrographique,
de dire si l'atteinte ligamentaire au poignet que présente
l'assuré est d'origine dégénérative ou traumatique.

cc) Au vu des éléments au dossier, on ne peut exclure
que l'accident se soit effectivement déroulé comme l'a
décrit le docteur D.________, à savoir que l'assuré aurait
effectué un brusque mouvement de retrait après qu'il a eu
sa main droite écrasée par le bloc de béton qu'il s'appli-
quait à déposer. Car, contrairement à l'avis du docteur
B.________, il ne s'agit là ni d'une version de l'accident
dont on pourrait douter de la réalité parce qu'elle serait
nouvelle (cf. les déclarations de l'assuré transcrites dans
le rapport du 11 novembre 1997 du docteur M.________,
p. 1), ni d'une version qui apparaîtrait invraisemblable
pour d'autres raisons encore, celles mises en avant par le
docteur B.________ ayant, à cet égard, plus le caractère de
conjectures que de faits concluants. D'ailleurs si,
suivant
les termes de ce dernier, l'assuré était vraiment resté
comme «paralysé» après que sa main droite a été prise sous
le bloc de béton, le dossier ne manquerait pas de contenir
des précisions sur la manière dont cette main aurait
ensuite finalement été dégagée.

dd) Il reste que les conclusions du docteur D.________
ne convainquent pas pour un autre motif.
Dans son analyse de la question de la causalité natu-
relle, ce médecin distingue trois niveaux : premièrement,
le lien de causalité entre l'accident et les lésions cons-
tatées, deuxièmement celui entre les lésions et les symptô-

mes (les douleurs) et, troisièmement, celui entre les
symptômes et l'incapacité de travail. On ne peut certes
exclure, sans autre examen, la pertinence du premier niveau
de causalité : purement technique, la controverse qui divi-
se les docteurs D.________ et B.________ sur la possibilité
même d'établir l'existence d'une relation de causalité
entre l'accident et les lésions ligamentaires constatées ne
pourrait être levée qu'au moyen d'une surexpertise, car le
point de vue de chacun des experts est étayé par de
nombreuses références scientifiques dont il n'appartient
pas au juge d'apprécier la valeur. En revanche, il en va
différemment en ce qui concerne la question relative à
l'existence d'un lien de causalité entre les lésions
constatées et les douleurs de l'assuré (soit le deuxième
niveau de causalité). A ce propos, le docteur D.________
constate que «l'irradiation de la symptomatologie algique
le long de l'avant-bras, du bras, et même de l'épaule ne
peut être attribuée à l'algodystrophie et encore moins à la
lésion du LT (ligament triangulaire du carpe)». Il en
infère «qu'il y a donc un problème dans l'établissement du
lien de causalité entre les lésions et les symptômes»
(rapport p. 7). Etant seulement possible, l'existence de ce
lien de causalité ne saurait par conséquent être retenue,
au degré de la vraisemblance prépondérante (cf. ATF
119 V 337 consid. 1, 118 V 289 consid. 1b et les référen-
ces). Or, si l'assuré ne peut plus utiliser son bras droit,
c'est non pas en raison des lésions comme telles, dont les
médecins s'accordent à dire qu'elles sont, indépendamment
de leur imputabilité à l'accident, mineures, mais en raison
de la symptomatologie douloureuse qui s'est développée à la
suite de l'accident. Dans cette mesure, les recourants ne
peuvent fonder leurs prétentions sur les conclusions du
docteur D.________.
Au demeurant, on relèvera que celles-ci sont contra-
dictoires : en effet, après avoir mis en lumière l'incerti-
tude qui entoure l'existence d'un rapport de cause à effet

entre l'accident et les douleurs de l'assuré, le docteur
D.________ conclut, de manière tout à fait surprenante, que
«le tout premier élément responsable de l'incapacité de
travail actuelle est certainement l'accident si l'on tient
compte qu'il existe un lien de causalité clair (sic) entre
les lésions et les symptômes, ce qui a été largement
discuté plus haut» (rapport, p. 9). Il n'est également pas
possible de suivre ces conclusions, car elles reposent sur
le postulat que la symptomatologie douloureuse n'a d'autre
cause que l'accident, au motif notamment que l'assuré
«n'est pas dépressif et que, s'il souffre d'une incapacité
de l'adaptation, il ne s'agit pas d'une dépression stricto
sensu» (eod. loc.). Or le docteur W.________, psychiatre
qui traite l'assuré depuis le mois de juin 1998, a posé le
diagnostic de trouble dépressif récurrent sévère
d'étiologie réactionnelle (rapport du 17 août 1999).

ee) Dans ces conditions, il faut donner la préférence
aux conclusions du docteur B.________, qui sont
sérieusement motivées et reposent en outre, conformément à
ce qu'exige la jurisprudence, sur une étude attentive et
fouillée du dossier (cf. ATF 125 V 353 sv. consid. 3b/ee).
A cet égard, le fait que ce médecin s'est prononcé
sans avoir personnellement examiné l'assuré n'est, contrai-
rement à l'opinion des recourants, pas de nature à discré-
diter son appréciation. Comme le fait pertinemment remar-
quer l'intimée, ce qui est décisif pour juger de la valeur
probante d'un tel rapport, c'est que le dossier qui a servi
de base à son établissement contienne suffisamment d'appré-
ciations médicales résultant d'un examen personnel de
l'assuré (cf. RAMA 1988 no U 56 p. 370 sv. consid. 5b et la
référence). Or, tel est le cas en l'occurrence, puisque
outre l'expertise du docteur D.________, qui elle-même
s'appuye sur de nombreux examens pratiqués en juin et
juillet 1998 à l'Institut de radiologie de la clinique
générale E.________ (cf. rapports des docteurs F.________,

R.________ et K.________), le dossier renferme également le
rapport de sortie de la clinique Y.________, les rapports
successifs du médecin d'agence de la CNA, ainsi que les
appréciations des docteurs C.________ et A.________, qui
sont autant de pièces médicales établies sur la base
d'examens personnels de l'assuré.

4.- En l'absence de causalité naturelle entre l'acci-
dent assuré et les troubles somatiques que présente
S.________, il reste encore à examiner si un tel rapport
peut être établi s'agissant des troubles d'ordre psychique
mis en évidence par le docteur W.________. Dans la mesure
où ce médecin considère que l'étiologie des troubles en
question est réactionnelle, la causalité naturelle entre
ceux-ci et l'accident peut être admise. Mais ce rapport de
causalité doit également être adéquat pour ouvrir droit à
des prestations de la part de l'intimée. Au regard de son
déroulement, l'accident assuré se situe toutefois dans la
catégorie des accidents de gravité moyenne. Or, comme l'ont
à juste titre constaté les premiers juges, les critères
retenus par la jurisprudence pour admettre un lien de
causalité adéquate entre un accident de gravité moyenne et
des troubles psychiques font, en l'occurrence, défaut. En
particulier, on ne voit pas de circonstances de nature à
faire apparaître l'accident comme impressionnant ou
particulièrement dramatique et le traitement des lésions
dues au traumatisme s'est déroulé de façon tout à fait
normale (cf. ATF 115 V 139 sv. consid. 6, 408 consid. 5).
Il suit de ce qui précède que les recours sont mal
fondés.

5.- Vu l'issue des recours, la requête d'effet suspen-
sif présentée par S.________ est devenue sans objet. Par
ailleurs, et pour la même raison, le prénommé ne saurait
prétendre une indemnité de dépens pour l'instance fédérale
(art. 159 al. 1 en corrélation avec l'art. 135 OJ).

6.- En règle générale, le Tribunal fédéral des assu-
rances ne peut imposer des frais de procédure aux parties,
en vertu de l'art. 134 OJ, dans les procédures de recours
en matière d'octroi ou de refus de prestations d'assurance.
Toutefois, dans la mesure où cette disposition a été édic-
tée avant tout dans l'intérêt des assurés en litige avec un
assureur social, elle ne s'applique ordinairement pas aux
procédures qui divisent, par exemple, deux assureurs-acci-
dents au sujet de la prise en charge des suites d'un acci-
dent subi par l'un de leurs assurés communs (ATF 120 V 494
consid. 3, 119 V 222 ss consid. 4), un assureur-accidents
et une caisse-maladie au sujet de l'obligation d'allouer
des prestations (ATF 126 V 192 consid. 6 et les références)
ou un tel assureur et l'assurance-invalidité (VSI 2000
p. 210 consid. 2).
En l'espèce, les deux causes qui ont été jointes oppo-
sent, d'une part, l'assuré S.________ à la CNA (U 194/00)
et,
d'autre part, la CMBB à la CNA (U 396/00). Cela étant, il
se justifie de mettre, conformément à l'art. 156 al. 1 OJ,
des frais de justice à la charge de l'assureur-maladie qui
succombe comme partie recourante dans un litige entre assu-
reurs sociaux (U 396/00). Que ce litige soit tranché dans
le même arrêt que la procédure non onéreuse qui oppose
l'assuré à la CNA ne change rien au fait qu'il s'agit,
formellement, de deux procès distincts.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances

p r o n o n c e :

I. Les recours sont rejetés.

II. Les frais de justice, d'un montant de 6000 fr., sont
mis à la charge de la Caisse-maladie pour les indus-
tries du bois, du bâtiment et branches annexes.

III. Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tri-
bunal administratif de la République et canton de
Genève et à l'Office fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 15 mars 2001

Au nom du
Tribunal fédéral des assurances
Le Président de la Ière Chambre :

Le Greffier :


Synthèse
Numéro d'arrêt : U.194/00
Date de la décision : 15/03/2001
Cour des assurances sociales

Analyses

Art. 134 et 156 al. 1 OJ: Sort des frais de justice dans un litige entre assureurs sociaux en cas de jonction de la cause avec une procédure non onéreuse opposant un assuré à l'un de ces assureurs. Dans un litige entre une caisse-maladie et un assureur-accidents au sujet de l'obligation d'allouer des prestations, des frais de justice doivent être mis à la charge de l'assureur social qui succombe, et cela indépendamment du fait que le litige a été tranché dans le même arrêt que la procédure non onéreuse qui oppose l'assuré à l'assureur-accidents.


Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2001-03-15;u.194.00 ?
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