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15/03/2001 | SUISSE | N°K.119/00

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 15 mars 2001, K.119/00


«AZA 7»
K 119/00 Rl

Ière Chambre

composée des Juges fédéraux Lustenberger, Président, Schön,
Borella, Leuzinger et Ferrari; Addy, Greffier

Arrêt du 15 mars 2001

dans la cause

FTMH Assurance-maladie et accidents, Weltpoststrasse 20,
Berne, recourante,

contre

F.________, intimé, représenté par le Groupe Sida Genève,
rue Pierre-Fatio 17, Genève

et

Tribunal administratif du canton de Genève, Genève

A.- F.________ a travaillé du 1er août 1991 au
31

octobre 1995 comme monteur électricien au service de
l'entreprise X.________ SA. A ce titre, il était affilié à

la FTMH assurance-ma...

«AZA 7»
K 119/00 Rl

Ière Chambre

composée des Juges fédéraux Lustenberger, Président, Schön,
Borella, Leuzinger et Ferrari; Addy, Greffier

Arrêt du 15 mars 2001

dans la cause

FTMH Assurance-maladie et accidents, Weltpoststrasse 20,
Berne, recourante,

contre

F.________, intimé, représenté par le Groupe Sida Genève,
rue Pierre-Fatio 17, Genève

et

Tribunal administratif du canton de Genève, Genève

A.- F.________ a travaillé du 1er août 1991 au
31 octobre 1995 comme monteur électricien au service de
l'entreprise X.________ SA. A ce titre, il était affilié à

la FTMH assurance-maladie et accidents (ci-après : la
caisse) dans le cadre d'un contrat collectif intitulé
«SPAM-FRMB», notamment pour une indemnité journalière en
cas de maladie. L'affiliation était assortie d'une réserve
d'assurance d'une durée de cinq ans, valable du 12 août
1991 au 12 août 1996, pour les affections suivantes :
dépendance aux opiacées, cure de méthadone et HIV positif.
Du 20 juin au 21 août 1995, F.________ a été déclaré
incapable de travailler en raison d'une affection
psychiatrique (rapport du docteur J.________ du 28 juin
1995). Il a bénéficié, durant cette période, des indemnités
journalières assurées. Dans le courant du mois de novembre
1995, l'employeur a avisé la caisse que les rapports de
travail avaient été résiliés pour le 31 octobre 1995. A
réception de cet avis, la caisse a invité l'assuré à lui
faire savoir dans un délai de dix jours, d'une part le nom
d'un éventuel nouvel employeur et, d'autre part, s'il dési-
rait maintenir son assurance perte de salaire en la trans-
férant dans l'assurance individuelle (lettre du 14 novembre
1995). L'assuré n'a pas répondu à cette invitation.
Après une période de chômage et une période d'occupa-
tion temporaire, F.________ a été engagé le 1er janvier
1999 par l'entreprise Y.________ & Cie SA qui assure
également dans le cadre de l'assurance collective précitée
«SPAM-FRMB» ses employés auprès de la FTMH
assurance-maladie et accidents pour une indemnité
journalière en cas de maladie.
Par décision du 28 juin 1999, prise sur la base d'un
rapport de son médecin-conseil et d'une déclaration person-
nelle d'adhésion de F.________, la caisse a admis le
prénommé dans l'assurance d'une indemnité journalière dès
le 1er janvier 1999, en instituant toutefois une réserve
d'une durée de cinq ans pour chacune des affections suivan-
tes :

- hépatite C chronique
- affection HIV et ses suites
- cure de méthadone
- ancienne dépendance aux opiacées
- état dépressif
- hallux valgus bilatéral

Saisie d'une opposition de l'assuré qui contestait le
bien-fondé de ces réserves, la caisse l'a rejetée par une
nouvelle décision du 8 octobre 1999.

B.- F.________ a recouru contre cette décision sur
opposition, en concluant à la suppression des réserves
d'assurance ou, subsidiairement, à la réduction de leur
durée.
Par jugement du 23 mai 2000, le Tribunal administratif
de la République et canton de Genève a partiellement admis
le recours et annulé la décision sur opposition attaquée,
en invalidant les réserves instituées par la caisse, à
l'exception toutefois de celles qui avaient déjà été appli-
quées en 1991 (dépendance aux substances opiacées, cure de
méthadone et HIV positif), lesquelles ont été maintenues
jusqu'au 30 septembre 1999.

C.- La caisse interjette recours de droit administra-
tif contre ce jugement dont elle requiert l'annulation.
F.________ conclut au rejet du recours, tandis que
l'Office fédéral des assurances sociales ne s'est pas
déterminé.

Considérant en droit :

1.- Le litige porte sur le bien-fondé des réserves
d'assurance instituées par la caisse le 28 juin 1999, avec
effet au 1er janvier 1999, que les premiers juges ont par-
tiellement invalidées.

2.- Aux termes de l'art. 69 LAMal, les assureurs peu-
vent exclure de l'assurance facultative d'indemnités jour-
nalières, par une clause de réserve, les maladies existant
au moment de l'admission; il en va de même pour les mala-
dies antérieures si, selon l'expérience, une rechute est
possible (al. 1). Les réserves sont caduques au plus tard
après cinq ans; avant l'échéance de ce délai, l'assuré peut
fournir la preuve que la réserve n'est plus justifiée
(al. 2). La réserve n'est valable que si elle est communi-
quée par écrit à l'assuré et qu'elle précise le début et la
fin de sa validité ainsi que le type de maladie qu'elle
concerne (al. 3). Les 1er à 3ème alinéas sont applicables
par analogie en cas d'augmentation du montant des indemni-
tés journalières ou de réduction du délai d'attente
(al. 4).
Selon les premiers juges, même si l'intimé n'est pas
passé dans l'assurance individuelle lors de sa sortie de
l'assurance collective en octobre 1995, il ne saurait être
considéré comme un nouvel assuré par la caisse recourante,
du moment qu'il avait précédemment déjà été affilié auprès
de celle-ci durant plus de quatre ans (du 1er août 1991 au
31 octobre 1995). Pour ce motif, ils ont invalidé les
réserves d'assurance instituées par la caisse, à l'ex-
ception toutefois de celles qui avaient déjà été appliquées
en 1991; ils ont en effet considéré que celles-ci devaient
être maintenues jusqu'au 30 septembre 1999, soit jusqu'à ce
que le délai initial de cinq ans, dont quatre ans et trois
mois avaient déjà été accomplis lors de la sortie de la
caisse en novembre 1995, fût totalement épuisé.
Pour sa part, la recourante fait valoir que l'art. 67
LAMal, qui traite de l'adhésion dans l'assurance facultati-
ve d'une indemnité journalière, ne fait pas de distinction
entre l'admission proprement dite d'un assuré, et sa réad-
mission après une précédente période d'affiliation. Or,
poursuit-elle, si le législateur avait entendu opérer une

telle distinction, il n'aurait pas manqué de le faire ex-
pressément. Elle ajoute également que la solution des pre-
miers juges favorise les abus, en ceci qu'elle permet aux
personnes qui jouissent d'une bonne santé de s'affilier
durant une courte période et de s'exonérer de la sorte du
risque de se voir opposer une réserve en cas de réaffilia-
tion ultérieure.

3.- a) En ce qui concerne le régime des indemnités
journalières, la LAMal n'a pas apporté de grand changement
par rapport à la réglementation qui était en vigueur sous
l'empire de la loi fédérale sur l'assurance-maladie du
13 juin 1911 (LAMA) (Gebhard Eugster, Zum Leistungsrecht
der Taggeldversicherung nach KVG, in : LAMal-KVG, Recueil
de travaux en l'honneur de la SSDA, Lausanne 1997, p. 505;
Aldo Borella, L'affiliation à l'assurance-maladie sociale
suisse, thèse Genève 1993, p. 403 ss; voir aussi arrêt F. du
27 octobre 2000, consid. 2b, destiné à la publication
[K 18/99]). Ainsi, s'agissant plus particulièrement des
modalités selon lesquelles des réserves peuvent être insti-
tuées, le Conseil fédéral a repris quasiment tel quel, à
l'art. 61 de son projet (actuel art. 69 LAMal précité), la
teneur de l'art. 5 al. 3 LAMA qui fixait ces modalités sous
l'ancien droit (Message du Conseil fédéral du 6 novembre
1991 concernant la révision de l'assurance-maladie, FF
1992 I p. 182 ad art. 61). La Cour de céans a d'ailleurs
naguère précisé que les principes jurisprudentiels dévelop-
pés du temps de la LAMA à propos de la possibilité d'ins-
taurer des réserves dans l'assurance facultative d'une
indemnité journalière restaient, pour l'essentiel, applica-
bles sous le nouveau droit (ATF 125 V 294 consid. 2).
Dans une jurisprudence déjà ancienne (ATFA 1969 p. 5
consid. 3), le Tribunal fédéral des assurances avait jugé
que, faute de dispositions contraires dans les statuts, les
caisses étaient en droit de faire des réserves, au sens de
l'art. 5 al. 3 LAMA, aussi bien lorsqu'elles admettaient un

nouveau membre que lorsqu'elles en réintégraient un ancien.
Dans un arrêt ultérieur (ATF 96 V 23 consid. 6), il a con-
firmé cette jurisprudence, du moins implicitement, en refu-
sant de voir une lacune de la loi dans le fait que celle-ci
ne faisait pas de différence, en ce qui concerne la possi-
bilité laissée aux caisses d'instaurer des réserves, entre
une première admission dans l'assurance et la réintégration
dans celle-ci d'un ancien assuré (sur la question des ré-
serves sous l'empire de la LAMA, voir Aldo Borella, op.
cité pp. 178 sv. et pp. 279ss).
Ces considérations gardent toute leur valeur sous
l'empire du nouveau droit.

b) Contrairement à l'opinion des premiers juges,
l'art. 69 LAMal ne postule en effet pas davantage que
l'art. 5 al. 3 LAMA de distinguer entre l'admission d'un
assuré et sa réadmission. Une telle distinction ne trouve
appui ni dans la lettre de la loi, ni même dans son esprit.
Car l'art. 69 LAMal ne vise d'autre but que la prise en
considération, du moins sous une forme atténuée, du prin-
cipe dit de l'assurance (sur cette notion : Meyer-Blaser,
Allgemeine Einführung/Übersicht in : Schweizerisches
Bundesverwaltungsrecht [SBVR], Soziale Sicherheit, p. 9
sv.), ceci afin de tenir compte du fait que l'assurance
d'une indemnité journalière est facultative, qu'elle peut
être pratiquée par des institutions de droit privé, et
qu'elle est financée par les primes individuelles des assu-
rés (message précité du Conseil fédéral p. 182). Le droit
d'instituer des réserves d'assurance permet également, dans
une certaine mesure, d'atténuer les conséquences financiè-
res qui découlent pour les assureurs de l'obligation de
contracter prévue à l'art. 68 LAMal (Gebhard Eugster, Kran-
kenversicherung, in Schweizerisches Bundesverwaltungsrecht
[SBVR], Soziale Sicherheit, p. 199 no 362; Alfred Maurer,
Das neue Krankenversicherungsrecht, 1996, p. 111). Or, à
supposer que les assureurs ne pourraient exclure de l'assu-

rance, lors de la réadmission d'un ancien affilié, des
maladies déjà existantes, singulièrement des maladies qui
seraient survenues depuis la première admission, le princi-
pe de l'assurance voulu par le législateur se trouverait
vidé d'une bonne partie de sa substance.
On ajoutera que, selon l'art. 71 LAMal, lorsqu'un
assuré sort de l'assurance collective parce qu'il cesse
d'appartenir au cercle des assurés définis par le contrat
ou parce que le contrat est résilié - comme ce fut le cas
pour l'intimé -, il a le droit de passer dans l'assurance
individuelle de l'assureur, sans que de nouvelles réserves
d'assurance ne puissent lui être opposées, pour autant
qu'il ne s'assure pas pour des prestations plus élevées
(al. 1). Il doit toutefois faire valoir son droit de pas-
sage dans les trois mois après qu'il a été informé par
écrit de ce droit (al. 2). A contrario, on doit déduire de
cette disposition que si l'assuré ne profite pas de son
droit de passage, de nouvelles réserves peuvent parfaite-
ment lui être opposées en cas de réaffiliation ultérieure.
Par conséquent, s'il entendait maintenir la même couverture
d'assurance, l'intimé n'avait d'autre choix, lors de sa
sortie de l'assurance collective, que de passer dans l'as-
surance individuelle, comme la caisse le lui en a d'ail-
leurs fait la proposition.

c) Il suit de ce qui précède que la caisse recourante
était bien en droit, au moment de la réadmission de l'inti-
mé dans l'assurance, d'instaurer des réserves aux condi-
tions de l'art. 69 LAMal.
Dans la mesure où, selon les indications du médecin-
conseil de la caisse (cf. rapport de la doctoresse
P.________ du 1er décembre 1999), les maladies ayant fait
l'objet d'une clause de réserve étaient soit existantes au
moment de la réadmission (affection HIV et ses suites, cure
de méthadone, état dépressif, hépatite C chronique, hallux
valgus bilatéral), soit antérieures à celle-ci mais avec un

risque de rechute (ancienne dépendance aux opiacées), la
décision de la caisse était justifiée. A cet égard, que le
docteur J.________, médecin traitant de l'assuré, ait
attesté que le traitement de son patient se déroulait bien
et donnait de bons résultats, ne change rien au droit
qu'avait la caisse d'instituer des réserves d'assurance
d'une durée de cinq ans; ce médecin a d'ailleurs précisé
que «des périodes d'incapacité de travail extrêmement
prolongées se terminant par une mise à l'AI sont
relativement fréquentes pour chacun des diagnostics
mentionnés ci-dessus pris séparément» (rapport du
28 juillet 1999, p. 2).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances

p r o n o n c e :

I. Le recours est admis et le jugement du 23 mai 2000 du
Tribunal administratif de la République et canton de
Genève est annulé.

II. Il n'est pas perçu de frais de justice. L'avance de
frais versée par la recourante, d'un montant de
500 fr., lui est restituée.

III. Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tri-
bunal administratif de la République et canton de
Genève et à l'Office fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 15 mars 2001

Au nom du
Tribunal fédéral des assurances
Le Président de la Ière Chambre :

Le Greffier :


Synthèse
Numéro d'arrêt : K.119/00
Date de la décision : 15/03/2001
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2001-03-15;k.119.00 ?
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