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06/03/2001 | SUISSE | N°5P.459/2000

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 06 mars 2001, 5P.459/2000


«/2»
5P.459/2000

IIe C O U R C I V I L E
**************************

6 mars 2001

Composition de la Cour: M. Bianchi, Juge présidant,
M. Raselli et Mme Nordmann, juges. Greffier: M. Abrecht.

_________

Statuant sur le recours de droit public
formé par

X.________, Assurance maladie et accident, représentée par
Me
Pascal Marti, avocat à Genève,

contre

l'arrêt rendu le 10 octobre 2000 par le Tribunal administra-
tif du canton de Genève dans la cause qui oppose la re

couran-
te à dame Y.________, intimée, représentée par Me Henri
Nanchen, avocat à Genève;

(art. 8 et 9 Cst.; assuranc...

«/2»
5P.459/2000

IIe C O U R C I V I L E
**************************

6 mars 2001

Composition de la Cour: M. Bianchi, Juge présidant,
M. Raselli et Mme Nordmann, juges. Greffier: M. Abrecht.

_________

Statuant sur le recours de droit public
formé par

X.________, Assurance maladie et accident, représentée par
Me
Pascal Marti, avocat à Genève,

contre

l'arrêt rendu le 10 octobre 2000 par le Tribunal administra-
tif du canton de Genève dans la cause qui oppose la recouran-
te à dame Y.________, intimée, représentée par Me Henri
Nanchen, avocat à Genève;

(art. 8 et 9 Cst.; assurance
complémentaire à l'assurance-maladie)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- Dame Y.________, née en 1969, est assurée depuis
le 1er juillet 1992 en matière d'assurance-maladie auprès de
la Fondation X.________, qui assure les risques de maladie
et
d'accidents sous le nom de X.________, assurance maladie et
accident (ci-après: X.________ ou la caisse). En 1997 et
1998, elle bénéficiait de l'assurance obligatoire de soins
("Basis") selon la loi fédérale du 18 mars 1994 sur l'assu-
rance-maladie (LAMal; RS 832.10), ainsi que d'assurances
complémentaires selon la loi fédérale du 2 avril 1908 sur le
contrat d'assurance (LCA; RS 221.229.1) pour l'hospitalisa-
tion en division privée ou en clinique (chambre à un lit)
avec limitation du choix de l'établissement ("Optima Plus")
et pour la maternité en division privée (chambre à un lit)
d'hôpitaux publics ou de cliniques ("Materna Plus").

B.- L'art. 3 des conditions spéciales d'assurance
(CSA) pour l'assurance complémentaire "Materna Plus" en vi-
gueur depuis le 1er janvier 1997 dispose que X.________
"assume la prise en charge des actes médicaux et
paramédicaux
nécessaires à la mère (...) pendant l'hospitalisation dans
un
établissement hospitalier agréé; si l'assurée n'a pas
recours
à un fournisseur de soins agréé, les frais de traitement
sont
remboursés jusqu'à fr. 200.- par jour". L'art. 4 CSA prévoit
que X.________ "assume la prise en charge du séjour hospita-
lier (chambre à 1 lit) et de l'encadrement médical forfaitai-
re facturés par un établissement hospitalier agréé; pour les
établissements hospitaliers non agréés, les frais hôteliers
sont couverts jusqu'à fr. 200.- par jour". L'art. 7 CSA pré-
cise que "la compagnie s'engage à remettre à l'assurée une
liste à jour des fournisseurs de soins agréés".

Jusqu'au 31 décembre 1996, les conditions spéciales
d'assurance pour l'assurance complémentaire "Materna Plus"

disposaient ce qui suit: "Lors d'une hospitalisation consécu-
tive à un accouchement, X.________ assume les frais de
séjour
en division privée ou en clinique de la mère (...); les
droits et obligations découlant de la souscription de la pré-
sente catégorie d'assurance sont en tous points similaires à
ceux prévus aux articles 2, 3, 4 (...) de la catégorie "Opti-
ma", respectivement "Optima plus" (art. 3 CSA). Les condi-
tions spéciales d'assurance pour l'assurance complémentaire
"Optima Plus" prévoyaient quant à elles ce qui suit:
"X.________ assume le paiement de tous les frais d'actes mé-
dicaux et paramédicaux nécessaires à l'assuré pendant son
hospitalisation, à la condition toutefois que les
traitements
aient été dispensés par des fournisseurs de soins ayant
passé
convention à cet effet avec la caisse ou, à défaut, dont le
nom figure dans une liste remise aux assurés au début de cha-
que année civile" (art. 3 CSA); "En couverture des frais hô-
teliers (...) et de l'encadrement médical facturé forfaitai-
rement, X.________ prend en charge la totalité de la factura-
tion établie par les établissements avec lesquels elle a
passé convention ou, à défaut, figurant dans une liste
remise
aux assurés au début de chaque année civile" (art. 4 CSA).

C.- En novembre 1996, X.________ a adressé à tous
ses assurés genevois désirant être hospitalisés en secteur
privé une lettre circulaire les informant que dès le 1er jan-
vier 1997, les couvertures "Optima", "Optima Plus",
"Materna"
et "Materna Plus" permettraient à ceux qui en bénéficiaient
de se faire hospitaliser en division privée à l'Hôpital can-
tonal universitaire de Genève, à la clinique de la Tour à
Meyrin, à la clinique de la Colline à Genève, à la Clinique
de Genolier et à l'Hôpital de Nyon; les assurés qui
voulaient
conserver une totale liberté dans le choix de
l'établissement
hospitalier pouvaient souscrire une nouvelle catégorie d'as-
surance "Ultra" à un tarif de primes adapté aux risques assu-
rés.

La liste susmentionnée a été annulée et remplacée le
20 février 1998 par une nouvelle "liste des fournisseurs de
soins agréés". Le seul établissement agréé sur territoire
genevois était l'Hôpital cantonal universitaire de Genève.

D.- Le 7 juillet 1998, dame Y.________ a informé
X.________ qu'elle était enceinte et qu'elle souhaitait pou-
voir bénéficier d'une prise en charge médicale par le
médecin
gynécologue et obstétricien qui l'avait assistée lors de
l'accouchement de son premier enfant à la clinique des Gran-
gettes à Genève. Elle indiquait qu'elle s'était vue privée
de
sa liberté de choix, puisque la catégorie d'assurance
"Ultra"
n'existait pas en matière de maternité, et déclarait
attendre
une proposition de prise en charge des frais liés à l'accou-
chement à la clinique des Grangettes.

Par courrier du 24 juillet 1998, la caisse a répondu
que selon les conditions d'assurance relatives à la
catégorie
"Materna Plus", la prise en charge intégrale du traitement
et
du séjour hospitalier n'était assumée que dans la mesure où
l'établissement hospitalier choisi figurait sur la liste des
fournisseurs de soins agréés communiquée aux assurés; à dé-
faut, les prestations allouées par ladite assurance complé-
mentaire étaient limitées forfaitairement à 200 fr. par jour
pour les frais de traitement et à 200 fr. par jour pour les
frais hôteliers, à quoi s'ajoutait le forfait journalier de
342 fr. par jour octroyé au titre de la catégorie "Basis".

E.- Dame Y.________ a accouché à la clinique des
Grangettes en décembre 1998. Les frais d'accouchement et de
séjour à la clinique se sont élevés au total à 15'606 fr.
20.
Selon décomptes des prestations des 22 février et 23 mars
1999, X.________ a pris en charge un montant de 4'762 fr.
25,
soit 2'362 fr. 25 sur l'assurance "Basis" et 2'400 fr. sur
l'assurance complémentaire "Optima Plus". L'échange de cor-

respondance qui a suivi est demeuré stérile, chacune des par-
ties campant sur ses positions.

F.- A l'occasion d'un courrier du 23 décembre 1998,
X.________ a transmis à dame Y.________ une ordonnance de
mesures provisionnelles prononcée le 6 janvier 1997 par la
Cour de justice du canton de Genève. Cette ordonnance,
rendue
sur la base de la loi fédérale du 6 octobre 1995 sur les car-
tels et autres restrictions à la concurrence (LCart; RS
251),
interdisait à la Conférence suisse des assureurs maladie
COSAMA ainsi qu'à la Fondation X.________ d'exclure sept cli-
niques genevoises, dont celle des Grangettes, des possibili-
tés d'hospitalisation avec prise en charge intégrale des
frais pour les assurés bénéficiant d'une couverture des
frais
d'hospitalisation dans le secteur privé.

Dans son courrier du 23 décembre 1998, la caisse
précisait qu'ensuite de la dénonciation au 31 décembre 1997
de la convention tarifaire qui liait les cliniques privées
genevoises à l'ensemble des assureurs-maladie, des pourpar-
lers étaient intervenus entre les différents partenaires en
vue de la conclusion de nouveaux accords; aucune entente
n'ayant pu être trouvée, X.________ avait adressé à ses assu-
rés genevois, à la fin du mois de février 1998, une nouvelle
liste des fournisseurs de soins agréés.

La procédure en validation des mesures provisionnel-
les prononcées le 6 janvier 1997 a été retirée avec désiste-
ment d'instance et d'action le 13 janvier 2000.

G.- Le 27 octobre 1999, dame Y.________ a saisi le
Tribunal administratif du canton de Genève, fonctionnant
comme tribunal cantonal des assurances, d'une demande
tendant
au paiement par X.________ d'un montant de 10'843 fr. 95 -
soit la différence entre les frais effectifs (15'606 fr. 20)
et le montant pris en charge par la caisse (4'762 fr. 25) -

avec intérêt à 5% l'an dès le 1er avril 1999. La
défenderesse
s'est opposée à la demande.

Statuant par arrêt du 10 octobre 2000, le Tribunal
administratif a condamné la défenderesse à verser à la deman-
deresse la somme de 10'843 fr. 95 avec intérêt à 5% l'an dès
le 23 avril 1999. Il a considéré que si la défenderesse, en
limitant le choix des établissements en novembre 1996, n'a-
vait fait que respecter les termes des conditions générales
d'assurance, elle était néanmoins tenue de prendre en charge
l'intégralité des frais relatifs à l'accouchement de la de-
manderesse en décembre 1998; en effet, suite à l'ordonnance
de mesures provisionnelles de la Cour de Justice du 6
janvier
1997, qui était en vigueur lorsque les faits pertinents pour
la solution du litige s'étaient passés, la défenderesse
n'était pas autorisée à écarter la clinique des Grangettes
de
la liste des fournisseurs de soins.

H.- Contre cet arrêt, la défenderesse exerce en
parallèle un recours de droit public et un recours en
réforme
au Tribunal fédéral. Dans le premier, qui tend à
l'annulation
de l'arrêt attaqué, elle reproche à l'autorité cantonale
principalement d'avoir arbitrairement passé sous silence un
fait essentiel dûment prouvé, et subsidiairement d'avoir
violé le principe d'égalité ancré à l'art. 8 Cst. Il n'a pas
été ordonné d'échange d'écritures.

C o n s i d é r a n t e n d r o i t :

1.- En vertu de l'art. 57 al. 5 OJ, il est sursis en
règle générale à l'arrêt sur le recours en réforme jusqu'à
droit connu sur le recours de droit public. Cette
disposition
est justifiée par le fait que, si le Tribunal fédéral devait
d'abord examiner le recours en réforme, son arrêt se substi-
tuerait à la décision cantonale, rendant ainsi sans objet le

recours de droit public, faute de décision susceptible
d'être
attaquée par cette voie (ATF 122 I 81 consid. 1; 120 Ia 377
consid. 1 et les arrêts cités). Il n'y a pas lieu d'y
déroger
en l'espèce.

2.- a) La recourante reproche d'abord au Tribunal
administratif d'avoir arbitrairement passé sous silence le
fait, pourtant dûment prouvé et essentiel, que la Fédération
genevoise des assureurs-maladie a dénoncé avec effet au 31
décembre 1997 la convention tarifaire d'hospitalisation qui
la liait à l'Association des cliniques privées de Genève.

b) Le recours de droit public est recevable contre
une décision cantonale de dernière instance (art. 86 al. 1
OJ) pour violation de droits constitutionnels des citoyens
(art. 84 al. 1 let. a OJ), à la condition toutefois que la
prétendue violation ne puisse pas être soumise par une
action
ou par un autre moyen de droit quelconque au Tribunal
fédéral
ou à une autre autorité fédérale (art. 84 al. 2 OJ; principe
de la subsidiarité absolue du recours de droit public).

En l'espèce, la recourante est en mesure de soumet-
tre la prétendue violation au Tribunal fédéral par la voie
du
recours en réforme, ce qu'elle a d'ailleurs fait. En effet,
si en instance de réforme, le Tribunal fédéral doit en prin-
cipe conduire son raisonnement sur la base des faits
contenus
dans la décision attaquée (art. 63 al. 2 OJ), il peut
décider
de compléter les constatations de l'autorité cantonale parce
que celle-ci n'a pas tenu compte de faits pertinents et régu-
lièrement allégués (art. 64 OJ; ATF 126 III 59 consid. 2a et
les arrêts cités). Dès lors que le grief invoqué peut ainsi
être soulevé dans le cadre du recours en réforme, il se révè-
le irrecevable dans le cadre du recours de droit public.

3.- a) La recourante fait également valoir que
l'arrêt du Tribunal administratif aboutirait à un résultat

totalement inéquitable, violant le principe d'égalité de
traitement reconnu à l'art. 8 Cst. En effet, après la dénon-
ciation au 31 décembre 1997 par la Fédération genevoise des
assureurs-maladie de la convention tarifaire d'hospitali-
sation qui la liait à l'Association des cliniques privées de
Genève, l'ensemble des caisses-maladie actives à Genève n'au-
raient versé dans le cadre de l'assurance complémentaire que
les prestations promises contractuellement. Ordonner à la
recourante de continuer à payer les prestations des assurés
au tarif d'une convention caduque constituerait une grave
discrimination par rapport aux autres caisses-maladie, qui
pourraient appliquer strictement leurs propres conditions
contractuelles.

b) Pour autant que ce grief ne relève pas de l'ap-
plication du droit civil fédéral et ne soit pas pour cette
raison déjà irrecevable au regard de l'art. 84 al. 2 OJ (cf.
consid. 3a supra), il apparaît de toute manière insuffisam-
ment motivé et donc irrecevable au regard de l'art. 90 al. 1
let. b OJ. En effet, la recourante se contente d'invoquer
une
inégalité de traitement virtuelle, sans même rendre vraisem-
blable que d'autres caisses-maladie actives à Genève
auraient
introduit en même temps qu'elle une nouvelle catégorie d'as-
surance complémentaire pour l'hospitalisation en division
privée ou en clinique avec limitation du choix de l'établis-
sement, ou qu'ayant introduit une telle nouveauté, elles
s'en
seraient tenues strictement à une liste d'établissements
agréés aussi restreinte que celle de la recourante.

4.- En définitive, le recours doit être déclaré
irrecevable
et la recourante, qui succombe, condamnée à
payer
les frais judiciaires (art. 156 al. 1 OJ). Il n'y a en re-
vanche pas lieu d'allouer de dépens dès lors que l'intimée
n'a pas été invitée à répondre au recours et n'a ainsi pas
assumé de frais pour la procédure devant le Tribunal fédéral

(Poudret/Sandoz-Monod, Commentaire de la loi Fédérale d'or-
ganisation judiciaire, vol. V, 1992, n. 2 ad art. 159 OJ).

Par ces motifs,

l e T r i b u n a l f é d é r a l :

1. Déclare le recours irrecevable.

2. Met un émolument judiciaire de 2'000 fr. à la
charge de la recourante.

3. Communique le présent arrêt en copie aux manda-
taires des parties et au Tribunal administratif du canton de
Genève.
__________

Lausanne, le 6 mars 2001
ABR/frs

Au nom de la IIe Cour civile
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE :
Le Juge présidant,

Le Greffier,


Synthèse
Numéro d'arrêt : 5P.459/2000
Date de la décision : 06/03/2001
2e cour civile

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2001-03-06;5p.459.2000 ?
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