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05/03/2001 | SUISSE | N°4P.274/2000

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 05 mars 2001, 4P.274/2000


«AZA 1/2»

4P.274/2000

Ie C O U R C I V I L E
************************

5 mars 2001

Composition de la Cour: MM. Walter, président, Leu et
Corboz,
juges. Greffière: Mme Aubry Girardin.
___________

Statuant sur le recours de droit public
formé par

Leo S c h m i d t, à Viège, demandeur et recourant, repré-
senté par Me Richard Steiner, avocat à Brigue,

contre

le jugement rendu le 13 octobre 2000 par la Ie Cour civile
du
Tribunal cantonal valaisan dans la cause

qui oppose le recou-
rant à la société le Groupe M a g r o S.A., à Sion, défen-
deresse et intimée, représentée par Me Rog...

«AZA 1/2»

4P.274/2000

Ie C O U R C I V I L E
************************

5 mars 2001

Composition de la Cour: MM. Walter, président, Leu et
Corboz,
juges. Greffière: Mme Aubry Girardin.
___________

Statuant sur le recours de droit public
formé par

Leo S c h m i d t, à Viège, demandeur et recourant, repré-
senté par Me Richard Steiner, avocat à Brigue,

contre

le jugement rendu le 13 octobre 2000 par la Ie Cour civile
du
Tribunal cantonal valaisan dans la cause qui oppose le recou-
rant à la société le Groupe M a g r o S.A., à Sion, défen-
deresse et intimée, représentée par Me Roger Pannatier, avo-
cat à Sion;

(indépendance du juge; appréciation arbitraire
des preuves en procédure civile)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- Leo Schmidt exploite un bureau d'ingénieur et
d'architecte à Viège.

Le Groupe Magro S.A. (ci-après: Magro), entreprise
de commerce de gros et de détail, sise à Sion, souhaitait
dès
1990 s'implanter dans le Haut-Valais.

Leo Schmidt a pris contact avec Jean-Marc Roduit,
le directeur général de Magro. Après discussions, ceux-ci se
sont mis d'accord sur la construction d'un centre commercial
à Viège, selon un projet déposé par Leo Schmidt.

Par contrat conclu le 15 décembre 1994, il a été
convenu que Magro louerait à Leo Schmidt le centre
commercial
à construire avec les terrains environnant sur une parcelle
située sur la commune de Viège. Cet acte stipulait qu'il
prendrait effet au moment de sa signature et remplacerait
tous les accords passés avant cette date, mais qu'il serait
annulé, sans que l'une ou l'autre des parties ne puisse pré-
tendre à un dédommagement, si le bailleur ne pouvait pas con-
clure les contrats d'achat nécessaires pour l'acquisition du
terrain et s'il ne pouvait pas l'inscrire au registre
foncier
"pour au plus tard le 31 janvier 1995". Il était également
prévu que le locataire déposerait "comme garantie de loyer,
et exclusivement comme garantie de loyer" une garantie ban-
caire irrévocable de deux millions de francs en faveur du
bailleur, et ce au plus tard au début des travaux de cons-
truction.

Le délai au 31 janvier 1995 a été reporté d'un com-
mun accord au 10 février 1995. Par courrier du 30 janvier
1995, le représentant de Schmidt a précisé que l'acte
d'achat

pouvait être signé avant le 31 janvier, mais que les formali-
tés d'enregistrement au registre foncier allaient prendre
quelques jours supplémentaires.

Par acte authentique du 31 janvier 1995, Leo
Schmidt a acquis les parcelles concernées à Viège.

Confortés par les assurances données par le manda-
taire de Schmidt dans sa lettre du 30 janvier 1995, les re-
présentants de Magro ont cru que l'inscription des parcelles
au registre foncier allait se faire dans le prolongement et
que le projet était en bonne voie de réalisation. Dans ce
contexte, Jean-Marc Roduit a écrit à Leo Schmidt, le 2 fé-
vrier 1995, qu'il avait appris la signature des contrats
d'achat du terrain et que le contrat de bail pouvait dès
lors
entrer en force. Il était encore précisé: "Nous attendons
simplement, pour la bonne forme, copie d'un extrait du Re-
gistre foncier attestant cet état de fait".

Des démarches en vue de réaliser le projet de cen-
tre commercial se sont poursuivies au-delà du 10 février
1995.

Par lettre du 9 mars 1995, Magro a été mise en de-
meure de fournir la garantie bancaire de deux millions de
francs avant le 13 mars 1995. Il était précisé que Leo
Schmidt ne commencerait la construction qu'une fois en pos-
session de ce document.

Ce courrier a suscité la méfiance de Magro envers
son partenaire contractuel et l'a fait douter de sa capacité
de financer le projet. Le 13 mars 1995, elle a signifié à
Leo
Schmidt qu'elle considérait cette mise en demeure comme nul-
le, puisque le contrat stipulait que la garantie bancaire se-
rait déposée au plus tard au début des travaux. Elle a aussi

demandé des précisions quant au financement et elle a
réclamé
un extrait du registre foncier.

Le lendemain, la fiduciaire de Schmidt a répondu à
Magro que l'inscription hypothécaire, qui coûtait plus de
100'000 fr., ne pouvait se faire avant d'avoir une sécurité
absolue concernant la réception de la garantie et que les
travaux de sondage avaient déjà commencé le 6 mars.

Le même jour, Magro a écrit à Leo Schmidt en
s'étonnant que le financement du projet ne soit pas réelle-
ment assuré, lui rappelant qu'aux termes du contrat du 15
décembre 1994, la garantie bancaire n'était délivrable que
comme garantie de loyer exclusivement et non comme condition
de financement. Elle a une nouvelle fois demandé la produc-
tion d'un extrait du registre foncier.

Sans répondre à cette demande, la fiduciaire de
Schmidt a imparti à Magro, le 20 mars 1995, un délai au 22
mars suivant pour déposer la garantie. Il a été retenu qu'à
cette date, le projet de Leo Schmidt était achevé.

Le 22 mars 1995, Magro a fait part à Leo Schmidt de
sa volonté de mettre les choses au point à propos de l'exécu-
tion du contrat du 15 décembre 1994. Elle a sollicité une
nouvelle fois la présentation de l'extrait du registre fon-
cier, tout en soulignant l'attitude surprenante de Schmidt à
propos de la garantie bancaire. Refusant de se laisser en-
traîner dans une situation non conforme aux règles
convenues,
elle a proposé une rencontre entre les parties.

A la suite de cette rencontre qui s'est tenue le 30
mars 1995, Magro a écrit, le même jour, à Leo Schmidt
qu'elle
considérait le contrat comme caduc, faute d'inscription de
Leo Schmidt au registre foncier en tant que propriétaire à
la
date du 10 février 1995. Elle se disait prête à négocier un

nouveau contrat, pour lequel elle formulait certaines exigen-
ces.

Le 4 avril 1995, Leo Schmidt a accusé réception de
cette lettre et a déclaré avoir pris connaissance des exigen-
ces de Magro. Il souhaitait que des négociations puissent
être menées dans les semaines suivantes. Le 24 avril, il a
une nouvelle fois souligné l'importance qu'il mettait à la
garantie bancaire de deux millions, tout en précisant que
les
négociations pouvaient se poursuivre.

Les parties ne sont pas parvenues à se mettre d'ac-
cord. Lors d'une séance du 21 juillet 1995, Leo Schmidt a ad-
mis la caducité du contrat du 15 décembre 1994.

L'acte de vente du 31 janvier 1995 a été finalement
inscrit au registre foncier le 4 août 1995. Leo Schmidt en a
informé Magro en lui faisant part d'une nouvelle proposition
par courrier du 8 août. Le 25 août, Magro a avisé Schmidt
que
son conseil d'administration prendrait une décision durant
la
première quinzaine de septembre. Le 12 septembre, elle lui a
indiqué que cette décision avait été reportée. Par courrier
du 23 octobre 1995, elle a informé Leo Schmidt que le
conseil
d'administration avait décidé de renvoyer de deux ans la dé-
cision d'implantation d'un centre commercial dans le Haut-
Valais et qu'il était dès lors mis fin aux pourparlers.

B.- Le 26 février 1996, Leo Schmidt a ouvert une
action contre Magro, en demandant le paiement de
1'916'125,15 fr. avec intérêt à 5 % dès le 1er novembre
1995.
Magro a conclu au rejet de la demande et au paiement de
50'000 fr. à titre reconventionnel.

Par jugement du 28 septembre 1999, le juge du dis-
trict de Sion a rejeté la demande principale et la demande
reconventionnelle.

Le 13 octobre 2000, le Tribunal cantonal valaisan a
rejeté l'appel formé par Leo Schmidt le 28 octobre 1999 à
l'encontre du jugement de première instance.

C.- Contre le jugement du 13 octobre 2000, Leo
Schmidt a déposé un recours de droit public rédigé en langue
allemande au Tribunal fédéral. Invoquant une violation des
art. 30 al. 1 et 9 Cst., il conclut à l'admission du recours
et à l'annulation du jugement entrepris.

Leo Schmidt a également interjeté un recours en
réforme au Tribunal fédéral à l'encontre de cette même déci-
sion.

Magro a proposé au Tribunal fédéral de rejeter le
recours de droit public formé par Leo Schmidt. Quant au Tri-
bunal cantonal, il n'a pas pris de conclusion, mais il a
fait
part de remarques en relation avec la violation de l'art. 30
al. 1 Cst. invoquée par le recourant.

C o n s i d é r a n t e n d r o i t :

1.- Il n'y a pas lieu de déroger en l'espèce au
principe de l'art. 57 al. 5 OJ (cf. ATF 122 I 81 consid. 1;
120 Ia 377 consid. 1 et les arrêts cités), de sorte qu'il
sera tout d'abord statué sur le recours de droit public.

2.- a) Le recours de droit public au Tribunal fé-
déral est ouvert contre une décision cantonale pour
violation
des droits constitutionnels des citoyens (art. 84 al. 1 let.
a OJ).

Le jugement rendu par le tribunal cantonal, qui est
final, n'est susceptible d'aucun autre moyen de droit sur le
plan fédéral ou cantonal dans la mesure où le recourant invo-
que la violation directe d'un droit constitutionnel, de
sorte
que la règle de la subsidiarité du recours de droit public
est respectée (art. 84 al. 2 et 86 al. 1 OJ). En revanche,
si
le recourant soulève une question relevant de l'application
du droit fédéral, le grief n'est pas recevable, parce qu'il
pouvait faire l'objet d'un recours en réforme (art. 43 al. 1
et 84 al. 2 OJ; cf. ATF 126 III 445 consid. 3b).

La cour cantonale a débouté le recourant de sa de-
mande en paiement, de sorte que celui-ci est lésé par la dé-
cision attaquée qui le concerne personnellement. Il a ainsi
qualité pour recourir (art. 88 OJ).

Interjeté en temps utile (art. 89 al. 1 OJ), dans
la forme prévue par la loi (art. 90 al. 1 OJ), le recours
est
donc en principe recevable.

b) S'agissant de la forme, il convient de préciser
que, bien que le jugement attaqué soit rédigé en français,
le
recourant peut déposer un mémoire en langue allemande devant
le Tribunal fédéral (art. 30 al. 1 OJ; art. 4 Cst.). Il n'y
a
cependant aucune raison de déroger en l'espèce à l'art. 37
al. 3 1ère phrase in fine OJ, à teneur duquel l'arrêt est ré-
digé, en règle générale, dans la langue de la décision atta-
quée. Le recourant ne fait du reste pas valoir qu'il serait
incapable de comprendre un arrêt en français (cf. ATF 124
III
205 consid. 2).

3.- Le recourant se plaint en premier lieu d'une
violation de l'art. 30 al. 1 Cst. Il considère qu'il n'est
pas compatible avec l'exigence d'impartialité que la juge
qui
avait fonctionné comme juge-instructeur en première instance
puisse, à la suite de son élection au Tribunal cantonal, fai-
re partie de la composition de la cour ayant rendu le juge-
ment entrepris.

Selon une jurisprudence constante, le grief tiré de
la prévention de l'un des membres d'une autorité doit être
invoqué dès que possible. Celui qui constate un tel vice et
qui ne le dénonce pas sans délai, mais laisse le procès se
dérouler sans intervenir, voit se périmer son droit de se
prévaloir ultérieurement d'une telle violation (ATF 119 Ia
221 consid. 5a p. 228 s. et les références citées). En par-
ticulier, il est contraire à la bonne foi d'attendre l'issue
d'une procédure pour tirer ensuite argument, à l'occasion
d'un recours, de la composition incorrecte de l'autorité qui
a statué, alors que le motif de récusation était déjà connu
auparavant (ATF 124 I 121 consid. 2; 119 Ia 221 consid. 5a
p.
228 s.; 118 Ia 282 consid. 3a). La garantie du juge naturel
comprend le droit d'être informé de la composition du tri-
bunal compétent (ATF 117 Ia 322 consid. 1c; 114 Ia 278 con-
sid. 3b), mais cela ne signifie toutefois pas que l'identité
des juges appelés à statuer doive nécessairement être commu-
niquée de manière expresse au justiciable; il suffit en
effet
que le nom de ceux-ci ressorte d'une publication générale fa-
cilement accessible, par exemple un annuaire officiel. La
partie assistée d'un avocat est en tout cas présumée connaî-
tre la composition régulière du tribunal (arrêt du Tribunal
fédéral des assurances du 26 septembre 2000 dans la cause I.
contre F. et F., destiné à la publication, consid. 1b et les
références citées; ATF 117 Ia 322 consid. 1c; 114 Ia 278 con-
sid. 3c p. 280).

En l'espèce, la juge à l'encontre de laquelle le
motif de prévention est invoqué était juge ordinaire au Tri-
bunal cantonal alors que la procédure de recours était pen-
dante devant cette autorité. Le recourant soutient qu'il n'a
pas eu connaissance de la composition de la cour avant le
prononcé du jugement entrepris. Il ressort toutefois des ob-
servations formées par la cour cantonale que le nom de la
magistrate concernée, comme du reste celui des deux autres
juges ayant siégé dans la présente cause, figurait sur la
liste des juges de la Cour civile I publiée dans le Rapport
1999 sur l'administration de la Justice du canton du Valais,
état au 15 mars 2000, et communiqué à chaque avocat du can-
ton. Contrairement à ce que soutient le recourant, il ne
s'agit donc pas d'une composition extraordinaire. Selon les
arrêts précités, celui-ci, représenté par un avocat
valaisan,
était ainsi censé connaître l'identité des juges appelés à
statuer sur son recours, de sorte qu'il ne pouvait attendre
le prononcé du jugement cantonal pour soulever une violation
de l'art. 30 al. 1 Cst. devant le Tribunal fédéral. Cette
conséquence peut certes apparaître comme sévère, dès lors
que, dans les circonstances du cas d'espèce, le recourant
aurait à la rigueur pu partir de l'idée que la juge ayant
instruit l'affaire en première instance ne siégerait pas en
appel. Il ne faut cependant pas perdre de vue que la juris-
prudence
se montre à cet égard très stricte, tout particu-
lièrement lorsque la partie qui se plaint de la composition
de l'autorité est, à l'instar du recourant, représentée par
un avocat. Bien qu'il s'agisse d'un cas limite, il y a donc
lieu de considérer que le grief a été invoqué tardivement et
qu'il n'est de ce fait pas recevable.

4.- Se fondant sur l'art. 9 Cst., le recourant
invoque en second lieu l'arbitraire dans l'appréciation des
preuves et dans l'établissement des faits.

a) Selon la jurisprudence, l'arbitraire, prohibé
par l'article 9 Cst., ne résulte pas du seul fait qu'une
autre solution que celle retenue par l'autorité cantonale
pourrait entrer en considération ou même qu'elle serait pré-
férable; le Tribunal fédéral ne s'écarte de la décision atta-
quée que lorsque celle-ci est manifestement insoutenable,
qu'elle se trouve en contradiction évidente avec la
situation
de fait, qu'elle viole gravement une norme ou un principe ju-
ridique clair et indiscuté ou encore lorsqu'elle heurte de
manière choquante le sentiment de la justice et de l'équité
(ATF 126 III 438 consid. 3 p. 440). Pour qu'une décision
soit
annulée pour cause d'arbitraire, il ne suffit pas que la mo-
tivation formulée soit insoutenable, il faut encore que la
décision apparaisse arbitraire dans son résultat (ATF 125 I
166 consid. 2a, II 129 consid. 5b p. 134; 124 I 247 consid.
5
p. 250).

S'agissant plus précisément de l'appréciation des
preuves et des constatations de fait, il y a arbitraire lors-
que l'autorité ne prend pas en compte, sans aucune raison sé-
rieuse, un élément de preuve propre à modifier la décision,
lorsqu'elle se trompe manifestement sur son sens et sa por-
tée, ou encore lorsque, en se fondant sur les éléments re-
cueillis, elle en tire des constatations insoutenables.

Il appartient au recourant d'établir la réalisation
de ces conditions en tentant de démontrer, par une argumenta-
tion précise, que la décision incriminée est insoutenable
(art. 90 al. 1 let. b OJ; ATF 122 I 70 consid. 1c p. 73; 117
Ia 393 consid. 1c p. 395; 110 Ia 1 consid. 2a).

b) Le recourant se plaint, tout d'abord de façon
générale, que le jugement entrepris soit identique à celui
rendu en première instance. Ce grief est dépourvu de tout
fondement, car on ne voit manifestement pas en quoi le fait
que l'autorité d'appel ait globalement procédé à une appré-

ciation des preuves similaire à celle de première instance
suffise à démontrer l'arbitraire au sens défini ci-dessus.

c) Le recourant soutient ensuite que la cour can-
tonale aurait retenu une série de faits en contradiction ma-
nifeste avec les pièces du dossier.

aa) Il lui reproche d'avoir constaté que, le 20
mars 1995, son projet était terminé. On ne voit toutefois
pas
que cet élément puisse être de nature à influencer le résul-
tat de la décision entreprise, puisqu'il n'a d'incidence que
sur le montant des dommages-intérêts auxquels pourrait pré-
tendre le recourant. Or, la cour cantonale, rejetant toute
responsabilité de l'intimée, n'avait pas à examiner cette
question. Dénué de pertinence, le grief est donc infondé.

bb) Selon le recourant, c'est contrairement à la
situation de fait que les juges ont constaté qu'il avait ad-
mis de manière implicite, dès avril 1995, puis explicitement
lors de la séance du 21 juillet 1995, que le contrat du 15
décembre 1994 était devenu caduc. Il ressort du jugement at-
taqué que, pour faire cette constatation, la cour cantonale
s'est fondée sur l'absence de réaction du recourant à la con-
firmation écrite de la caducité du contrat par l'intimée le
30 mars 1995, ainsi que sur le compte-rendu de la séance du
21 juillet 1995 établi par l'intimée le 24 juillet et sur
deux témoignages. Le recourant ne conteste pas l'existence
de
ces éléments, mais il soutient que l'intimée elle-même
aurait
renoncé à se prévaloir de la caducité du contrat. Il mention-
ne à cet égard la lettre du 2 février 1995, dans laquelle la
société avait indiqué que le contrat entrait en force. Il se
garde cependant de rappeler que ce courrier faisait suite à
ses propres assurances relatives à l'imminence de l'inscrip-
tion au registre foncier. En outre, dans cette lettre, l'in-
timée rappelait qu'elle attendait encore la copie de l'ex-
trait du registre foncier. Le recourant fait également état

de l'attitude de l'intimée qui, jusqu'à la fin du mois de
mars 1995, ne s'est pas prononcée clairement sur la validité
du contrat. Le recourant semble toutefois perdre de vue que,
durant cette période, il a lui-même tenu en expectative
l'intimée, lui laissant croire que le projet était en bonne
voie de réalisation. Enfin, le recourant ne peut être suivi
lorsqu'il soutient que l'inscription au registre foncier ef-
fectuée en août 1995 prouverait qu'il n'a jamais reconnu le
contrat comme caduc, puisque celle-ci est seulement la con-
séquence logique de l'achat des terrains. Aucun des éléments
invoqués n'est ainsi de nature à démontrer que les constata-
tions de la cour cantonale seraient en contradiction manifes-
te avec les pièces du dossier s'agissant de l'admission de
la
caducité du contrat par le recourant.

cc) Quant au grief selon lequel la cour cantonale
aurait omis de constater que l'intimée n'avait jamais
délivré
la garantie bancaire de deux millions, il est à l'évidence
infondé, dès lors que les juges ont analysé la portée du re-
fus de l'intimée de fournir cette garantie. Ce que le recou-
rant conteste en réalité, c'est la signification juridique
donnée à ce refus, ce qui n'est pas admissible dans le cadre
d'un recours de droit public, lorsque la voie du recours en
réforme est ouverte (cf. supra consid. 2a).

En outre, comme la cour cantonale a considéré en
droit que l'intimée n'avait pas violé ses obligations con-
tractuelles en ne fournissant pas la garantie de loyer, on
ne
voit pas que l'on puisse lui reprocher, sous l'angle de
l'arbitraire, de ne pas s'être demandé si la société était
ou
non en mesure de libérer cette garantie.

d) Enfin, le recourant considère que c'est arbi-
trairement que la cour cantonale n'a pas admis que l'intimée
avait commis une culpa in contrahendo.

Il soutient tout d'abord que les faits retenus font
ressortir de manière explicite l'existence d'une culpa in
contrahendo, de sorte qu'il était insoutenable de la nier.
Par cette critique, il reproche à la cour cantonale d'avoir
méconnu la notion de culpa in contrahendo. A nouveau, il sou-
lève une question relevant de l'application du droit
fédéral,
ce qui n'est pas admissible dans la cadre de la présente pro-
cédure.

Le recourant reproche ensuite à la cour cantonale
de n'avoir arbitrairement tenu compte que des témoignages en
sa défaveur. Il ne cite toutefois aucune déclaration ou té-
moignage précis de nature à établir la culpa in contrahendo
de l'intimée. Insuffisamment motivée (cf. supra let. a in
fine), sa critique n'est pas recevable.

Le recourant fait également grief aux juges de
s'être contentés de reprendre la décision de première ins-
tance, sans procéder eux-mêmes à une appréciation des preu-
ves, ce qui leur aurait permis d'établir la culpa in contra-
hendo de l'intimée. A cet égard, il reprend toute une série
de faits, en leur donnant sa propre interprétation, mais
sans
faire ressortir le caractère insoutenable de l'appréciation
retenue par les juges cantonaux. Comme le relève
pertinemment
l'intimée, le recourant confond à cet égard le recours de
droit public avec un appel, ce qui n'est pas admissible (cf.
ATF 125 I 492 consid 1b p. 495; 117 Ia 412 consid. 1c).

Toujours dans le même contexte, le recourant men-
tionne des éléments établissant selon lui l'existence d'une
culpa in contrahendo et dont la cour cantonale n'aurait arbi-
trairement pas tenu compte. Il cite des pièces démontrant
que
l'intimée cherchait, en mai et en juin 1995, à obtenir de sa
banque la garantie bancaire de deux millions. Il fait égale-
ment état de publications datant de mai 1995 dans lesquelles
l'intimée avait manifesté son intention de s'implanter dans

le Haut-Valais. Contrairement à ce que soutient le
recourant,
une telle attitude ne démontre pas la mauvaise foi de l'inti-
mée, puisqu'il ressort des faits retenus qu'en mai et en
juin
1995, les parties considéraient certes le contrat de
décembre
1994 comme caduc, mais qu'elles étaient en négociation pour
trouver un nouvel accord. L'intimée entendait donc toujours
s'établir dans le Haut-Valais à cette époque et, comme le re-
courant avait insisté sur l'importance d'une garantie de
loyer, il est compréhensible qu'elle ait alors continué ses
démarches auprès de la banque pour obtenir une telle assuran-
ce, tout en considérant le contrat du 15 décembre 1994 comme
caduc. Ces éléments n'étant pas de nature à établir la culpa
in contrahendo de l'intimée, on ne peut reprocher à la cour
cantonale de ne pas les avoir mentionnés.

Dans ces circonstances, le recours doit être rejeté
dans la mesure où il est recevable.

5.- Le recourant, qui succombe, sera condamné aux
frais et dépens (art. 156 al. 1 et 159 al. 1 OJ).

Par ces motifs,

l e T r i b u n a l f é d é r a l :

1. Rejette le recours dans la mesure où il est re-
cevable;

2. Met un émolument judiciaire de 15'000 fr. à la
charge du recourant;

3. Dit que le recourant versera à l'intimée une in-
demnité de 20'000 fr. à titre de dépens;

4. Communique le présent arrêt en copie aux manda-
taires des parties et à la Ie Cour civile du Tribunal canto-
nal valaisan.

__________

Lausanne, le 5 mars 2001
ECH

Au nom de la Ie Cour civile
du TRIBUNAL FÉDÉRAL SUISSE:
Le Président,

La Greffière,


Synthèse
Numéro d'arrêt : 4P.274/2000
Date de la décision : 05/03/2001
1re cour civile

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2001-03-05;4p.274.2000 ?
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