La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

05/03/2001 | SUISSE | N°2A.555/2000

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 05 mars 2001, 2A.555/2000


«/2»
2A.555/2000

IIe C O U R D E D R O I T P U B L I C
***********************************************

5 mars 2001

Composition de la Cour: MM. et Mme les Juges Wurzburger,
président, Hartmann et Yersin.
Greffier: M. de Vries Reilingh.

Statuant sur le recours de droit administratif
formé par

A.________ , née B.________ le 13 janvier 1972,

contre

la décision prise le 31 octobre 2000 par le Département fé-
déral de justice et police;

(art. 17 al. 2 LSEE et 8 par.

1 CEDH: refus d'approuver
le renouvellement de l'autorisation de séjour)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
...

«/2»
2A.555/2000

IIe C O U R D E D R O I T P U B L I C
***********************************************

5 mars 2001

Composition de la Cour: MM. et Mme les Juges Wurzburger,
président, Hartmann et Yersin.
Greffier: M. de Vries Reilingh.

Statuant sur le recours de droit administratif
formé par

A.________ , née B.________ le 13 janvier 1972,

contre

la décision prise le 31 octobre 2000 par le Département fé-
déral de justice et police;

(art. 17 al. 2 LSEE et 8 par. 1 CEDH: refus d'approuver
le renouvellement de l'autorisation de séjour)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- Ressortissante marocaine, A.________ est arrivée en
Suisse en novembre 1998. En raison de son mariage le 21 jan-
vier 1999 avec C.________, citoyen italien né le 18 novembre
1965, titulaire d'une autorisation d'établissement, elle a
bénéficié d'une autorisation de séjour.

En raison des violences graves et permanentes de son
époux qui au surplus la séquestrait, elle s'est enfuie du
domicile conjugal le 31 août 1999 à l'occasion d'un déména-
gement pour se réfugier dans un foyer.

Le 3 septembre 1999, elle a déposé plainte pénale con-
tre son mari pour lésions corporelles, violences conjugales,
séquestration et viol entre époux.

Le 26 janvier 2000, elle a intenté une action en sépa-
ration de corps contre son conjoint.

B.- Le 27 janvier 2000, l'Office cantonal de la popula-
tion du canton de Genève (ci-après: l'Office cantonal) a in-
formé l'intéressée qu'il renonçait, en l'état, "à mettre en
exécution [son] intention de ne pas renouveler son autorisa-
tion de séjour". Il a toutefois réservé l'approbation de
l'Office fédéral des étrangers (ci-après: l'Office fédéral).

Le 10 mars 2000, ce dernier office a refusé de donner
son approbation au renouvellement de l'autorisation de sé-
jour.

Le 12 octobre 2000, le Tribunal de première instance du
canton de Genève a notamment prononcé la séparation de corps
entre les époux.

Le 19 octobre 2000, A.________ a donné naissance à une
fille nommée D.________.

Le 31 octobre 2000, le Département fédéral de justice
et police (ci-après: le Département fédéral) a rejeté le re-
cours de l'intéressée contre la décision prise le 10 mars
2000 par l'Office fédéral. Il a essentiellement considéré
que, les époux vivant séparés depuis le 31 août 1999,
A.________ ne pouvait se prévaloir d'aucun droit à la déli-
vrance d'une autorisation de séjour, peu importaient les mo-
tifs et responsabilités de la séparation du couple. Par ail-
leurs, l'intéressée ne s'était pas créé, pendant son séjour
en Suisse, de liens particulièrement intenses et profonds
avec son pays d'accueil, les conjoints s'étant séparés après
huit mois et aucun enfant n'étant issu de leur union. Elle
avait en outre conservé de fortes attaches avec le Maroc où
elle était née, avait été éduquée et passé toute son adoles-
cence et ses premières années d'adulte, de sorte qu'elle
n'avait pas atteint un niveau d'intégration tel qu'il se
justifierait de renouveler son autorisation de séjour dont
elle avait bénéficié uniquement en raison de son mariage
avec un ressortissant étranger titulaire d'une autorisation
d'établissement. Enfin, il ne s'imposait pas non plus d'ap-
prouver le renouvellement de son autorisation de séjour pour
qu'elle puisse assister aux procédures civiles et pénales
intentées contre son mari, dès lors qu'elle pourrait obtenir
un visa ponctuel à cet effet. Les coûts de voyage élevés in-
voqués n'étaient pas relevant à cet égard, car il appartien-
drait aux autorités judiciaires de déterminer dans quelle
mesure sa présence aux procédures précitées était nécessaire
et de prendre le cas échéant les dispositions pour assurer
sa comparution.

Le 7 novembre 2000, l'Office fédéral a imparti à
A.________ un délai échéant le 30 janvier 2001 pour quitter
la Suisse.

C.- Le 30 novembre 2000, le Département fédéral a dé-
claré irrecevable la demande en révision de sa décision pri-
se le 31 octobre 2000 présentée par l'intéressée. Il a esti-
mé en substance que la naissance de sa fille D.________
n'était pas un fait nouveau important ouvrant la voie de la
révision dès lors que A.________ avait accouché avant que la
décision dont elle demandait la révision ne soit prise et
qu'elle était déjà enceinte, probablement de onze semaines,
au moment où elle a interjeté recours contre la décision
du 10 mars 2000 de l'Office fédéral. L'acte de naissance
ne constituait pas non plus une preuve nouvelle dans la me-
sure où il porte sur un fait qu'elle ne pouvait ignorer et
qu'elle n'avait en outre pas invoqué. Par ailleurs, l'accou-
chement ayant eu lieu avant la décision départementale du 31
octobre 2000, la naissance de l'enfant ne pouvait pas non
plus être invoquée dans le cadre d'une demande de réexamen
adressée à l'Office fédéral. Enfin, le Département fédéral
n'a pas exclu que la naissance de D.________ puisse avoir
une incidence sur l'éloignement et a invité l'Office canto-
nal à examiner attentivement cette question dans le cadre
des mesures visant à l'exécution du renvoi.

D.- Agissant par la voie du recours de droit adminis-
tratif, A.________ demande au Tribunal fédéral d'annuler la
décision prise le 31 octobre 2000 par le Département fédéral
et celle prise le 10 mars 2000 par l'Office fédéral. Elle
requiert également d'ordonner le renouvellement de son auto-
risation de séjour et de "renvoyer le dossier à l'adminis-
tration" pour nouvelle décision dans ce sens. Elle demande
en outre à être mise au bénéfice de l'assistance judiciaire.

Le Département fédéral conclut à l'irrecevabilité du
recours.

E.- Par ordonnance du 21 décembre 2000, le Président de
la IIe Cour de droit public a admis la demande d'effet sus-
pensif présentée par l'intéressée.

F.- Par courrier du 23 février 2001, A.________ a fait
parvenir à l'autorité de céans l'arrêt rendu le 6 février
2001 par la Cour d'assises du canton de Genève condamnant
son mari notamment à six ans de réclusion pour séquestra-
tions aggravées, lésions corporelles simples, injures, viols
et menaces.

Le 27 février 2001, le Département fédéral a également
envoyé cet arrêt pour le joindre à son dossier.

C o n s i d é r a n t e n d r o i t :

1.- a) Selon l'art. 100 al. 1 lettre b ch. 3 OJ, le re-
cours de droit administratif n'est pas recevable en matière
de police des étrangers contre l'octroi ou le refus d'auto-
risations auxquelles le droit fédéral ne confère pas de
droit. Selon l'art. 4 de la loi fédérale du 26 mars 1931
sur le séjour et l'établissement des étrangers (LSEE; RS
142.20), les autorités compétentes statuent librement, dans
le cadre des prescriptions légales et des traités avec
l'étranger, sur l'octroi ou le refus d'autorisations de sé-
jour ou d'établissement. En principe, l'étranger n'a pas
droit à l'autorisation de séjour. Ainsi, le recours de droit
administratif est irrecevable, à moins que ne puisse être
invoquée une disposition particulière du droit fédéral ou
d'un traité, accordant le droit à la délivrance d'une telle
autorisation (ATF 126 II 425 consid. 1 p. 427; 377 consid. 2
p. 381; 335 consid. 1a p. 337/338 et les arrêts cités).

b) L'art. 17 al. 2 1ère phrase LSEE dispose que le con-
joint d'un étranger possédant une autorisation d'établisse-
ment a droit à une autorisation de séjour aussi longtemps
que les époux vivent ensemble. Cette disposition légale
n'est applicable qu'aussi longtemps qu'existe une communauté
conjugale juridique et effectivement vécue, contrairement à
l'art. 7 LSEE qui n'exige que l'existence formelle du maria-
ge pour que le conjoint étranger d'un ressortissant suisse
puisse prétendre à une autorisation de séjour. Peu importe
la cause pour laquelle les époux ne vivent pas ensemble,
pour autant que cette séparation ne soit pas de très courte
durée et qu'une reprise de la vie commune ne soit pas sé-
rieusement envisagée. Il est également sans importance
qu'aucune procédure en divorce n'ait été introduite ou
qu'elle ne soit pas terminée (arrêt non publié du 1er avril
1998 en la cause Loukili contre le Département fédéral de
justice et police consid. 2b; Alain Wurzburger, La jurispru-
dence récente du Tribunal fédéral en matière de police des
étrangers, in RDAF 1997 p. 267 ss, p. 278).

En l'espèce, il n'est pas contesté que la recourante
s'est mariée avec un étranger titulaire du permis d'établis-
sement le 21 janvier 1999 et qu'elle vit séparée de son mari
depuis le 31 août 1999, soit depuis une année et demie envi-
ron. Le 12 octobre 2000, la séparation de corps entre les
époux a en outre été prononcée. Ainsi, dans la mesure où la
recourante ne fait plus ménage commun avec son conjoint de-
puis une assez longue période et que la reprise de la vie
commune paraît exclue, elle ne peut pas déduire de l'art. 17
al. 2 1ère phrase LSEE un droit à l'octroi d'une autorisa-
tion de séjour, ce qu'elle ne prétend au demeurant pas.

c) aa) L'intéressée se réclame de l'art. 8 par. 1 de la
Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et
des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (ci-après:
CEDH; RS 0.101) et soutient qu'elle aurait le droit de rési-

der en Suisse en raison de son lien avec sa fille D.________
qui aurait le droit d'être incluse dans le permis d'établis-
sement de son père légal. Ce dernier ne serait toutefois pas
le père biologique.

bb) Selon l'art. 17 al. 2 3ème phrase LSEE, si un
étranger possède l'autorisation d'établissement, ses en-
fants célibataires âgés de moins de dix-huit ans ont le
droit d'être inclus dans l'autorisation d'établissement
aussi longtemps qu'ils vivent auprès de leurs parents.

L'art. 8 par. 1 CEDH, qui garantit le respect de la vie
privée et familiale, confère en principe un droit à l'au-
torisation de séjour, à condition que la relation entre
l'étranger et une personne de sa famille ayant le droit de
s'établir en Suisse (en principe nationalité suisse ou per-
mis d'établissement) soit étroite et effective (ATF 126 II
425 consid. 2a p. 427; 377 consid. 2b et 2c p. 382-386).

cc) De l'aveu de la recourante, son époux n'est pas le
père de sa fille avec qui elle ne vit plus. Son enfant ne
demeure pas non plus avec celui-ci. L'intéressée ne prétend
par ailleurs pas que son mari entretiendrait des contacts
avec sa fille ou qu'il exercerait un droit de visite. Son
enfant D.________ n'a dès lors pas de droit à être incluse
dans l'autorisation d'établissement de son père légal. Il
importe peu à cet égard que son époux soit le père légal de
sa fille en vertu de l'art. 255 al. 1 CC. Partant, la recou-
rante ne peut se prévaloir d'une relation étroite et effec-
tive avec un membre de sa famille - D.________ en l'occur-
rence - ayant le droit de s'établir en Suisse.

Au demeurant, l'intéressée ne prétend pas non plus
qu'elle ou son enfant D.________ entretiendraient une re-
lation vécue et effective avec le père biologique de sa fil-

le, ni d'ailleurs que ce dernier bénéficierait d'un permis
d'établissement ou aurait le droit d'obtenir un tel permis.

d) Dès lors, la recourante n'a pas de droit à l'auto-
risation de séjour, que ce soit sur la base de l'art. 17 al.
2 LSEE ou de l'art. 8 par. 1 CEDH - la conduite d'un procès
concernant sa vie privée et familiale ne conférant au demeu-
rant pas non plus de droit à une telle autorisation. Son re-
cours de droit administratif se révèle donc irrecevable en
vertu de l'art. 100 al. 1 lettre b ch. 3 OJ. Par ailleurs,
le présent recours est également irrecevable comme recours
de droit public car l'autorité intimée est une autorité fé-
dérale (art. 84 al. 1 OJ a contrario).

2.- Pour le surplus, la question de savoir si l'inté-
ressée remplit le cas échéant les conditions de l'art. 13
lettre f de l'ordonnance du 6 octobre 1986 limitant le nom-
bre des étrangers (OLE; RS 823.21) ne fait pas l'objet de la
présente procédure, de sorte qu'elle ne doit pas être exami-
née (à ce sujet cf. Wurzburger, op. cit., p. 291 à 298).

3.- Vu ce qui précède, le recours est irrecevable.

Au surplus, le Tribunal fédéral a pris note que l'Offi-
ce cantonal était invité à examiner attentivement la situa-
tion de la recourante dans le cadre des mesures visant à
l'exécution du renvoi.

L'intéressée a présenté une requête d'assistance judi-
ciaire au sens de l'art. 152 OJ. Celle-ci doit toutefois
être rejetée, les conclusions du recours apparaissant d'em-
blée vouées à l'échec. Toutefois, compte tenu de la situa-
tion financière modeste de la recourante, il y a lieu de
fixer l'émolument judiciaire mis à sa charge au minimum
prévu par l'art. 153a al. 2 lettre b OJ.

Par ces motifs,

l e T r i b u n a l f é d é r a l :

1. Déclare le recours irrecevable.

2. Rejette la demande d'assistance judiciaire.

3. Met un émolument judiciaire de 200 fr. à la charge
de la recourante.

4. Communique le présent arrêt en copie à la recourante
et au Département fédéral de justice et police.

Lausanne, le 5 mars 2001
DVR/mnv

Au nom de la IIe Cour de droit public
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
Le Président,

Le Greffier,


Synthèse
Numéro d'arrêt : 2A.555/2000
Date de la décision : 05/03/2001
2e cour de droit public

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2001-03-05;2a.555.2000 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award