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05/03/2001 | SUISSE | N°1A.325/2000

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 05 mars 2001, 1A.325/2000


«/2»

1A.325/2000

Ie C O U R D E D R O I T P U B L I C
**********************************************

5 mars 2001

Composition de la Cour: MM. les Juges Aemisegger, Président,
Vice-président du Tribunal fédéral, Féraud et Favre.
Greffier: M. Kurz.

Statuant sur le recours de droit administratif
formé par

l'Office fédéral de la justice, à Berne,

contre

l'ordonnance rendue le 8 novembre 2000 par la Chambre d'accu-
sation du canton de Genève dans la cause qui oppose l'

office
recourant à X.________ et Y.________, représentés par Me
Bruno de Preux, avocat à Genève;

(entraide judici...

«/2»

1A.325/2000

Ie C O U R D E D R O I T P U B L I C
**********************************************

5 mars 2001

Composition de la Cour: MM. les Juges Aemisegger, Président,
Vice-président du Tribunal fédéral, Féraud et Favre.
Greffier: M. Kurz.

Statuant sur le recours de droit administratif
formé par

l'Office fédéral de la justice, à Berne,

contre

l'ordonnance rendue le 8 novembre 2000 par la Chambre d'accu-
sation du canton de Genève dans la cause qui oppose l'office
recourant à X.________ et Y.________, représentés par Me
Bruno de Preux, avocat à Genève;

(entraide judiciaire à la France)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- Le 8 décembre 1997, le Ministre de la Justice de
la République française a adressé à l'Office fédéral de la
police (ci-après: OFP) une demande d'entraide judiciaire pré-
sentée pour les besoins d'une enquête pour délits d'initiés
conduite par un Juge d'instruction près le Tribunal de
Grande
Instance de Paris contre Y.________, X.________, Z.________
et autres. L'enquête se rapporte à la vente de gré à gré, à
trois banques suisses, de titres du groupe X.________, entre
le 31 juillet et le 11 septembre 1992, à un prix supérieur
au
cours, juste avant l'annonce, le 21 septembre 1992, des ré-
sultats semestriels du groupe, en fort retrait par rapport à
l'exercice précédent. Immédiatement après cette annonce, le
cours de l'action a chuté de 7,48%. Il a ensuite régulière-
ment baissé et se serait stabilisé peu avant l'annonce, en
janvier 1993, de l'absorption du groupe X.________ par
A.________. Les ventes avaient été effectuées sur instruc-
tions de Y.________ (dirigeant effectif du groupe) et réali-
sées par Z.________, ces deux personnes disposant dès la fin
du mois de juillet 1992 d'informations inconnues du public
concernant la dégradation des résultats du groupe
X.________.
Le produit de la vente aurait servi à résorber des
découverts
importants dans les comptes de Y.________ et de X.________.
Après un premier non-lieu, un supplément d'information avait
été requis afin de déterminer les destinataires des actions
et les conditions de leur cession. Des actes d'enquête
étaient requis auprès des trois banques suisses concernées.

B.- Le canton de Genève a été désigné comme canton
directeur le 15 décembre 1997. Après être entré en matière
le
6 janvier 1998, et avoir obtenu des banques la documentation
requise, le Juge d'instruction genevois a, le 12 mai 1999,
retourné la demande à l'OFP en considérant, sur le vu des ex-

plications fournies par Y.________ et X.________, que la con-
dition de la double incrimination n'était pas remplie, à dé-
faut notamment d'exploitation de faits confidentiels et d'en-
richissement. Par décision de clôture du 26 juillet 1999, il
a rejeté la demande d'entraide, pour les mêmes motifs.

Par ordonnance du 13 octobre 1999, la Chambre d'ac-
cusation du canton de Genève a admis un recours formé par
l'OFP contre cette dernière décision, et a renvoyé la cause
pour nouvelle décision au juge d'instruction, au motif que
celui-ci n'avait pas à revoir l'état de fait - clair et dé-
pourvu de contradictions - joint à la demande.

Par arrêt du 24 janvier 2000, le Tribunal fédéral a
déclaré irrecevables les recours formés contre cette ordon-
nance, compte tenu de son caractère incident.

C.- Par ordonnance du 26 juillet 2000, le juge
d'instruction a derechef rejeté la demande d'entraide. Les
investigations menées en Suisse avaient permis de découvrir
que le produit de la vente des actions avait été acheminé
auprès d'une banque de Paris, afin de couvrir l'endettement
de X.________ et Y.________. Les inculpés s'étaient vendu
les
titres à eux-mêmes, de sorte qu'il n'y avait ni exploitation
de faits confidentiels, ni enrichissement illégitime.

D.- Sur recours de l'Office fédéral de la justice
(devenu entre-temps compétent en la matière), la Chambre
d'accusation a confirmé cette décision par ordonnance du 8
novembre 2000. Selon la jurisprudence, des pertes ou une di-
minution sensible des bénéfices, telles qu'exposées dans la
demande d'entraide, ne constituaient pas des faits confiden-
tiels au sens de l'art. 161 ch. 1 et 3 CP. C'est au Tribunal
fédéral qu'il appartiendrait le cas échéant de modifier
cette
jurisprudence, comme le souhaitait l'OFJ.

E.- L'OFJ forme un recours de droit administratif
contre cette dernière ordonnance, dont il requiert l'annula-
tion. Il est d'avis que la jurisprudence devrait se montrer
plus large dans l'interprétation de la notion de "faits ana-
logues d'importance comparable" figurant à l'art. 161 ch. 3
CP.

X.________, Y.________ et les trois sociétés tou-
chées par les mesures d'entraide concluent au rejet du re-
cours.

C o n s i d é r a n t e n d r o i t :

1.- Le recours est formé en temps utile contre une
ordonnance de refus de l'entraide judiciaire confirmée par
l'autorité de dernière instance cantonale (art. 80f al. 1
EIMP). La qualité pour recourir de l'OFJ résulte de l'art.
80h let. a EIMP.

2.- Selon l'art. 161 ch. 1 CP, est punissable de
l'emprisonnement ou de l'amende celui qui, notamment en qua-
lité de membre du conseil d'administration ou de la
direction
d'une société anonyme, aura obtenu pour lui-même ou pour un
tiers un avantage pécuniaire en exploitant la connaissance
qu'il a d'un fait confidentiel dont il est prévisible que la
divulgation exerce une influence notable sur le cours de
l'action négociée en bourse ou avant bourse. Selon le ch. 3
de cette disposition, sont considérés comme faits, au sens
du
ch. 1, "l'émission imminente de nouveaux droits de participa-
tion, un regroupement d'entreprises ou tout fait analogue
d'importance comparable".

a) La cour cantonale s'est fondée sur la jurispru-
dence du Tribunal fédéral, qui exclut du cercle des informa-
tions confidentielles non seulement les informations de peu
d'importance, mais aussi celles qui ne présentent pas une

analogie directe avec les deux exemples mentionnés à l'art.
161 ch. 3 CP. Des pertes subies par une entreprise ou une
diminution de son bénéfice ne constituent pas de tels faits
(ATF 118 Ib 547). En l'espèce, selon l'exposé figurant dans
la demande - seul déterminant -, les personnes mises en exa-
men auraient profité d'informations privilégiées concernant
une baisse importante du bénéfice du groupe X.________. En
droit suisse, de tels agissements ne seraient donc pas pu-
nissables.

Avec raison, la cour cantonale n'a pas considéré -
comme l'a fait le juge d'instruction - qu'en raison de
l'identité entre acheteurs et vendeurs, l'enrichissement il-
légitime ne pouvait être retenu. En effet, la demande d'en-
traide expose le soupçon que les ventes litigieuses ont pro-
fité à leurs auteurs. Quand bien même les investigations me-
nées en Suisse ont démontré le contraire, l'examen de la
double incrimination doit se faire sur la base des seuls
soupçons initialement exposés.

b) L'OFJ est d'avis que, contrairement à la juris-
prudence actuelle, la notion de "faits analogues
d'importance
comparable" devrait être élargie à toutes les informations
susceptibles d'avoir les effets mentionnés à l'art. 161 ch.
1
CP. Tel serait l'opinion exprimée par la Commission fédérale
des bourses (CFB) en matière d'entraide administrative,
ainsi
que par une partie de la doctrine récente. Cette interpréta-
tion permettrait par ailleurs l'octroi de l'entraide la plus
large possible, notamment dans le cas de délits d'initiés
dont le caractère international est marqué, comme l'exige
l'art. 1 al. 1 CEEJ. Tel serait aussi le sens de l'art. 4
al.
4 TEJUS, qui permet de faire abstraction de différences dans
les éléments constitutifs qui ne sont pas essentiels. Selon
la demande d'entraide, l'annonce de la baisse importante du
bénéfice aurait provoqué une chute, significative, de 7,4%
du
cours du titre.

3.- Contrairement à ce que soutient implicitement
l'office recourant, l'autorité suisse saisie d'une demande
d'entraide judiciaire ne peut, lorsqu'elle examine la punis-
sabilité des faits selon le droit suisse, interpréter plus
largement les dispositions applicables que ne le ferait le
juge pénal national. Les règles d'interprétation valables
dans ce domaine doivent être appliquées de la même manière.
Consacré à l'art. 1 CP, selon lequel nul ne peut être puni
s'il n'a commis un acte expressément réprimé par la loi, le
principe fondamental de la légalité des peines n'empêche pas
le juge pénal - ou les autorités chargées de juger de l'ad-
missibilité d'une demande d'entraide - de recourir aux métho-
des habituelles d'interprétation des textes légaux, afin
d'en
dégager le sens véritable (ATF 126 II 71 consid. 6d p.
80/81;
228 consid. 2a p. 230/231). Le juge prendra d'abord en consi-
dération le texte de la disposition concernée, et sa place
dans la systématique légale (interprétation littérale et sys-
tématique). Il s'inspirera ensuite de son but, en
particulier
de l'intérêt protégé, et de la volonté du législateur, telle
qu'elle ressort notamment des travaux préparatoires (ATF 118
Ib 448 consid. 3c p. 451/452 et les arrêts cités), pour au-
tant toutefois qu'elle ait trouvé son expression dans le tex-
te légal.

a) La jurisprudence rappelée par la cour cantonale,
rendue dans le cadre d'une procédure d'entraide judiciaire,
considère que la notion de "faits analogues d'importance com-
parable" doit être interprétée restrictivement (ATF 118 Ib
547 consid. 4 p. 553). Dans ce dernier arrêt, le Tribunal fé-
déral a tout d'abord rappelé que la doctrine était largement
divisée sur l'interprétation de cette notion (consid. 4b).
Il
s'est ensuite livré à un examen de détail des travaux prépa-
ratoires: le message du Conseil fédéral mentionnait, comme
autres exemples, des opérations immobilières d'envergure,
ainsi que des pertes imminentes importantes. Les débats par-
lementaires ont toutefois abouti à l'adoption d'une formula-

tion tenant compte de faits non seulement "d'importance com-
parable", mais aussi "analogues" aux deux exemples retenus,
ce qui impliquait une ressemblance non seulement quantitati-
ve, mais aussi qualitative. Seule une perte massive de subs-
tance de l'entreprise, devant entraîner un assainissement ou
une restructuration fondamentale de la société, pouvait éven-
tuellement satisfaire à l'analogie requise par le texte lé-
gal, la question étant toutefois laissée indécise.

Cette solution, certes insatisfaisante au regard des
intérêts protégés (en particulier la protection des investis-
seurs), n'en correspondait pas moins au texte légal, que le
législateur avait eu le loisir de modifier au cours des tra-
vaux parlementaires; toute une partie de la protection accor-
dée aux investisseurs s'en trouvait ainsi réduite, mais il
n'appartenait pas au juge d'y suppléer (consid. 4e/bb in
fine
p. 559).

b) La doctrine récente ne se prononce pas plus clai-
rement en faveur d'une interprétation extensive de l'art.
161
ch. 3 CP qu'elle ne le faisait lors du prononcé de l'arrêt
précité. Hofstetter (Die Insiderstrafnorm als Teil des Kapi-
talmarktsrechts - Konsequenzen für deren Auslegung, Recht
1999/4 pp. 126ss, 136.) préconise une telle interprétation,
tout en précisant que seules les pertes importantes, portant
atteinte à la substance de l'entreprise, peuvent entrer en
considération. Les avis exprimés postérieurement à l'ATF 118
Ib précité ne se prononcent pas de manière déterminante en
faveur de l'une ou de l'autre des tendances évoquées ci-
dessus (cf. Strebel, Insidervergehen und Banken, thèse
Zurich
1990, p. 60-61 qui reprend l'interprétation restrictive et
les exemples de Böckli, Insiderstrafrecht und Verantwortung
des Verwaltungsrates, Zurich 1989; Stratenwerth, Schweize-
risches Strafrecht, Besonderer Teil I, Berne 1995, p. 412 et
les auteurs cités, qui soutiennent également
l'interprétation
restrictive fondée sur le texte et la systématique de la nor-

me; Trechsel, Kurzkommentar, Zurich 1997, n° 16 ad. art. 161
CP). Au terme d'une synthèse des opinions doctrinales, et
d'une interprétation littérale, historique, systématique et
téléologique, Peter (Aspekte der Insiderstrafnorm, insbeson-
dere der "ähnliche Sachverhalt von vergleichbarer
Tragweite",
thèse, Zurich 1991) estime lui aussi que l'adjectif "analo-
gue" figurant à l'art. 161 ch. 3 CP ne peut se rapporter aux
effets de l'information, puisque cela découle déjà de l'ex-
pression "d'importance comparable". L'analogie ne peut donc
porter que sur les deux types d'opérations mentionnées à ti-
tre d'exemples. Les faits confidentiels doivent dès lors con-
cerner des modifications structurelles internes (actionna-
riat) ou externes de la société, comme par exemple des divi-
sions d'entreprises, des prises majoritaires de participa-
tions ou des assainissements par diminution de capital. Tel
n'est pas le cas, en revanche des pertes ou des bénéfices
importants (op. cit. p. 109-110).

c) La solution retenue dans l'ATF 118 Ib précité a
encore été confirmée, notamment par un arrêt non publié du
25
février 1998 dans la cause X. Corp., relatif à une demande
d'entraide américaine. Cet arrêt maintient que l'analogie re-
quise à l'art. 161 ch. 3 CP est limitée aux deux exemples fi-
gurant dans cette disposition (consid. 2c).

d) L'OFJ évoque l'obligation d'accorder l'entraide
la plus large possible, telle qu'elle découle notamment de
l'art. 1er de la CEEJ. Il est certes regrettable que la
Suisse, qui s'est dotée d'une norme applicable aux délits
d'initiés surtout pour pouvoir donner suite aux demandes
d'entraide étrangère
(Egli, L'entraide judiciaire accordée
par la Suisse pour le répression des délits d'initiés; pro-
blèmes récents, in: Recht, Staat und Politik am Ende des
zweiten Jahrtausends, Berne 1993 p. 605 ss, 606), en ait
circonscrit la portée de manière si étroite; mais ces consi-

dérations téléologiques ne sauraient l'emporter sur le texte
de la loi.

L'OFJ mentionne également l'art. 4 al. 4 TEJUS, qui
permet de faire abstraction, dans l'examen de la double in-
crimination, des éléments constitutifs non essentiels d'une
infraction. Tel ne peut toutefois pas être le cas de la no-
tion même de faits confidentiels, qui se trouve au centre de
l'art. 161 CP. La condition de la double incrimination
serait
par ailleurs totalement vidée de son contenu s'il suffisait,
comme le préconise l'OFJ, que les droits des Etats requérant
et requis tendent à la protection du même bien juridique,
sans égard aux modalités de cette protection. La lecture de
la norme française relative aux délits d'initiés fait d'ail-
leurs clairement apparaître que cette infraction est appré-
hendée de façon fondamentalement différente dans les deux
Etats: l'art. 10-1 de la loi du 28 septembre 1967, modifiée
le 2 juillet 1996, s'applique aux "informations privilégiées
sur les perspectives ou la situation d'un émetteur..., ou
sur
les perspectives d'évolution d'un instrument financier", ce
qui permet une définition beaucoup plus large de la notion
de
faits confidentiels que celle qui prévaut en droit suisse.

e) En définitive, les arguments avancés par l'office
recourant ne justifient pas de revoir la solution adoptée
dans l'ATF 118 Ib précité. Les avis de doctrine évoqués ci-
dessus, favorables à une application extensive de l'art. 161
ch. 3 CP, s'achoppent tous au texte de la disposition
légale.
En réalité, la modification de pratique voulue par l'OFJ ne
suppose pas un changement de jurisprudence, mais une
révision
législative que le Tribunal fédéral a déjà appelée de ses
voeux.

L'OFJ se prévaut enfin de la position adoptée par la
CFB dans le cadre de procédures administratives (notamment
dans une décision du 30 août 2000 dans la cause N., faisant

l'objet de la procédure de recours de droit administratif
2A.476/2000). L'OFJ perd toutefois de vue que la CFB a
laissé
indécise la question de savoir si la jurisprudence restricti-
ve du Tribunal fédéral devait être confirmée, car, dans le
cadre particulier de l'entraide accordée selon l'art. 38 al.
2 let. c LBVM, il suffisait que les normes de droit pénal
des
Etats requérant et requis tendent à la protection des mêmes
intérêts juridiques. Or, comme relevé ci-dessus, tel n'est
pas le cas lors de l'examen d'une demande d'entraide judi-
ciaire en matière pénale.

4.- La demande d'entraide du 19 novembre 1997 indi-
que que Y.________ et les autres personnes mises en cause au-
raient cédé leurs titres entre le 31 juillet et le 11 septem-
bre 1992, soit avant l'annonce, le 21 septembre suivant, des
résultats semestriels du groupe, "en fort retrait par
rapport
à l'exercice précédent". Les résultats nets consolidés pour
le premier semestre de 1992 auraient été de 6 MF, alors
qu'ils étaient de 41 MF pour l'exercice précédent. Après la
publication de ce résultat, le cours de l'action aurait
chuté
de 7,48% au cours des trois séances suivantes; il aurait en-
suite régulièrement baissé, puis se serait redressé quelque
peu, juste avant l'annonce de l'absorption de la société
X.________ par A.________. L'élément confidentiel porte donc
uniquement sur une réduction importante du bénéfice du
groupe
par rapport à l'exercice précédent, ce qui ne constitue pas,
comme cela est relevé plus haut, un fait confidentiel au
sens
de l'art. 161 ch. 3 CP.

Une partie de la doctrine évoque la possibilité de
prendre en considération des pertes importantes, imminentes
ou déjà subies, pour autant que la substance même de l'entre-
prise soit atteinte ou qu'elles nécessitent un
assainissement
(Schmid, op. cit. p. 115). Dans l'ATF 118 Ib 547, le
Tribunal
fédéral a lui aussi envisagé - sans toutefois l'affirmer -
qu'une perte massive de nature à modifier profondément la

"structure du bilan" et à rendre nécessaire un
assainissement
ou une restructuration fondamentale de la société, puisse
éventuellement constituer un "fait analogue" au sens de
l'art. 161 ch. 3 CP. Tel ne saurait être le cas, en
revanche,
lorsqu'il n'existe pas de perte, mais que le bénéfice de
l'entreprise apparaît largement inférieur à celui de l'exer-
cice précédent; rien ne permet de penser, en l'occurrence,
que la survie de l'entreprise se soit trouvée en péril immé-
diat, rendant a priori nécessaire une restructuration de
l'entreprise ou un rapprochement avec une autre entité. La
société X.________ a finalement été absorbée par une autre
société - fait qui, en soi, pourrait tomber sous le coup de
l'art. 161 ch. 3 CP -, et il est possible que les résultats
décevants de la société en soient la cause, mais cela n'ap-
paraît pas comme une conséquence inéluctable et d'emblée
prévisible. L'OFJ relève qu'une diminution de 7,48% du cours
de l'action serait suffisante "dans le cadre de l'entraide
judiciaire". Ce faisant, il adopte un critère purement quan-
titatif, ignorant les exigences qualitatives de l'art. 161
ch. 3 CP.

Tels qu'ils sont supposés dans la demande d'entrai-
de, les faits ne seraient dès lors pas punissables en droit
suisse. C'est donc avec raison que le juge d'instruction,
puis la Chambre d'accusation, ont refusé de donner suite à
la
requête.

5.- Le recours de droit administratif doit par con-
séquent être rejeté. Conformément à l'art. 156 al. 2 OJ, il
n'est pas perçu d'émolument judiciaire. Une indemnité de dé-
pens, due aux intimés, doit être mise à la charge de l'OFJ.

Par ces motifs,

l e T r i b u n a l f é d é r a l :

1. Rejette le recours.

2. Dit qu'il n'est pas perçu d'émolument judiciaire.

3. Alloue aux intimés Y.________, X.________ et
consorts une indemnité globale de dépens de 2000 fr., à la
charge de l'Office fédéral de la justice.

4. Communique le présent arrêt en copie à l'office
recourant (B 91380), au mandataire des intimés, au Juge
d'instruction et à la Chambre d'accusation du canton de
Genève.

Lausanne, le 5 mars 2001
KUR/col

Au nom de la Ie Cour de droit public
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
Le Président,

Le Greffier,


Synthèse
Numéro d'arrêt : 1A.325/2000
Date de la décision : 05/03/2001
1re cour de droit public

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2001-03-05;1a.325.2000 ?
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