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12/02/2001 | SUISSE | N°4C.317/2000

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 12 février 2001, 4C.317/2000


«/2»

4C.317/2000

Ie C O U R C I V I L E
****************************

12 février 2001

Composition de la Cour: M. Walter, président, M. Leu,
M. Corboz, Mme Klett et Mme Rottenberg Liatowitsch, juges.
Greffier: M. Ramelet.

__________

Dans la cause civile pendante
entre

X.________ S.A., défenderesse et recourante, représentée par
Mes Benoît Chappuis et Gilles Favre, avocats à Genève,

et

A.________ S.A., demanderesse et intimée, représentée par Me
Daniel

Guggenheim, avocat à Genève;

(contrat de compte courant; virements bancaires; extourne)

Vu les pièces du dossier d'où ress...

«/2»

4C.317/2000

Ie C O U R C I V I L E
****************************

12 février 2001

Composition de la Cour: M. Walter, président, M. Leu,
M. Corboz, Mme Klett et Mme Rottenberg Liatowitsch, juges.
Greffier: M. Ramelet.

__________

Dans la cause civile pendante
entre

X.________ S.A., défenderesse et recourante, représentée par
Mes Benoît Chappuis et Gilles Favre, avocats à Genève,

et

A.________ S.A., demanderesse et intimée, représentée par Me
Daniel Guggenheim, avocat à Genève;

(contrat de compte courant; virements bancaires; extourne)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- a) B.________ S.A., devenue par la suite
A.________ S.A., pratique le commerce des cigarettes et
fournit notamment D.________ dont le siège est à Dubai
(Emirats Arabes Unis).

Pour le paiement de la marchandise, D.________
donnait un ordre à sa banque, la C.________, à Dubai, qui le
transmettait à sa banque correspondante, la E.________, à
New
York, laquelle créditait un compte du groupe X.________, à
New York, les fonds étant ensuite portés au crédit du compte
courant n° 719.100.82.1 de B.________ S.A. ouvert auprès de
la succursale genevoise de X.________ S.A. Ce compte courant
était soumis aux conditions générales de la banque, qui pré-
voyaient à l'art. 7 ce qui suit:

"Toute réclamation du client relative à l'exécution
ou à l'inexécution d'un ordre ainsi qu'à l'encontre d'autres
communications de la banque doit être présentée à réception
de l'avis correspondant ou au plus tard dans le délai fixé
par la banque (...). Les contestations concernant les
relevés
de compte et de dépôts doivent être présentées dans le délai
d'un mois. Ce délai écoulé, les relevés sont considérés
comme
approuvés. L'approbation expresse ou tacite du relevé de
compte emporte celle de tous les articles qui y figurent ain-
si que des réserves éventuelles de la banque".

L'art. 14 desdites conditions générales déclarait
le droit suisse applicable et fixait le for au siège de la
banque ou au lieu de la succursale traitant avec le client.

B.________ S.A. étant un important client de
X.________ S.A., il avait été convenu qu'elle devait perce-

voir des intérêts sur les montants virés en sa faveur dès
réception des fonds par X.________ à New York. Par le
système
électronique Infaccount, A.________ S.A. pouvait connaître
en
tout temps l'état de son compte et constater instantanément
toute variation.

b) Le 4 juillet 1991, C.________ à Dubai, agissant
sur mandat de D.________, a envoyé à E.________ un ordre
électronique de payer, valeur 5 juillet 1991, 6 600 000 US$
à X.________ à New York, par le débit du compte de
C.________
auprès de E.________. Le même jour, C.________ a fait
parvenir à X.________ S.A. à Zurich un ordre de transfert
télégraphique, priant ladite banque de créditer, valeur 5
juillet 1991, le compte de B.________ S.A. à Genève, pré-
cisant "avoir crédité" du montant en question le compte de
X.________ à New York, également valeur 5 juillet 1991.

Toujours en date du 4 juillet 1991 - jour férié aux
Etats-Unis d'Amérique -, X.________ S.A., se fiant à l'arri-
vée des fonds à X.________ à New York, a crédité le compte
de
B.________ S.A., valeur 5 juillet 1991, puis a établi et ex-
pédié à B.________ S.A. un avis de crédit ordinaire, sans
condition ni réserve, valeur à la même date.

Le 5 juillet 1991, les avoirs de C.________ ont été
bloqués dans le monde entier, suite au retrait de l'autorisa-
tion de pratiquer accordée à cette banque. E.________ a déci-
dé de ne pas exécuter l'ordre donné par C.________ en faveur
de X.________, alors même que cet ordre était antérieur au
blocage et que le compte de C.________ auprès de E.________
était suffisamment provisionné.

Le 8 juillet 1991, X.________ S.A. a pris connais-
sance de cette situation tout à fait exceptionnelle et a in-
formé par téléphone B.________ S.A. que le crédit devait mal-
heureusement être extourné. Le lendemain, X.________ S.A. a

procédé à l'extourne sur le compte de B.________ S.A.,
valeur
5 juillet 1991.

Le 9 juillet 1991, X.________ S.A. a adressé à
B.________ S.A. un avis de débit portant sur 6 600 000 US$
valeur 5 juillet 1991 avec la mention "extourne de notre
écriture du 5 juillet 1991". Ce débit figure également sur
le
relevé mensuel de compte au 31 juillet 1991 et sur les rele-
vés trimestriels au 30 juin 1991 et au 30 septembre 1991.

Il n'est pas prouvé que B.________ S.A. ait protes-
té ou émis des réserves.

B.________ S.A. s'est employée à soutenir son
client D.________ dans ses tentatives pour obtenir le rem-
boursement de son virement par C.________ ou E.________; un
avocat américain est parvenu à la conclusion qu'il fallait
s'adresser à C.________. Pour obtenir la livraison de
B.________ S.A., D.________ lui a versé à nouveau la somme
de
6 600 000 US$.

D.________ a produit une créance de 6 600 000 US$
dans la liquidation de C.________, recevant des liquidateurs
au total 3 044 537,64 US$.

A la suite d'un avis de droit donné par son actuel
avocat, B.________ S.A. a réclamé à X.________ S.A., par
lettre du 29 juillet 1997, le remboursement du montant ex-
tourné, faisant valoir que l'extourne n'était pas justifiée.

B.- Le 9 février 1998, B.________ S.A. a déposé
devant les tribunaux genevois une demande en paiement
dirigée
contre X.________ S.A., concluant au paiement de la somme de
6 600 000 US$. En cours de procédure, les conclusions ont
été
réduites à 3 555 462,36 US$ plus intérêts.

Par jugement du 27 janvier 2000, le Tribunal de
première instance de Genève, après avoir constaté que
B.________ S.A. était devenue A.________ S.A., a débouté
cette dernière de toutes ses conclusions.

Statuant sur appel de la demanderesse par arrêt du
6 septembre 2000, la Chambre civile de la Cour de justice ge-
nevoise a au contraire condamné X.________ S.A. à payer à
A.________ S.A. 3 555 462,36 US$ avec intérêts.

C.- Parallèlement à un recours de droit public qui
a été rejeté par arrêt de ce jour, X.________ S.A. exerce un
recours en réforme au Tribunal fédéral. Invoquant la viola-
tion du droit fédéral, elle conclut à la réforme de l'arrêt
attaqué et au rejet de la demande, subsidiairement au renvoi
de la cause à l'autorité cantonale.

L'intimée propose la confirmation de l'arrêt atta-
qué.

C o n s i d é r a n t e n d r o i t :

1.- a) Interjeté par la partie qui a succombé dans
ses conclusions libératoires et dirigé contre un jugement fi-
nal rendu en dernière instance cantonale par un tribunal su-
périeur (art. 48 al. 1 OJ) sur une contestation civile dont
la valeur litigieuse dépasse largement le seuil de 8000 fr.
(art. 46 OJ), le recours en réforme est en principe receva-
ble, puisqu'il a été déposé en temps utile (art. 54 al. 1
OJ)
dans les formes requises (art. 55 OJ).

b) Le recours en réforme est ouvert pour violation
du droit fédéral (art. 43 al. 1 OJ). Il ne permet en
revanche
pas d'invoquer la violation directe d'un droit de rang cons-

titutionnel (art. 43 al. 1 2e phrase OJ) ou la violation du
droit cantonal (ATF 126 III 161 consid. 2b, 189 consid. 2a,
370 consid. 5; 125 III 305 consid. 2e).

Saisi d'un recours en réforme, le Tribunal fédéral
doit conduire son raisonnement sur la base des faits
contenus
dans la décision attaquée, à moins que des dispositions fédé-
rales en matière de preuve n'aient été violées, qu'il y ait
lieu à rectification de constatations reposant sur une inad-
vertance manifeste (art. 63 al. 2 OJ) ou qu'il faille complé-
ter les constatations de l'autorité cantonale parce que
celle-ci n'a pas tenu compte de faits pertinents et réguliè-
rement allégués (art. 64 OJ; ATF 126 III 59 consid. 2a; 119
II 353 consid. 5c/aa). Dans la mesure où un recourant présen-
te un état de fait qui s'écarte de celui contenu dans la dé-
cision attaquée, sans se prévaloir avec précision de l'une
des exceptions qui viennent d'être rappelées, il n'y a pas
lieu d'en tenir compte. Il ne peut être présenté de griefs
contre les constatations de fait, ni de faits ou de moyens
de
preuve nouveaux (art. 55 al. 1 let. c OJ). L'appréciation
des
preuves à laquelle s'est livrée l'autorité cantonale ne peut
être remise en cause (ATF 126 III 189 consid. 2a; 125 III 78
consid. 3a).

L'état de fait déterminant ne comprend pas seule-
ment les faits que la cour cantonale a elle-même exposés,
mais aussi les faits constatés dans la décision de
l'instance
inférieure, si la cour cantonale s'y réfère expressément
(Corboz, Le recours en réforme au Tribunal fédéral in: SJ
2000 II p. 61; Messmer/Imboden, Die eidgenössischen Rechts-
mittel in Zivilsachen, p. 128 n° 93)

Si le Tribunal fédéral ne saurait aller au-delà des
conclusions des parties, lesquelles ne peuvent prendre de
conclusions nouvelles (art. 55 al. 1 let. b in fine OJ), il
n'est lié ni par les motifs qu'elles invoquent (art. 63 al.
1

OJ), ni par ceux de la décision cantonale (art. 63 al. 3 OJ;
ATF 126 III 59 consid. 2a; 123 III 246 consid. 2).

2.- a) Entre la venderesse (la demanderesse) et
l'acheteuse (D.________), il avait été convenu d'un paiement
au moyen de virements bancaires en série (sur cette figure
juridique: cf. ATF 124 III 253 consid. 3b; 121 III 310 con-
sid. 3a). Dans un tel cas, l'engagement pris par chaque ban-
que assignée revêt un caractère abstrait, c'est-à-dire qu'il
est indépendant du rapport de provision et du rapport de va-
leur (ATF 124 III 253 ibidem; 121 III 109 consid. 3a).

La question posée par le recours n'est cependant
pas celle de la validité de l'avis de crédit, mais bien
celle
de la validité de l'extourne.

Il faut donc s'interroger sur le sens et la portée
juridique de l'extourne.

b) Il convient tout d'abord d'observer que les par-
ties avaient conclu un contrat de compte courant (sur cette
figure juridique: cf. ATF 100 III 79; Engel, Traité des obli-
gations en droit suisse, 2ème éd., p. 773 s.). Dans un
compte
courant, les prétentions et contre-prétentions portées en
compte s'éteignent par compensation et une nouvelle créance
prend naissance à concurrence du solde (cf. ATF 104 II 190
consid. 2a et 2c; arrêt du 23 décembre 1993 publié in SJ
1994
p. 269 ss, consid. 4a/bb). Il y a novation lorsque le solde
du compte a été arrêté et reconnu (art. 117 al. 2 CO). Les
parties peuvent convenir d'une reconnaissance tacite (cf.
Daniel Guggenheim, Die Verträge der schweizerischen Bank-
praxis, p. 228 s.). La novation suppose cependant une cause
valable (ATF 104 II 190 consid. 3a; arrêt du 23 décembre
1993
précité, ibidem). Il n'est donc pas a priori exclu de démon-
trer que le solde reconnu est faux (ATF 104 II 190 consid.
3a; Laurent Etter, Le contrat de compte courant, thèse

Lausanne 1994, p. 219). Il est cependant admis que la recon-
naissance du solde vaut renonciation à invoquer les excep-
tions et objections connues (ATF 104 II 190 consid. 3a;
Guggenheim, op. cit., p. 230).

c) Les parties ne se sont pas bornées à conclure un
contrat de compte courant; elles ont aussi adopté l'art. 7
des conditions générales de la défenderesse.

Cette clause contractuelle prévoit qu'il incombe au
client, en cas de désaccord, de réagir immédiatement à
l'égard de toute communication de la banque (et non pas seu-
lement lorsqu'il s'agit d'établir un solde de compte). Cer-
tes, cette clause générale ne fixe pas un délai précis pour
réagir, mais elle prévoit en revanche clairement, pour ce
qui
est des relevés de compte périodiques, que les contestations
doivent être présentées dans le délai d'un mois. Cette exi-
gence d'une réclamation dans un certain délai n'est pas sans
rappeler l'art. 454 al. 2 CO. On peut donc se demander si
l'on ne se trouve pas en présence d'une clause instituant
une
péremption conventionnelle.

La jurisprudence a d'ailleurs reconnu, au sujet de
ce même art. 7 des conditions générales, que la défenderesse
avait un intérêt légitime à connaître rapidement les postes
contestés (arrêt du 7 décembre 1984 publié in SJ 1985 p. 246
ss consid. 2).

Il n'est toutefois pas nécessaire d'approfondir la
question sous cet angle.

d) En envoyant l'avis d'extourne, la recourante a
manifesté sa volonté d'annuler les effets de l'avis de cré-
dit. Cet avis doit s'interpréter comme une offre de convenir
que l'avis de crédit est sans effet. En n'émettant ni oppo-
sition ni réserves dans le délai contractuel et en entrepre-

nant les démarches décrites en détail dans le jugement de
première instance, l'intimée, choisissant de ne pas s'en
prendre à la banque, a accepté l'extourne par acte
concluant.
Un contrat a donc été conclu sur un objet qui était indiscu-
tablement à la libre disposition des parties. En présence
d'une situation exceptionnelle et complexe, alors que la dé-
fenderesse contestait s'être engagée valablement, les
parties
sont convenues d'admettre qu'il n'y avait pas dette. La qua-
lification juridique de ce contrat, qui relève de la liberté
contractuelle, peut paraître délicate puisqu'il présente
tout
à la fois les aspects de la remise d'une dette éventuelle et
ceux d'une transaction; la doctrine connaît cette figure
sous
la dénomination de contrat de reconnaissance de dette négati-
ve (von Tuhr/Escher, Allgemeiner Teil des Schweizerischen
Obligationenrechts, vol. II, p. 179; Gonzenbach, Commentaire
bâlois, 2ème éd., n. 3 ad art. 115 CO; Aepli, Commentaire zu-
richois, n. 22 ad art. 115 CO). Ainsi, il a été conclu une
convention qui lie l'intimée.
Dans un tel contrat, les possi-
bilités d'invoquer une erreur sont très restreintes (von
Tuhr/Escher, op. cit., ibidem).

e) Il reste à vérifier si ce contrat n'est pas af-
fecté d'un vice du consentement (art. 23 ss CO).

Il résulte des constatations cantonales que l'inti-
mée a connu immédiatement l'ensemble des faits de façon véri-
dique; la défenderesse lui a aussi exposé sans retard sa po-
sition juridique. La demanderesse disposait donc de tous les
éléments de fait nécessaires pour se déterminer et il lui ap-
partenait d'examiner de manière critique l'argumentation ju-
ridique de son cocontractant. Il est évident que l'intimée
devait prendre en considération les possibilités d'obtenir
satisfaction par une autre voie, dans le souci de maintenir
de bonnes relations avec sa banque et de se prémunir contre
les risques liés à toute procédure judiciaire. L'intimée
soutient qu'elle n'a pas pensé, pendant environ six ans, à

l'argumentation juridique soutenue actuellement par son avo-
cat. Dans le contexte de cette affaire, on peut parfaitement
imaginer que la demanderesse, souhaitant garder de bonnes
relations avec la défenderesse, ait trouvé inéquitable, dans
ces circonstances exceptionnelles, que celle-ci doive suppor-
ter la perte et qu'elle ait préféré s'adresser à un autre
protagoniste de cette affaire, d'autant que ce procédé pou-
vait lui apparaître plus efficace. On voit donc que la qua-
lité de l'argumentation juridique n'était que l'un des para-
mètres à prendre en compte; partant, il ne s'agissait pas
d'un élément nécessaire et, s'il y a eu erreur, il faut con-
sidérer qu'il ne s'agit que d'une erreur sur les motifs
(art.
24 al. 2 CO; ATF 118 II 58 consid. 3).

Il y a ensuite lieu de rechercher si l'intimée a
conclu sous l'effet d'un dol (art. 28 CO).

Il n'est cependant pas établi que l'un ou l'autre
des auxiliaires de la banque ait eu l'intention de tromper
la
demanderesse ou qu'ils aient donné sciemment des renseigne-
ments faux sur les faits. Le seul reproche qu'on leur
adresse
concerne leur argumentation juridique, qui n'est pas celle
que la cour cantonale a retenue.

On rejoint ici un autre argument invoqué, à savoir
que la banque serait de mauvaise foi, parce qu'elle aurait
malicieusement dissuadé l'intimée d'agir contre elle.

L'autorité cantonale admet elle-même que le résul-
tat aurait été différent si la banque avait assorti son avis
de crédit d'une condition, par exemple "sauf encaissement"
ou
"sous réserve de bonne fin". Elle ajoute cependant qu'il
existe des situations, notamment pour l'encaissement des ef-
fets de change, où cette condition est implicite. Cette opi-
nion est conforme à la doctrine (Etter, op. cit., p.
135/136). Dans le cas d'espèce, la défenderesse avait accep-

té, dans l'intérêt de sa cliente, d'inscrire rapidement les
virements en compte, pour qu'ils portent intérêt, sans atten-
dre une communication interne de X.________ à New York. On
peut se demander si, dans de telles circonstances, la clause
"sauf bonne fin" n'était pas implicite. Il ne s'agit pas ici
de trancher la question, mais il faut constater que la situa-
tion était suffisamment complexe pour que la banque puisse
soutenir de bonne foi la position juridique qui a été la
sienne. Que le juge de première instance lui ait donné gain
de cause confirme d'ailleurs que la situation n'était pas
évidente. En conséquence, on ne saurait dire que la défende-
resse, par la position qu'elle a adoptée sur le plan du
droit, a agi de mauvaise foi ou fait preuve d'une intention
dolosive.

Ayant accepté l'extourne par acte concluant, l'in-
timée se trouve liée par cet accord, de sorte que sa demande
doit être rejetée.

Dans ces conditions, il est superflu d'examiner
l'autre grief soulevé par la recourante. Enfin, pour
répondre
à un argument de l'intimée, il convient de rappeler que,
dans
le rapport entre l'assigné et l'assignataire, l'assigné
n'est
pas garant de l'exactitude de ses opinions juridiques; dans
une assignation bancaire, la banque assignée ne joue pas le
rôle de conseiller de son client.

3.- Le recours est admis, l'arrêt déféré est annu-
lé et la demanderesse est déboutée de toutes ses
conclusions.
Les frais et dépens de la procédure fédérale doivent être
mis
à la charge de l'intimée qui succombe (art. 156 al. 1 et 159
al. 1 OJ). La cause sera renvoyée à l'autorité cantonale
pour
nouvelle décision sur les frais et dépens de la procédure
cantonale.

Par ces motifs,

l e T r i b u n a l f é d é r a l :

1. Admet le recours et annule l'arrêt attaqué;

2. Déboute la demanderesse de toutes ses conclu-
sions;

3. Met un émolument judiciaire de 18 000 fr. à la
charge de l'intimée;

4. Dit que l'intimée versera à la recourante une
indemnité de 20 000 fr. à titre de dépens;

5. Renvoie la cause à la cour cantonale pour sta-
tuer sur les frais et dépens de la procédure devant les ju-
ridictions cantonales;

6. Communique le présent arrêt en copie aux manda-
taires des parties et à la Chambre civile de la Cour de jus-
tice genevoise.

____________

Lausanne, le 12 février 2001
ECH

Au nom de la Ie Cour civile
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
Le Président, Le Greffier,


Synthèse
Numéro d'arrêt : 4C.317/2000
Date de la décision : 12/02/2001
1re cour civile

Analyses

Compte courant. Validité de l'extourne d'un crédit. Lorsque le client d'une banque n'a pas contesté l'avis d'extourne d'un crédit dans le délai contractuel, choisissant dans un premier temps de ne pas s'en prendre à la banque et d'entreprendre des démarches auprès d'un autre protagoniste de l'affaire pour obtenir le remboursement du montant extourné, il convient d'admettre que ce client a accepté l'extourne par acte concluant et a ainsi conclu avec la banque un contrat de reconnaissance de dette négative. En l'espèce, il a été considéré que ce contrat n'était pas affecté d'un vice du consentement (consid. 2).


Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2001-02-12;4c.317.2000 ?
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