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12/02/2001 | SUISSE | N°4C.301/2000

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 12 février 2001, 4C.301/2000


«/2»

4C.301/2000

Ie C O U R C I V I L E
****************************

12 février 2001

Composition de la Cour: MM. Walter, président, Leu et
Corboz,
juges. Greffier: M. Carruzzo.

_____________

Dans la cause civile pendante
entre

M.________, demandeur et recourant, représenté par Me Pierre
Hack, avocat à Lausanne,

et

les époux B.________, défendeurs et intimés, représentés par
Me Félix Paschoud, avocat à Lausanne;

(contrat de bail; protecti

on contre les congés)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- a) Par contrat de bail du 20 mars ...

«/2»

4C.301/2000

Ie C O U R C I V I L E
****************************

12 février 2001

Composition de la Cour: MM. Walter, président, Leu et
Corboz,
juges. Greffier: M. Carruzzo.

_____________

Dans la cause civile pendante
entre

M.________, demandeur et recourant, représenté par Me Pierre
Hack, avocat à Lausanne,

et

les époux B.________, défendeurs et intimés, représentés par
Me Félix Paschoud, avocat à Lausanne;

(contrat de bail; protection contre les congés)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- a) Par contrat de bail du 20 mars 1996, la Ban-
que Paribas (Suisse) S.A. a loué à la société X.________ une
surface d'environ 894 m² située au rez-de-chaussée d'un im-
meuble dont elle était propriétaire au chemin de la Colline
6-8, à Lausanne. A l'instar des autres bâtiments du
quartier,
cet immeuble, vétuste, est voué, dans sa partie inférieure,
à
l'artisanat, à l'industrie ou au commerce et, dans sa partie
supérieure, à l'habitation. Le loyer mensuel net a été fixé
à
1200 fr. Conclu pour une période de quatre mois, du 1er
avril
au 31 juillet 1996, avec un préavis de résiliation d'un
mois,
le contrat s'est ensuite renouvelé de mois en mois. Il pré-
voit notamment que le bailleur a le droit de résilier le
bail
sans délai et d'exiger la libération des locaux dans le
délai
de trente jours au cas où la société propriétaire déciderait
d'effectuer des travaux majeurs dans l'immeuble ou de vendre
celui-ci.

Les locaux en question sont utilisés pour la fabri-
cation et le stockage de matières premières et d'éléments
préfabriqués en ciment, béton ou similipierre. M.________ y
a
exercé cette activité, dans un premier temps, comme associé
d'une société en nom collectif qu'il avait constituée avec
son père, puis sous la forme d'une raison individuelle. Il
aurait exécuté des travaux d'équipement électrique et sani-
taire pour quelque 30 000 fr. dans les locaux pris à bail.

b) Le 10 juillet 1997, C.________ et D.________ ont
acquis l'immeuble précité ainsi que d'autres biens-fonds
dans
le même quartier. Ils ont fait rénover les étages du
bâtiment
aménagés en appartements. Les nouveaux propriétaires ont éga-
lement décidé de transformer les locaux occupés par
M.________ en parking de 29 places pour répondre à la
demande

des locataires et des habitants du quartier. La location des-
dites places, à raison de 120 fr. chacune, devait leur procu-
rer un rendement de 3480 fr. par mois.

Les bailleurs ont pris contact avec M.________ afin
de lui proposer des locaux de remplacement, à titre provisoi-
re. Ils allèguent lui avoir offert de louer le local sis au
chemin de la Colline 5, qu'il occupait avant 1996 et qui se
trouve en face des locaux loués par lui, mais l'intéressé
conteste avoir reçu une telle offre et la réalité de
celle-ci
n'a pas été établie.

Au printemps 1998, vraisemblablement dans le cou-
rant du mois de mars, M.________ s'est vu proposer par les
bailleurs un local situé au sous-sol de l'immeuble dans le-
quel il exerce son activité professionnelle. Il s'agit d'un
ancien dépôt de bus, inoccupé depuis longtemps, qui serait
accessible moyennant réfection d'une rampe d'accès
existante,
mais qui nécessiterait un rafraîchissement, de même que
l'installation de l'électricité et la réfection de l'isola-
tion.

Par lettre du 30 mars 1998 de leur gérant,
C.________ et D.________ ont résilié le bail de M.________
pour le 30 juin 1998. Ils lui ont confirmé, à cette
occasion,
leur offre - valable jusqu'à fin avril 1998 - de lui louer
les locaux du sous-sol pour une durée de cinq ans, moyennant
un loyer de 2500 fr. par mois, dès que la rampe d'accès se-
rait terminée.

c) Le 20 avril 1998, M.________ a saisi la Commis-
sion de conciliation en matière de baux à loyer du district
de Lausanne en vue d'obtenir, principalement, l'annulation
du
congé et, subsidiairement, une prolongation du bail.

Il résulte d'une note datée du 22 avril 1998, rédi-
gée, en partie en tout cas, de la main de D.________, que
des
discussions relatives à la conclusion d'un contrat de bail
ont à nouveau eu lieu avec le locataire. On peut inférer de
ce document que deux sortes de location ont été envisagées:
la location d'une surface de 600 m², pour un loyer mensuel
qui serait porté de 2300 fr. à 2700 fr. sur cinq ans, ou cel-
le d'une surface de 890 m², pour un loyer mensuel qui serait
porté de 3300 fr. à 3700 fr. sur cinq ans. En revanche, le
document n'indique pas si cette double proposition est négo-
ciable, ni de quels locaux il s'agit.

La Commission de conciliation a tenu séance le 9
juillet 1998. Elle a entendu les parties, dont le représen-
tant des bailleurs qui a fait état de la volonté de ceux-ci
de réaménager les locaux litigieux en places de parking et
de
la rupture définitive des pourparlers entre parties. Sur
quoi, après avoir tenté en vain la conciliation, la Commis-
sion a constaté la validité de la résiliation et prolongé le
bail d'une année, soit jusqu'au 30 juin 1999.

B.- a) Par requête du 20 août 1998, M.________ a
saisi le Tribunal des baux du canton de Vaud d'une requête
dirigée contre C.________ et D.________. Il a sollicité
l'annulation du congé donné le 30 mars 1998 ou, sinon, la
prolongation du bail pour une durée de six ans, soit
jusqu'au
30 juin 2004. Selon le demandeur, les bailleurs, sous le fal-
lacieux prétexte de la réalisation d'un parking, ne lui
avaient en fait signifié son congé que pour pouvoir
augmenter
le loyer des locaux qu'il occupe.

Les défendeurs ont conclu au rejet de la demande.

Après avoir entendu trois témoins et procédé à une
inspection locale avec les parties, le Tribunal des baux,
statuant le 15 décembre 1998, a constaté que le congé avait

été valablement donné pour le 30 septembre 1998 et il a pro-
longé le bail une seule fois jusqu'au 30 septembre 1999. En
substance, les premiers juges ont tenu pour établie l'inten-
tion des bailleurs de transformer en parking les locaux
loués
par le demandeur, de sorte que l'on ne pouvait admettre que
ceux-ci avaient tenté de lui imposer une majoration de son
loyer par le biais de la résiliation du bail. Le congé liti-
gieux était donc valable, mais ses effets devaient être re-
portés au 30 septembre 1998, les bailleurs n'ayant pas res-
pecté le délai de six mois fixé à l'art. 266d CO. Enfin, une
unique prolongation du bail, d'une durée d'un an, a été
jugée
nécessaire et suffisante pour permettre au demandeur de trou-
ver des locaux de remplacement et d'organiser son déménage-
ment.

b) M.________ a recouru au Tribunal cantonal vau-
dois contre ce jugement, en concluant, principalement, à sa
nullité et, subsidiairement, à sa réforme en ce sens que le
congé contesté devait être purement et simplement annulé ou,
à ce défaut, une première prolongation du bail de trois ans,
jusqu'au 30 septembre 2001, lui être accordée.

C.________ et D.________ ont vendu l'immeuble en
cause aux époux B.________, lesquels en sont devenus pro-
priétaires le 5 mai 1999.

Par arrêt du 9 août 1999, la Chambre des recours du
Tribunal cantonal vaudois a rejeté le recours et confirmé le
jugement du Tribunal des baux. Elle a, tout d'abord,
constaté
l'applicabilité des règles du Code de procédure civile vau-
dois et souligné le caractère subsidiaire du recours en nul-
lité par rapport au recours en réforme. Passant ensuite à
l'examen de ce dernier, elle a rappelé qu'elle ne pouvait
pas
entrer en matière sur le grief de fausse appréciation des
preuves et que, de toute façon, le Tribunal des baux avait
retenu à juste titre, d'une part, qu'il n'était pas établi

que l'offre manuscrite du 22 avril 1998 concernât les locaux
litigieux et, d'autre part, que les bailleurs entendaient y
réaliser un parking. Aussi n'y avait-il pas lieu d'annuler
le
congé en application de l'art. 271a al. 1 let. b CO. Quant à
la durée de la prolongation du bail, la Chambre des recours
a
considéré que le demandeur n'était pas recevable à critiquer
devant elle les faits retenus à cet égard dans le jugement
attaqué, si bien qu'il alléguait en pure perte que la réali-
sation du parking n'était pas à l'ordre du jour pour l'ins-
tant. Pour le surplus, elle a fait siens les motifs des pre-
miers juges touchant la durée de la prolongation du bail ac-
cordée au demandeur. S'agissant enfin du recours en nullité,
la cour cantonale a estimé qu'il n'avait plus d'objet du mo-
ment qu'elle avait pu statuer sur le recours en réforme.

c) M.________ a formé un recours de droit public
pour violation de l'art. 4 aCst. Statuant le 6 décembre
1999,
le Tribunal fédéral a admis le recours et annulé l'arrêt du
9
août 1999. Il a considéré, en résumé, que la cour cantonale
avait commis un déni de justice formel en n'examinant pas
les
moyens de nullité que le recourant avait soulevés devant
elle
en vue de faire constater la violation du principe de l'ins-
truction d'office qu'il imputait au Tribunal des baux.

C.- a) Après avoir donné aux parties l'occasion de
compléter leurs moyens, la Chambre des recours du Tribunal
cantonal vaudois, statuant par arrêt du 12 avril 2000, a re-
jeté le recours et confirmé le jugement du Tribunal des
baux.
Elle a restreint son examen aux moyens de nullité soulevés
par le recourant et s'est référée à son premier arrêt s'agis-
sant des moyens de réforme. Son argumentation sera examinée
plus loin en regard des critiques dont elle fait l'objet.

b) M.________ interjette un recours en réforme au
Tribunal fédéral. Il conclut principalement à l'annulation
du
jugement du Tribunal des baux et au renvoi de la cause à ce

tribunal pour complément d'instruction et nouvelle décision.
A titre subsidiaire, le demandeur sollicite une prolongation
de bail de trois ans, jusqu'au 30 septembre 2001. Plus subsi-
diairement, il propose l'annulation partielle du jugement de
première instance et le renvoi de la cause au Tribunal des
baux pour complément d'instruction et nouvelle décision sur
la question de la prolongation du bail.

Les époux B.________, défendeurs et intimés, con-
cluent au rejet du recours dans la mesure où il est receva-
ble.

C o n s i d é r a n t e n d r o i t:

1.- a) La cause soumise à l'examen du Tribunal fé-
déral est assurément une contestation civile, au sens de
l'art. 46 OJ (sur cette notion, cf. ATF 124 III 229 consid.
2a, 123 III 346 consid. 1 p. 349, 122 I 351 consid. 1d).
Elle
oppose, en effet, les parties à un contrat de bail qui dispu-
tent de la validité du congé signifié au locataire et, subsi-
diairement, de la durée de la prolongation de bail
sollicitée
par ce dernier. En cas de différend relatif à la validité
d'un congé, la valeur litigieuse se calcule en fonction de
la
période pendant laquelle le contrat subsiste nécessairement
si la résiliation n'est pas valable et qui s'étend jusqu'au
moment pour lequel un nouveau congé peut être donné ou l'a
été effectivement (cf. consid. 2b, non publié, de l'ATF 120
II 105; consid. 1b, non publié, de l'ATF 118 II 50; ATF 111
II 384 consid. 1 p. 386 et les arrêts cités). En l'occurren-
ce, la durée déterminante pour le calcul de la valeur liti-
gieuse ne saurait être inférieure à la période de trois ans,
à compter de la fin de la procédure judiciaire pendante, du-
rant laquelle le congé est annulable en vertu et aux condi-
tions de l'art. 271a al. 1 let. e CO. Multiplié par trente-

six, le loyer mensuel de 1200 fr. payé par le demandeur
donne
un total de 43 200 fr., valeur qui excède le minimum fixé à
l'art. 46 OJ pour la recevabilité du recours en réforme.

b) Dans son recours en réforme, le demandeur ne
critique pas le refus de la Chambre des recours de prendre
en
considération le moyen qu'il tirait de la vente de
l'immeuble
par C.________ et D.________ aux époux B.________. Il n'au-
rait d'ailleurs pas pu le faire dans ce cadrelà, étant donné
que ledit refus découle de l'application du droit de procédu-
re cantonal (art. 55 al. 1 let. c in fine OJ). Il n'y a donc
pas lieu d'examiner cette question.

c) Saisi d'un recours en réforme, le Tribunal fédé-
ral doit conduire son raisonnement juridique sur la base des
faits contenus dans la décision attaquée, à moins que des
dispositions fédérales en matière de preuve n'aient été vio-
lées, qu'il y ait lieu à rectification de constatations repo-
sant sur une inadvertance manifeste (art. 63 al. 2 OJ) ou
qu'il faille compléter les constatations de l'autorité canto-
nale parce que celle-ci n'a pas tenu compte de faits perti-
nents et régulièrement allégués (art. 64 OJ; ATF 126 III 59
consid. 2a et les arrêts cités).

Le motif pour lequel le bail a été résilié relève
du fait (ATF 115 II 83 consid. 3, 484 consid. 2b p. 486). A
supposer que le demandeur tentât de remettre en cause, ne
fût-ce qu'indirectement, les constatations souveraines des
juges cantonaux à ce sujet, son recours en réforme serait ir-
recevable sur ce point (55 al. 1 let. c et 63 al. 2 OJ).

2.- Devant la Chambre des recours, le demandeur
avait soulevé le moyen de nullité tiré de la violation du
principe de l'instruction d'office qu'il imputait au
Tribunal
des baux. A l'invitation du Tribunal fédéral, la cour canto-
nale a procédé, dans son second arrêt présentement attaqué,
à

l'examen dudit moyen qu'elle a jugé infondé. Selon le deman-
deur, la conclusion à laquelle la Chambre des recours a abou-
ti serait contraire au droit fédéral.

a) L'art. 274d al. 3 CO prescrit au juge d'établir
d'office les faits, les
parties devant lui soumettre toutes
les pièces nécessaires à l'appréciation du litige. Il pose
le
principe d'une maxime inquisitoire sociale, laquelle ne con-
stitue cependant pas une maxime officielle absolue. Cela dé-
coule déjà de la réserve expresse, selon laquelle les
parties
présentent toutes les pièces nécessaires à l'appréciation du
litige. Le juge ne doit pas instruire d'office le litige
lorsqu'une partie renonce à expliquer sa position, mais il
doit interroger les parties et les informer de leur devoir
de
collaboration et de production des preuves. Il n'est tenu de
s'assurer que les allégations et offres de preuve sont com-
plètes que lorsqu'il a des motifs objectifs d'éprouver des
doutes à ce propos. L'initiative du juge ne va pas au-delà
de
l'invitation faite aux parties de mentionner les preuves et
de les présenter. La maxime inquisitoire prévue par le droit
du bail ne permet pas d'étendre à bien plaire l'administra-
tion des preuves et de recueillir toutes les preuves possi-
bles (ATF 125 III 231 consid. 4a p. 238).

Au demeurant, la maxime inquisitoire sociale ne mo-
difie pas le fardeau de la preuve, ni ne dispense les
parties
de proposer des moyens de preuve (Lachat, Le bail à loyer,
p.
99, note de pied 61 in fine). Par conséquent, lorsque, comme
c'est ici le cas, le locataire soutient que le congé liti-
gieux visait à lui imposer une augmentation de loyer (art.
271a al. 1 let. b CO), il lui incombe de démontrer qu'il
existait un lien direct entre la résiliation et la volonté
du
bailleur d'imposer sa prétention (Higi, Commentaire zuri-
chois, n. 90 ad art. 271a CO). La preuve de ce lien de causa-
lité peut résulter d'indices (ATF 115 II 484 consid. 3c p.
487; Lachat, op. cit., p. 477, n. 5.2.3).

b) Il convient d'examiner, à la lumière de ces
principes, si la Chambre des recours a violé le droit
fédéral
en écartant les cinq moyens de nullité soulevés devant elle
par le demandeur au titre de la violation de la maxime d'of-
fice.

aa) aaa) Le demandeur estimait que le Tribunal des
baux aurait dû rechercher d'office à quels locaux se rappor-
tait l'"offre" du 22 avril 1998 et ce que signifiait la men-
tion "8 j.", plutôt que de constater que le document en ques-
tion ne mentionne pas si la double proposition qui y figure
était négociable ni de quels locaux il s'agit.

La Chambre des recours a rejeté ce moyen de nullité
au motif que le demandeur, qui s'était fait assister à l'au-
dience du Tribunal des baux par une mandataire de l'Associa-
tion suisse des locataires (Asloca), aurait eu la faculté
d'interpeller les défendeurs sur ce point. A son avis, si le
demandeur s'était vu refuser de les questionner à ce sujet,
il lui aurait incombé de faire consigner ce refus au procès-
verbal, cela dans la perspective de se ménager ainsi un
moyen
de recours. Partant, il faut admettre comme établi que l'on
ignore si ladite offre concernait effectivement les locaux
litigieux.

A l'appui de son recours en réforme, le demandeur
met tout d'abord en évidence la légèreté des indices - des
factures sans rapport avec la réalisation du parking et un
plan sommaire - sur lesquels le Tribunal des baux s'est
fondé
pour établir l'intention des bailleurs de créer un parking
au
rez-de-chaussée de l'immeuble. Selon lui, la note manuscrite
du 22 avril 1998 infirmerait clairement l'intention prêtée
aux bailleurs par les juges de première instance. Considérée
au regard des autres éléments de preuve ressortant du
dossier
cantonal, ladite note ne pouvait du reste concerner, selon
toute vraisemblance, que les locaux en cause. Aussi le Tribu-

nal des baux n'était-il pas en droit de constater simplement
que l'objet de l'offre qu'elle incluait était inconnu sans
instruire cette question, laquelle était décisive pour l'is-
sue du litige car l'intention des bailleurs de conclure un
nouveau bail excluait celle de construire un parking dans
les
mêmes locaux. Quant à la Chambre des recours, elle se voit
reprocher par le demandeur d'avoir transformé la maxime d'of-
fice en "une sorte de maxime des débats qualifiée" pour ne
s'être pas avisée du fait qu'il appartenait au juge, et non
à
une mandataire de l'Asloca, d'interpeller les parties relati-
vement à l'objet de l'"offre" du 22 avril 1998.

bbb) En l'occurrence, il incombait au demandeur, en
sa qualité de locataire, d'établir l'existence d'un lien di-
rect entre la résiliation de son bail et la volonté des bail-
leurs de lui imposer une augmentation de loyer. Le Tribunal
des baux a considéré que cette condition n'était pas réali-
sée, dès lors que les bailleurs n'entendaient pas majorer le
loyer mais créer un parking dans les locaux donnés à bail.
Comme on l'a déjà indiqué plus haut, le motif pour lequel le
bail a été résilié relève du fait. Par conséquent, les cons-
tatations y relatives échappent à la connaissance de la juri-
diction fédérale de réforme, quel que soit le poids des indi-
ces sur lesquels elles reposent. Il est, au demeurant, con-
forme au droit fédéral que le demandeur doive se laisser op-
poser l'absence de preuve de l'intention prêtée par lui aux
bailleurs.

Force est d'observer ensuite que, de l'aveu même du
demandeur, l'intention des bailleurs, telle qu'elle a été re-
tenue par le Tribunal des baux, serait "clairement" infirmée
par la note du 22 avril 1998, laquelle visait, selon toute
vraisemblance, les locaux pris à bail. A suivre le
demandeur,
cette preuve littérale, rapprochée des autres éléments proba-
toires figurant au dossier cantonal, suffirait donc à
établir
la véritable intention des bailleurs. Mais alors, s'il dit

vrai, on ne voit pas pour quelle raison les premiers juges
auraient dû pousser plus avant l'instruction de la cause sur
ce point. En réalité, ce qui leur est reproché, c'est de
n'avoir pas déduit des preuves dont ils disposaient la volon-
té des bailleurs de majorer le loyer du demandeur. Semblable
reproche, qui concerne l'appréciation des preuves, ne
saurait
cependant être formulé dans le cadre de la procédure du re-
cours en réforme.

Pour le surplus, le demandeur attribue à la maxime
inquisitoire sociale une portée extensive qu'elle n'a pas
quand il soutient que c'est le Tribunal des baux, et non pas
sa propre mandataire, qui aurait dû interpeller les parties
pour déterminer sur quels locaux portait l'"offre" du 22
avril 1998. L'art. 274d al. 3 CO ne fait pas du juge
l'avocat
des parties et ne lui commande pas davantage de se
substituer
aux mandataires de celles-ci pour compléter ou modifier leur
argumentation, à plus forte raison lorsque, comme en l'espè-
ce, la partie réputée la plus faible est assistée d'une per-
sonne travaillant pour le compte d'une association de protec-
tion des locataires. Le débat judiciaire revêt souvent un ca-
ractère aléatoire, en ce sens qu'il n'est pas rare que le
sort du procès dépende de la manière dont sont présentés les
points de vue antagonistes des plaideurs. Ce serait en faus-
ser les données et en détruire l'équilibre que de permettre
au juge d'y intervenir de son propre chef pour épauler l'une
des parties. En l'espèce, le demandeur avait allégué, sous
chiffre 8 de sa requête au Tribunal des baux, que, lors d'un
entretien qui s'était déroulé le 22 avril 1998, les
bailleurs
lui avaient proposé d'annuler la résiliation et, en contre-
partie, d'augmenter progressivement son loyer. Il avait pro-
duit la pièce litigieuse pour étayer ses dires. Dans leur ré-
ponse, les bailleurs se sont déterminés sur cet allégué par:
"contesté". Ainsi, le demandeur ne pouvait ignorer que l'ar-
gument soulevé par lui et l'élément de preuve censé en éta-
blir le bien-fondé n'étaient pas admis par son adverse par-

tie. Il lui appartenait dès lors de prouver le fait sous-ten-
dant cet argument. La possibilité de le faire s'est offerte
à
lui, le 15 septembre 1998, date à laquelle le Tribunal des
baux a tenu séance pour procéder à l'instruction et au juge-
ment de la cause dont il s'agit. Il ressort du procès-verbal
de cette audience que D.________, rédacteur d'une partie en
tout cas de la note manuscrite du 22 avril 1998, a comparu
devant les juges de première instance. Par conséquent, rien
n'empêchait le demandeur, assisté d'une employée de
l'Asloca,
d'interpeller directement l'intéressé pour qu'il précisât à
quels locaux se rapportait ladite note. S'il n'a pas saisi
l'occasion qui lui était ainsi donnée de clarifier la situa-
tion, il ne peut s'en prendre qu'à lui-même plutôt que de ve-
nir le reprocher a posteriori au Tribunal des baux.

Cela étant, la Chambre des recours n'a pas violé le
droit fédéral en considérant que les premiers juges
n'avaient
pas méconnu la maxime d'office relativement à la note manus-
crite du 22 avril 1998.

bb) Si l'on en croit le demandeur, le Tribunal des
baux aurait dû examiner, en outre, si le sous-sol du
bâtiment
dans lequel se trouvent les locaux litigieux comportait bien
un seul accès, excluant la division des locaux.

La Chambre des recours a rejeté la critique formu-
lée de ce chef par le demandeur pour le même motif que celui
qui vient d'être indiqué. Selon elle, il ne résulte pas du
procès-verbal de l'audience que le demandeur aurait expressé-
ment interpellé les défendeurs sur le point de savoir si ce
local du sous-sol ne possédait qu'un seul accès empêchant la
division des locaux ou qu'il se serait vu refuser la possibi-
lité de poser la question.

Le demandeur ne paraît pas s'en prendre spécifique-
ment à cette motivation dans son acte de recours. Il y souli-

gne, d'ailleurs, que, si le rez-de-chaussée du bâtiment com-
porte bien deux accès, le niveau inférieur n'en comporte
qu'un seul, ce que "le tribunal a pu constater lors de son
inspection locale". En argumentant de la sorte, le demandeur
reconnaît lui-même que la procédure probatoire a permis
d'établir le fait à prouver. Il s'ensuit que le Tribunal des
baux n'avait pas à administrer d'office d'autres moyens de
preuve pour établir ce fait.

cc) Toujours selon le demandeur, le Tribunal des
baux aurait dû rechercher d'office s'il n'eût pas été plus
simple et plus logique de réaliser un parking au sous-sol de
l'immeuble.

Pour écarter le moyen de nullité correspondant, la
Chambre des recours a rappelé que les premiers juges avaient
retenu, d'une façon qui la liait, que les bailleurs enten-
daient réaliser le parking dans les locaux du
rez-de-chaussée
loués au demandeur. A son avis, étant donné qu'il n'avait ja-
mais été question d'aménager le parking au sous-sol, il n'ap-
partenait pas au Tribunal des baux de faire porter d'office
l'instruction sur cette question, les intentions des défen-
deurs étant parfaitement claires à cet égard. De surcroît,
le
procès-verbal de l'audience n'indique pas que le demandeur
se
serait vu refuser la faculté d'interpeller ces derniers sur
cette question.

Le demandeur se borne, pour toute critique, à re-
procher aux juges cantonaux d'avoir confondu le moyen tiré
de
l'appréciation des preuves (qui n'était pas en cause ici) et
celui relatif au défaut d'une instruction suffisante. Le re-
proche est infondé. Si, comme il l'a retenu souverainement,
le Tribunal des baux considérait, sur la base des éléments
probatoires dont il disposait, que les bailleurs avaient
l'intention de réaliser le parking dans les locaux loués au
demandeur, c'est-à-dire au rez-de-chaussée de l'immeuble, il

n'avait pas à examiner d'office la possibilité - exclue par
les intéressés - d'aménager le parking au sous-sol.

dd) Selon le demandeur, il eût été indispensable,
ne fût-ce que pour fixer la durée de la prolongation de bail
sollicitée par lui, de verser au dossier le plan de quartier
pour permettre aux juges de vérifier la conformité de l'amé-
nagement projeté du parking avec ce plan.

La Chambre des recours constate, ici également, que
le demandeur n'a ni produit lui-même, ni requis la
production
du plan de quartier, alors qu'il lui appartenait de le faire
s'il entendait s'y référer pour justifier la prolongation de
bail requise. Elle ajoute que les conditions techniques et
réglementaires échappent à la compétence du Tribunal des
baux
et ne pourraient de toute façon pas être connues avant la
fin
de la mise à l'enquête, dont le départ du locataire est un
préalable indispensable.

Le demandeur soumet au Tribunal fédéral, sur un mo-
de appellatoire, l'argument qu'il avait présenté devant la
Chambre des recours. Il le fait en pure perte. Conformément
aux principes susmentionnés, c'est à lui qu'il incombait de
prouver que les bailleurs n'avaient résilié son bail que
sous
le fallacieux prétexte de la construction projetée d'un par-
king, désireux qu'ils auraient été en réalité de lui imposer
une augmentation de loyer. S'il entendait établir la chose
en
contestant la faisabilité du parking sous l'angle du droit
administratif, il devait effectivement produire ou, à tout
le
moins, requérir la production du plan de quartier qui, par
hypothèse, eût mis obstacle à la construction projetée ou, à
tout le moins, en eût retardé la réalisation. Ne l'ayant pas
fait en temps utile (le procès-verbal de l'audience
contient,
en effet, la mention suivante: "sans autre réquisition,
l'instruction est close"), il ne peut pas venir reprocher
après coup aux juges de première instance leur inaction par

une interprétation extensive, sur ce point aussi, de la maxi-
me inquisitoire sociale. Enfin, s'agissant de la faisabilité
technique du parking, le Tribunal des baux a constaté souve-
rainement que les locaux occupés par le demandeur "peuvent
être aménagés de la sorte sans travaux importants", ainsi
que
le relèvent
à juste titre les défendeurs dans leur réponse
au
recours. Il n'y avait donc pas matière à instruire d'office
cette question de manière plus approfondie.

ee) Quant au dernier moyen de nullité, la Chambre
des recours a répondu au demandeur, qui avait soulevé le pro-
blème du prix de location des places de parc, qu'il est de
notoriété publique que des particuliers sont prêts à payer
un
loyer de 120 fr. par mois pour disposer d'une place de parc
intérieure dans l'agglomération lausannoise, de sorte qu'il
n'était nul besoin d'instruire plus avant cette question.

Le demandeur ne critique pas ce raisonnement qui
est du reste convaincant.

c) Force est d'admettre, au terme de cet examen,
que la Chambre des recours n'a pas méconnu l'art. 274d al. 3
CO en écartant les moyens de nullité relatifs à la violation
de la maxime inquisitoire sociale que le demandeur imputait
au Tribunal des baux dans le cadre de la contestation du con-
gé litigieux.

3.- a) En ce qui concerne la durée de la prolonga-
tion de bail qui lui a été accordée, le demandeur reprend,
dans le grief y afférent, le moyen tiré de la violation de
la
maxime inquisitoire sociale en rapport avec les conditions
juridiques et techniques d'aménagement du parking. Ce moyen
a
été examiné et rejeté plus haut (consid. 2b/dd), si bien
qu'il n'est pas nécessaire d'y revenir.

b) aa) Selon l'art. 272b al. 1 CO, le bail de lo-
caux commerciaux peut être prolongé de six ans au maximum.
Cette disposition ne précise cependant pas sur quelles bases
le juge doit se fonder pour fixer la durée de la
prolongation
du bail. La doctrine unanime admet qu'il doit procéder à une
pesée des intérêts en présence (Lachat, op. cit., p. 507 n.
4.4; Anita Thanei, Die Erstreckung des Mietverhältnisses,
Fachreihe Mietrecht no 2, Zurich 1990, p. 18; Bruno Giger,
Die Erstreckung des Mietverhältnisses [art. 272-272d OR],
thèse Zurich 1995, p. 80 s.). Ainsi, la pesée des intérêts,
prescrite par l'art. 272 al. 1 et 2 CO pour décider d'oc-
troyer ou non une prolongation du bail, sert également pour
déterminer la durée de celle-ci (arrêt non publié du 10 juil-
let 2000, dans la cause 4C.139/2000, consid. 2a).

Le juge doit garder à l'esprit que la prolongation
a pour but de donner du temps au locataire pour trouver une
solution de remplacement (ATF 125 III 226 consid. 4b) ou, à
tout le moins, qu'elle tend à adoucir les conséquences péni-
bles résultant d'une extinction du contrat selon les règles
ordinaires (ATF 116 II 446 consid. 3b).

Lorsqu'il est appelé à se prononcer sur une prolon-
gation du bail, le juge dispose d'un large pouvoir d'appré-
ciation pour en déterminer la durée dans les limites fixées
par la loi; il ne transgresse pas le droit fédéral en exer-
çant le pouvoir d'appréciation que la loi lui accorde; le
droit fédéral n'est violé que s'il sort des limites fixées,
s'il se laisse guider par des considérations étrangères à la
disposition applicable, s'il ne prend pas en compte les élé-
ments d'appréciation pertinents ou s'il tire des déductions
à
ce point injustifiables que l'on doive parler d'un abus du
pouvoir d'appréciation (ATF 125 III 226 consid. 4b).

bb) Dans son jugement du 15 décembre 1998, le Tri-
bunal des baux a tout d'abord mis en évidence le fait que le

demandeur avait conclu un contrat qui était non seulement de
courte durée, mais également à caractère précaire. Passant
ensuite à la pesée des intérêts, il a tenu compte, d'une
part, du fait que le demandeur pourrait rencontrer certaines
difficultés à trouver un atelier de remplacement en raison
notamment du genre d'activités qu'il déploie (bruit, volume,
poids des machines, etc.) et, d'autre part, de la forte de-
mande de places de parc des habitants de l'immeuble et du
quartier, laquelle n'était cependant à l'époque pas urgente
au point de faire obstacle à toute prolongation. Estimant
que
le droit des propriétaires de disposer de leur immeuble l'em-
portait sur celui du locataire de continuer à utiliser une
grande surface pour un loyer très modique, les premiers
juges
sont arrivés à la conclusion qu'une prolongation était
certes
indispensable pour permettre au demandeur de trouver des lo-
caux de remplacement et d'organiser son déménagement, mais
qu'elle devait rester unique et ne pas excéder une année, eu
égard à l'ensemble des circonstances.

La Chambre des recours, dans son arrêt du 16 avril
1999, a fait siens les motifs retenus par les premiers juges
et elle se réfère à cet arrêt dans celui qui fait l'objet du
présent recours.

Dans le cas particulier, les juges cantonaux ont
tenu compte, à juste titre, de la faible durée initiale du
bail en cause et du caractère précaire de celui-ci (cf. ATF
121 III 260 consid. 6a et l'arrêt cité), éléments que le de-
mandeur passe totalement sous silence dans son recours en ré-
forme. Pour le surplus, dans la mesure où il paraît se préva-
loir du droit qu'il aurait de demeurer dans les locaux pris
à
bail jusqu'à la réalisation du parking, le demandeur mécon-
naît le but de la prolongation du bail, tel qu'il vient
d'être rappelé, ainsi que la constatation souveraine de la
Chambre des recours, selon laquelle le départ du locataire

est un préalable indispensable à la mise à l'enquête du pro-
jet de parking.

Au demeurant, la question n'est pas de savoir si le
Tribunal fédéral, à supposer qu'il ait eu à statuer en lieu
et place de l'autorité cantonale, aurait fixé une durée plus
longue. Il n'a pas, en effet, à substituer sa propre appré-
ciation à celle du juge du fait. Saisi d'un recours en réfor-
me, il doit se borner à dire si la cour cantonale a violé le
droit fédéral; dès lors que celui-ci accorde au juge un
large
pouvoir d'appréciation, une violation du droit fédéral suppo-
serait que la cour cantonale ait fait, au détriment du deman-
deur, une erreur de raisonnement manifeste ou qu'elle soit
parvenue à des conclusions injustifiables. Tel n'est pas le
cas.

On relèvera encore, avant de conclure, même si une
telle circonstance n'est pas déterminante, que le demandeur
a
bénéficié de facto des trois quarts de la prolongation requi-
se en raison de la durée importante de la procédure close
par
le présent arrêt.

4.- Il y a lieu, dans ces conditions, de rejeter le
recours, avec suite de frais et dépens (art. 156 al. 1 et
159
al. 1 OJ), et de confirmer l'arrêt du 12 avril 2000.

Par ces motifs,

l e T r i b u n a l f é d é r a l :

1. Rejette le recours et confirme l'arrêt attaqué;

2. Met un émolument judiciaire de 3000 fr. à la
charge du recourant;

3. Dit que le recourant versera aux intimés, créan-
ciers solidaires, une indemnité de 3000 fr. à titre de dé-
pens;

4. Communique le présent arrêt en copie aux manda-
taires des parties et à la Chambre des recours du Tribunal
cantonal du canton de Vaud.

____________

Lausanne, le 12 février 2001
ECH

Au nom de la Ie Cour civile
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
Le Président,

Le Greffier,


Synthèse
Numéro d'arrêt : 4C.301/2000
Date de la décision : 12/02/2001
1re cour civile

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2001-02-12;4c.301.2000 ?
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