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12/02/2001 | SUISSE | N°1A.306/2000

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 12 février 2001, 1A.306/2000


«/2»

1A.306/2000

Ie C O U R D E D R O I T P U B L I C
**********************************************

12 février 2001

Composition de la Cour: MM. les Juges Aemisegger, Président,
Vice-président du Tribunal fédéral, Féraud et Favre.
Greffier: M. Kurz.

Statuant sur le recours de droit administratif
formé par

F.________, représenté par Me Marc Bonnant et Me Jean-Marc
Carnicé, avocats à Genève,

contre

la décision rendue le 24 octobre 2000 par l'Office fédéral

de
la justice;

(réextradition de l'Italie aux Etats-Unis)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s ...

«/2»

1A.306/2000

Ie C O U R D E D R O I T P U B L I C
**********************************************

12 février 2001

Composition de la Cour: MM. les Juges Aemisegger, Président,
Vice-président du Tribunal fédéral, Féraud et Favre.
Greffier: M. Kurz.

Statuant sur le recours de droit administratif
formé par

F.________, représenté par Me Marc Bonnant et Me Jean-Marc
Carnicé, avocats à Genève,

contre

la décision rendue le 24 octobre 2000 par l'Office fédéral
de
la justice;

(réextradition de l'Italie aux Etats-Unis)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- Le 18 octobre 1996, F.________, citoyen italien
né en 1940, a été extradé aux autorités italiennes, pour ré-
pondre du délit de banqueroute frauduleuse.

B.- Le 2 mars 2000, l'Ambassade d'Italie à Berne a
requis de l'Office fédéral de la police (OFP) l'autorisation
de réextrader F.________ vers les Etats-Unis d'Amérique, en
vertu d'une demande formelle de cet Etat, fondée sur un man-
dat d'arrêt n° CR 98-200 délivré le 12 février 1999 par la
Cour de district des Etats-Unis pour le district central de
Californie. Les charges retenues contre F.________ figurent
dans un acte d'accusation (Superseding Indictment,
remplaçant
un premier acte d'accusation du 26 février 1996) rendu par
un
Grand Jury le 12 novembre 1998 dans la cause dirigée contre
P.________, F.________ et C.________, et comprenant 55 chefs
d'accusation distincts dont 24 concernent F.________ et se
rapportent à trois opérations principales. La première
concerne l'acquisition, entre 1987 et 1989, d'une participa-
tion majoritaire dans la société Cannon Group Inc. (Cannon);
F.________ et P.________ auraient fait de fausses déclara-
tions quant à la provenance des fonds utilisés pour cette ac-
quisition, notamment un prêt octroyé par le Crédit Lyonnais
Bank Netherland (CL), dont des employés auraient été sou-
doyés. La seconde opération concerne la vente d'avoirs déte-
nus par Cannon (rebaptisée Pathé Communication Corp, PCC) à
la société Cinema 5, pour environ 232 millions d'US$. Cinema
5 était en fait contrôlée par P.________ et F.________ et
les
avoirs vendus auraient été faussement surévalués. La troi-
sième opération se rapporte au projet d'acquisition de la so-
ciété MGM/UA Communications Company (MGM/UA), pour environ
1,3 milliards d'US$, en vue de sa fusion avec PCC.
P.________
et F.________ auraient fait de fausses déclarations aux auto-
rités de contrôle, experts et investisseurs, en particulier

quant aux sources de financement de l'acquisition, qui prove-
naient de prêts bancaires et non des liquidités de PCC.

Les agissements reprochés à F.________ consistent en
substance dans de faux renseignements donnés aux investis-
seurs, à la presse et aux organes de contrôle, de faux rap-
ports présentés à la US Securities and Exchange Commission
(SEC), des falsifications de documents comptables, des dé-
tournements de fonds et d'autres actes frauduleux ayant en-
traîné la cessation d'activités de PCC, la mise en faillite
de MGM et une perte de plusieurs centaines de millions d'US$
pour les investisseurs. Les infractions retenues sont: un
chef d'accusation de complot ("conspiracy") en rapport avec
l'infraction de "securities fraud" et de faux dans les
titres
(titre 18, section 371 du code pénal des Etats-Unis - USC);
quatre chefs d'accusation de "securities fraud" en rapport
avec l'acquisition et la vente de PCC et MGM/UA (tit. 15,
sect. 78j(b) et 78ff, tit. 17 du code of federal regulation
-
CFR); neuf chefs d'accusation pour la présentation de faux
rapports à la SEC (tit. 15, sect. 78ff(a) et 78m(a) USC,
tit.
17 CFR); trois chefs d'accusation pour faux en écritures
(tit. 15, sect. 78ff(a) et 78m(b) USC, tit. 17 CFR); sept
chefs d'accusation pour déclaration fallacieuse aux
réviseurs
d'une société cotée en bourse (tit. 15, sect. 78ff(a) USC,
tit. 17 CFR).

C.- Entendu à Rome le 18 mars 2000, F.________ s'est
opposé à sa réextradition. Dans son mémoire motivé du 13
juin
2000, il relevait que la demande américaine ne comportait
pas
d'indications suffisantes quant aux lieux, dates et mode de
commission des infractions, ainsi que quant à l'application
des dispositions pénales aux faits exposés. La condition de
la double incrimination n'était pas réalisée: les délits men-
tionnés n'étaient pas punissables en droit suisse, ils se-
raient prescrits selon ce même droit et auraient été commis
en dehors du territoire américain. La prescription serait

aussi vraisemblablement acquise en droit américain, la dispo-
sition exceptionnelle permettant de suspendre le délai en
cas
d'envoi de commissions rogatoires n'étant pas applicable.
L'Italie devait préalablement indiquer pour quels faits elle
entendait réextrader F.________, subsidiairement être
invitée
à fournir des précisions quant au point de départ du délai
de
prescription et aux demandes d'entraide envoyées par les
Etats-Unis, et à produire le premier acte d'accusation du 26
février 1998.

D.- Par décision du 24 octobre 2000, l'Office fédé-
ral de la justice (OFJ, auquel les compétences en la matière
ont été transférées), a autorisé la réextradition de
F.________ aux Etats-Unis pour les faits mentionnés dans la
demande du 2 mars 2000. Sous l'angle de la double incrimina-
tion, les faits décrits pouvaient être qualifiés d'escroque-
rie, l'astuce consistant dans la remise à la SEC de faux do-
cuments dont elle n'était pas en mesure de vérifier la véra-
cité. Les sociétés concernées avaient leur siège aux Etats-
Unis, ainsi que la SEC, ce qui suffisait à admettre la com-
pétence américaine. Les infractions n'étaient pas
prescrites,
selon les indications figurant dans la demande.

E.- F.________ forme un recours de droit adminis-
tratif contre cette dernière décision. Il en demande l'an-
nulation, et le refus de la réextradition aux Etats-Unis.
Subsidiairement, il conclut au renvoi de la cause à l'OFJ
afin que l'Italie précise pour quels faits elle entend accor-
der l'extradition, fournisse des précisions sur la date
d'avril 1992 arrêtée pour faire partir le délai de prescrip-
tion de l'infraction de complot, produise les dix-huit deman-
des d'entraide formées par les Etats-Unis ainsi que l'acte
d'accusation du 26 février 1998.

L'OFJ conclut au rejet du recours. Le recourant a
répliqué.

C o n s i d é r a n t e n d r o i t :

1.- La décision par laquelle l'OFJ, autorité fédéra-
le de première instance, autorise la réextradition vers un
Etat tiers, est une décision d'extradition au sens de l'art.
55 al. 1 de la loi fédérale sur l'entraide internationale en
matière pénale (EIMP, RS 351.1). Elle est susceptible d'un
recours de droit administratif (art. 55 al. 3 et 25 al. 1
EIMP). Le recourant a agi dans le délai et les formes utiles.

2.- Selon l'art. 15 de la Convention européenne
d'extradition (CEExtr., RS 0.353.1), l'assentiment de la par-
tie requise est nécessaire pour permettre à la partie requé-
rante de livrer à une autre Partie ou à un Etat tiers l'indi-
vidu extradé pour des infractions antérieures à la remise.
L'art. 15 CEExtr. ne précise pas à quelles conditions cet as-
sentiment est donné; il permet toutefois à la partie requise
d'exiger la production des pièces prévues au paragraphe 2 de
l'art. 12, soit la demande d'extradition présentée par
l'Etat
tiers, ainsi que les pièces à l'appui.

A l'instar de l'extension de l'extradition (art. 14
CEExtr., 39 EIMP), l'obligation de requérir l'assentiment de
l'Etat requis pour réextrader vers un Etat tiers (art. 15
CEExtr., 38 al. 1 let. a in fine EIMP) est une conséquence
du
principe de la spécialité. Principe reconnu de droit des
gens, ce dernier constitue certes une garantie en faveur de
la personne extradée, mais tend également à protéger la sou-
veraineté de l'Etat requis en limitant celle de l'Etat requé-
rant, en empêchant toute condamnation à raison d'un acte
pour
lequel l'extradition n'a pas été consentie (ATF 110 Ib 187
consid. 3b p. 188). Saisie d'une demande de réextradition,
la
Suisse doit ainsi s'assurer que la personne extradée ne sera
pas remise à un Etat tiers pour y répondre de faits pour les-
quels elle n'aurait pas elle-même accordé l'extradition.
Elle
examine la demande de l'Etat tiers comme s'il s'agissait

d'une demande qui lui était directement soumise, le cas
échéant au regard du traité conclu avec l'Etat tiers. Elle
doit ainsi notamment vérifier que la condition de la double
incrimination est remplie, et que les infractions
poursuivies
ne sont pas de celles pour lesquelles la coopération interna-
tionale de la Suisse est refusée.

3.- Le recourant soutient en premier lieu que la de-
mande d'extradition américaine ne permettrait pas de compren-
dre quels sont les faits constitutifs d'infractions. Elle
n'indiquerait pas le lieu de commission de ces infractions.
Le recourant invoque toutefois à tort les art. 12 CEExtr. et
10 al. 2 EIMP. Si l'obligation, pour l'Italie, de requérir
l'autorisation de la Suisse découle de la CEExtr., l'admissi-
bilité de la demande américaine doit en revanche s'examiner
sur le seul vu du Traité conclu le 14 novembre 1990 (TExUS,
RS 0.353.933.6), ou des dispositions du droit interne
lorsque
celles-ci se révèlent plus favorables à l'extradition. C'est
dès lors l'art. 9 TExUS qui détermine les conditions de
forme
auxquelles la demande doit satisfaire. Cette disposition pré-
voit, elle aussi, l'indication de la date et du lieu des in-
fractions (al. 2 let. b), afin de permettre à l'autorité re-
quise de vérifier la compétence ratione loci des autorités
répressives de l'Etat requérant (art. 1 TExUS), et de s'assu-
rer qu'il n'y a pas prescription selon le droit de l'Etat re-
quérant (art. 5 TExUS).

Même si la date et le lieu des infractions décrites
ne sont pas systématiquement précisés, la demande d'extradi-
tion américaine contient suffisamment de données pour permet-
tre d'en apprécier le bien-fondé. L'exposé des faits est par-
ticulièrement complet; il mentionne notamment que
l'opération
relative à l'acquisition de la participation majoritaire de
Cannon aurait eu lieu entre 1987 et 1989, que les transac-
tions relatives à Cinema 5 se seraient déroulées dès
décembre
1989, et que le projet d'acquisition de MGM/UA a été initié

en décembre 1990. L'autorité requérante n'est pas tenue de
prouver les soupçons qu'elle allègue, ni même, contrairement
à ce que soutient le recourant, de démontrer en quoi les dis-
positions pénales seraient applicables aux faits décrits. En
effet, selon l'art. 2 TExUS, il est indifférent, sous
l'angle
de la double incrimination, que les infractions décrites
soient ou non définies en des termes identiques dans le
droit
des deux Etats; l'autorité requise examine simplement si ces
faits sont pénalement appréhendés dans son propre droit pé-
nal, sans avoir à appliquer le droit pénal étranger (cf. ci-
dessous consid. 4).

Le recourant persiste à considérer que le rattache-
ment avec les Etats-Unis serait insuffisamment démontré,
puisque selon lui, la demande n'indiquerait comme lieu de
perpétration que des villes européennes. L'OFJ a toutefois
répondu que les sociétés touchées par les opérations
décrites
ont toutes leur siège aux Etats-Unis. Les faux
renseignements
et documents auraient par ailleurs été destinés à tromper
les
experts, contrôleurs et autorités américains, en particulier
la SEC, ainsi que les investisseurs. Les indications
fournies
sont suffisantes pour s'assurer que les agissements délictu-
eux ont eu leur résultat sur le territoire de l'Etat requé-
rant (cf. au surplus ci-dessous consid. 5). Les arguments re-
latifs à la motivation de la demande d'extradition
américaine
apparaissent ainsi mal fondés.

4.- Pour le recourant, la condition de la double in-
crimination ne serait pas satisfaite, chacune des
infractions
mentionnées dans la demande n'ayant pas son équivalent en
droit suisse. Le complot (conspiracy) ne correspondrait pas
à
l'infraction prévue à l'art. 260ter CP (organisation crimi-
nelle), disposition visant essentiellement le crime organisé
de type mafieux. L'infraction de "securities fraud" pourrait
correspondre à l'art. 161bis CP (manipulation de cours),
mais
il n'est pas fait état, dans la demande, d'une volonté d'in-

fluencer le cours boursier afin de se procurer un avantage
financier. L'infraction concernant les faux rapports présen-
tés à la SEC ne correspondrait à aucune infraction du droit
suisse permettant d'accorder l'extradition. Faute de préci-
sions, les infractions de faux dans les titres et d'escroque-
rie ne seraient pas établies. Les fausses informations don-
nées aux auditeurs des sociétés ne seraient pas couvertes
par
l'art. 152 CP. Quant à la falsification de documents commer-
ciaux, elle ne correspondrait pas à l'art. 251 CP.
L'ensemble
de ces infractions seraient d'ailleurs prescrites en droit
pénal suisse.

a) L'argumentation du recourant, fondée à tort sur
les art. 2 CEExtr. et 35 EIMP, puisque c'est l'art. 2 TExUS
qui est en l'espèce seul applicable, part de la prémisse, er-
ronée, selon laquelle les infractions pénales retenues par
l'autorité requérante devraient chacune correspondre à une
norme de droit pénal suisse. Tel n'est pas le sens de l'art.
2 let. a TExUS, qui précise que les infractions ne doivent
pas forcément être définies en termes identiques dans les
droits des deux Etats.

L'examen de la punissabilité selon le droit suisse
comprend ainsi les éléments constitutifs objectifs et subjec-
tifs de l'infraction, après
transposition nécessaire de
l'état de fait, à l'exclusion des conditions particulières
posées en matière de culpabilité et de répression (ATF 117
Ib
64 consid. 5c p. 90). Il n'est pas nécessaire que les faits
incriminés soient qualifiés juridiquement de la même manière
dans les deux Etats, ni qu'ils soient soumis aux mêmes condi-
tions de punissabilité ou passibles de peines équivalentes:
il suffit qu'ils soient réprimés dans les deux Etats comme
des délits donnant ordinairement lieu à la collaboration in-
ternationale (ATF 117 Ib 337 consid. 4a p. 342). La collabo-
ration instituée par le traité ne saurait en effet être en-
travée en raison de différences entre les systèmes
juridiques

des deux Etats. Il est par exemple sans importance que le
droit étranger réprime plusieurs infractions distinctes pour
des faits qui, en droit suisse, n'en formeraient qu'une
seule
(cf. ATF 108 Ib 525 consid. 5 p. 532/533). L'inverse est éga-
lement vrai, l'important étant que les infractions décrites
par l'autorité requérante soient, d'une manière ou d'une au-
tre, appréhendées par le droit pénal de l'Etat requis.

L'autorité suisse doit ainsi se livrer à une appré-
ciation d'ensemble des faits décrits. Elle est par ailleurs
tenue par cette description (ATF 125 II 250 consid. 5b p.
257, 122 II 422 consid. 3c p. 431 et les arrêts cités).

b) L'OFJ a correctement appliqué ces principes, en
retenant que le recourant et ses comparses auraient, selon
la
demande, élaboré un édifice complexe de manoeuvres destinées
à tromper les autorités et les investisseurs en taisant la
source de financement réelle de leur prise de participation
dans Cannon, puis du rachat de MGM/UA, et en surévaluant les
actifs vendus à Cinema 5 dans le but d'augmenter fictivement
les avoirs de PCC. La demande fait aussi état de prêts ban-
caires accordés par le CL dont les employés auraient été sou-
doyés. Ce seraient ainsi plusieurs centaines de millions
d'US$ qui auraient été perdues par les investisseurs, et il
ne fait pas de doute que ces derniers ont été trompés par
les
manoeuvres frauduleuses mises sur pied par le recourant, no-
tamment quant à la capacité financière des différentes socié-
tés. L'élément d'astuce propre à l'escroquerie est manifeste-
ment réalisé, les auteurs ayant largement recouru à des docu-
ments comptables falsifiés; l'infraction de faux dans les ti-
tres peut elle aussi être retenue. Cela suffit pour admettre
la réalisation de la condition de la double incrimination.
L'argumentation de détail soulevée par le recourant n'a
ainsi
pas sa place dans le cadre de la présente procédure. Il y a
lieu au surplus de relever, s'agissant du délit de complot,
que l'art. 2 al. 3 TExUS limite considérablement la portée
de

la condition de la double incrimination, puisqu'il suffit
que
l'extradition puisse, comme c'est le cas en l'espèce, être
accordée pour les délits principaux d'escroquerie et de
faux.
La jurisprudence a par ailleurs précisé que la circonstance
aggravante du métier, par exemple dans le cas d'escroquerie,
permettait au droit suisse d'appréhender pénalement les agis-
sements constitutifs de complot (cf. la jurisprudence citée
par Zimmermann, La coopération judiciaire internationale en
matière pénale, Berne 1999, note 214 ad n° 355).

c) Le recourant soutient aussi que les infractions
décrites seraient prescrites en droit suisse. Il perd de vue
que, si elle est mentionnée aux art. 10 CEExtr. et 5 al. 1
let. c EIMP, la prescription selon le droit de l'Etat requis
ne constitue pas un obstacle à l'extradition selon l'art. 5
TExUS, seul applicable en l'espèce. L'argument doit être
écarté.

5.- Invoquant l'art. 7 CEExtr., le recourant sou-
tient que les infractions motivant la demande américaine au-
raient été commises hors du territoire de l'Etat requérant.
Il se livre à un examen des conditions posées à l'art. 7
CEExtr., en méconnaissant à nouveau que la demande
américaine
ne doit être examinée que par rapport au TExUS. Or, la dispo-
sition correspondant à l'art. 7 CEExtr., soit l'art. 1er al.
2 TExUS, impose à la Suisse d'accorder l'extradition non seu-
lement lorsque, ayant été commise hors du territoire de
l'Etat requérant, l'infraction serait punissable en Suisse
dans des conditions analogues, mais aussi lorsque la
personne
réclamée a la nationalité de l'Etat requérant ou est recher-
chée pour une infraction commise aux dépens d'un ressortis-
sant de l'Etat requérant. Cette dernière condition est réali-
sée en l'espèce, la demande faisant état des pertes importan-
tes subies par de très nombreux investisseurs aux
Etats-Unis.
Point n'est besoin, dès lors, de rechercher si, comme le pré-
tend le recourant, les faits décrits ont été commis en
dehors

du territoire américain, ce qui parait d'ailleurs douteux
compte tenu du lieu de situation des principales sociétés im-
pliquées.

6.- Le recourant estime enfin que les infractions
seraient vraisemblablement prescrites en droit américain. La
prescription, de cinq ans pour ce type de délits, serait ac-
quise si l'acte d'accusation n'est pas rédigé dans ce délai.
En l'espèce, l'acte d'accusation date du 12 novembre 1998,
de
sorte que les faits reprochés, antérieurs au 12 novembre
1993, seraient prescrits. Dans sa demande, l'autorité requé-
rante évoque la section 3292 du titre 18 USC, qui permet de
suspendre le délai de prescription durant trois ans lorsque
des demandes d'entraide sont adressées à l'étranger, et que
les faits sont déjà visés par un premier acte d'accusation
établi en temps utile. Le recourant estime, en se fondant
sur
un avis de droit, qu'il ne serait pas possible de vérifier
si
tel est le cas, dès lors que les dix-huit demandes
d'entraide
et l'acte d'accusation du 26 février 1998 n'ont pas été pro-
duits.

De même que la condition de la double incrimination,
la question de la prescription doit être examinée par l'auto-
rité requise sur la seule base des faits allégués par l'auto-
rité requérante, sans que cette dernière n'ait à fournir de
preuves. Exiger les pièces réclamées par le recourant irait
à
l'encontre de ce principe. L'autorité américaine expose clai-
rement les raisons pour lesquelles elle estime que la pres-
cription n'est pas encore acquise, et rien ne permet a
priori
de penser que les informations données à ce propos soient
inexactes ou lacunaires.

7.- Le recourant voudrait encore que l'Italie soit
préalablement invitée à faire savoir pour quels faits elle
entend accorder l'extradition. L'autorisation de la Suisse
constitue l'une des conditions préalables à l'octroi de l'ex-

tradition par l'Italie, de sorte qu'on ne saurait exiger de
cet Etat qu'il statue en premier. Les conclusions du recou-
rant paraissent d'ailleurs dénuées d'objet, car, sur le vu
de
ce qui précède, l'assentiment de la Suisse n'a pas à être ac-
compagné de réserve, ce qui confère à l'Italie toute
latitude
pour juger de la demande d'extradition qui lui est soumise.
Le recourant reproche par ailleurs en vain à l'OFJ de ne pas
avoir rendu de décision d'entrée en matière conformément à
l'art. 43 EIMP. Selon cette disposition, l'office fédéral
décide s'il y a lieu d'entrer en matière sur la demande et à
quelles conditions. Contrairement à ce que soutient le recou-
rant, cela n'oblige pas l'autorité à rendre dans chaque cas
une décision formelle préalable, puisque l'octroi de l'extra-
dition doit de toute manière faire l'objet d'une décision fi-
nale fondée sur l'art. 55 EIMP. On ne voit pas quel intérêt
pouvait avoir le recourant à une telle décision préalable,
laquelle n'aurait d'ailleurs pas pu faire l'objet d'un re-
cours, vu son caractère incident. L'essentiel est que le re-
courant ait pu prendre connaissance du dossier et s'exprimer
avant le prononcé attaqué, conformément aux art. 52 et 55
al.
1 EIMP. Son droit d'être entendu est ainsi respecté.

8.- Le recours de droit administratif apparaît ainsi
entièrement mal fondé. Un émolument judiciaire est mis à la
charge du recourant, qui succombe (art. 156 al. 1 OJ).

Par ces motifs,

l e T r i b u n a l f é d é r a l :

1. Rejette le recours.

2. Met à la charge du recourant un émolument judi-
ciaire de 5000 fr.

3. Communique le présent arrêt en copie aux manda-
taires du recourant et à l'Office fédéral de la justice
(B 87961/08).

Lausanne, le 12 février 2001
KUR/col

Au nom de la Ie Cour de droit public
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
Le Président,

Le Greffier,


Synthèse
Numéro d'arrêt : 1A.306/2000
Date de la décision : 12/02/2001
1re cour de droit public

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2001-02-12;1a.306.2000 ?
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