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09/02/2001 | SUISSE | N°B.36/00

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 09 février 2001, B.36/00


«AZA 7»
B 36/00 Rl

IIe Chambre

composée des Juges fédéraux Lustenberger, Président, Rüedi
et Ferrari; Métral, Greffier

Arrêt du 9 février 2001

dans la cause

B.________, recourant, représenté par la Fédération suisse
pour l'intégration des handicapés (FSIH), Place
Grand-SaintJean 1, Lausanne

contre

1. Caisse de pensions des Etablissements Sarina SA à
Villars-sur-Glâne, représentée par Maître Jean-François de
Bourgknecht, avocat, Boulevard de Pérolles 18, Fribourg,> 2. Winterthur-Columna fondation collective 2ème pilier,
Zurich, pour adresse Paulstrasse 9, Winterthur,
toutes deux intimées,
...

«AZA 7»
B 36/00 Rl

IIe Chambre

composée des Juges fédéraux Lustenberger, Président, Rüedi
et Ferrari; Métral, Greffier

Arrêt du 9 février 2001

dans la cause

B.________, recourant, représenté par la Fédération suisse
pour l'intégration des handicapés (FSIH), Place
Grand-SaintJean 1, Lausanne

contre

1. Caisse de pensions des Etablissements Sarina SA à
Villars-sur-Glâne, représentée par Maître Jean-François de
Bourgknecht, avocat, Boulevard de Pérolles 18, Fribourg,
2. Winterthur-Columna fondation collective 2ème pilier,
Zurich, pour adresse Paulstrasse 9, Winterthur,
toutes deux intimées,

et

Tribunal administratif du canton de Fribourg, Givisiez

A.- B.________ a travaillé en qualité de menuisier
pour le compte de l'entreprise S.________ SA du
1er novembre 1989 au 31 mai 1990. Le 22 février 1990, il a
subi un accident à l'épaule droite qui a nécessité une
arthroscopie avec acromioplastie pour pincement et une
ablation d'ostéophytes de l'épaule droite (opération du
23 avril 1990), suivies, le 20 novembre 1990, d'une nouvel-
le arthroscopie et d'une toilette articulaire arthroscopi-
que pour omarthrose droite.
Les suites de l'accident ont été prises en charge par
la Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents
(CNA) qui a fixé finalement l'atteinte à l'intégrité à 10 %
(décision du 12 mai 1992) et alloué une rente d'invalidité
fondée sur un taux de 20 % (décision sur opposition du
2 mai 1997). Le recours de l'assuré contre la décision
relative au taux d'invalidité a été rejeté par le Tribunal
administratif du canton de Fribourg, Cour des assurances
sociales.
Par décisions des 29 janvier et 12 septembre 1996,
l'assurance-invalidité a octroyé à B.________ une de-
mi-rente basée sur un taux d'invalidité de 53 % pour la
période du 1er février au 30 novembre 1991, puis du
1er octobre 1995 au 30 octobre 1998. Dans l'intervalle,
l'assuré a bénéficié d'une mesure de reclassement profes-
sionnel. Depuis le 1er novembre 1998, il perçoit une rente
entière d'invalidité à la suite d'une nouvelle atteinte à
la santé découlant d'un accident de circulation.
B.________ était affilié à la Caisse de pensions des
Etablissements Sarina SA (Caisse de pensions Sarina). Le
25 janvier 1991, S.________ SA a conclu un contrat de
prévoyance pour ses employés avec la Voska Crédit Suisse
Fondation de prévoyance 2ème pilier (la Voska). Par la
suite, la Caisse de pensions Sarina a procédé à une liqui-
dation partielle, que l'autorité de surveillance avait
autorisé par décision du 13 février 1992. L'activité de la
Voska se déroule depuis janvier 1999 sous la raison sociale

Winterthur-Columna fondation collective 2ème pilier, Zurich
(Winterthur-Columna).

B.- Le 17 décembre 1997, B.________ a sollicité de la
Caisse de pensions Sarina le versement d'une rente d'in-
validité. Devant le refus de l'institution de prévoyance,
il a ouvert action contre elle au Tribunal administratif du
canton de Fribourg, Cour des assurances sociales, en con-
cluant au versement d'une rente fondée sur une invalidité
de 53 %, ainsi que de rentes complémentaires pour ses en-
fants, avec intérêt moratoire à 5 % l'an. La Caisse de pen-
sions Sarina a conclu à l'irrecevabilité de la demande,
voire à son rejet, et subsidiairement à la réduction des
rentes éventuellement allouées.
Le 6 mai 1999, B.________ a ouvert action devant la
même juridiction contre la Voska et Winterthur-Columna en
prenant les mêmes conclusions. Winterthur-Columna a conclu
au rejet de la demande.
Après avoir joint les causes, le tribunal adminis-
tratif a, par jugement du 29 mars 2000, rejeté les demandes
dirigées contre la Caisse de pensions Sarina et Winterthur-
Columna et déclaré irrecevable la demande contre la Voska.
Il n'a pas alloué de dépens ni imposé de frais de justice.

C.- B.________ interjette recours de droit adminis-
tratif contre ce jugement dont il demande l'annulation.
Sous suite de frais et dépens, il conclut au renvoi de la
cause à la juridiction cantonale pour qu'elle fixe qui, de
la Caisse de pensions Sarina ou de Winterthur-Columna, doit
lui verser les rentes auxquelles il prétend.
Par mémoires séparés, les intimées ont conclu au rejet
du recours. L'Office fédéral des assurances sociales en
propose l'admission dans le sens des conclusions du recou-
rant.

Considérant en droit :

1.- a) Ont droit à des prestations d'invalidité les
invalides qui étaient assurés lors de la survenance de
l'incapacité de travail dont la cause est à l'origine de
l'invalidité (art. 23, 2ème partie de la phrase, LPP).
Selon la jurisprudence, l'événement assuré au sens de
l'art. 23 LPP est uniquement la survenance d'une incapacité
de travail d'une certaine importance, indépendamment du
point de savoir à partir de quel moment et dans quelle
mesure un droit à une prestation d'invalidité est né. La
qualité d'assuré doit exister au moment de la survenance de
l'incapacité de travail, mais pas nécessairement lors de
l'apparition ou de l'aggravation de l'invalidité. Cette
interprétation littérale est conforme au sens et au but de
la disposition légale en cause, laquelle vise à faire béné-
ficier de l'assurance le salarié qui, après une maladie
d'une certaine durée, devient invalide alors qu'il n'est
plus partie à un contrat de travail. Lorsqu'il existe un
droit à une prestation d'invalidité fondée sur une incapa-
cité de travail survenue durant la période d'assurance,
l'institution de prévoyance concernée est tenue de prendre
en charge le cas, même si le degré d'invalidité se modifie
après la fin des rapports de prévoyance. Dans ce sens, la
perte de la qualité d'assuré ne constitue pas un motif
d'extinction du droit aux prestations au sens de l'art. 26
al. 3 LPP (ATF 123 V 263 consid. 1a, 118 V 45 consid. 5).
L'incapacité de travail est la perte ou la diminution
de la capacité de rendement de l'assuré dans sa profession
ou son champ d'activité habituelle. Pour être prise en
considération, la diminution du rendement professionnel
doit être sensible et indiscutable; en outre, cet état de
fait doit être durable (ATF 105 V 159 consid. 2a).

b) Conformément à l'art. 26 al. 1 LPP, les disposi-
tions de la LAI (art. 29 LAI) s'appliquent par analogie à

la naissance du droit aux prestations d'invalidité. Si une
institution de prévoyance reprend - explicitement ou par
renvoi - la définition de l'invalidité de la LAI, elle est
en principe liée, lors de la survenance du fait assuré, par
l'estimation de l'invalidité par les organes de cette assu-
rance, sauf si cette estimation apparaît d'emblée insoute-
nable. Cette force contraignante vaut aussi en ce qui con-
cerne la naissance du droit à la rente et, par conséquent,
également pour la détermination du moment à partir duquel
la capacité de travail de l'assuré s'est détériorée d'une
manière sensible (ATF 123 V 271 consid. 2a et les référen-
ces citées).
Il est admis en l'espèce que l'invalidité selon le
règlement de l'institution de prévoyance est identique à la
notion d'invalidité selon la LAI.

c) Après avoir constaté que l'incapacité de gain ré-
sultant de l'atteinte accidentelle à l'épaule droite avait
été fixée à 20 % par la CNA (capacité de travail entière
dans la profession acquise suite au reclassement et diminu-
tion du rendement de 10 %), que ce taux avait été confirmé
par leur propre juridiction par jugement du 16 décembre
1999, les premiers juges ont considéré, sur la base des
nombreux certificats médicaux, que la prise en compte par
l'AI d'un taux plus élevé découlait aussi d'une incapacité
de travail liée à une affection dégénérative et que ces
troubles cervicaux étaient indépendants de l'accident du
22 février 1990. Dès lors qu'ils étaient apparus trois ans
après l'accident et la fin des rapports de travail, la
condition de la connexité temporelle et matérielle, néces-
saire pour que l'ancienne institution de prévoyance soit
tenue à prestations, faisait défaut. Il n'y avait dès lors
pas lieu de s'en tenir au taux d'invalidité de l'AI, fixé
au demeurant sur la base d'une comparaison erronée des
revenus.

Pour sa part, le recourant soutient toujours que
l'institution de prévoyance est liée par la décision de
l'AI dès lors que celle-ci n'est pas manifestement erronée.

2.- a) L'évaluation de l'invalidité par les organes de
l'AI repose sur des certificats médicaux dont les juges
cantonaux ont rappelé en détail les conclusions (cf. con-
sid. 4 b de leur jugement, auquel on peut renvoyer). Il
n'existe toutefois pas au dossier d'attestation médicale
dont on puisse déduire que les cervicalgies dont se plaint
le recourant sont en elles-mêmes à l'origine d'une incapa-
cité de travail. En réalité, et sur la base d'une apprécia-
tion différente de ces certificats, les organes de l'AI
sont arrivés à la conclusion que le recourant présentait
une capacité résiduelle de travail dans sa nouvelle profes-
sion de 60 %, en raison essentiellement des séquelles du
traumatisme de l'épaule droite. Fondée sur des certificats
médicaux, cette appréciation n'est pas insoutenable, même
si, de son côté, la CNA a pu légitimement arriver à des
conclusions différentes.

b) Pour fixer le taux d'invalidité de 53 %, les orga-
nes de l'AI ont procédé selon la méthode de comparaison des
revenus, en prenant en compte, outre un revenu hypothétique
d'invalide de 31 200 fr. par année (revenu d'un monteur
électronicien travaillant à 60 %), un revenu sans invalidi-
té de 65 905 fr. 80 pour l'année 1995. Avec les juges can-
tonaux, il faut certes convenir que l'estimation de ce
revenu repose sur des données insatisfaisantes, comme une
augmentation de salaire de 17 % fondée uniquement sur une
augmentation égale du coût de la vie de 1990 à 1995. En
réalité, en se fondant sur les renseignements fournis par
l'ancien employeur, il aurait fallu déterminer le salaire
de l'assuré en 1995 en retenant qu'il aurait obtenu un
salaire mensuel de 4300 fr. auquel s'ajoutent les vacances
(8.3 % soit 356 fr. 90) et le 13ème salaire (8.33 % soit

387 fr. 90). Le revenu annuel de 60 537 fr. 60
(5044 fr. 80 x 12) aboutit, par comparaison avec le revenu
d'invalide, à un taux d'invalidité de 48,5 %. Au regard de
la marge d'évaluation de l'invalidité, cette divergence
appréciable ne saurait en toutes hypothèses être taxée
d'insoutenable dès lors qu'elle est inférieure à 5 % (cf.
U. Meyer-Blaser, Zur Prozentgenauigkeit in der Invalidi-
tätsschätzung, in Rechtsfragen der Invalidität in der
Sozialversicherung, Lucerne 1999, p. 9 ss).
Il s'ensuit que c'est à tort que les juges cantonaux
se sont écartés du prononcé de l'AI fixant tant le taux
d'invalidité que le début de celle-ci au 1er février 1991.
Supérieur à 25 %, ce taux entraîne l'obligation pour l'an-
cienne institution de prévoyance de prester, dès lors qu'il
y a lieu de retenir une relation de connexité temporelle et
matérielle entre l'incapacité de travail originaire et
l'invalidité.

3.- Le recourant était affilié à la Caisse de pensions
Sarina lorsqu'a débuté l'incapacité de travail aboutissant
à l'invalidité. Par ailleurs, il n'était plus employé de
S.________ SA lorsqu'est entré en vigueur le contrat de
prévoyance avec la Voska (actuellement Winterthur-Columna).
Contrairement à l'opinion des premiers juges, ces seuls
éléments ne suffisent pas pour fixer que la Caisse de
pensions Sarina serait l'institution tenue de prester. En
effet, en l'absence de renseignements précis sur les moda-
lités de la liquidation partielle et sur le contenu des
conventions passées avec la Voska, il n'est pas possible de
dire si cette obligation incombe encore à la Caisse de
pensions Sarina ou si elle a été transférée à la Voska,
chacune des institutions de prévoyance soutenant au surplus
qu'elle n'est pas concerné par ce cas d'assurance.
Le dossier sera en conséquence renvoyé à la juridic-
tion cantonale pour qu'elle procède à un complément d'ins-
truction sur cette question, puis fixe dans son jugement le

montant des rentes de la prévoyance professionnelle
auxquelles a droit le recourant.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances

p r o n o n c e :

I. Le recours est admis et le jugement du Tribunal admi-
nistratif du canton de Fribourg, Cour des assurances
sociales, du 29 mars 2000 est annulé.

II. L'affaire est renvoyée à la juridiction cantonale pour
instruction complémentaire au sens des considérants et
nouveau jugement.

III. Il n'est pas perçu de frais de justice.

IV. La Caisse de pensions des Etablissements Sarina SA et
la Winterthur-Columna fondation collective 2ème pi-
lier, Zurich, verseront chacune au recourant la somme
de 1000 fr. (y compris la taxe à la valeur ajoutée) à
titre de dépens pour l'instance fédérale.

V. Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tri-
bunal administratif du canton de Fribourg, Cour des
assurances sociales, et à l'Office fédéral des assu-
rances sociales.

Lucerne, le 9 février 2001

Au nom du
Tribunal fédéral des assurances
p. le Président de la IIe Chambre :

Le Greffier :


Synthèse
Numéro d'arrêt : B.36/00
Date de la décision : 09/02/2001
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2001-02-09;b.36.00 ?
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