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31/01/2001 | SUISSE | N°U.270/00

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 31 janvier 2001, U.270/00


«AZA 7»
U 270/00 Sm/Ge

IIe Chambre

composée des Juges fédéraux Lustenberger, Président, Meyer
et Ferrari; Berthoud, Greffier

Arrêt du 31 janvier 2001

dans la cause

M.________, 1964, recourant, représenté par Maître Jérôme
Bassan, avocat, Place de la Taconnerie 5, Genève,

contre

ELVIA Assurances, Badenerstrasse 694, Zurich, intimée,

et

Tribunal administratif du canton de Genève, Genève

A.- a) M.________ a été victime de deux accidents, les
20 avril

1992 et 23 février 1996, au cours desquels il
s'est blessé à l'articulation de la main droite, notamment.
Le docteur R.________, chir...

«AZA 7»
U 270/00 Sm/Ge

IIe Chambre

composée des Juges fédéraux Lustenberger, Président, Meyer
et Ferrari; Berthoud, Greffier

Arrêt du 31 janvier 2001

dans la cause

M.________, 1964, recourant, représenté par Maître Jérôme
Bassan, avocat, Place de la Taconnerie 5, Genève,

contre

ELVIA Assurances, Badenerstrasse 694, Zurich, intimée,

et

Tribunal administratif du canton de Genève, Genève

A.- a) M.________ a été victime de deux accidents, les
20 avril 1992 et 23 février 1996, au cours desquels il
s'est blessé à l'articulation de la main droite, notamment.
Le docteur R.________, chirurgien FMH, a pratiqué une
arthrodèse de la base du pouce, le 3 septembre 1996.

A la demande de l'Elvia Assurances (Elvia), assureur-
accidents, le docteur C.________, spécialiste en chirurgie
et en orthopédie, a effectué une expertise. Dans son rap-
port du 16 décembre 1996, ce médecin a diagnostiqué une
contusion de la région sacro-lombaire, une arthrose de
l'articulation trapézométacarpienne du pouce à droite,
ainsi qu'un status après arthrodèse le 3 septembre 1996
(arthrodèse non encore consolidée). Il a estimé qu'il exis-
tait un état antérieur manifeste au niveau de la main puis-
que l'arthrose décrite existait déjà en juillet 1992 et
qu'elle n'avait pas évolué radiologiquement d'une manière
appréciable jusqu'en 1996. Selon le docteur C.________,
l'état antérieur jouait un rôle de 50 % au niveau du pouce,
l'autre moitié étant représentée par l'aggravation perma-
nente due à l'accident survenu en 1996. En ce qui concerne
la colonne vertébrale, l'expert a estimé qu'il n'existait
pas d'état antérieur jouant un rôle dans l'accident de 1996
et que les séquelles étaient minimes.
Quant à l'incapacité de travail, le docteur
C.________ a rappelé que l'assuré travaillait à nouveau à
50 % depuis le 2 décembre 1996; il a ajouté qu'on ne pou-
vait pas attendre du patient qu'il reprenne le travail à
100 % très rapidement, mais uniquement au début du mois de
février 1997, pour autant qu'il n'y ait pas de complication
au niveau de la main droite.

b) Par décision du 10 mars 1997, l'Elvia a mis un
terme à ses prestations avec effet au 31 août 1996, au
motif que l'assuré avait retrouvé, à ce moment-là, l'état
de santé qui était le sien avant l'accident du 23 février
1996.
L'assuré s'est opposé à cette décision en se fondant
sur trois rapports du docteur R.________. Ce dernier a
estimé à 50 % environ la fonction globale résiduelle du
membre supérieur droit (rapport du 27 février 1997). Il a
ajouté que l'accident survenu en 1996 avait entraîné une
diminution de

la force, probablement définitive, ainsi qu'une diminution
de la mobilité du rayon du pouce et l'apparition de dou-
leurs lors de l'emploi avec force ou de mouvements répéti-
tifs; à son avis, l'état de santé n'avait pas atteint le
statu quo sine à la fin du mois d'août 1996 (rapport du
9 avril 1997). Il a également attesté que son patient su-
bissait une incapacité de travail de 50 % à partir du
29 novembre 1996, probablement de manière durable (certifi-
cat du 15 mai 1997).
Par décision du 28 janvier 1998, l'Elvia a réformé
partiellement sa décision du 10 mars 1997. Elle a pris en
charge l'opération pratiquée le 3 septembre 1996, tout en
acceptant de verser des indemnités journalières sur la base
d'une incapacité de travail de 100 % jusqu'au 10 novembre
1996, de 80 % du 11 novembre au 1er décembre 1996, puis de
50 % du 2 décembre 1996 au 31 mars 1997.

B.- M.________ a recouru contre cette décision sur
opposition devant le Tribunal administratif du canton de
Genève, en concluant à ce que l'Elvia fût condamnée à
servir ses prestations au-delà du 31 mars 1997 et jusqu'au
rétablissement du statu quo sine.
Par jugement du 9 mai 2000, la juridiction cantonale a
rejeté le recours, après avoir entendu le docteur
R.________, comme l'assuré l'avait requis.

C.- M.________ interjette recours de droit administra-
tif contre ce jugement dont il demande l'annulation, avec
suite de dépens, en concluant derechef au versement
d'indemnités journalières au-delà du 31 mars 1997. Il
sollicite la mise en oeuvre d'une expertise.
L'intimée conclut au rejet du recours, avec suite de
dépens. L'Office fédéral des assurances sociales ne s'est
pas déterminé, tandis que la Caisse Vaudoise, assureur-ma-
ladie du recourant, a déclaré qu'elle n'avait pas d'obser-
vations particulières à formuler.

Considérant en droit :

1.- Le litige porte sur le droit du recourant aux
prestations de l'intimée (en particulier d'indemnités jour-
nalières) postérieurement au 31 mars 1997.

2.- a) L'assuré a droit au traitement médical appro-
prié des lésions résultant de l'accident (art. 10 al. 1
LAA, in initio). Par ailleurs, s'il est totalement ou par-
tiellement incapable de travailler à la suite d'un acci-
dent, il a droit à une indemnité journalière (art. 16 al. 1
LAA).

b) En vertu de l'art. 36 al. 1 LAA, les prestations
pour soins, les remboursements de frais ainsi que les in-
demnités journalières et les allocations pour impotent ne
sont pas réduits lorsque l'atteinte à la santé n'est que
partiellement imputable à l'accident. La jurisprudence a
souligné a à cet égard que lorsqu'un état maladif préexis-
tant est aggravé ou, de manière générale, apparaît consé-
cutivement à un accident, le devoir de l'assurance-acci-
dents d'allouer des prestations cesse si l'accident ne
constitue pas la cause naturelle (et adéquate) du dommage,
soit lorsque ce dernier résulte exclusivement de causes
étrangères à l'accident. Tel est le cas lorsque l'état de
santé de l'intéressé est similaire à celui qui existait
immédiatement avant l'accident (statu quo ante) ou à celui
qui serait survenu tôt ou tard même sans l'accident par
suite d'un développement ordinaire (statu quo sine) (cf.
RAMA 1992 n° U 142 p. 75 consid. 4b; Maurer, Schweize-
risches Unfallversicherungsrecht, p. 469 nos 3 et 4;
Debrunner/Ramseier, Die Begutachtung von Rückenschäden,
Berne 1990, p. 52; Meyer-Blaser, Die Zusammenarbeit von
Richter und Arzt in der Sozialversicherung, Bulletin des
médecins suisses 71/1990, p. 1093). A contrario, aussi
longtemps que le statu quo sine vel ante n'est pas rétabli,

l'assureur-accidents doit prendre à sa charge le traitement
de l'état maladif préexistant, dans la mesure où il a été
causé ou aggravé par l'accident. La disparition du carac-
tère causal de l'accident eu égard à l'atteinte à la santé
de l'assuré doit être établie au degré habituel de la
vraisemblance prépondérante requis en matière d'assurances
sociales. La simple possibilité que l'accident n'ait plus
d'effet causal ne suffit pas. Dès lors qu'il s'agit dans ce
contexte de la suppression du droit à des prestations, le
fardeau de la preuve n'appartient pas à l'assuré mais à
l'assureur (cf. RAMA 1994 n° U 206 p. 328 consid. 3b).

c) La tâche du médecin consiste à porter un jugement
sur l'état de santé et à indiquer dans quelle mesure et
pour quelles activités l'assuré est incapable de travail-
ler. En outre, les données médicales constituent un élément
utile pour déterminer quels travaux on peut encore, raison-
nablement, exiger de l'assuré (ATF 115 V 134 consid. 2,
114 V 314 consid. 3c, 105 V 158 consid. 1).

3.- a) Dans son expertise du 16 décembre 1996, le doc-
teur C.________ a indiqué que l'accident de 1996 avait
causé une aggravation de l'état du pouce (ch. 4.2 et 4.3 du
rapport, p. 16), mais que le patient finirait par s'accom-
moder à l'arthrodèse de la base du pouce (ch. 4.6, p. 17).
Il a estimé qu'il était en revanche prématuré d'aborder la
question de l'atteinte à l'intégrité - probable, à ses
yeux - avant l'automne 1997 (ch. 4.7, p. 17). Quant au
docteur R.________, il a attesté que la fonction globale
résiduelle du membre supérieur droit était de 50 % (rapport
du 27 février 1997).
A l'examen de ces avis médicaux partiellement diver-
geants, il n'était donc pas possible de déduire au degré de
vraisemblance prépondérante requis que le statu quo sine
avait été rétabli en février 1997.

b) Les médecins prénommés ne s'accordent pas davantage
sur la capacité de travail du recourant. Tandis que le
docteur C.________ estimait possible une reprise du travail
à 100 % au début de février 1997 (ch. 4.5, p. 17, de
l'expertise du 16 décembre 1996), son confrère R.________
attestait une incapacité de travail durable de 50 % à par-
tir du 29 novembre 1996 (certificat du 15 mai 1997). L'avis
du docteur C.________, donné en décembre 1996, porte sur la
capacité de travail que le recourant aurait dû avoir en
février 1997; l'expert a toutefois réservé son pronostic,
la situation dépendant selon lui de facteurs tels que l'ac-
coutumance et l'absence de complications au niveau de la
main droite. Quant au docteur R.________, même s'il n'a pas
motivé son point de vue, il a eu l'occasion d'examiner le
patient à cinq reprises du 29 novembre 1996 au 27 mars
1997, ce qui l'a conduit à évaluer la capacité de travail à
50 % lors des consultations.
Vu les divergences d'opinions des médecins, il sub-
siste effectivement un doute sur le degré exact de l'inca-
pacité de travail du recourant dont l'intimée devrait ré-
pondre ensuite de l'accident du 23 février 1996. Dès lors,
sans compléter son instruction, cette dernière ne pouvait
statuer sur cette question et mettre un terme à ses presta-
tions au 31 mars 1997. Au demeurant, comme le statu quo
sine vel ante n'était pas rétabli, l'intimée aurait dû
examiner la question de la capacité résiduelle de travail
du recourant avec un soin particulier.

c) En conséquence, la décision litigieuse et le juge-
ment attaqué seront annulés dans la mesure où le droit du
recourant aux prestations de l'intimée est limité au
31 mars 1997. La cause lui sera renvoyée afin qu'elle sta-
tue à nouveau sur ce point, ce qui impliquera de déterminer
préalablement, à l'aide d'un expert, si et, cas échéant,
quand le statu quo sine vel ante a été rétabli.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances

p r o n o n c e :

I. Le recours est admis en ce sens que le jugement du
Tribunal administratif du canton de Genève du 9 mai
2000 et la décision sur opposition de l'Elvia Assuran-
ces du 28 janvier 1998 sont annulés, la cause étant
renvoyée à l'intimée pour instruction complémentaire
au sens des considérants et nouvelle décision.

II. Il n'est pas perçu de frais de justice.

III. L'intimée versera au recourant la somme de 2500 fr. à
titre de dépens pour l'instance fédérale.

IV. Le Tribunal administratif du canton de Genève statuera
sur les dépens pour la procédure de première instance,
au regard de l'issue du procès de dernière instance.

V. Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tri-
bunal administratif du canton de Genève, à l'Office
fédéral des assurances sociales, ainsi qu'à la Caisse
Vaudoise.

Lucerne, le 31 janvier 2001

Au nom du
Tribunal fédéral des assurances
Le Président de la IIe Chambre :

Le Greffier :


Synthèse
Numéro d'arrêt : U.270/00
Date de la décision : 31/01/2001
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2001-01-31;u.270.00 ?
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