La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

29/01/2001 | SUISSE | N°K.56/00

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 29 janvier 2001, K.56/00


«AZA 7»
K 56/00 Mh

IIe Chambre

composée des Juges fédéraux Lustenberger, Président, Meyer
et Ferrari; Frésard, Greffier

Arrêt du 29 janvier 2001

dans la cause

Les hoirs de feue S.________ , soit
1. A.________,
2. B.________,
3. C.________,
recourants, tous trois représentés par Maître Pierre-André
Berthoud, avocat, rue du Lion-d'Or 2, Lausanne,

contre

SUPRA Caisse-maladie, chemin de Primerose 35, Lausanne,
intimée,

et

Tribunal des assurances du

canton de Vaud, Lausanne

A.- S.________ souffrait d'une affection psychique
pour laquelle elle a été traitée pendant de nombreuses...

«AZA 7»
K 56/00 Mh

IIe Chambre

composée des Juges fédéraux Lustenberger, Président, Meyer
et Ferrari; Frésard, Greffier

Arrêt du 29 janvier 2001

dans la cause

Les hoirs de feue S.________ , soit
1. A.________,
2. B.________,
3. C.________,
recourants, tous trois représentés par Maître Pierre-André
Berthoud, avocat, rue du Lion-d'Or 2, Lausanne,

contre

SUPRA Caisse-maladie, chemin de Primerose 35, Lausanne,
intimée,

et

Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne

A.- S.________ souffrait d'une affection psychique
pour laquelle elle a été traitée pendant de nombreuses
années par le docteur G.________, médecin-psychiatre à
l'Hôpital Y.________. Du 13 au 21 novembre 1995, elle a été

hospitalisée à l'Hôpital X.________ pour les suites, notam-
ment, d'une attaque avec lésions diverses, ainsi que pour
des crises épileptiques partielles hémicorporelles. Elle a
ensuite été transférée à l'établissement Z.________, où
elle a séjourné les 21 et 22 novembre 1995, en vue d'une
réadaptation motrice. Elle a toutefois développé un compor-
tement agressif, dans le cadre d'un état anxio-dépressif,
ce qui a motivé son transfert à l'Hôpital Y.________, en
division des soins généraux prévus pour les malades de type
«A psychiatrique». Elle a séjourné dans cet hôpital du
22 novembre 1995 au 19 mai 1997, date à laquelle elle est
entrée à l'établissement médico-social R.________, dont le
médecin consultant est le docteur G.________.

B.- S.________ était assurée auprès de la Caisse-
maladie SUPRA pour l'assurance obligatoire des soins. Par
lettre du 23 octobre 1996, qui faisait suite à divers
échanges de correspondance, la SUPRA a informé la direction
de l'Hôpital Y.________ que, dès le 1er août 1996, le
séjour de l'assurée serait considéré comme un hébergement
médico-social et qu'il devait, par conséquent, être facturé
au tarif prévu par la Convention vaudoise d'hébergement
médico-social (CVhé), soit 60 fr. par jour. Une copie de
cette lettre fut adressée à la patiente. Le 18 novembre
1996, l'Hôpital Y.________, se référant à cette lettre de
la SUPRA, a informé le curateur de l'assurée que, dès le
1er août 1996, il facturerait directement à cette dernière
une participation aux frais de pension de 136 fr. par jour.
Par l'intermédiaire de son curateur, S.________ a
contesté la position de la caisse.
Par décision du 24 décembre 1996, celle-ci a accepté
d'allouer des prestations pour une hospitalisation néces-
sitant des soins psychiatriques aigus jusqu'au 15 septembre
1996 (ces prestations étant de 359 fr. par jour pour 1995
et de 346 fr. par jour pour 1996). Dès le 16 septembre

1996, le séjour de l'assurée devait être qualifié d'héber-
gement médico-social au sens de la CVhé (type C). Les pres-
tations à verser à ce titre s'élèveraient à 60 fr. par
jour, sous réserve de modifications pour l'année 1997.
Saisie d'une opposition de l'assurée, la caisse l'a
rejetée, par une nouvelle décision, du 3 mars 1997.

C.- S.________ a recouru contre cette décision par
écriture du 3 avril 1997. Elle est décédée le 25 janvier
1998. Ses héritiers ont décidé de poursuivre la procédure.
A la demande du Tribunal des assurances du canton de
Vaud, le docteur G.________ a répondu à diverses questions
dans un rapport du 26 février 1999. Statuant le
21 septembre 1999, le tribunal a partiellement admis le
recours et il a réformé la décision attaquée dans le sens
des considérants. Il a retenu que l'assureur devait prendre
en charge jusqu'au 31 décembre 1996 les frais d'hospitali-
sation de l'assurée à l'Hôpital Y.________«au titre d'un
séjour de type A» selon la convention vaudoise d'hospitali-
sation (CVho).

D.- Les hoirs de feue S.________ interjettent un
recours de droit administratif dans lequel ils concluent à
la réforme du jugement cantonal en ce sens que la SUPRA
«doit répondre de l'hospitalisation A selon la CVho de feue
S.________ pour la période du 16 septembre 1996 au 19 mai
1997».
La SUPRA conclut principalement au rejet du recours.
Subsidiairement, elle conclut à la confirmation de ses
décisions. Quant à l'Office fédéral des assurances socia-
les, il ne s'est pas déterminé au sujet du recours.

Considérant en droit :

1.- a) Selon l'art. 49 al. 3 LAMal, la rémunération
allouée en cas d'hospitalisation s'effectue conformément au

tarif applicable à l'hôpital (servant au traitement hospi-
talier de maladies aiguës au sens de l'art. 39 al. 1 LAMal)
en vertu de l'art. 49 al. 1 et 2 LAMal, tant que le patient
a besoin, selon l'indication médicale, d'un traitement et
de soins ou d'une réadaptation médicale en milieu hospita-
lier. Si cette condition n'est plus remplie, le tarif selon
l'art. 50 LAMal est applicable. Aux termes de cette derniè-
re disposition légale, l'assureur prend en charge, en cas
de séjour dans un établissement médico-social (art. 39
al. 3 LAMal), les mêmes prestations que pour un traitement
ambulatoire et pour les soins à domicile; il peut toutefois
convenir, avec l'établissement médico-social, d'un mode de
rémunération forfaitaire. L'art. 49 al. 3 LAMal reprend la
jurisprudence rendue à propos du principe d'économie du
traitement prescrit à l'art. 23 LAMA (cf. le message du
Conseil fédéral concernant la révision de l'assurance-mala-
die du 6 novembre 1991, FF 1992 I 168; ATF 124 V 364 con-
sid. 1b).
Par conséquent, selon le nouveau droit également, le
caractère économique du traitement n'autorise un séjour
dans un hôpital pour patients atteints de maladie aiguë, au
tarif des établissements hospitaliers, qu'aussi longtemps
qu'un tel séjour est rendu nécessaire par le but du traite-
ment (ATF 124 V 364 consid. 1). De même, conformément à la
jurisprudence rendue du temps de la LAMA, il convient, si
nécessaire, d'accorder à l'assuré séjournant dans un hôpi-
tal pour patients atteints d'une affection aiguë une brève
période d'adaptation pour lui permettre de se rendre dans
un établissement médico-social ou une division de ce type
(ATF 124 V 366 consid. 2c).
Dans ce contexte, on relèvera encore que l'assureur-
maladie n'a pas à répondre du surcroît de coûts résultant
du fait que l'assuré séjourne dans un établissement hospi-
talier parce qu'il n'y a pas de lit disponible dans un éta-
blissement médico-social (ATF 124 V 365 consid. 1b et les
références citées).

b) Aux termes de l'art. 8 al. 2 let. b de la Conven-
tion vaudoise d'hospitalisation (CVho), à laquelle les
premiers juges se réfèrent, les malades dits «A psychiatri-
ques» sont des malades atteints d'affections aiguës néces-
sitant des soins psychiatriques continus et intensifs. Les
moyens d'investigation, d'intervention qui en découlent
sont importants en terme d'équipement et de personnel. Les
traitements sont prescrits notamment en fonction de la
gravité de la symptomatologie ou dans le cadre d'un contrat
thérapeutique à visée de changement.
Par ailleurs, dans le canton de Vaud, les relations
financières entre les diverses parties intéressées, aux
fins de couvrir les coûts d'exploitation des établissements
médico-sociaux ainsi que des divisions et lits médico-so-
ciaux (EMS), en faveur des pensionnaires qu'ils accueil-
lent, ont été régies de 1992 à 1996 par trois Conventions
vaudoises d'hébergement médico-social (CVhé 1992, 1994 et
1996). Selon les dispositions de la CVhé en vigueur en
1996, étaient considérés de type «C» les séjours effectués
par les personnes atteintes d'affections chroniques, en
règle générale stabilisées, assurées auprès d'un assureur
conventionné et dont le certificat d'admission est pris en
considération par ledit assureur.

2.- a) Sur la base des déclarations du docteur
G.________, les premiers juges considèrent que la patiente
n'avait plus besoin d'un traitement pour malade atteint
d'une affection aiguë à partir du 15 septembre 1996. L'as-
surée en a toutefois été informée à réception seulement de
la copie de la lettre du 23 octobre 1996 de la SUPRA à
l'Hôpital Y.________. Comme la caisse a suivi de près le
cas de l'assurée à partir du mois de mars 1996 déjà, elle
ne pouvait pas limiter rétroactivement au 15 septembre 1996
le droit au remboursement de ses frais d'hospitalisation.
De plus, dès le mois d'octobre 1996, il eût fallu accorder

à l'intéressée une brève période d'adaptation, jusqu'au
31 décembre 1996, pour lui permettre de se rendre dans un
établissement médico-social, conformément à la jurispru-
dence susmentionnée. Aussi bien les premiers juges con-
cluent-ils que l'assureur doit prendre en charge jusqu'au
31 décembre 1996 les frais d'hospitalisation de l'assurée à
l'Hôpital Y.________ «au titre d'un séjour de type A selon
la CVho».
Il s'agit dès lors de savoir si la caisse doit encore
répondre d'une hospitalisation pour patient atteint de
maladie aiguë (type «A psychiatrique») au-delà du
31 décembre 1996 et jusqu'au 19 mai 1997. On notera au
passage que l'indemnisation pour la période postérieure au
19 mai 1997, date à laquelle l'assurée a été placée dans
l'établissement R.________, n'est pas en discussion.

b) Il ressort du rapport du docteur G.________ du
26 février 1999 que des raisons médicales rendaient néces-
saire, pour l'assurée, un séjour dans une division pour
soins aigus en raison d'une «problématique oscillant entre
des phases aiguës et sub-aiguës» demandant un encadrement
médical et soignant soutenu. A la question lui demandant si
la patiente aurait pu être transférée dans un établissement
prévu pour des séjours du type «C», pour la période du
16 septembre 1996 au 19 mai 1997, ce médecin a répondu
qu'il était «imaginable» de placer la patiente dans un seul
établissement médico-social psychogériatrique pouvant ac-
cepter et encadrer correctement «une problématique de ce
type» et permettant un transfert correct des informations
médicales, ainsi qu'un suivi par un médecin qui connaissait
la patiente. Si le placement dans un établissement médi-
co-social n'est intervenu que le 19 mai 1997, c'est parce
qu'à ce moment-là il a été possible d'obtenir une place
dans l'établissement médico-social R.________, qui garan-
tissait une prise en charge psychiatrique hautement spécia-
lisée, adéquate pour la patiente et permettant un suivi

médical par la même équipe. Le placement dans un autre
établissement médico-social n'a pas été envisagé, car le
risque d'une nouvelle décompensation était hautement proba-
ble.
A la question lui demandant si, à son avis, la déci-
sion de la SUPRA de considérer le séjour de l'assurée dès
le 16 septembre 1996 comme un séjour relevant du type «C»,
le docteur G.________ a reconnu qu'il n'était pas facile
d'apporter une réponse et il a notamment déclaré ce qu'il
suit :

«La notion de long terme ou de chronique aboutit souvent à
un déclassement unilatéral par les assurances-maladie en
patients de type C. Ce déclassement est le plus souvent mal
accepté par les familles qui voient que l'un des leurs
reste malade mais qu'on diminue les prestations financiè-
res. Nous avons tenté le placement de Mme S.________ dans
un EMS qui avait la compétence de prendre en charge une
telle problématique et qui permettait une continuité du
suivi médical. Les établissements ayant des compétences
aussi spécifiques sont très rares dans le réseau de soins.
A l'heure actuelle ils se sont épuisés dans la prise en
charge de ce type de patients, faute de reconnaissance et
de moyens financiers. Depuis l'automne 1998 aucun EMS
n'accepterait d'héberger et de prendre en soin une telle
patiente».

Le docteur G.________ a encore précisé que les méde-
cins de l'Hôpital Y.________ n'avaient pas contesté la
décision de la SUPRA de considérer le séjour de la pa-
tiente, à partir du 16 septembre 1996, comme un séjour de
type «C». D'ailleurs, bien que l'Hôpital Y.________ soit un
établissement pour soins aiguës, il a appliqué, pour la
période du 16 septembre 1996 au 19 mai 1997, le tarif
correspondant à un hébergement dans un établissement
médico-social, impliquant une participation de l'assurée
aux frais de pensions (136 fr. par jour en 1996 et
137 fr. 30 en 1997)

c) On peut retenir de ces déclarations qu'il existait,
en 1996 et 1997, certains établissements médico-sociaux
spécialisés qui eussent été susceptibles d'accueillir la
patiente, en particulier l'établissement R.________. Si
l'assurée a continué à séjourner à l'Hôpital Y.________
(après le 15 septembre 1996), c'est dans l'attente d'une
place disponible dans un établissement médico-social
spécialisé qui fût à même de garantir à l'assurée les soins
spécifiques dont elle avait besoin et qui, en outre, permît
un suivi médical par le docteur G.________. L'établissement
R.________ répondait à ces critères, mais, faute de place,
l'assurée n'a pu y être placée qu'à partir du 19 mai 1997.
On peut donc admettre, avec les premiers juges, que l'état
de l'assurée ne nécessitait plus, dès la mi-septembre 1996,
un séjour dans un établissement hospitalier.
Dans de telles conditions, le jugement attaqué n'appa-
raît pas critiquable. Comme on l'a vu, l'assureur-maladie
n'a pas à répondre du fait qu'aucun lit ne fût en l'occur-
rence disponible dans un établissement médico-social.
D'autre part, contrairement aux conclusions subsidiai-
res de l'intimée, on ne voit pas de motif de remettre en
cause le jugement attaqué, dans la mesure où les premiers
juges considèrent, pour les motifs ci-dessus exposés (cf.
supra consid. 2a) que, malgré l'absence de nécessité d'un
traitement hospitalier à partir du 16 septembre 1996, la
caisse doit calculer ses prestations selon l'art. 49 LAMal
jusqu'au 31 décembre 1996. Ces conclusions subsidiaires, du
reste, ne sont pas motivées.

3.- C'est dire en résumé que, conformément
au jugement
attaqué, il incombera à la caisse de prendre en charge les
frais de séjour de l'assurée, jusqu'au 31 décembre 1996,
selon le tarif conventionnel applicable en cas d'hospita-
lisation. En revanche, dès le 1er janvier 1997, la caisse
allouera les prestations prévues en cas de séjour dans un
établissement médico-social.
Le recours de droit administratif est mal fondé.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances

p r o n o n c e :

I. Le recours est rejeté.

II. Il n'est pas perçu de frais de justice.

III. Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tri-
bunal des assurances du canton de Vaud et à l'Office
fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 29 janvier 2001

Au nom du
Tribunal fédéral des assurances
Le Président de la IIe Chambre :

Le Greffier :


Synthèse
Numéro d'arrêt : K.56/00
Date de la décision : 29/01/2001
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2001-01-29;k.56.00 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award