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29/01/2001 | SUISSE | N°1P.812/2000

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 29 janvier 2001, 1P.812/2000


«/2»
1P.812/2000

Ie C O U R D E D R O I T P U B L I C
**********************************************

29 janvier 2001

Composition de la Cour: MM. et Mme les Juges Aemisegger,
Président, Vice-président du Tribunal fédéral, Favre et
Pont Veuthey, Juge suppléante. Greffier: M. Parmelin.

Statuant sur le recours de droit public
formé par

X.________ , actuellement détenu à la prison de Champ-
Dollon, à Thônex, représenté par Me Nicolas Jeandin,
avocat à Genève,

contre

l'arrêt rendu le 20 novembre 2000 par la Chambre pénale
de la Cour de justice du canton de Genève, dans la cause
qui opp...

«/2»
1P.812/2000

Ie C O U R D E D R O I T P U B L I C
**********************************************

29 janvier 2001

Composition de la Cour: MM. et Mme les Juges Aemisegger,
Président, Vice-président du Tribunal fédéral, Favre et
Pont Veuthey, Juge suppléante. Greffier: M. Parmelin.

Statuant sur le recours de droit public
formé par

X.________ , actuellement détenu à la prison de Champ-
Dollon, à Thônex, représenté par Me Nicolas Jeandin,
avocat à Genève,

contre

l'arrêt rendu le 20 novembre 2000 par la Chambre pénale
de la Cour de justice du canton de Genève, dans la cause
qui oppose le recourant au Procureur général du canton de
G e n è v e ;

(art. 9 Cst.: irrecevabilité
d'un appel déposé par télécopieur)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- Par jugement du 12 septembre 2000, le Tribunal de
police du canton de Genève a reconnu X.________ coupable
d'infraction grave à la loi fédérale sur les stupéfiants
et l'a condamné à une peine de douze mois d'emprisonnement,
sous déduction de la détention préventive subie. Il a en ou-
tre ordonné son expulsion du territoire suisse pour une du-
rée de sept ans.

X.________ a déclaré faire appel de ce jugement par ac-
te daté du 26 septembre 2000, adressé le même jour à 17h08
par télécopieur au Tribunal de police. Ce dernier a accusé
réception de ce courrier le 27 septembre 2000 selon le tim-
bre humide apposé sur ce document.

Statuant par arrêt du 20 novembre 2000, la Chambre pé-
nale de la Cour de justice du canton de Genève (ci-après: la
Chambre pénale) a déclaré l'appel irrecevable. Après avoir
rappelé la jurisprudence du Tribunal fédéral parue aux ATF
121 II 252, suivant laquelle le dépôt d'un recours ne peut
être effectué valablement au moyen d'un télécopieur, elle a
constaté que la déclaration d'appel, parvenue au Tribunal de
police le 27 septembre 2000, n'avait pas été remise à un bu-
reau de poste suisse dans le délai de quatorze jours prévu
par l'art. 241 du Code de procédure pénale genevois (CPP
gen.) et qu'elle était tardive.

B.- Agissant par la voie du recours de droit public
pour violation des art. 9 et 32 Cst., X.________ demande au
Tribunal fédéral d'annuler cet arrêt et de renvoyer la cause
à la Chambre pénale pour nouvelle décision dans le sens des
considérants. Il requiert l'assistance judiciaire.

La Chambre pénale se réfère aux considérants de son ar-
rêt. Le Procureur général du canton de Genève conclut au re-
jet du recours dans la mesure où il est recevable.

C o n s i d é r a n t e n d r o i t :

1.- Formé en temps utile contre une décision finale
prise en dernière instance cantonale qui ne peut être atta-
quée que par la voie du recours de droit public et qui tou-
che le recourant dans ses intérêts juridiquement protégés,
le recours est recevable au regard des art. 84 ss OJ.

2.- Le recourant reproche à la Chambre pénale d'avoir
fait preuve d'arbitraire en déclarant son appel tardif et,
partant, irrecevable alors qu'il l'avait adressé par télé-
copieur le dernier jour du délai de recours.

a) Selon la jurisprudence, une décision est arbitraire
et, partant, contraire à l'art. 9 Cst. lorsqu'elle méconnaît
gravement une norme ou un principe juridique clair et indis-
cuté ou lorsqu'elle heurte de manière choquante le sentiment
de la justice ou de l'équité. Le Tribunal fédéral ne s'écar-
te dès lors de la solution retenue en dernière instance can-
tonale que si elle est insoutenable, en contradiction mani-
feste avec la situation effective, si elle a été adoptée
sans motif objectif ou en violation d'un droit certain. Il
ne suffit pas que la motivation de la décision soit insou-
tenable; encore faut-il qu'elle soit arbitraire dans son ré-
sultat (ATF 126 I 168 consid. 3a p. 170; 125 I 166 consid.
2a p. 168 et les arrêts cités).

b) En l'espèce, l'autorité intimée a considéré la dé-
claration d'appel comme tardive parce qu'elle est parvenue
au Tribunal de police après l'échéance du délai prévu à cet

effet. Il est établi que le recourant a adressé par téléfax
sa déclaration d'appel au Tribunal de police le 26 septembre
2000, dernier jour du délai d'appel, à 17h08. De même, il
est constant que cette autorité a accusé réception de ce do-
cument le jour suivant. L'heure d'arrivée du téléfax sur le
télécopieur du tribunal n'est en revanche pas déterminée. Il
n'y a pas lieu d'examiner si la Chambre pénale pouvait de
manière soutenable déduire de ces faits que l'appel n'était
pas parvenu au Tribunal de police le dernier jour du délai,
conformément à l'art. 95 al. 4 CPP gen., mais le lendemain.
A supposer le grief d'arbitraire bien fondé sur ce point,
cela ne conduirait pas encore à l'admission du recours.

La Chambre pénale a en effet considéré qu'un appel ne
pouvait de toute manière pas valablement être effectué au
moyen d'un télécopieur; elle s'est référée à cet égard à un
arrêt rendu le 13 juillet 1995 par le Tribunal fédéral et
paru aux ATF 121 II 252, qui dénie la validité d'un recours
administratif ou d'un recours de droit administratif déposé
par télécopieur en raison des risques d'abus liés au défaut
de signature originale.

Les cantons ne sont certes pas liés par la solution
adoptée en droit fédéral pour l'interprétation de leurs pro-
pres dispositions de procédure. Toutefois, une autorité can-
tonale qui, dans des circonstances similaires, déclarerait
un recours irrecevable ne fait pas preuve d'arbitraire ou
de formalisme excessif (cf. en ce sens, arrêt non publié du
22 juillet 1993 dans la cause S.-F. contre C. SA, mentionné
dans l'arrêt paru aux ATF 121 II 252). Selon l'art. 242 CPP
gen., l'appel se fait par déclaration écrite non motivée au
greffe du Tribunal de police, qui la communique sans délai
au greffe de la Cour de justice. L'art. 95 al. 4 CPP gen.
précise que les écrits doivent parvenir à l'autorité compé-
tente pour les recevoir ou avoir été remis à son adresse à
un bureau de poste suisse le dernier jour du délai au plus

tard. Il ressort ainsi de ces dispositions que l'acte d'ap-
pel doit être communiqué par écrit pour être valablement dé-
posé. Or, l'exigence de la forme écrite implique nécessaire-
ment celle d'une signature manuscrite (cf. ATF 112 Ia 173).
L'autorité intimée n'est dès lors pas tombée dans l'arbi-
traire en considérant que les conditions de fait et de droit
étaient similaires à celles qui prévalaient dans l'arrêt pa-
ru aux ATF 121 II 252 et n'a pas fait preuve d'un formalisme
excessif en appliquant la solution retenue en droit fédéral
pour le dépôt des actes judiciaires.

Les autres arguments du recourant ne sont pas de nature
à remettre en cause cette appréciation. Il importe en effet
peu qu'une convention d'élection de for ou une convention
d'arbitrage puisse être valablement passée au moyen d'un té-
lécopieur selon les art. 5 al. 1 et 178 de la loi fédérale
sur le droit international privé, 17 de la Convention de
Lugano et 7 de la loi modèle de la Commission des Nations
Unies pour le Droit Commercial International sur l'arbitrage
commercial international du 21 juin 1985, voire que la forme
écrite selon l'art. 13 CO soit respectée, suivant la doctri-
ne, par un échange de télécopies dans les relations entre
parties (cf. Schmidlin, Berner Kommentar, Das Obligationen-
recht, n. 32 ad art. 13 CO; Schwenzer, in: Honsell/Vogt/
Wiegand, Obligationenrecht I, Bâle 1992, n. 14 ad art. 13
CO. Pour les télex, cf. ATF 112 II 326 consid. 3a p. 328/
329; 111 Ib 253 consid. 5 p. 255. En matière de compromis
arbitral, cf. Lalive/Poudret/Reymond, Le droit de l'arbitra-
ge, Lausanne 1989, n. 6.1 ad art. 6 CA). Le Tribunal fédéral
a en effet considéré que ces assouplissements, répondant à
la pratique et aux besoins du commerce interne ou interna-
tional, ne sauraient être, en l'état tout au moins, étendus
au dépôt des actes judiciaires (cf. ATF 121 II 252 consid. 3
in fine p. 355). De même, il est indifférent que des juri-
dictions de recours d'autres pays ou d'autres cantons admet-
tent la validité d'une déclaration de recours transmise par

télécopie (cf. arrêt de la Cour de cassation pénale du Tri-
bunal cantonal du canton de Vaud du 4 janvier 1995 paru au
JdT 1996 III 19, dont la solution est au demeurant critiquée
par Daniel Stoll, ibidem, p. 21). La référence à l'arrêt
rendu le 15 novembre 2000 par la Chambre des poursuites et
des faillites du Tribunal fédéral est par ailleurs dénuée
de pertinence car la loi fédérale sur la poursuite pour det-
tes et la faillite (LP; RS 281.1) n'exige nullement la forme
écrite pour faire opposition à une poursuite (cf. art. 74
al. 1 LP et consid. 4a de cet arrêt). Pour le surplus, le
recourant ne prétend pas à juste titre que le vice consis-
tant dans l'absence de signature manuscrite aurait pu être
décelé suffisamment tôt pour être corrigé dans le délai lé-
gal (ATF 125 I 166 consid. 3a p. 170; 111 Ia 170). Enfin, en
l'absence de toute argumentation en ce sens, il n'appartient
pas au Tribunal fédéral d'examiner d'office si une exception
à la solution retenue dans l'arrêt paru aux ATF 121 II 252
devrait être consentie lorsque l'acte d'appel émane d'un
avocat inscrit au barreau de Genève (cf. ATF 125 I 492 con-
sid. 1b p. 495 et les arrêts cités).

3.- Le recours doit par conséquent être rejeté dans la
mesure où il est recevable. Les conditions de l'art. 152 al.
1 OJ étant réunies, il convient de faire droit à la demande
d'assistance judiciaire et de statuer sans frais. Il y a
lieu de désigner Me Nicolas Jeandin comme avocat d'office
du recourant pour la présente procédure et de lui verser
une indemnité à la charge de la Caisse du Tribunal fédéral
(art. 152 al. 2 OJ).

Par ces motifs,

l e T r i b u n a l f é d é r a l :

1. Rejette le recours dans la mesure où il est receva-
ble;

2. Admet la demande d'assistance judiciaire et désigne
Me Nicolas Jeandin en qualité d'avocat d'office du recou-
rant;

3. Dit qu'il n'est pas perçu d'émolument judiciaire.

4. Dit que la Caisse du Tribunal fédéral versera une
indemnité de 1'000 fr. à titre d'honoraires au mandataire
du recourant;

5. Communique le présent arrêt en copie au mandataire
du recourant, au Procureur général et à la Chambre pénale
de la Cour de justice du canton de Genève.

Lausanne, le 29 janvier 2001
PMN/mnv

Au nom de la Ie Cour de droit public
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
Le Président,

Le Greffier,


Synthèse
Numéro d'arrêt : 1P.812/2000
Date de la décision : 29/01/2001
1re cour de droit public

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2001-01-29;1p.812.2000 ?
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