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25/01/2001 | SUISSE | N°4P.240/2000

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 25 janvier 2001, 4P.240/2000


«/2»

4P.240/2000

Ie C O U R C I V I L E
****************************

25 janvier 2001

Composition de la Cour: MM. Walter, président, Leu et
Corboz,
juges. Greffière: Mme de Montmollin Hermann.

__________

Statuant sur le recours de droit public
formé par

H.________, représenté par Me Yannis Sakkas, avocat à
Martigny,

contre

le jugement rendu le 20 septembre 2000 par la Cour de cassa-
tion civile du Tribunal cantonal valaisan dans la cause qui
oppose l

e recourant à X.________ S.A., représentée par
Me Stéphane Jordan, avocat à Sion;

(arbitraire)

Vu les pièces du dossie...

«/2»

4P.240/2000

Ie C O U R C I V I L E
****************************

25 janvier 2001

Composition de la Cour: MM. Walter, président, Leu et
Corboz,
juges. Greffière: Mme de Montmollin Hermann.

__________

Statuant sur le recours de droit public
formé par

H.________, représenté par Me Yannis Sakkas, avocat à
Martigny,

contre

le jugement rendu le 20 septembre 2000 par la Cour de cassa-
tion civile du Tribunal cantonal valaisan dans la cause qui
oppose le recourant à X.________ S.A., représentée par
Me Stéphane Jordan, avocat à Sion;

(arbitraire)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- X.________ S.A., est une société anonyme dont
le capital est divisé en actions nominatives liées.

H.________ est inscrit au registre des actionnaires
pour 488 actions.

Divers actes juridiques ont été passés ayant pour
objet les actions de la société, mais ils semblent litigieux
et n'avoir pas donné lieu à une modification du registre des
actionnaires.

Le 16 décembre 1999, X.________ S.A. a tenu une as-
semblée générale extraordinaire. Seuls les actionnaires ins-
crits au registre des actions ont été convoqués. Chaque ac-
tion donnant droit à une voix, une augmentation du capital-
actions a été acceptée par 1422 voix contre 488 (à savoir
les
actions de H.________, qui s'est opposé à l'augmentation).

H.________ a pleinement exercé son droit de sous-
cription préférentiel dans le cadre de cette augmentation du
capital-actions.

B.- Le 15 février 2000, H.________ a ouvert action
contre la société, demandant l'annulation des décisions pri-
ses lors de l'assemblée générale extraordinaire du 16 décem-
bre 1999. Il allègue en substance que ces décisions n'ont
pas
été prises par des personnes ayant qualité d'actionnaires et
que de véritables actionnaires n'ont pas été admis à y parti-
ciper. Il soutient que l'augmentation du capital-actions a
pour but de diluer ses droits.

Le 20 avril 2000, H.________ a déposé une requête
de mesures provisionnelles, concluant à ce qu'il soit fait
interdiction au préposé du registre du commerce de procéder
à
l'inscription, jusqu'à droit connu, de la décision d'augmen-
tation litigieuse.

Le 25 avril 2000, le juge II du district de Marti-
gny et St-Maurice a fait interdiction au préposé, à titre
préprovisoire, de procéder à l'inscription de l'augmentation
du capital.

Par décision du 6 juillet 2000, le juge a rejeté la
requête de mesures provisionnelles.

Le 17 juillet 2000, le préposé a procédé, sur re-
quête de X.________ S.A., à l'inscription au registre du com-
merce de l'augmentation de capital litigieuse. Celle-ci a
été
publiée dans la FOSC du 26 juillet 2000 et dans le Bulletin
Officiel n° 34 du 25 août 2000.

Le 16 août 2000, H.________ a interjeté un pourvoi
en nullité contre la décision du 6 juillet 2000. L'effet sus-
pensif a été accordé par décision du 21 août 2000.

Par arrêt du 20 septembre 2000, la cour cantonale,
constatant qu'il avait été procédé à l'inscription que la re-
quérante voulait interdire à titre provisionnel, estima que
la procédure sur mesures provisionnelles était devenue sans
objet. Statuant sur les frais, la cour cantonale les a mis à
la charge du requérant par 1500 fr., estimant notamment que
la requête aurait vraisemblablement été rejetée.

H.________ forme un recours de droit public au Tri-
bunal fédéral. Invoquant l'interdiction de l'arbitraire et
l'existence d'un déni de justice formel, il conclut à l'annu-
lation de la décision attaquée. Il a sollicité par ailleurs

l'effet suspensif, qui a été refusé par ordonnance du 26 oc-
tobre 2000.

L'intimée conclut à l'irrecevabilité, subsidiaire-
ment au rejet du recours.

C o n s i d é r a n t e n d r o i t :

1.- a) Dans le cas d'un recours de droit public, la
jurisprudence admet que la décision qui met fin à la procédu-
re sur mesures provisionnelles doit être considérée comme
une
décision finale; même si elle devait être qualifiée de déci-
sion incidente, il faudrait reconnaître, en raison de sa na-
ture, qu'elle cause un dommage irréparable ouvrant la voie
d'un recours immédiat (ATF 118 II 369 consid. 1; 108 II 69
consid. 1; 103 II 120 consid. 1; 100 Ia 19 s. consid. 1).

La décision attaquée, qui est fondée sur la procé-
dure cantonale, n'est susceptible d'aucun autre moyen de
droit sur les plans fédéral ou cantonal, de sorte que la rè-
gle de la subsidiarité du recours de droit public est respec-
tée (art. 84 al. 2 et 86 al. 1 OJ).

b) Saisi d'un recours de droit public, le Tribunal
fédéral n'examine que les griefs d'ordre constitutionnel in-
voqués et suffisamment motivés dans l'acte de recours (ATF
125 I 492 consid. 1b; 122 I 70 consid. 1c; 121 IV 317
consid.
3b).

2.- a) Le recourant se plaint d'un déni de justice
formel, dont la prohibition découle des art. 29 al. 1 et 30
al. 1 Cst.

Il y a déni de justice lorsqu'une autorité se refu-
se à statuer bien qu'elle y soit obligée (ATF 124 V 130; 117
Ia 116 consid. 3a).

En l'espèce, la cour cantonale a rendu une décision
motivée sur l'ensemble des conclusions prises devant elle.
Il
n'y a donc pas trace d'un déni de justice formel. Que le re-
courant ne soit pas d'accord avec la décision rendue est une
autre question.

b) Le recourant reproche également à la cour canto-
nale d'être tombée dans l'arbitraire.

Selon la jurisprudence, l'arbitraire, prohibé par
l'art. 9 Cst., ne résulte pas du seul fait qu'une autre solu-
tion pourrait entrer en considération ou même qu'elle serait
préférable; le Tribunal fédéral ne s'écarte de la décision
attaquée que lorsque celle-ci est manifestement
insoutenable,
qu'elle se trouve en contradiction claire avec la situation
de fait, qu'elle viole gravement une norme ou un principe
juridique indiscuté, ou encore lorsqu'elle heurte de manière
choquante le sentiment de la justice et de l'équité; pour
qu'une décision soit annulée pour cause d'arbitraire, il ne
suffit pas que la motivation formulée soit insoutenable, il
faut encore que la décision apparaisse arbitraire dans son
résultat (ATF 126 I 168 consid. 3a et les références).

c) Dans la mesure où le recourant invoque des faits
qui ne figurent pas dans la décision cantonale et qui n'ont
pas de rapport avec l'objet de la décision querellée, sans
prétendre et démontrer que la décision cantonale serait arbi-
traire à cet égard, il n'y a pas lieu d'en tenir compte.

d) Comme le prévoit l'art. 32 al. 2 ORC, le recou-
rant avait sollicité, à titre de mesure provisionnelle,
qu'il

soit fait interdiction au préposé d'inscrire la décision li-
tigieuse portant augmentation du capital-actions.

Il ressort de la comparaison entre les alinéas 1 et
2 de l'art. 32 ORC que cette mesure provisionnelle n'est pos-
sible et n'a de sens que pour autant que l'inscription n'ait
pas déjà été opérée.

Constatant que l'inscription avait déjà été effec-
tuée, la cour cantonale en a déduit que la requête de
mesures
provisionnelles était sans objet et que la cause devait être
rayée du rôle (cf. art. 268 al. 2 du Code de procédure
civile
valaisan, ci-après: CPC/VS).

On ne voit pas en quoi ce raisonnement pourrait
être qualifié d'arbitraire.

Le recourant reproche au préposé d'avoir procédé à
l'inscription. Les décisions du préposé peuvent cependant
faire l'objet d'un recours et elles peuvent être portées, en
dernière instance, devant le Tribunal fédéral par la voie du
recours de droit administratif (cf. art. 929 al. 1 CO, 3 al.
3 et art. 5 ORC). Ce n'est pas l'objet de la décision atta-
quée.

Au demeurant, les mesures préprovisoires sont deve-
nues caduques lorsque le juge de première instance a statué,
en rejetant la requête; il résulte de l'art. 231 al. 1
CPC/VS
que son jugement était entré en force et exécutoire au
moment
de l'inscription, puisque l'autorité de recours n'avait pas
encore pris de mesures provisionnelles (art. 231 al. 2
CPC/VS). Sous cet angle également, on ne discerne aucun arbi-
traire.

e) Le procès étant devenu sans objet, la cour can-
tonale devait statuer sur les frais (art. 256 al. 1 CPC/VS).

Pour le faire, il n'est en tout cas pas arbitraire de se ré-
férer à la règle générale de l'art. 252 al. 1 CPC/VS selon
laquelle les frais sont mis à la charge de la partie qui suc-
combe. Rien de contraire ne peut être déduit, à l'égard de
la
partie recourante, de l'art. 235 CPC/VS consacré spécifique-
ment au pourvoi en nullité. La cour cantonale a donc statué
sur les frais en appréciant, sur la base du dossier, les
chances qu'avait le recourant d'obtenir la mesure provision-
nelle sollicitée.

Le recourant soutient que les frais auraient dû
être mis à la charge de la partie qui avait rendu le procès
sans objet. On observera cependant que l'inscription au re-
gistre du commerce a été publiée à la FOSC avant qu'il ne
dépose son pourvoi en nullité. Il aurait donc dû savoir que
le procès était devenu sans objet et qu'il était vain de dé-
poser un pourvoi en nullité. En recourant néanmoins, il a
engagé une procédure inutile, ce qui pouvait déjà justifier,
sans arbitraire, que les frais en soient mis à sa charge.

Contrairement à ce que soutient le recourant, on ne
voit pas que l'on puisse reprocher à sa partie adverse un ac-
te de mauvaise foi. Elle a transmis au préposé un jugement
qui existait effectivement et qui était bien exécutoire,
puisque le juge de première instance ne l'avait pas assorti
d'un effet suspensif (cf. art. 231 al. 1 CPC/VS).

La cour cantonale a déduit de l'acte authentique
que les personnes qui avaient participé à l'assemblée généra-
le étaient les actionnaires inscrits au registre des
actions.
Le recourant n'établit pas que cette déduction soit fausse
ou
insoutenable, de sorte que l'arbitraire n'est pas démontré.
Le registre des actions fait présumer, de façon réfragable,
la qualité d'actionnaire (cf. art. 689a al. 1 CO; ATF 124
III
350 consid. 2c p. 354 et les références citées). Cette règle
doit permettre à la société de fonctionner lorsque, comme

c'est le cas en l'espèce, il existe une situation litigieuse
complexe. La cour cantonale a retenu que la présomption ne
pouvait être renversée, au stade des mesures
provisionnelles,
qu'en rendant vraisemblable un transfert des actions nomina-
tives liées et un agrément de la société (art. 684 al. 2 et
685a al. 1 CO). Examinant chacun des transferts invoqués, la
cour cantonale est parvenue à la conclusion que le recourant
n'était pas parvenu à établir, même sous l'angle de la
simple
vraisemblance requise au stade des mesures provisionnelles,
que cette double condition (transfert des actions et agré-
ment) ait été remplie ou que l'absence d'agrément soit illé-
gale. A cette partie de l'argumentation cantonale, le recou-
rant ne fait qu'opposer sa propre version des faits et sa
propre appréciation des preuves, ce qui est insuffisant pour
démontrer l'arbitraire.

Dans un seul cas, la cour cantonale a admis que le
recourant avait peut-être rendu vraisemblable le transfert,
mais elle a constaté que le nombre des voix concernées
n'était pas suffisant pour faire obstacle à l'augmentation
du
capital-actions. Il faut en effet relever que la mesure pro-
visionnelle sollicitée est régie par le droit cantonal (ATF
97 II 185 consid. II/2). Or, l'art. 290 al. 1 CPC/VS ne per-
met une mesure provisionnelle que "si l'intervention du juge
peut écarter la menace d'un dommage irréparable". Le préjudi-
ce invoqué réside entièrement dans l'augmentation du capital-
actions. Dès lors que l'on doit admettre qu'une nouvelle as-
semblée générale tenant compte du transfert en cause ne per-
mettrait pas de changer la majorité, il n'y a rien d'arbi-
traire à refuser la mesure provisionnelle en considérant
qu'elle n'est pas apte à éviter le dommage invoqué.

La cour cantonale ayant ainsi considéré sans arbi-
traire que la mesure provisionnelle aurait été vraisemblable-
ment refusée, la condamnation du recourant aux frais ne
tombe
pas non plus sous le coup de l'arbitraire.

Comme la décision attaquée, dans son résultat, est
justifiée sans arbitraire par l'argumentation qui précède,
il
n'y a pas lieu d'examiner les autres motifs (notamment la
question du dommage irréparable ou difficilement réparable)
développés par la cour cantonale (et critiqués par le recou-
rant), puisque cet examen ne pourrait pas avoir pour effet
de
faire apparaître la décision attaquée comme arbitraire dans
son résultat.

3.- Les frais et dépens doivent être mis à la char-
ge du recourant qui succombe (art. 156 al. 1 et 159 al. 1
OJ).

Par ces motifs,

l e T r i b u n a l f é d é r a l :

1. Rejette le recours dans la mesure où il est re-
cevable;

2. Met un émolument judiciaire de 5000 fr. à la
charge du recourant;

3. Dit que le recourant versera à l'intimée une in-
demnité de 6000 fr. à titre de dépens;

4. Communique le présent arrêt en copie aux manda-
taires des parties et à la Cour de cassation civile du Tribu-
nal cantonal valaisan.

_________

Lausanne, le 25 janvier 2001
ECH

Au nom de la Ie Cour civile
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
Le président,

La greffière,


Synthèse
Numéro d'arrêt : 4P.240/2000
Date de la décision : 25/01/2001
1re cour civile

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2001-01-25;4p.240.2000 ?
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